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1 3 3 / i VÉGÉTAUX DE DIVERS PAYS AU POINT DE VUE DES ORIGINES.
relativement à des liens, ou antérieurs, ou originels, entre les végétations
comparées. Il n'est pas inutile d'énoncer clairement les hypothèses auxquelles
je fais allusion. En les mettant au grand jour, on comprendra
mieux la distance qui les sépare encore des faits connus, et Ton appréciera
peut-être mieux leur degré de probabilité.
Pour les personnes qui admettent dans les espèces une variabilité indéfinie,
sous l'empire du temps et de circonstances extérieures différentes,
les espèces analogues dans deux pays sont probablement des dérivations
différentes d'une même forme primitive. Je me suis occupé de cette
théorie dans le chapitre xi.Il m'est impossible de l'admettre comme générale
et comme démontrée. Peut-être certaines formes très analogues,
appelées espèces, qu'on devrait appeler plutôt sous-espèces ou races, doivent
elles leur origine à cette cause, mais quant à l'immense majorité des
plantes, ce n'est pas possible, puisque ce genre de modifications suppose
l'isolement, et que les espèces analogues sont ordinairement juxtaposées
ou rapprochées.
Les naturalistes d'une autre école, qui croient à une fixité plus ou
moins grande des espèces, sont obligés de recourir à d'autres hypothèses
au sujet des genres et familles divisés entre plusieurs flores. Ces hypothèses
se rapportent à trois catégories de phénomènes : des changements
d'habitation à la suite de modifications dans les terres et dans les
climats; 2® des extinctions d'espèces, et par suite de genres, ou même de
familles; 3« des circonstances tenant à la création des êtres organisés. On
va voir qu'il est nécessaire de combiner ces différentes causes, puisque
toutes ont dû exercer une influence dans chaque cas particulier.
Une végétation ayant été commune à un vaste continent, pendant une
certaine époque, il a pu arriver qu'à la suite d'une séparation en deux pays
et de changements inégaux dans les climats de ces deux pays, les espèces
d'un genre se soient entièrement éteintes dans un des pays, et les espèces
d'un autre genre se soient conservées en partie dans les deux. Si, à
l'époque actuelle, un abaissement du sol venait à prolonger le golfe de
Carpentarie au point de partager la Nouvelle-Hollande en deux îles, on
verrait d'abord s'éteindre celles des espèces du désert central qui sont le
plus locales ou qui redoutent extrêmement rimmidité, puis, pendant une
série de siècles, des familles, genres et espèces, en grand nombre, seraient
communes aux deux îles ; enfin, par une diminution graduelle ou par l'eflet
de nouveaux événements, les espèces communes disparaîtraient, tantôt dans
une île, tantôt dans l'autre, et il pourrait arriver finalement une époque
où l'une des îles, étant plus petite, plus humide, ou moins élevée que
l'autre, ne présenterait plus d'espèces communes avec elle, mais seule-
ORIGINES PROBABLES DES VÉGÉTATIONS ACTUELLES. 1335
ment des espèces diverses de quelques genres, ou des genres divers de
quelques familles. On peut appliquer, assez heureusement, cette hypothèse
aux îles d'un même archipel qui offrent des espèces différentes de
mêmes genres. Ce phénomène si curieux, remarqué dans les îles Canaries,
Galapagos et dans d'autres archipels, ne peut pas venir d'influences locales
sur les espèces, puisque les climats sont semblables, à la même hauteur,
dans des îles rapprochées. On ne comprend guère comment une création
primitive les aurait constituées différentes. Il semble plus aisé d'admettre
un temps prolongé, pendant lequel des éruptions volcaniques ou d'autres
causes auraient détruit ça et là plusieurs espèces et en auraient laissé de
différentes d'un même genre sur certaines sommités insulaires. Les îles
Galapagos, elles-mêmes, en dépit de leur apparence récente, ont pu traverser
des séries d'événements géologiques, du moins il est difficile de
prouver que cela n'est pas arrivé. Elles n'ont aucun terrain de sédiment,
et l'apparence de leurs volcans est d^avoir été exhaussés hors de la mer, à
une époque peu ancienne (Darwin, l. c.) ; mais il a pu exister une fois des
îles entre cet archipel et l'Amérique. Si des surfaces terrestres se sont
afl'aissées dans cette direction, comment le prouver?De même entre Juan-
Fernandez et le Chili, entre Sainte-Hélène et l'Afrique, etc. La mer cache
peut-être dans ses profondeurs les terrains de sédiments qui constateraient
d'anciennes relations. Ainsi, lorsqu'on remarque aujourd'hui sur les montagnes
des Galapagos, des Cactacées analogues à celles des Andes, des
Composées analogues à celles du plateau mexicain, mais appartenant à
des espèces difl'érentes, même à des genres différents de tribus semblables,
il n'est pas impossible que ce soit le reste d'une ancienne végétation
uniforme, étendue, ayant beaucoup d'espèces identiques, dont une foule
auraient disparu tantôt dans deux des pays que l'on compare, tantôt dans
un seul. Quelquefois, il ne resterait plus d'espèces identiques; dans d'autres
cas, il en resterait un petit nombre.
En transportant ce genre d'hypothèses dans les végétations antérieures,
on peut imaginer que la flore éocène s'étendait d'Europe à la mer Pacifique,
et que les espèces non identiques, mais congénères, qui existent
aujourd'hui dans les îles de la Sonde, etc., sont une continuation d'espèces
contemporaines de nos espèces éocènes, quoique différentes. On peut supposer
la flore actuelle des États-Unis méridionaux une continuation de
notre flore pliocène d'Europe, du moins d'autres espèces qui vivaient
dans ce temps, et ces mêmes flores comme liées avec celle du Japon,
malgré les diversités spécifiques. M. Agassiz (a) a considéré la florQ
(a) Lake sitperior, p. 150.
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