
dix à douze gouttes du réaôif ; quand-le vin ne
perd pas fa couleur, on peut compter qu’il ne contient
pas de plomb , & s’il en -contient il devient
obfcur , rougeâtre, puis brun, & enfin noirâtre ;
plus la couleur approche du noir, plus il s’y trouve
de plomb.
On éprouvera de la même manière l’eau qui
auraféjourné dans des vaiffeaux de plomb, celle
qui aura coulé fur des terraffes & dans des gouttières
de plomb après les grandes féchereffes.
On peut également éprouver le beurre, une
fauce ou toute autre matière fufpeâe, en la triturant
dans un vafe de verre, porcelaine ou fayance,
avec quelques gouttes du réa&if ; la couleur noire
décéléra le plomb.
Obfei varions pratiques fur la diflillation des vins ,
6» confeils pour retirer des vins de Veau-de-vie
meilleure 6* en plus grande quantité ; par M. de
Bullion.
M. de Bullion ne penfe pas qu’il faille attendre
fix ou huit mois pour diftiller les vins que l’on
veut convertir en eau-de-vie : les expériences
qu’il a faites, & que nous allons rapporter, lui
ont fait regarder cette pratique comme fufceptible
d’inconvéniens.
Il a diftillé de mois en mois les mêmes vins ;
& plus l’opération a été retardée, moins elle a
produit d’efprit ardent.
L’époque où il convient de diftiller les vins
n’eft pas lorfque la fermentation eft tulmultueufe,
car le vin n’eft pas encore achevé ; mais lorfque
la fermentation devient tranquille, & que la liqueur
s’éclaircit, le vin eft fait alors, & il contient
autant d’efprit ardent qu’il en peut contenir.
Il eft certain que tous les mois on trouve du
vide dans les tonneaux; ce vide paroit à l’auteur
ne devoir être attribué qu’à l’évaporation de l’ef-
prijt ardent, q u i, étant plus fufceptible de fe vo-
latifer que les autres parties conftituantes du vin,
doit néceffairement difparcître le premier. Pour
éviter les pertes qui réfultent de..cette évaporation,
il eft aifé de voir, d’après ce qui a été
dit, qu’il faut diftiller les vins dès l’inftant où
ils commencent à s’éclaircir ; c’eft le moment Je
plus favorable; puifque fi Ton attend plus longtemps,
on perd tout l’efprit ardent qui poprra
s’évaporer.
La diffolution du tartre dans le moût eft fur-
tout très-néceffaire dans les raifins qui contiennent
beaucoup de fucre; le tartre fedécompofe,
fuivant M. de Bullion, & fe change, au moyen
de la fermentation, en efprit ardent.
Les moûts des raifins faturés de tartre, tels mj
ceux de Champagne, exigent qu’on y ajoute du
fucre pour augmenter l’efprit ardent.
Dans les vins qu’on deftine à brûler, il faut
outre le tartre & le fucre , mettre de l’eau pour
étendre davantage la diffolution de ces deux in.
grédiens ; alors la fermentation eft plus vigoureufe
& l’efprit ardent fe forme en plus grande abondance.
Ces vins doivent êtrediftillés auffi-tôt qu’ils
font faits, ft l’on veut en retirer une plus grande
quantité d’eau-de-vie.
Quant aux vins qu’on garde pour être bus il
faut que la partie fucrée domine dans le moût;
nos vins de liqueur font dans ce cas; mais il y
a excès de fucre. Pour les faire , on laide le raifin
fécher fur les feps ou fur la paille ; on en exprime
le jus qui fermente peu, & le vin qui en provient
eft doux & fucré : ils ne contiennent prefque pas
d’efprit ardent.
V in de cer ife .
On obtient de la cerife un excellent vin. Le
fruit écrafé , les noyaux concaffés, on y ajoute,
par cent livres de fruit , une livre & demie à
deux livres de fucre, caffonade ou miel; la fermentation
ne tarde pas à s’exciter, & le vin qui
en réfulte eft excellent.
Tous les fruits doux-& fucrés peuvent également
donner du v in , la grofeille, l’abricot, la
pêche, & c ., &c. M. Baume, a indiqué la manière
de faire le vin de grofeille; MM. Rouelle obtenoient
de l’abricot & de la pêche un vin délicieux ; mais
leur procédé n’eft pas. connu.
On peut, en diftillant le vin de cerife , en retirer
une liqueur fpiritueufe fort analogue au Kirfch-
WafTer, & peut-être plus agréable au goût que
ce dernier, quife fait avec la merife. (L e merifier
eft le grand cerifier des bois. )
On obfervera que le vin des cerifes ne peut
être d’aucune reftource dans le pays vignobles
& fur-tout dans les années d’abondance , mais
c’en feroit une précieufe dans les circonftancçs
contraires.
Procédé économique, pour préparer un vin artificiel
fain & bon; par M. Jolivct.
Employez un grain quelconque & même celui
d’avoine qui eft le plus foible de tous & vous
coûtera le moins. Gardez-vous de faire ufage de
celui qui eft menu & long, il rend irès-peu de
farine & eft plus dur à la mouture. -Choififfez le
grain petit & court, qui eft plus pefant, & qu’on
nomme communément groffe avoine.
Vous éviterez la germination , parce qu’il faut
fimpliûer les Froc®^s quanc* on a Peu ^’emplacement
& de temps à fa difpofition. Ce grain
fera bien fe c , afin qu’il foit mieux moulu.
Un tonneau fraîchement vide de vin, fera défoncé
d’un bout, & incliné, pour avoir la commodité
de clouer à la douve de la bonde, en
i dedans , à la diftance de trois doigts du fond,
une grille dont les interfaces feront ferrés, afin
que le marc ne puiffe fluer à travers. Un petit
i panier d’ofier , comme ceux employés aux colom-
j tiers, remplit cet objet. On fait un trou avec un
perçoir, à la mefure du diamètre de la canelle
[ de bois ou de cuivre qu’on fe propofe d’adapter,
[ & on a attention qu’il correfponde au centre de
I la grille intérieure. Ce tonneau fera le fervice d’une
J cuve;''
Vous adoffez ce tonneau à un mur, ou à un I autre corps folide, & .votis le pofez fur deux bouts
I de chantier , ou à défaut de bois, fur deux gros
I pavés égaux, à la hauteur de terre d’environ un
I pied au moins , mais de manière qu’on puiffe ai-
I fément gliffer fous le jable un baquet ou petit broc.
I On place la canelle , & on verfe dans le tonneau
I la quantité de farine qu’on veut employer.
i Si c’eft en hiver , on fait ufage d’eau tiède, fi
I c’eft en été ou que l’emplacement foit chauffé d’un
I poêle, on emploie de l’eau froide.
I On emplit d’abord à moitié le tonneau d’eau,
I & on braffe avec une pelle , ou un rable, les I matières pendant un quart-d’heure , pour les em- I pêcher de s’engrumeler : enfuite on leur denne
I du relâche, afin que la diffolution de la farine I fefiffe. On recommence à braffer, fi vingt-quatre I heures après la diffolution n’efl pas opérée.
I Les bulles d’air, une écume blanche, s’élèvent
l àla furface du marc. Elles annoncent les premiers
K mouvemens de la fermentation : fi après l’efpace
i de quelques jours, elle ne fe manifefte pas, il
K faut recourir à l’eau tiède s’il fait froid. Un en-
B tonnoir à longue douille, qui conduit l’eau dans
I le fond de la cuve , répand mieux la chaleur dans
I toutes les parties du moût, que fi on verfoit l’eau
i fur la fut face. A défaut d’entonnoir, on fait un
I trou' ou plusieurs dans le marc, & on verfe l’eau
I tiède dans ce vide, pour exciter la fermentation.
I Onemplit le tonneau à la diftance d’environ demi-
B pied du haut de la cuve qu’on fonce. L’on fait
B avec une bondonnière, tarière ou autre perçoir,
B un trou au milieu de la pièce de fond principale..
B En verfant par ce trou , on achève le rempliffage
B de la cuve, à un pouce ou deux près du fond ,
B avec de l’eau tiède, & on laiffe la fermentation
B fe faire. Si l’ébullition étoit forte, la liqueur au-
I foit la facilité de fe répandre par le trou de la
pièce du fond. Enfin au bout de quelques jours
l’on bouche le trou , d’abord légèrement, enluue
davantage, afin de n’ être pas furpris par 1 irruption
des matières en fermentation.
Si l’on opère en été, on emplira d’abord deau
froide la cuve jufqu’aux trois quarts, & l’on braf-
fera vigoureufement les matières à.diverfes repri-
fes : on introduira le lendemain dans la cuve,
quelque levain artificiel, tel que de^ la levure , de
la lie claire de v in , des fucs de fruits doux , acerbes
ou fauvages , nouvellement cueillis fur les
aibres ou furies buiffons ; telles que poires , pommes
qu’on aura écrafées , prunes, nefles , coings,
cerifes , grofeilles , mûres, des feuilles^de vignes,
ou autres , & c .... La fermentation s’établit, on
fonce la cuve, & on la remplit à deux pouces près,
avec trente pintes d’eau tiède pour pouffer la fermentation
au plus haut degré. Après quelques heures
qu’elle a été ftationnaire , on tire la liqueur dans
urt demi-muid; ou fi l’on veut tirer à la cuve
pour boire, on attend quelques femaines que la
liqueur fe foit éclaircie, & que le fédiment fe loit
précipité^
Les moyens du peuple de la campagne feroient
bien plus étendus encore, s’il s’occupoit à extraire
& à faire fermenter les feves fucrèes de quantité
d’arbres qui en abondent au printemps. 11 fufnt de
faire des incifions à leurs branches ou à leurs tronci.
Le frêne, le bouleau, le fycomore, le hêtre,
l’érable, fourniffent des fèves que l’on peut charger
en vin; ces fucs employés dans le moût ce
grain, ajouteroient beaucoup à fa'qualité.
En général, les fubftances les plus fucrees fort
les plus propres à faire des vins ; cependant lorf-
qu’elles font vifqueufes St mucilagineufes comn ®
les fyrops , on ne fauroit les faire fermenter. C eft
ce qui arrive au moût de femences farineiifes ; la
fermentation en eft lente, lorgne St languiffante,
8t les boiffons vineufes qui en réfultent font
dégoûtantes par leur trop grande douceur. Alors
il faut le délayer avec plus grande quantire d eau ,
mais cela ne fuffit pas. Le lucre lui-même étendu
dans une fuffifante quantité d’eau pour fermenter ,
formeroit une boiffon vineufe infipide : il faut
que les matériaux employés pour faire ces boiffons ,
aient la faveur douce , St d’autres goûts tels qu une
acidité légère, un principe aromatique flatteur ,
qui s’applique à l’odotat comme au goût, ou même
une faveur tant foit peu âpre , amère ou acerbe,
qui feule feroit défagréable; mais , qui, fondue
& intimément mêlé avec le corps fucré, peut ,
après la fermentation , produire une boiffon vineufe
plus vive , plus tranfparente, plus faine &
plus agréable.
1 C ’eft le cas où l’art & l’intelligence viennent