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Àufli-tôt après que les lazagnes font faites, on
les met fécher feulement à l’air. Il fe fait plus de
déchet des lazagnes en féchant, qu’il ne s’en fait
des vermicelles 8c(des macaronis , parce que les lazagnes
fèchent plus que les autres pâtes, fur-tout
plus que les macaronis. Les pâtes font plufieurs mois
à fécher : fi l’on en ufe avant qu’elles foientfèches,
elles ne font point fermes, point leur forme en bouillant e; ll&es ennfel acnot ndfearnvse nlet
bouillon, elles fe mettent en une cfpèce de bouillie,
qui n’eft pas fi bonne.
Le déchet des pâtes, en féchant, eft ordinairement
de la quantité d’eau .qu'on a employée à les
faire, c’eft-à-dire , fi on a pris 50 livres de fe-
moule pour faire la pâte, on n’a que 50 livres de
vermicelle , ou de macaroni, ou de lazagne, dans
l’état fec. Il y refte cependant encore un peu d’eau,
mais par la fabrication de la pâte & par differentes
opérations pour leur donner diverfes formes,
il fe fait une perte d’un peu de femoule 8c de pâte ;
ce qui équivaut en général au peu d’eau qui refte
encore dans la compofition de la pâte.
Ce qui contribue à conferver ces pâtes comme
on les conferve, c’eft que, quoiqu’on les travaille
beaucoup plus qu’on ne travaille la pâte pour faire
le pain, on y fait entrer moins d’air, parce que
le travail de la brie eft bien moins propre à renfermer
de l’air dans la pâte, que ne le font les
mouvemens qu’on donne à la pâte avec*lè$ mains.
C’eft l’inconvénient d’une machine qui a été
préfentée à l’académie en 1761, pour pétrir à la
fois une grande quantité de pâte. Cette machine
pour pétrir eft bonne, à cel^ près , qu’elle n’incorpore
pas dans la pâte autant d’air qu’on a coutume
de faire en la pétrifiant à l’ordinaire, en la battant
avec les mains. M. Coufin, boulanger, chez qui
l’on a fait ces expériences, a dit que comme l’on
ne peut battre la pâte avec cette machine, mais
feulement la bien pétrir, le pain qui en a réfulté
étoit moins blanc que n’étoit le pain pétri à l’ordinaire
& avec la même farine.
On peut ajouter à cela qu’y ayant moins d’eau
dans les pâtes, elles contiennent moins d’air aufli,
parce que l’eau contient extraordinairement d’air,
& l’air entre avec l’eau ; enfin le peu d?eau qui
entre dans la compofition des pâtes eft très-chaude,
d&’a ipr.ar conféquent elle contient d’autant moins
Les pâtes pour les vermicelles, pour les macaronis
& pour les lazagnes contenant moins d’air
en général que la pâte pour le pain, font moins
bchlaenucrh deess, ppâatrecse &qu ed ul’ apira infa.it beaucoup à la blanOn
eft ordinairement deux heures à faire paf-
fcr 50 livres de pâte par les moules, foit par
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ceux des macaronis, foit par ceux des lazagnes :
ces deux heures jointes au temps qu’on eft à fabriquer
la pâte, font cinq ou fix heures, qui eft
le temps entier qu’on met à faire chacune de toutes
ces différentes pâtes.
fe L, efse v eferrmveicnetl ieorrsd,i npaoiurerm geranitf ldere lace vrvise ldlee laau -plrieefu-
de graiffe; ils prennent le plus fouvent pour cela,
la cervelle de boeuf, qu’il faut faire cuire dans
de l’eau auparavant ; enfuite on la laifle bien égoutter
, puis on la pile, & on y mêle un peu d’huile.
La cervelle ainfi préparée eft meilleure pourgraif-
fer les vis, que tout autre matière grade.
Les pâtes compofées•
La fabrication des pâtes , dont nous venons de
donner la méthode 8c les détails , n’eft pas une
compofition variée par les ingrédiens ; c’eft un choix
du grain & un travail particulier de la pâte ; c’eft
un fimple alliage de femoule & d’eau, mais bien
travaillées enfemble & mifes fous des formes différentes
: c’eft-à-dire , que les vermicelles, les macaronis,
les lazagnes 8c les autres pâtes ne font
point des compofitions différentes ; il n’y a de différence
que par les diverfes formes qu’on donne
à la pâte en la moulant, ce qui y fait plus qu’on
ne croit. On fait des vermicelles 8c des macaronis
de diverfes groffeurs & fineffes; 8c l’on donne
aux lazagnes différentes largeurs 8c épaiffeurs, 8tc.
On peut donner à la pâte toutes fortes de figures
; les ouvriers en pâtes fines en font, dans
le royaume de Naples, de plus de trente fortes
différentes, telles font les fadelinï, fementelle, pun-
te-d’aghi ,felluce , occhidi-perdici ,Jlelette, vermiceli, 8cc. Ces pâtes font plus fines, parce que les fe-
moules avec lefquelles on les compofe font plus
fines , ou ont été faffées plus de fois. Chaque fois
que l’on paffe la femoule par un fas on crible,
c’eft ce que l’on nomme une faffés : la femoule
eft d’autant plus fine qu’elle a eu plus de
faffées : on dit, cette pâte ejl d'une femoule de tant
de faffées, La plus fine femoule eft la femoletta tanta,
dont on fe fert pour faire les pâtes les plus
fdiénleicsa, t8ecs . qCu’ee ftl ’oàn ltar availle plus : ce font les plus torre de Vanonfiada, à quatre
lieues de Naples, que font ces ouvriers en pâtes
fines; car les macaronarii de Naples , qui font les
pâtes ordinaires, ont le droit de les empêcher de
travailler dans la ville. On fabrique préfentement
à Paris aufli celles que l’on fait à la torre de l’a-
nonfiada.
Avec les pâtes qui ne font pas fines, on fait
les macaronis, trenete , laçagnette, pater-nojler 8*
ricci-di foretana.
On fait non-feulement avec la même pâte, mais
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aufli avec les mêmes moules, differentes fortes
de pâtes : celles dont je viens de parler diffèrent
feulement par le temps où on les coupe : on fait
des itoiUttes quand on coupe la pâte, dès qu’elle
fort du movile d’une demi-ligne. Si on^ les coupe à une ligne !& demie ou deux lignes, c’eft ce que
l’on nomme des pater-nojler, qui font de la grof-
feur des grains de chapelet, & ce font des corals
lorfqu’on les coupe à environ deux lignes & de-
mie*-
Ce moule eft formé de façon qu’il y a des crê-
nelures le long des corals, & des pater-nojler. Ces
rainures forment aufli les rayons des étoilettes.
Il y a un petit ftylet dans chaque trou de ce
moule, qui fait que ces pâtes font percées comme
les macaronis.
On donne aufli aux pâtes les figures foit de légumes
, comme de lentilles, 8cc. foit de poiffons,
comme de foies , 8cc. Ces pâtes figurées ont été
plus en ufage autrefois qu’elles ne le font à prêtent
: on en fervoit même des repas entiers : le
ro i,ia reine 8c la famille royale, n’étoient fer-
vis , le vendredi faint, à leur grand couvert, qu’en
pâtes figurées en poiffons 8c en légumes ; ce qui
par le changement des temps a paru fi extraordinaire,
qu’en 1782 on en a fupprimé l’ufage.
D’ailleurs, on les préparoi t moins bien qu’autre
fois : les pâtes plates, comme les foies , étoient
feulement compofées de même que les échaudés
de carême, avec de la farine pétrie ferme avec
de l’eau 8c du fel ; enfuite on les fculptok avec
un petit couteau , pour imiter la figure du poiffon.
Pour les pâtes relevées comme les merlans, on
prenoit des carottes ou des panais cuits dans 1 eau,
qu’on tailloit félon la figure que l’on vouloir leur
donner, 8c on les enveloppoit d’une pâte compo-
fée de farine, pétrie avec du vin blanc. On fai-
foit frire dans de l ’huile ces pâtes différemment
figurées, 8c on les fervoit toutes chaudes.
En général, on ufe bien moins des pâtes aujourd’hui
qu’on ne faifoit autrefois; 8c 1 ufage du
pain a augmenté en France à proportion que celui
des pâtes eft tombé , ou plutôt l’ufage des pâtes
eft tombé, à proportion que l’ufage du pain a
augmenté : l’ulage du pain a augmenté aufli à proportion
qu’on a appris à le faire.
Une grande partie des pâtes dont on ufe pre-
fentement chez les grands font compofées 8c préparées
dans les cuifines; ce ne font pas des pâtes
Amples comme font celles des vermiceliers.
Pour compofer ces pâtes dans les maifons, on
choifit de h meilleure farine , celle qu’on nomme
àv\blanc-bourgeois ; on la pétrit avec des oeufs fans
eau, 8c on en fait une pâte ferme qu’on manie for- |
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’tement. Il y en a qui y ajoutent aufli un peu de
beurre fur la fin de ce travail : j’ai confeillé d’employer
de la crème au-lieu de beurre.
Enfuite on aplatit cette pâte également avec
un rouleau, en galette la plus mince que l’on peur.
On taille par les bords cette pâte ainfi aplatie,
pour en former un petit quarré.
On poudre un peu de farine deflus , 8c l’on
roule un quarré fur lui-même ; puis on coupe par un
bout ce morceau de pâte roulé, en filets comme des
vermicelles ; c’eft ce que l’on nomme des nouilles.
On coupe aufli ce rouleau de pâte en tranche
de deux à trois lignes de largeur, 8c on les étend fi
l’on veut les laiffer en lazagnes, que l’on découpe
par les bords pour les feftonner; ou bien l’on roule
ces petites bandes de pâtes fuivant leur longueur
avec une e/pèce de groffe aiguille, pour en faire
des macaronis.
On fait aufli avec les nouilles coupées menus
en grains, une efpèce de femoule compofée, que
l’on nomme cacha en Pologne.
Pour achever de préparer ces pâtes, on les met
dans de l’eau bouillante , fur le feu , 8c on les y
tient deux ou trois minutes, pendant lequel temps
on entretient l’eau toujours bouillante; 8c l’on a
foin de l’agiter continuellement avec une écumoire,
qu’on enfonce à plat 8c que l’on relève promptement
comme pour battre l’eau ; afin d’empêcher
parle mouvement qu’on lui donne, que les lazagnes
ou les macaronis ne fe prennent 8c ne fe collent
: enfuite on les jette dans une paffoire , 8c de
la paffoire aufli-tôt dans de l’eau froide où on les
agite. Enfin , on les retire, 8c on les met fécher.
On nomme aufli macaroni, les lazagnes compofées
dans les maifons particulières. On ne con-
noît aujourd’hui vulgairement en France les pâtes
que fous les noms de macaroni, de vermicelle 8c de
femoule•
Quelques perfonnes prennent la femoule pour
fuenme oueflpeè ceeft dAem ppâletme ecnotm upno fgéreu a:u a ud e cforonmtreanirte ,p ula
rifié; 8c il y en a qui croient qu’on fait aufli de
la femoule avec du ris : ce n’eft point de la véritable
femoule : donner ou vendre du ris pilé en
groffe farine pour de la femoule, c’eft tromper.
Les pâtes compofées font meilleures au goût
que ne font les pâtes ordinaires, qui font fimples ,
parce que les pâtes compofées font affaifonnées,
8c parce qu'on les mange toujours nouvellement
faites : elles ne fe garderoient point comme les
pâtes fimples.
Les pâtes fimples ont l’inconvénient d’être fu-
| jettes à avoir le goût de poufîière lorfqa’elles font