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1 3 2 8 VÉGÉTAUX DE DIVERS PAYS AU POINT DE VUE DES ORIGINES.
La grande cliaine de l'Himalaya paraît à quelques géologues plus réceiile
que nos AlpeSj du moins sous sa forme actuelle, et les Nilglierries
également (a)^ mais avant que les étendues immenses de matières ignées
qui les composent aient pu se refroidir et devenir propres à l'établissement
des végétaux, n'a-t-il pas fallu plusieurs milliers d'années? La
végétation y est moins variée que dans les Alpes ou les Pyrénées, si l'on
fait attention à l'étude relative de ces chaînes. Combien y a-t-il d'espèces
disjointes entre les montagnes de Ceylan et les Nilgherries, entre ceux-ci
et rilimalaya? A quelles catégories de plantes appartiennent ces espèces?
Ce sont des faits que MM. Hooker fds et Thomson donneront probablement
dans la Flore dont ils s'occupent. Hs indiqueront peut-être aussi les connexités
géologiques par lesquelles on pourrait essayer d'expliquer les phénomènes.
Il y a quelques Phanérogames disjointes entre Java et la chaîne de l'Himalaya.
J'ai remarqué une Lobéliacée, le Piddingtonia nummularia^
Alph. DC. {Prodr.y VH, p. 3/|l), et ce n'est pas le seul fait. Bien plus,
le Phryma ieptostachya^ du Népaul, m'a paru identique avec celui
des États-Unis (Prorfr., XI, p. 520). Y aurait-il eu des communications
anciennes, par des terres maintenant submergées, entre l'Inde et
Java d'un côté, même avec l'Amérique septentrionale de l'autre? Quand
il s'agit de cas pour ainsi dire uniques, et de pays fort éloignés, comme le
Népaul et les Etats-Unis, on recule devant ce genre d'hypothèses, et l'on
incline plus volontiers à l'idée d'une création double de la môme espèce à
de grandes dislances. Cette autre hypothèse a cependant bien peu de motifs
en sa faveur, car en admettant comme probable une multiplicité d'individus
pour chaque espèce au moment de sa création (p. 111^), on ne peut
se dispenser d'ajouter, d'après la considération de l'ensemble des faits, que
ces individus auraient été voisins les uns des autres et non séparés par
d'immenses étendues.
Un assez grand nombre d'espèces se trouvent communes entre l'Asie
méridionale (Péninsule, Ceylan, Java) et l'Afrique intertropicale. Beaucoup
de plantes qui ne craignent pas la sécheresse ont une habitation prolongée
du Sénégal au Bélouchistan et aux plaines du nord de l'Inde, avec ou sans
interruptions dans les pays intermédiaires. D'autres suivent plutôt le littoral
de l'Afrique occidentale, ou se trouvent partagées entre l'Inde et
Madagascar (voy. p. 998, pour des plantes aquatiques, et divers ouvrages
(Ò) pour les autres). L'analogie actuelle des climats et la direc
(a) Ânsted, The ancient world, p. 315.
{b) A. Richard et M. Bouton le remarquaient déjà en 1831 {Ann. sc. nat., XXIV,
p. 249). Voyez ci-dessus, p. 1036-
OmCINES PROBABLES OU POSSIBLES BES ESPÈCES ACTUELLES. j329
tion des courants de l'Inde à Mozambique ne suffisent pas pour expliquer une
si grande communauté d'espèces. Madagascar semble avoir plus d'espèces
communes avec la Péninsule indienne et Ceylan qu'avec les parties orientales
de la colonie du Cap, dont elle est plus rapprochée et sur laquelle porte
un courant rapide qui marche du canal de Mozambique vers le midi. Il est
naturel, en voyant ces faits, de supposer que la mer, à une époque peu
ancienne, avançait moins du côté de l'Arabie, que l'Afrique touchait à
la Péninsule indienne, ou au moins que des îles intermédiaires grandes et
nombreuses donnaient des moyens temporaires de communications (a). Les
groupes des Seychelles et des Maldives s'élèvent, si je ne me trompe, d'une
mer peu profonde, travaillée par des volcans. C'est aux géologues d'apprécier
si cette mer est ancienne.
La végétation de l'Afrique australe est tellement distincte, tellement variée,
que, selon les probabilités botaniques, ce serait un pays émergé depuis
longtemps et enrichi par des créations locales, plutôt que par des migrations.
On connaît quelques espèces, en bien petit nombre, partagées entre
le Cap et l'Abyssinie (6), et même le Mtjrsine africana est partagé entre
le Cap, l'Abyssinie et les Açores (p. i0/i8); mais on reti^oiivera peut-être
ces espèces dans des points intermédiaires, et, d'ailleurs, ce sont des cas
excessivement rares. D'un autre côté, rien n'indique un centre de végétation
au midi, cà l'est ou à l'ouest de l'Afrique australe, duquel certaines
espèces auraient pu provenir. En eifet, les espèces de Sainte-Hélène, de
Tristan d'Acunha, de la Nouvelle-Hollande, de Kerguelen et même de
Madagascar, sont essentiellement différentes de celles du Cap, et les curieuses
observations du docteur Hooker (Flora antarctica, II, p. 29),
sur la constitution géologique de Kerguelen, en particulier sur ses houilles
recouvertes de couches de formation marine, montrent que s'il a existé
dans cette direction une terre considérable, ce devait être à une époque
géologique très ancienne, sans doute antérieure à toutes les Dicotylédones
actuelles de l'Afrique australe. S'il reste à notre époque quelque chose de
la végétation de ces terrains houillers, ce serait parmi les Fougères et les
Cycadées de l'hémisphère austral ; cependant, après un nombre impossible
à apprécier de milliers ou de millions d'années, il est probable qu6
les espèces de ces familles anciennes ont été successivement éteintes et
remplacées par d'autres.
(a) On sait le genre d'hypothèse émis quelquefois par Lyell, Hooker fils, etc. Soient
deux continents A et C, avec une île intermédiaire B. A une époque ^ et 7? ont pu se
toucher et les espèces passer de Tune à l'autre; plus tard, séparation; ensuite B- et C
viennent à se toucher et les espèces de B passent en C ; enfm, B peut se séparer de
C, lequel conserve des espèces de A, sans communication ou transport visibles.
(Ò) Je remarque les deux suivantes : Olea laiirifolia, Lam. (voy. DG., Prodr., Vili
p. 287 et 674), et lïehenstreitia dentala, h, (Choisy, dans Prodr., XII, p. 3).
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