
qu’on avoit négligé, nous remarquâmes que le
verre qui éioit relié dans le fond étoit de même
devenu opaque par le refoidiffement
Nous avons cru devoir donner les détails exa&s
de ces expériences., dont le réfultat a été fi différent
de celui de M. Ghérard : il feroit important
do favoir fi la différence du fuccès tiendrait- à
celle de la quantité de matière travaillée , tant par
lui que par nous ; c’eft une vérité reconnue, qu’il
eft très-peu de cas dans les arts ou l’on puifle prudemment
conclure du petit au grand , & l’on voit
en effet que nous avons eu ici en petit une apparence
de fuccès qui s’eft complètement démentie,
lorfque nous avons voulu travailler en grand. Il
fe peut aufii que nous ayons négligé, quelque
circonftance du procédé de M. Ghérard que nous
n’avons pas bien faille, ou dont nous n’avons pas
été informé?. Enfin les felds-fpaths, fubftance pier-
reufe dure, fiifible , pefante, font rarement purs,
fe trouvant le plus ordinairement en une efpèce
de maffe graniteufe qui contient beaucoup d’autres
fubftances , & alors le feld-fpath de M. Géhrard ,
foit par fa pureté , foit par les fubftances avec lesquelles
il étoit combiné, pouvoir être fl différent
du nôtre, qu’il nous étoit impoflible d’obtenir le
même réfultat en travaillant celui-ci.
L’on tife avec force, jufqu’à parfait affilage.
Nous avons affez détaillé fur-tout dans l’article glaces
eçuléés, les précautions qu’exige le tifage en bois;
le tifeur en charbon pour verre à vitres fe comporte
comme celui qui emploie le mêmecombuf-
tible, pour la fufiondu verre noir. Il doit avoir
attention de tenir fa grille conftamment dégagée
de moujjes ou cra,yers , pour que les courans d'air
"fournis par les caves ne foient pas abforb^S ; il
doit alimenter fes deux tifars également, & régulièrement,
prenant garde fur tout de ne pas les
engorger par une trop, grande quantité de charbon
: la combuftion ne fauroit alors en être rapide,
& elle produiroit pue fumée épaiffe & abondante,
qui, non feulement ne feroit nullement propre à
augmenter la chaleur , mais encore terniroit la fur-
face du verre, & en altéreront la couleur. Onobferve
en effet, que les tuiles , dont on a coutume de
boucher en partie les ouvreaux d’un four pendant
les fentes , pour empêcher la trop libre accefîion
de l’air environnant, doivent être plus petites pour
un four en charbon , que pour un four en bois ;
les ouvreaux trop bouchés ne laiffent pas affez de
liberté à la diffipation de la fumée, qui féjourne
alors fur les pots, & jaunit la furface de la maffe
vîtreufe ; on eft même quelquefois obligé, pour
prévenir cet inconvénient, de laiffer les ouvreaux
entièrement ouverts,
Lorfeue les pots font pleins, & leur contenu
bien affiné, le tifeur en bois ceffe de tifer , ferme
de deux tuiles ou margeoirs les foupiraux de
faglaye, il bouche auffi fon tifar, & Ton attend
que le verre ait pris la confiftance convenable
pour le travailler; fi dans le cours du travail,
le verre venoit à durcir un peu trop, quelques
bîllettes ’introduites avec difcrétiôn, par les deux
tifars, foutiendroient la chaleur du four, la rani-
meroient même félon le befotraî Le tifeur en charbon
a les mêmes effets à produire, mais fes moyens
fout différens ; il ne peut fans danger tifer pendant
le travail; la fumée & les cendres de fon
combnftible , beaucoup plus craffes que celles du
bois, en fe portant fur les pots , ou fur le verre,
au moment qu’on le cueille , gâteroient les manchons
à mefure qu’on les fabriqueroir. Il faut donc
qu’il fourniffe au feu un aliment durable, & qui
n’exige pas de mouvement , ou qui n’en exige
que très peu : pour cet effet, il fait la braife. Nous
avons déjà expofe cette opération du tifeur, en
traitant des bouteilles en verre noir, mais il ne
fera pas inutile d’ajouter quelques détails à ce
que nous en avons dit.
On commence par dégager complètement la
grille , de tous les erayers qui peuvent i’engprger:
on égalife enfuite fur la grille, avec un rable
introduit fucceffivement par les deux tifonniers,
toute la braife que le four contient dans cet in (tant.
On jette un lit de gros charbon , que l’on rend
le plus qu’il eft poffible , d’une égale épaiffeur
‘ dans toute l’étendue du foyer; on couvre ce premierlit
d’un fécond lit de charbon menu qui remplit
les interftices de la première couche, & on a
foin de rebattre fortement avec ua rable le charbon
qu’on a ainfi introduit. Sur la couche de charbon
menu, on en établit une troifième de gros
charbon qu’on couvre d’une quatrième de charbon
menu , continuant toujours à'rebattre avec
force ; ainfi de fuite , jufqu’à ce que le foyer foit
prefque rempli ; il eft 'aifé de concevoir qu’après
une femblable difpofitiôn, le charbon dont la
grille eft chargée doit fe confumer lentement.
Les gros charbons qu’on a placés les premiers
fur la grille, en couvrant les interftices des barreaux
qui la forment, diminuent l’aâion des courans
d’air de la cave ; on peut ajouter aux précautions
que nous venons d’indiquer celle de marger la
grille, c’eft-à-dire ; fi l’on aprçoit dans quel-?
qu’une de fes parties, des vides qui donnéroient
lieu à l’air d’accélérer la combuftion , de les bou->
cher avec des pelottes de terre argilleufe, qu’on
y introduit avec une fourche, du deffous de la
grille. Le tifeur, dès qu’il a fini fa braife, bouche
fes deux tifonniers d’un petit mur de gros charbon.
La braife bien faite peut durer environ douze
heures , & maintenir pendant ce temps le four
dans la température qui convient au travail ; fi
cependant on jugeroit néceffaire d’augmenter, ou
de foutenir la chaleur, on poufferoit fous la tonelle
quelqu’un des morceaux de charbon qui bouchent
lés tifonniers, & on les remplaceroit par d’autres.
< Si lorfque la braife eft à peu prés confiimée ,
la journée n’eft pas finie , e’eft-à-dire, que les ouvriers
n’ayent pas encore vidé -leurs pots , on
fufpend un peu le travail, & on fait une fécondé
braife qui- puiffe feulement durer encore quelques
heure?.
Lorfque le verre eft parvenu par la ceffation
du tifage à la confiftance convenable, on l’écrême
en enlevant la furface de la potée, foit avec un
rable , foit par un fort cueillage fait avec un ferret
ou Un poutil autour duquel on applatit le premier
coup de verre. Cette opération ôte de deffus le
bain de verre, les ordures qui pourroient y être
tombées pendant la fufion.
Les outils du fouffieur en manchons font ; la
canne ou fele, la palette, la pincetîe , .le marbre ,
les crochets ou la crémaillère , l ’auge, la bicorne, le
bloc, la cordeline , le fer à fendre. L’on connoit
déjà les cinq premiers de ces outils : L’auge eft
un morceau de bois bien fain , creufé, d’environ ,
un pied de longueur, deftinè à contenir de l’eau
& percé dans le fond, d’un trou fermé d’un bouchon
de bois, par lequel on vide l’auge à volonté.
L’auge eft difpofée à l’extrémité de la place de
l’ouvrier, & placée à une hauteur qui permette
au fouffieur de pofer la canne deffus.
Les places des manchoniers ne font que des
planches pofées Solidement fur des trétaux , &
qui plaçéesidevant chaque ouvreau, au niveau dt-s
fièges, s’étendent à peu près jufques hors la maçonnerie
des arches. Elles doivent être élevées
au-deffus du fol de la halle d’environ deux pieds| ou
trois pieds, & elles font Séparées par un efpace
fufüfant pour qu’on puiffe alonger, le manchon
dans ce vide. Les -ouvriers dans leur travail pré-
fentent à l’ouvreau le côté gauche de leur corps,
& l’on adopte derrière eux un chevron qui fuit
toute la longeur de la place , qui forme la fépa-
ration d’avec lés places voifines & fur lequel le
fouffieur peut s’affeoir..
La bigorne eft un morceau de fer d’environ fix
pouces de long, pointu par un bout , pour pouvoir
être planté à l’une des extrémités de l’auge,
& préfenrant en fon extrémité Supérieure une
efpèce de petit croiffant fur lequel on pofe la canne.
Le bloc eft un morceau de bois dans lequel
on creufe une efpèce de demi Sphère oblongue,
ou de demi ellipfoïde qui fert démoule pour former
la paraifon ; à l’entrée de cette forte de moulé,
on pratique une dépreflion deftiriée à recevoir le
mors de la canne auquel eft attachée la paraifon.
Il, eft d’ufage de faire les blocs en bois de hêtre ',
le frêne, l'érable p2fient auffi pour être propres
a cet ufage ; je croirois qu’en général on pourroit
fe lervir de tous les bois dont les fibres (croient
Arts 6* - Métiers , Terne VIII.
ferrées, & qui creufés à la gouge préfenteroient
une furface unie. On fent d’avance que la forme
régulière du bloc décide de cell- que prendra la
paraifon qui y fera moulée ; c’eft 1 ouvrier feul,
qui, par l’expérience, peut régler la manière dont
le bloc doit être creufé : auffi a-t-il toujours foin
de le faire lui-même, & c’eft ce qu’on appelle
hacher' le bloc.
La cordeline, eft un ferret très léger, comme
nous l’avons v u , en décrivant la fabrication des
bouteilles noires.
Le fer à fendre, eft un ferret plus fort & plus
long que la cordeline.
Le fouffieur cueille un morceau de verre au bout
de fa canne ; il la retire du four , tournant la canne
pour que le verre encore fluide -ne s’en détaché
pas; après un très léger réfroidiffement , il prend
un fécond coup de Verre qu’il retire encore du
four ; il prend un troifième cueillage, fi les deux
premiers coups de verre ne fuffifent pas, pour
la pièce qu’il fe propofe de faire. Dès que fa canne
eft affez chargée, il la pofe fur la bigorne, & la
faifant rouler entre les doigts de fa main gauche
il unit de la droite toute la furface de fon verre
avec le plat de la palette, enfuite fans ceffer de
rouler la canné , il appuie fortement , avéc le
tranchant de la palette, contre le mors de la fêle ,
la portion de verre qui y eft attachée; c eft ce
qu’on appelle trancher le verre. On peut auffi trancher
le verre , en faifant rouler le mors de la canne
en appuyant avec force fur une barre de fér placée
horizontalement, à la manière des fouffieurs
en boudiné ; & quelques manchoniers le pratiquent
ainfi.
Lorfque le verre eft tranché , on pofe la paraifon
dans le bloc difpofé folidement fur la place ,
dans une pofition un peu inclinée, l’ouvrier étant
placé vers le bout du bloc le plus élôvè; on tourne
le verre dans le bloc pour l’arrondir, la canne
prefque droite, & l’on Souffle avec force pour commencer
à introduire l’air dans la paraifon & à
dilater, celle-ci ; c’eft ce qu’on entend par percer
le verre. A mefure qu’on fouffie, on retourne la
paraifon dans le bloc , ce qu’on appelle fouffler la.
boule , faifant porter le mors de la canne fur la
dépreifiou pratiquée au bloc pour les recevoir. La
paraifon prend alors une forme ovale ; elle tient a
la canne par une attache dont le diamètre intérieur
eft celui du mors de la (elle; cette partie de la
boule qui joint le manchon à la canne eft défignée
fous le nom de collet du manchon.
En plaçant la paraifon dans le bloc , on a eu
foin de mettre; un peu d’eau dans celui-ci , &
pendant que l’on fait la boule, le gamin jette
encore de l’eau dans le bloc en la verfant vers
PPP,