
pelle rouané tout ouvrage ou marchandife marquée
avec la rouane.
VL Des autres vaijfeaux qui font du reffort du
tonnelier.
Le tonnelier ne fe borne pas à faire des
tonnes , tonneaux, pipes , &c. les cuves , cuviers ,
baignoires, baquets, & c , font auflî de fon reffort.
Mais comme il y emploie à peu près les mêmes
moyens que nous avons fuffifamment détaillés,
nous laiderons au leâeur à,en faire l’application
aux différons ouvrages que font les tonneliers,
& qui font tous formés par des planches réunies
par des liens de bois ou de fer. Il nous fuffîra,
je crois , de faire remarquer que la forme de ces
vafes dépend toujours de celle que le tonnelier
donne à chaque douve, & qu’elle tient à la façon
de les tailler.
Le vaiffeau variera plus ou moins de formes;
i° . fuivant que le tonnelier diminuera la largeur
des extrémités du merrain, en confervant celle
du milieu; 2°. s’il diminue l’une de fes extrémités
, en ne diminuant point la largeur de l’autre ;
3®. s’ il bombe plus ou moins une des furfaces
de fon merrain; 4°* fuivant la pente que donne
le tonnelier au chanfrein qu’il forme fur fon
çpaiffeur.
La figure des vaifleaux, tels que brocs, féaux,
feilles , baignoires , petits cuviers propres à tirer
le vin , dépend de cette différente taille qu’il
donne au merrain ; & ces faces changeront toujours
de forme & de nom, fuivant la figure que
l’ouvrier aura donnée aux douves dont il fe fera
fervi pour les former.
Pour bâtir les petites cuves, le tonnelier prend
du merrain de différentes dimenfions fuivant la
grandeur des cuves qu’il veut en conftruire. Il
la dreffe comme nous l’avons décrit. Mais comme
la figure de la cuve approche un peu de la forme
d’un grand tonneau coupé vers le ‘bondon , le
tonnelier diminue la douve de largeur , feulement
fur une de fes extrémités , fur celle qui doit
former la partie inférieure de la cuve. Il travaille
auffi l’épaiffeur de la douve en bifeau ; il creufe
un peu la planche dans la furface qui doit être
placée intérieurement dans la çuve , & rendre
l’autre \jn peu convexe,
Lorfque les euyes font grandes , au lieu de
merrain, on emploie du bois de fci âge, que l’on
appelle dans la fpr$t d’Orléans gobillard. On le
débite en planches de quatre à fix pouces de
large fur 18 lignes & deux polices d’épaiffeur.
Ce bois fert pour faire des cuves qui contiennent
depuis quatre poinçons jqfqu’à quarante,
Au lieu qu’aux tonneaux & barriques la partie lt
plus étroite eft du côté du jable, on fait à certaines
cuves la partie du jable plus large que le
haut de la cuve ; ce qui s’appelle une cuve en
tinette y d’où il réfulte deux avantages.
Le bois de la cuve venant à fécher, les cer*
clés ne coulent point, & l’on peut les rabattre,
la cuve reliant en place, fans être obligé de la
renverfer pour les ferrer.
La pratique pour les cuves, eft la même que
pour bâtir les poinçons. Le tonnelier prend la
mefure des cercles fur la circonférence de la cuve,
avec des ofiers qu’il lie les uns au bout des
autres, & il la rapporte fur le cercle. Mais comme
il ne peut l’affujettir avec la main pour le cooher\
il paffe les deux extrémités du cercle dans une
coche de bois, & il les lie avec de l ’ofier, comme
ceux des poinçons.
Souvent les tonneliers goujonnent les planches
qui fervent à former les cuves ; c’eft-à-dire, qu’ ils
placent entre les planches, des chevilles de fer
ou de bois appelées goujons, qui entrent moitié
dans une planche , moitié dans celle qui l’approche
; ces goujons fervent à donner plus de
lidité à toutes les plâhches qui forment la cuve.
Il y a des provinces où l’on fait les cuves
quarrées : alors on fe fert de moifes. avec des
coins , pour ferrer les planches. Cette pratique
eft moins fujette à réparation que celle des cuves
rondes reliées avec des cercles & de l’ofier.
Mais comme ceci eft du fait du menuifier , nous
n’entrerons pas ici dans un plus grand détail fur
leur confiniélion.
Quelquefois on retient les cuves, quoique rondes,
avec des traverfes & des moifes, au lieu de
cercles ; & pour lors on ceintre intérieurement
les traverfes, de façon qu’elles embraffent & ferrent
toutes les planches , qui compofent la cuve. Ces
planches font taillées comme nous allons l’expliquer
pour la conftruélion des cuves ordinaires.
Quand les cuves forment une portion régulière
de cercle, le tonnelier arrange les douves, &
frappe la dernière pour faire ferrer les autres , &
les retenir toutes.
II eft quelquefois befoin du bâtiffoir pour faire
revenir les douves du côté où la cuve eft plus
étroite. Ce bâtiffoir reffemble à celui dont nous
avons donné la defcription & l’ufage : il eft feulement
plus fort que celui qui eft employé pour
les tonneaux.
P„our former le jable qui doit retenir le fond
d la cuve , le tonnelier eft obligé d’aflùjettir fa
cuve
cuve fur le côté. Il prend la jabloire à cuve ,
qui eft plus forte que celle pour les tonneaux.
Cet outil doit former une rainure qui ait de la
profondeur, & trois à quatre lignes de largeur. s
Audi le fer produit-il ici le même effet que le
rabot ou bouvet que le mènuifier emploie pour
pouffer des rainures. L ’outil diffère en ce qu’il
tient à une pièce de bois par le moyen de deux
tringles fur lefquelles le rabot peut avancer ou
reculer. Ceft ce qui règle, comme fait le truf-
quin du menuifier, la diltance o ù j ’on veut placer
la rainure. '
La jabloire forme une rainure dont le fond n’eft
pas égal à l’ouverture , parce qu’on donnera auffi
la même forme aux planches qui entrent dans
cette efpèce de rainure, Le tonnelier la forme
en faifant changer de place à fon outil, à mefure
que la rainure eft pratiquée, & en faifant
passer plufieurs fois la jabloire dans la partie ou
il doit former le jable.
L’ouvrier forme ensuite le fond de fa cuve.
Il choifit de bonnes planches qu’il dreffe, & dont
il unit les épaiffeurs, de façon que chacune porte
dans toute fa longueur fur celte qui l’ayoifine.
Il arrange toutes fes planches fur un terrain u n i,
il les retient avec des piquets qu’il enfonce en
terre, & il trace le fond de fa cuve fur ces plan- ,
ches qui doivent le former.
Pour tracer cette circonférence, il mefure celle
de la cuve avec le grand compas dont nous parlerons
dans un moment. Il prend fa mefure dans
le jable, Ôc la fixième partie de la circonférence
forme le rayon de fon fond , qu’il trace avec
le compas fur des planches dreffées & placées les
unes contre les autres.
Le compas â cuve eft fait de deux tringles de
bois qui font applaties d’un côté. L’une des extrémités
de ces tringles eft fendue & partagée'
fuivant fon épaiffeur, & permet à l’extrémité
de la fécondé d’entrer dans cette ouverture. Elles
■ font toutes deux traverfées par une vis qui leur
permet un mouvement de charnière, & forment
h. tête du compas.
Lès deux autres extrémités de ces tringles font
pointues & garnies d’une pointe de fer. Environ au
quart de leur longueur, du côté de la tête du
compas , eft ajuftee à l’une des branches une troi-
fième tringle de bois , formée en portion de
cercles, qui y eft retenue pat deux chevilles,
& qui passe dans une entaille faite à une des
branches du compas. Cette partie circulaire eft
deftinée à affujettir le compas félon l’ouverture
que l’on juge convenable. Ainfi , lorfque le ton-
Arts & Métiers. Tome VIII.
nelier l’ouvre pour tracer fon fond, il le maintient
à l’aide d’une vis q u i, par fa feule preflion
fur cette portion circulaire , retient le compas,
quand il lui a donné l’ouverture du rayon de
la cuve qu'il a mefuré.
Le torfnelier fe règle fur ce trait pour fcier les
planches. Il forme fur tout le contour de fon fond
un bifeau qui doit entrer dans la rainure faite
à la cuve , ou dans le jable, & il le met ^n
place.
Pour le faire entrer dans la feuillure du jable ,
le tonnelier fe fert de la tire à barrer , ou riretoir,
pour les cuves. Cette tire eft plus forte que celle
pour les tonneaux. Avec le fecours de cet outil
, il pofe les |planches de fond , comme nous
l’avons dit en parlant des tonneaux.
Le tonnelier a l’attention de pratiquer intérieurement
fur le bout des planches qui doivent former
le haut de la cuve, une feuillure ou entaille
à mi-bois, d’environ un demi pouce de
profondeur, pour pouvoir , fi l’on veut, enfon-
cer la cuve t c’eft-à-dire , y mettre un fécond fond.
On difpole ce fécond fond tout prêt à pouvoir
être placé, quand on le jugera à propos.
Il eft formé de plufieurs planches dreffées , principalement
fur leur champ : il les taille fur les
dimenfions de la furface fupérieure de la cuve,
& les conferve pour pouvoir enfoncer la cuv e,
ou y mettre ce fécond fond, quand on veut con-
ferver du vin à clair pendant quelque temps
dans la cuve. On fait pour lors entrer à force,
de la moufle entre les jointures des planches ,
& on les recouvre de terre graffe, qu’on couyre
de fable à la hauteur de deux , trois ou quatre
pouces.
Les grandes cuves ( on en fait qui tiennent
Jufqu’à quarante pièces de vin avec leurs marcs )
font ordinairement cerclées de bandes de fer qui
fe reflerrent avec des écrous ou des clavettes,
Ceux là durent plus long-temps , mais ils rompent
quelquefois; & comme il y en a peu fur
une cuve, la rupture d’un feul cercle fuffit pour
que tout le vin fe perde.
Pour former les jales & les baignoires, les
tonneliers tracent ordinairement fur le terrain la
forme qu’ils veulent donner à ces vaifleaux.
Les baignoires ont fouvent la figure d’une eî-
lipfe; & pour tracer cette courbe, ils prennent
trois centres.
Celui du milieu donne la forme aux deux côtés
de la baignoire qui règlent fa longueur : les deux