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9 5 0 OniGKNK GÈOGHAPHKJUK DES ESPÈCES CUETIVÉES.
troduisit la culture longtemps avant l'ère chrétienne (Julien, dansLoisel.,
ConsicL sur les céréales, p. 2 9 ) ; au contraire, il est indiqué dans une Encyclopédie
chinoise du xvip siècle comme apporté des pays occidentaux
(Klaproth, dimslhimh., Nouv.-Esp., 2' édit., p. h09). M.d'Hervey-Saint-
Denys (Rec/K sur Vagric. et Vhort. des Chinois, 1 vol. in-8% Paris,
1 8 5 0 ) , qui a exploité surtout la grande encyclopédie Chéon-chi-thongkhao,
impriuïée eu 1 7 3 7 , et qui parle de l'ancienne agriculture des Chinois,
mentionne un grand Sorghum qui, d'après la figure originale, tient
également du maïs et du bananier (p. 2 ;U) , mais il n'indique nulle part
le Maïs. Thunberg {FL Jap., p. 37) mentionne le Maïs comme cultivé au
Japon, et, avec une légèreté digne de lui, il cite pour synonyme un nom
de Ka^mpler, lequel, d'après la phi'ase même de Ksempfer, doit être un Sorghum.
Il attribue donc, par erreur, au Maïs ce que KiBmpier dit de ce Sorghum,
par exemple qu'il a été probablement transporté de Chine au Japon.
Le Maïs aurait pu à la rigueur être introduit en Chine à la date de l'Encyclopédie
dont parle Bonafous, car les Portugais abordèrent à Java en
l / i 9 6 (Rumph., Amh., V, p. 525) , quatre années après la découverte de
l'Amérique; ils parvinrent en Chine dès 1 5 1 6 (Malte-Brun, Géogr,, I,
p- /|93), et le voyage de Magellcin de l'Amérique iiiistrale aux Philippines
eut lieu en 1 5 2 0 . Si j e me refuse à supposer une introduction directe de
cette manière, c'est que les Chinois auraient propagé extrêmement vite une
plante aussi précieuse, et qu'on n'en aurait pas été à la fin du siècle dernier
sur le continent indien à cultiver le Maïs comme une délicatesse
d'amateurs (Roxb., Fl. Ind., III, p. 569). Aujourd'hui encore il est
moins répandu dans l'Inde qu'en Amérique (Roxb., III., p. Z|20).
Les arguments de cette nature, quand il s'agit de plantes annuelles, faciles
à cultiver, et d'une utilité évidente, me semblent plus forts que toutes
les interprétations possibles de chartes du moyen âge et d'opinions d'anciens
auteurs. On va s'en assurer en jetant un coup d'oeil sur les faits relatifs au
Maïs en Amérique.
La culture en était aussi générale dans cette partie du monde au moment
de la découverte, que celle du blé ou de l'orge en Europe et en Asie
( J . Acosta, Ilist. nat. Ind., trad, française, 1598, p. 1 6 0 ; Hernandez,
Thés. Mexic.). Elle régnait du Chili à la Virginie, du Brésil à la Californie.
Elle avait produit un nombre considérable de variétés, ce qui
indique une culture déjà ancienne ; aujourd'hui encore c'est du nouveau
monde que les agriculteurs ont fait venir presque toutes les variétés un
peu distinctes de Maïs, et ils paraissent n'avoir pas encore épuisé cette
riche mine. Les tombeaux des Incas, les catacombes les plus antiques du
Pérou, contiennent habituellement des épis de Maïs, de môme que celles
ORIGINE DES ESPÈCES LE PLUS GÈNÉUALEMENT CULTIVÉES. 951
de l'Egypte contiennent des grains d'orge et de millet. Les cérémonies religieuses
des anciens Mexicains et Péruviens exigeaient souvent l'emploi du
Maïs. Au Mexique, une déesse portant un nom dérivé de celui du Maïs
(Cmleull, de Cinlli), était adorée comme la Cérès des Grecs, car elle recevait
les prémices des récoltes du Maïs, de même que la déesse grecque les
premiers épis de nos céréales. A Cusco, les vierges du Soleil préparaient
du pain de maïs pour les sacrifices. Rien ne montre mieux l'antiquité et la
généralité de la culture d'une plante dans un pays que cette fusion intime
avec les usages religieux des premiers habitants.
Les autres espèces du genre Zea sont américaines.
Le Maïs varie plus dans la forme et la couleur de ses graines que nos
céréales de l'ancien monde. Ceci est digne d'attention, soit pour la recherche
du Maïs primitif indigène, soit comme considération sur les modifications
des espèces. Il est assez curieux de voir une plante de la même famille
que nos céréales, varier autrement qu'elles. Cependant le fait est certain,
car il y a des Maïs à grains ronds, ovoïdes, pointus, à pointes recourbées
(a), et enfin de couleurs très différentes, tandis que les grains de
froment sont toujours ellipsoïdes et s'éloignent peu de la couleur jaune.
Jusqu'à présent on n'a pas retrouvé le Maïs, d'une manière certaine, à
l'état sauvage. A. de Saint-Hilaire (Ann. sc. nat., XVI, p. 1/|3) avait cru
le reconnaître dans la race qu'il nomme Zea 31 ays tunicata, dont les
grains sont entièrement cachés par des enveloppes allongées et aiguës. L e
naturaliste américain, l'abbé Larranhaga, qui le lui avait donné, disait que
les Indiens Guaycurus le cultivent ; mais, selon de Saint-Hilaire, ces sauvages
sont au dernier rang de l'échelle, et ne se livrent à aucune culture.
Un jeune Guarany, qui était né dans le Paraguay ou sur ses frontières, reconnut
ce Maïs, et ajouta qu'il croissait dans les forêts humides de son pays.
Le Maïs ordinaire étant la seule grarainée dont les graines soient à découvert,
Saint-Hilaire présume que la forme signalée serait l'état primitif de
l'espèce. Bientôt Bonafous (Hist. nat. du Maïs, p. 3 0 , pl. 5 bis) donna
une figure de ce Maïs, qu'il nomma Zea cryplosperma. Il le regardait
comme une espèce distincte. On lui en avait envoyé des graines de Buenos-
Ayres sous le nom de PinsingaUo, en l'avertissant que « la culture n'en
altère point les caractères, mais que la difficulté de séparer le grain de ses
glumes empêche de le semer plus souvent. »
Le docteur Lindley, dix ans après la publication de Bonafous et sans en
faire mention, donna la figure et la description du même Maïs (Journal of
(a) Zea Mays rostrata, Bonafous, Compt. rond. Acad. se. Par., 1842, l"-sem. ,p. 683.
Cette forme se perpétue de semis. Elle doit être ancienne, car on en a trouve dans une
rivière rlu Pérou une imitation sculptée, qui a été envoyée à M. Robert Brown, d après h;
témoignage de Bonafous,
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