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( Art
I j'ATtr du Vannier eft fort ancien & fort utile.
On fait que les Pères du défert & les pieux foli-
taires l’exerçoient dans leurs retraites , & qu’ils en
tiroient la plus grande partie de leur fubfiftance.
Cet art fourniffoit autrefois des ouvrages très-
fins pour fervir fur la table des riches , où l’on n’en
voit plus guère > les vafes.de cryflal ayant pris leur
place.
Le van, qui a donné fon nom au Vannier, eft
un infiniment d’ofier à deux anfes, qui fert à vanner
les grains , pour en féparer la menue paille &
la poumère. Cet infirument eft le principal objet
du métier des Vanniers, qui en outre font toutes
fortes d’autres ouvrages d’ofier, comme paniers,
corbeilles, hottes, &c.
Prefque tout l’ofier que les Vanniers emploient
à Paris, vient de Champagne & d’Orléans, en
paquets de quatre pieds de long,' qu’on appelle
molles.
On nomme ofier rond t celui qui n’ eft point fendu;
il doit être de cent brins à la molle, & l’ofier fendu
de trois cents ; ce qui revient au même, attendu
que chaque brin de ce dernier eft fendu en trois :
une partie de l’ofier rond eft apporté tout pelé &
en blanc.
Avant d’employer l’ofier, on le bajjlne J ce qui
confifte àjeter de l’eau deffus avec la main ; enfuite
on le defcend dans la cav e, jufqu’à ce qu’il ait
atteint la flexibilité néceffaire pour le travailler.
Cependant fi l’ofier eft fraîchement coupé, on
peut l ’employer fans le bafliner.
Le Vannier eft quelquefois obligé, pour certains
ouvrages, de fendre l’ofier en trois ; il fe fert,
pour cette opération , d’un infirument appelé [en-
doir j qui eft un morceau de buis ou d’autre bois
dur , de fept ou huit pouces de long , avec
une efpèce de tête partagée en trois, dont chaque
pièce eft taillée en pointe de diamant.
Le fendoir ne fert qu’à fendre l’ofier qu’on veut
féparer en trois : celui qu’on fépare en deux ou en
uatre, fe fend avec le coût eau.
du )
Pour fe fervir du fendoir, il faut amorcer le gros
bout de l’ofier, c’eft à-dire, l’ouvrir en trois parties
, puis y infinuer la tête de l’outil, & le conduire
avec un mouvement à demi circulaire, juf-
qil’à la dernière pointe de l’ofier.
Tour faire un ouvrage de vannerie , de quelque
efpèce qu’il foit, l’ouvrier, après avoir préparé fon
o fier ,fait avec du gros ofier-rond ou même du
bois menu, un bâti à claire voie , auquel il donne
la même forme que doit avoir l’ouvrage, & qui
en eft en quelque forte la carcaffe ou la charpente.
Il en remplit enfuite plus ou moins les intervalles
par des ofiers plus minces & plus flexibles, qu’il
entrelace avec propreté , & qui donnent de la con-
fiftance & de la folidité à l’ouvrage.
Pour faire cette dernière opération , le Vannier
fe fert d’une efpèce de petit établi appelé [dette.
C’eft une forte planche de chêne, large d’un pied
& de deux pieds de long y & garnie d’un côté
feulement de deux petits pieds de bois d’environ
deux pouces de hauteur, en forte que la felette
va en penchant fur le devant, où elle n’eft point
foutenue par des pieds : le Vannier fe place xder"
rière cette felette , aflis ou à genoux , fur le grand
établi de l’atelier.
Paniers de jonc , qui tiennent Veau & autres liquides.
Les paniers ou terrines, dit M.'Sparmann , qui
fervent aux Hottentots-Caffres à traire le lait, font
faits de racines treffées d’une façon curieufe. Le
tiflù en eft fi ferré , qu’ils peuvent contenir le lait
& l’eau. Ces vafes feroient aufli propres qu’ils font
légers, fi les Hottentots ne négligeoient pas de
les laver; mais ils laiflfent le lait s’y incrufter, au
point qu’on diroit qu’ils font enduits d’un maftic.
Cependant j’ai vu depuis de ces terrines neuves
& très-propres, fur-tout une que j’ai rapportée,
& q u i, fans aucune efpèce d’enduit, ne laiflbit
point du tout échapper l’eau ; elles tiennent depuis
trois jufqu’à feize pintes, & elles ont, outre la
légéreté, l’avantage d’être affez pliantes.
Une Sauvage gonaquoife, dit M. Vaillant,'
m’offroit une abondante provifion de lait dans des
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paniers qui me paroiffoient d’ofier. Ce dernier cadeau
m’étonna : du lait dans des paniers , m-
difois-ie, voilà une invention qui annonce bien
de l’ induftrie ou de l’adreffe. Ces jolis paniers fe
fabriquent avec des rofeaux fi déliés , & d’une texture
fi ferrée , qu’ils peuvent fervir à mettre de
l’eau. Ils m’ont été pour cet ufage d une grande
reffource dans la fuite. Le chef des Gonaquois
m’apptit qu’ils étoient l’ouvrage des Caffres , avec
lefquels ils les échangent contre d’auttes objets.
Ouvrages des Vanniers.
Les différent ouvrages qui diftinguent les Van-
niers, font ceux de la mandrerie, de la clôture ou
cloferie , & de la faifferie. La mandrerie, dont les
maîtres font appelés Vanniers Mandriers, comprend
tous les ouvrages d’ofier blanc & d ofier verd , qui
ne font point à claire voie, à la réferve des vans
à vanner les grains1, & des hottes à vin, qui font
réfervés à la clôture, dont les maures fe nomment
Vanniers-Clôturicrs'.
A l’égard de la faifferie , qui eft la vannerie
proprement dite, fort partage confifte dans fout
ce qui fe fait d’ouvrages à jour, de quelque forte
d’ofier que ce foit. Cette partie du métier des
Vanniers donne.à ceux qui s’y occupent, le nom
de Vanniers-Fd’JJiers. Malgré cetté efpece de dil-.
tinélion d’ouvrages & de métier, les maîtres Vanniers
ne s’y affujettiffent pourtant pas tellement,
qu’il ne s’en trouve qui travaillent tout a la fois
aux uns & aux autres. -
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Comme les ouvrages de clôture font les plus
difficiles & demandent les plus hibik? ouvriers ,
8c qu’il faut d'ailleurs des outils à part, les f-lûtu-
riers s’occupent rarement à la mandrerie c l a a
faifferie ; mais au contraire les Mandriers cl les
Faiflîers, convenant en quantité de chofes, cl te
fervant d;s mêmes outils , il eft rare que ceux qui
exercent la faifferie, ne travaillent pas aufli a la
mandrerie.
Les outils & inftrumens communs aux trois fortes
de Vann ers , font la fcie montée & la fcie à main ,
le couteau à travailler, divers villebrequins, entre
autres le villebrequin à hottriau , 1 épluchoir, le
poinçon de fer, les fers à clore, le maillet ,1e chevalet,
l’établi , la fellette, les moules & le fendoir.
Outre ces outils , les Gôiuriers ont encore la batte
de fer, le villebrequin à Menuifier, la becaiie , le
crochet & la trét.oire.
A Paris, la communauté des maîtres Vanniers-
Quincaillers a des ftatuts depuis, l’année 1467. Us
ont été confirmés par lettres-patentes de Louis XL,
& réformés fous le règne de Charles I X , par arrêt
du confeil, du mois defcptembre 156 1, enregiftre
a u parlement la même année. On ne fait douleur
eft venu le nom d e Qû'nc4ille.rs> qu’ils ont dans
leurs ftatuts.
Les apprentifs quiafpiroient a la maitrife , etojent
obligés au chef-d’oeuvre , & le refte comme dans
les autres corps. On compte à Paris, environ trois
cents martres Vanniers.