
T O I L E S IM P R IM E E S A L ’H U I L E
( Art de préparer les )
P O u R préparer les toiles imprimées à l’huile,
dont on fe fert dans la peinture ordinaire, on a
un couteau d’un pied & demi de longueur , qui
a le tranchant émouffé & dont le manche fait
un arg'e obtus avec le dos.
Enfuite, on tend la toile fur un chaflis.
On la frotte avec la pierre pour en ufer les
noeuds.
On lui donne un enduit de colle de poiffon,
lorfqu’elle eft groffe & claire ; car fi c’eft une
batifte , ou une autre toile ferrée , comme les
peintres d’un genre précieux ont coutume de
es prendre , l’enduit de colle devient fuperfliu
On laiffe fécher cet enduit.
On prépare un gris en délayant à l’huile du
blanc & du noir. On jette ce gris fur la toile ;
on l’étend & le traîne fur toute fa furface avec
le couteau j ce qui s’appelle donner une impref-
Jîon.
On laiffe fécher cette première impreflion : il
faut pour cela quatre à cinq jours , félon laYaifon.
Quand cette impreflion eft fèche, on en donne
une fécondé qu’on laiffe fécher aufli, & alors la
toile eft préparée pour la peinture à l'huile1.
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T O L E .
( Art de vernir la )
T i a tôle eft un fer mince, ou un fer en feuille,
qui fert à faire les cloifons des" ferrures moyennes
, les platines des verrous, les targettes & tous
les ornemens de relief, emboutis , c’eft-à-dire, ci-
felés en coquille. On fait aufli des ornemens avec
de la tôle évidée ou découpée à jour. Voye^fer',
ferrurier.
La peinture fur tôle eft d’un ufage très-ancien
en Turquie, & on y peint également fur le cuivre
, dont on fait des cafetières, des théières, &
autres vaiffeaux qu’on couvre d’un vernis qui ré-
fifte à l’aftion du feu.
La qualité de ce vernis réunie à la beauté des
vafes qu’ il décoroit, excita l’émulation des étrangers
; on effaya en Italie , en Angleterre , en
France & ailleurs , d’imiter ce procédé du Levant.
Le premier qui y réuflit avec quelque fuc-
cès fut un particulier qui s’établit à Rome, il y
a plus de cinquante ans ; les vaiffeaux qu’il y ven-
doit étoient couverts d’un vernis qu’il prétendoit
être le véritable vernis de la Chine à l’épreuve
du feu ; pour le prouver il mettoit fes vafes fur
des charbons allumés fans qu’ils en fouffriffent^
aucun dommage, quoiqu’ils s’y échauffaffent de
manière à pouvoir y faire du café.
Ces expériences ayant piqué la curiofité de
plufieurs perfonnes , elles recherchèrent quelle
éroit la matière dont ppuvoit être compofé le vernis
qui excitoit leur admiration.
Après plufieurs effais, elles trouvèrent que le
vernis d’ambre, appliqué fur un métal quelconque,
ne s’en détachoit pas , quoiqu’on l’exposât à la
chaleur du feu , & qu’ il réfiftolt au feu comme
le vernis dur que les graveurs ont coutume d’employer
pour graver fur cuivre.
Le père Bonami, Jéfuite Italien , ayant obfervé
que ce vernis n’avoit pas ce brillant noir, & n’ap-
prochoit pas de celui du fmalt qu’on voyoit dans
les ouvrages de Turquie, imagina de couvrir un
morceau de métal avec un autre vernis , & de
le faire cuire de la même manière que les graveurs
faifoient cuire le leur.
Dans le cours de fes expériences, ce curieux
remarqua que la première couverte demandoit
plus de cuiifon, parce que lorfqu’il falloit faire
cuire la fécondé couverte, fi la première étoit trop
cuite, elle fe brûloit, s’écailloit & s’enievoit facilement
de deffus le métal.
Pour réuffir dans la cuite des différentes couvertes
de vernis qu’il étoit néceffaire de mettre
fur les vafes d'ont les deux fuperficies dévoient
être vernies , il éprouva qu’il valoit mieux tenir
fufpendue fur le feu la plaque de métal, ou
le vafe , quel qu'il fut, que de fe fervir du gril
dont les traverfes empêchoient la chaleur d’agir
également & fur toutes les parties de la pièce
qu’on faifoit chauffer dans le four.
Afin d’obvier à cet inconvénient, & pour fou-
tenir toujours la pièce dans une pofition horizontale,
l’approcher ou l’éloigner plus commodément
du feu , il inventa un triangle compofé de trois
baguettes de fer courbées dans leurs parties intérieures
& extérieures, c’eft-à-dire, garnies de
crans , afin que , par le moyen d’un anneau , on
embraffât & ferrât ces trois baguettes q u i, avec
leurs dents intérieures, embraffoient la plaque ou
le vafe expofé au feu.
Afin qu’on n’eût pas la peine de foutenir ces
pièces en l’air jufqu’à ce que le vernis fût cuit,
on fufpendoit le triangle par le moyen d’un crochet
à un des points de réunion des trois verges.
Lorfque la pièce étoit grande, quarrée ou oblon-
gue,, à la place du triangle on fubftituoit un
quarré où les baguettes étoient rangées de façon
qu’on pouvoit les ferrer par le moyen d’un anneau
comme celles du triangle, afin que ces baguettes
puffent embraffer & foutenir les vaiffeaux
par les courbures ou dents qui étoient pratiquées
à leurs parties inférieures.
La folidité de cette découverte fe confirma
par un'accident imprévu. Le père Bonami étant
Ià une fenêtre de cinquante pieds 4e haut, laiffa
tomber fur le pavé la plaque de cuivre dont
il s’étoit fervi pour faire fon expérience : elle