
pièce qu’il veut bâtir. Deux de ces cercles doivent
être placés à fix pouces environ du bondon,
6c avoir par conféquent un diamètre égal à celui
du fût auprès du bouge, y compris l’épaiffeur des
douves. Les deux autres cercles doivent être placés
auprès du jable, & avoir le même diamètre
que le tonneau a à cette partie. Le tonnelier,
pour ne fe point tromper, a ordinairement plu-
fieurs cercles de fer de différentes grandeurs,
fuivant la jauge du tonneau qu’il fe propofe de
conftruire. C ’eft fur un de ces cercles de fer qu’il
lie les premiers cerceaux dont nous parlons.
Il arrange dix-huit ou dix-neuf douves ou doel-
îes., à peu près la quantité qu’il croit convenable
pour former fa futaille.
On comprend aifément que lorfque les douves
font étroites, il en faut beaucoup davantage.
Il les dreffe debout ; & les pofant les unes far
les autres, il leur donne une certaine inclinaifon,
pour les retenir toutes avec le feceurs d’une feule
douve , qui, placée en arcboutant dans une inclinaifon
contraire aux premières, foutient toutes
les autres.
Quand il peut fe placer lé long d’un mûr,
il n’a pas befoin de ce moyen pour foutenir toutes
fes douves : il les appuie le long du mur , à
portée de l’endroit où il bâtit fon tonneau.
Le tonnelier prend un des cercles qui doit régler
les dimenfions du tonneau fur le jable ; c’eft
pourquoi nous l’appellerons ici cercle du jable.
Il place fon tire-fond, dans le cercle ; il appuie
la première douve contre ce tire-fond, qui
reffemble affez à un piton de fer. Nous le décrirons
plus amplement dans la fuite.
Il choifit la douve la plus large pour la pofer
la première ; il la met en place ; il l’appuie contre
le tire-fond,, & la pofe avec la main. Il met
à côté de cette première, une féconde, une troi-
fième , une quatrième, jufqu’à ce que tout le cercle
foit garni. Rarement toutes fes douves fe trouvent
elles juftes de largeur, pour remplir tout le
cercle & former tout le fût.
Quand il ne refte plus qu’une petite diftance à
remplir, il ôte une petite douve ,. & la remplace
par une plus large ; ou bien il en ôte deux étroites
, & en met une qui ait plus de largeur que
les deux qu’il a fouftraites , ou il en ôte u n e ,
& en met deux.
Enfin, comme il fe propofe, de remplir arec
les douves tout le cercle , quand il refle une petite
partie de ce cercle à garnir de douves, il
trouve fouvent plus court d’en travailler une
nouvelle 6c de la diminuer de largeur.
Auparavant il s’affure encore s’il ne fuffiroit
pas den retourner quelques-unes bout pour bout
qui ne fèroient pas d’égale dimenfion fur les deux
extrémités. Il mefure la partie qu’il faut remplir,
ou celle qu’il faut fouftraire. Le tonnelier coupe
une paille pour fe rappeler cette quantité.
Pour s’affurer fi les douves réunies ne forment
pas un efpace plus grand du côté du fût que de
l’autre, il les retourne toutes bout par bout,
les arrange comme il a fait la première fois ; &
c’eft ce que le tonnelier appelle batoumer.
Il mefure de nouveau la diftance entre les douves
avec la paille, & cette paille lui apprend fi
les douves font d’égale largeur fur leurs deux extrémités;
c’eft fur cette mefure qu’il arrange fa
nouvelle douve, en lui donnant les dimenfions
que lui indique la paille.
Cette opération fe fait fur la felle à tailler avec
la plane, comme nous l’avons déjà décrit. C ’eft
avec cet outil qu’il réduit fa douve de largeur
convenable. Il la dreffe enfuite fur la colombe,
& lui forme la pente dont nous avons parlé, &
qui lui eft néceffaire pour qu’elle joigne- exactement
avec les autres douves.
Cette douve que travaille le tonnelier doit fer-
vir encore à donner au tonneau la forme pref-
crite; & c’eft à l’aide de cette dernière opération
que l’on pratique en le bâtiffant, que le tonnelier
corrige la forme irrégulière que pourroit
lui avoir donné la diminution que l’on étoit obligé
défaire fur. la largeur des douves, depuis leur
milieu jufqu’à chacune de leurs extrémités, pour
former ce qu’on appelle la partie moyenne &
la plus large du tonneau, ou le bouge.
Si cette diminution n’a pas été faite également
fur les deux extrémités des douves, le tonnelier
arrange fa nouvelle douve fur l’obfervation qu’il
en a faite ; & cette douve qni doit finir le tonneau
étant achevée, il la met en place.
Quand fon cercle eft garni de douves, il les
frappe toutes en-deffus, ’enfuite en-dedans, pour
les faire rentrer l’une dans l’autre, & s’appliquer
exactement. Il met encore un fécond cercle plus
large que le premier, & qui defcend au-deffous
de celui qui a fervi de règle pour donner les dimenfions
au tonneau. Ce fécond , que nous nommerons
cercle du bouge, fert encore à retenir
les douves. 11} les frappe pour les faire fetrer ,
& donne aufli quelques coups fur les douves pour
les empêcher de revenir.
1
Il ne s’agit plus que d’arranger l’autre côté du
poinçon. Pour cela, le tonnelier retourne fon fût,
6c fe fert, pour refferrer toutes les douves qui
tendent à s’éloigner les unes des autres , d’une
machine ou uftenfile nommé bâûjjb'r, probable- '
ment parce qu’elle fert à bâtir le tonneau.
C ’eft un petit treuil, foutenu dans un chaflis.
L’arbre du treuil porte une corde avec laquelle
le tonnelier .entoure les douves. Elle revient s’attacher
au chalfis* du bâtiffoir. On refferre. cette
corde par le moyen d’un petit levier qui fait
tourner l’arbre fur lequel elle s’entortille.
, Le tonnelier a un cercle de jable tout prêt, déjà
retenu par fes .liens d’ofier , & de grandeur convenable
qui porte les mêmes dimenfions que celui
qu’il a placé de l’autre bout du poinçon. Il
fait paffer les douves dans celui-ci pour affujet-
tïr ce fécond bout de 1 a pièce. Il remet encore
de côté un feCond cercle de bouge plus grand que
celui du jable, & qui, comme nous l’avons expliqué
, porte fur les douves plus près du bondon.
Le fût, ainfi retenu par quatre cercles , eft en
état d’être tranfporté. Il refte cependant encore
au tonnelier quelques opérations à exécuter, que
nous allons décrire dans les articles fuivans.
Quelquefois pour faire revenir les douves plus
facilement , & pour empêcher le bois de fe caf-
fer, en lui faifant prendre la courbe que l’on veut
donner au tonneau, on brûle des copeaux dans
le fût. La chaleur attendrit le bois ; il devient
plus fouple, 6c obéit mieux au bâtiffoir.
Les tonneliers ont l’attention d’exécuter cette
opération dans un endroit éloigné de celui où
ils travaillent ordinairement, pour que le feu ne
& communique point aux copeaux fecs, ou à
d’autres bois qui pourroicnt donner lieu à un incendie.
On voit maintenant pourquoi le tonnelier a
diminue un peu de l’épaiffeur des douves fur la
largeur ; ce qu’ils appellent tailler en roue. La
douve prend extérieurement la courbe, & donne
au tonneau la forme circulaire que l’on demande
dans chacune de fès parties.
On voit que chaque douve, plus large dans
fa partie moyenne que vers fes extrémités ref-
ferrées par les cercles , contribue encore à donner
au tonneau une forme régulière , & celle qu’on
eft convenu de lui donner.
III. Moyens qu’emploie le tonnelier pour rogner les
(fauves, 6» former ce qu’on appelle le jable du
tonneau.
Le tonnelier, après avoir monté fon tonneau
& fa futaille, & l’avoir retenue par deux cercles
de chaque côté du bouge , réduit chaque
douve à une même longueur.
Cette opération qui fe nomme rogner les douves
, demande beaucoup d’attention de la part du
tonnelier. Elle doit précéder celle où le tonnelier
fera le jable ; la perfection de cette fécondé
manoeuvre dépendant en grande partie d u , foin
qu’on a mis à bien exécuter la première.
Avant de décrire la façon dé rogner & de
faire le jable, nous devons dire un mot de deux
opérations moins effentielles que celles-ci , &
moins difficiles à exécuter , mais que le tonnelier
pratique toujours avant celle de rogner 6c de ja-
bler. Ce font celles qu’il appelle faire le parage,
& former le pas-d’ajfe ou le chanfrein.
Pour entendre ce que les ouvriers nomment le
parage 6c le pas-d’ajfe, il faut fe repréfenter la figure
intérieure que doit avoir le tonneau. Nous
avons dit qu’il formoit un polygone à autant de
côtés qu’il y a eu de douves employées à le
conftruire, plutôt qu’utte furface arrondie, parce
que l’efpace compris entre les planches droites,
ne pouvoit pats donner une figure cylindrique.
Il faut encore favoir que la petite portion de
l’intérieur du tonneau qui doit refter apparente,
eft celle comprife f depuis chaque extrémité du
tonneau , jufqu’à la rainure du jable.
Le parage eft l’opération par laquelle, dans la
partie du tonneau qui doit devenir vifible, le
tonnelier change la figure de polygone qu’il avoir
auparavant, oc lui donne une forme circulaire.
Avant de parer fon jable, l’ouvrier prend fon
fût retenu par quelques cercles, comme nous l’avons
dit plus haut ; il le pofe fur une furface
unie , pour examiner , en frappant toutes les
douves & en les faifant porter fur un terrain égal,
celles qui font plus longues qu’il ne convient
à la dimenfion du tonneau. Il porte enfuite fon
fût dans la felle à rogner.
La felle à rogner eft une efpèce d’étau deftiné
à arrêter & à maintenir le tonneau , tandis que
le tonnelier l’achève & le perfeélionne. Cet étau,
que nous ne nommons ainfi que parce qu’ii retient
la partie qu’on veut travailler, confifte en
deux fortes branches qui, réunies par une de
leurs extrémités, forment une efpèce de fourche.
Pour la rendre folide , le tonnelier a retenu
en terre le côté où les deux branches fe réunif-
fent. Il a encore arrêté l’une des deux branches
à un poteau auffi enterré, & placé perpendiculairement
à l’extrémité de cette branche. De l’autre