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utilement au fecours de la nature. Ç’eft ici qu’ils '
corrigent les moûts dans lefquels un principe
domine trop , par quélque mélange de fuc, dont
la faveur diffère d’eux entièrement.
Ce raifonnement nous amène au confeil de ne
pas einployer indifféremment, dans le moût de
grain, les fucs & les fèves dont j’ai parlé plus
haut : comme il fe liquéfie difficilement par fa
vifcofité, le mélange d’un fuc:léger,' acidulé par
défaut de maturité & gazeux , lui eft le plus convenable.
Je dois une explication à l’emploi des matières
que j’ai confeillé d’ajouter au moût de grain. Les
fucs de fruits que j’ai invité de mettre dans la cuve, .
doivent avoir la propriété de fe marier avec les
matières auxquelles ils fervent d’addition & de .
fermens, & ils n’ont cette difpofition que lorfqu’ils
font en état de moût ou dé fermentation ; on
manqueroit le but fi on emplbyok du cidre , du
poiré & d’autres vins de fruits quand ils ne fermentent
plus. A. l’égard dés feuilles, on doit les
employer vertes , & le fuc des racines & dès
plantes après les avoir fait macérer, diffoudre dans
de l’eau , & fait réduire en pâte par le pilon .
dans un mortier.
Quand j’ai avancé qu’une acidité légère con-
tribuoit à rendre un vin de meilleur goût, je n’ai
pas entendu l’acidité qui eft l’état par ou le vin
pafle pour devenir vinaigre ; car les chimiftes confondent
foùvent la verdeur acide par défaut de
maturité du fruit avec l’acidité aceffente , ou acé-
teufe.
Il n’eft aucune boiffon agréable fans un peu
de vert acide; il contribué beaucoup à la falu-
hrité de la liqueur; les alimens feroient infipides
fans Tel, les boiffons feroient plates & fades fans
acide. D'autre part, lès boiffons faites avec des
fruits qui manquent de maturité, ont befoin d’un
ferment fucré, qui étâbliffe les proportions facca-
rines, & fans lui elles manqueroient d’efprit inflammable.
Mais le citadin n’aura pas toujours des fruits
verts à fa difpofition , ou on voudra lui vendre
fort cher. Lofque les fruits ou les fubftances fourni
fes à la fermentation , n’auront pas un degré
allez éminent d’acidité; lorfqu’ilne pourra fepro-
_ curer une levure fraîche, il a la reffource du tartre.
Sa faveur eft moins défagréable que l’amertume
' du houblon. Le tartre eft un Tel végétal qui a
beaucoup d’analogie avec les végétaux qu’on veut
convertir en vin : il eft doué de qualités avan-
tageufes à la fanté ; il eft commun; une livre fuffit
pour un muid de moût de grain : elle ne coûte que,
douze fols , on acquiert à bon marché un correâif,
un confervateur des moûts foibles ou fades.
V I N . :
On fe re flou viendra d’acheter le .tartre.en p0ll, ;
dre , & de le faire diffoudre dans „«trente fois 'f0jj |
poids d’eau , avant de l’empldyerr j^itroduit dans!
le moût fans la précaution de IVvà^r fait diffou.
dre, il feroit fans effet.
De la petite cuve o.u~ tonneau de viil de grain
Ton peut faire deux extraits en deux petits vaif.1
feaüx. Le premier extrait fera tiré de la partie du I
marc : le fécond Extrait proviendra des parties
groffières, terreflre^Sç glutineufes du marc qu’on
aura h.umedé aveç^éaucoijp d’eau tiède, du fuC
de houblpn bpuilfi , & d’autres herbes., plantes
feuilles & légumes. Cette piquette ou fécond vin
de grain , fera encore fufceptible d’être une boif-
fon un peu fpiritueufe , meilleure & plus falubre I
que l’eau dont s’abreuvent les pauvres gens : fur-
tout à la campagne ou ils la boivent fouvent mal
faine & fiévreufe.
Ceux qui préféreront d’avoir un vin de grain!
fermenté dans un! tonneau couché, commence-J
ront toujours par le mettre debout,.& le défoncer
pour introduire la farine & l’eau jufqu’an
bondon : enfuite ils le refonceront, le coucheront I
fur le chantier, & le rempliront par l'orifice delà
bonde. Les matières y fermenteront, & ils attendront
aufli que la liqueur foit devenue claire &
calme pour la tirer.
Après le calme de la fermentation fuccède la
réparation des fèces, du fon & des parties hétérogènes;
mais quand le vin de grain refte trouble
& épais, on le clarifie par le procédé fuivant.
On achète une once de cette colle connue fous
le nom de colle de poifîon; c’eft le mieux quelle1
foit en pondre ; on la fait bouillir dans une pinte
d’eau, & on en obtient, quand elle eft refroidie,
une gelée epaifle. On tire deux ou trois pintes de
liqueur dans laquelle on met cette gelée qu’on
fouette fort avec un petit balai. On jette cette gelée
en moufle dans le tonneau , on braffe le tout
pendant quelques minutes avec un bâton fendu
en quatre par un bout, & on remplit exactement
le tonneau qu’on laiffe débouché pendant vingt-
quatre heures, afin que l’air pèfe fur la colle,&
accélère fon effet ; enfuite , on bouche à moitié
le tonneau. Le vin de grain fe clarifie dans lef*
pace de peu de jours. S’il refte trouble ou épais
après huit jours , on le foufire dans l’état qu’il
eft, & on recommence dans le tonneau où il eft
trânfvafé, cette opération, en doublant la dofe de
colle de poifîon , & ajoutant une pincée ou deux
' de fel commun ; & une pincée d’alun en poudre.
Cette opération dégage les molécules épaife
de lamu coûté qui les tenoit fufpendues. La colle
bien braffée fe mêle avec la lie , les fèces, le(oB
&les ordures qui flottent dans la liqueur qui cède
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I la pefantenr de la collé. Celle-ci traverfe la
jiîiaffe du vin, fe précipite par degré, emportant
Vvec elle tout ce qu’elle a trouvé fur Ion chemin ,
[en forte que la colle , l’eau & les parties groffières
k hétérogènes fe réunifient au fond, & laiffent la
baffe du vin claire, nette, tranfparente & plus pure.
J La corne de cerf remplace la colle quand on
L peu d’argent à dépenfer à la clarification : les
tens de la campagne qui ne font pas à la portée
Ile fe procurer de la corne de c e r f, ni la colle,
[emploient ^par tonneau une clemi-douzaine de
8)lancs-û oeufs bien frais qu’ils font mouffer comme
june crème dans de l’ eau de puits , qu’ils verfent
Idans le tonneau où ils Tagitent en tout feus. C ’eft
|in filtre qui raffemble également comme dans un
IfJet, les parties vifqueufes de' la liqueur ; maïs
(comme fa pefatùeur fpécifique eft moindre que
[celle;,do la colle, on emploie une douzaine d’oeufs
Iqiiand le mucilage du corps qu’on veut clarifier
left rébelle. En changeant la liqueur de tonneau ,
& la féparant du dépôt-dé lie , réitérant l-’opération
Jde la colle, lui laillant le corps nècefîaire,• après
IFavoir bradée dans le tonneau, on obtient la
[clarification-,
L Le fédiment de plufieurs tonneaux de vin de
■ grain .étant recueilli dans un feul, on le laiffe
wepofer ; la maffe fe partage ;en deux parties égales.:
■ Celle qui fumage eft liquide. Elle peut s’employer
1 comme un levain; Celle au fond qui eft le marc,
/fe vend ou s’emploie pour engraiffer les vaches,
Iles cochons , & c ., rien n’eft perdu.
Vin de fon.
Dans les années de cherté dé grain, il eft encor*
un moyen de fabriquer une boiffon à l’ufage des
pauvres habitans de la campagne avec fes fèces
St fon écorce.
Prenez du fon de froment par préférence , ou
d’un autre grain. Faites-en une décodion dans
de l’eau de rivière avec des grofeilles épluchées
& écrafées , ou d’autres fruits fraîchement cueillis
& faciles à fe diffoudre. Paffez les matières dans
un .grand tamis de crin, ou à travers d’une poignée
de paille fraîche, pour fépàrer du jus la partie
corticale du grain & la peau des fruits. On remplit
un tonneau. La fermentation ne tarde pas de s’établir.
Àuffi-tôt qu’on s’aperçoit que l'écume
ceffe de jaillir par le bondon , ou que le bouillon
diminue, on bou,che le tonneau exademenr, &
on fal obtenu un vin de fôn.
■ Une quantité donnée de fon bouilli dans l’eau,'
tamifée oir filtrée donneroit un fluide qui, délayé
en temps chaud , par un levain, ou de la levure
de bière, dans un tonneau, fermenteroit bientôt.
En le bouchant après le cSlme déjà fermentation ,
on ôbtiendroit un autre vin de fon qui feroit à
la vérité acidulé; mais, par cette raifon , il feroit
propre à défaltèrer !é moifîbhneur ou le faucheur :
ce fera la limonade en été des gens de campâgrié.
On ne •" faurôit trop venir à leur fecours.