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§ II. CHANGEMENTS OUI s'Ol'ÈnENT DANS LES ESPÈCES A L'ÉPOQUE ACTUELLE,
PliNDANT LA DUlîÉE DE NOS OBSERVATIONS.
Les inodificatioiis qui s'observent dans les espèces, pendant l'époque
actuelle, doivent être envisagées au point de vue de leur nature et au
point de vue de leurs causes.
Quant à leur nature, elle est très variée, car ce sont tous les organes
et toutes les propriétés physiologiques d'une espèce, qui sont susceptibles
de dévier. Heureusement, on peut grouper toutes les modifications, d'après
la manière dont elles se conservent et se propagent. On les désigne alors
par les ternies de variations, monstruosités, variétés, races, qui ont dans
le langage scientifique moderne des sens bien établis (a). Je vais les rappeler,
en indiquant les causes, autant qu'on peut les apprécier, et en insistant
sur les races, dont Tiraportance est très grande au point de vue qui
nous occupe.
1" Variations. — On remarque sur un même individu, selon les
années, des difl'érences, quelquefois assez frappantes, ordinairement fort
légères. Ainsi, la grandeur des feuilles, le nombre des fleurs et des fruits,
dans certaines espèces la couleur des fleurs, ou au moins l'intensité de la
couleur, l'abondance des poils ou des épines, voilà des caractères qui
varient souvent sur le même pied à des époques successives. Les mêmes
différences s'observent entre des individus de la même espèce; il est impossible,
dans ce cas, de leur attribuer plus de gravité.
Les causes des variations sont ordinairement très claires. Les unes sont
externes, les autres internes. Que, par exemple, un printemps soit humide,
les feuilles seront plus grandes, plus vertes, moins velues, parce que les
poils se seront répartis sur une plus grande surface; les fleurs seront moins
nombreuses et les fruits s'en ressentiront peut-être. Dans une année chaude,
les fleurs seront plus abondantes, les fruits meilleurs, etc. Si la plante a
bien élaboré ses sucs pendant une année et que la production des fruits ne
les ait pas absorbés en automne, la végétation de l'année suivante sera plus
abondante; alors la cause est devenue interne. On sait comment varie
un arbre transplanté d'un bon dans un mauvais terrain, ou vice versa.
Il y a des plantes vivaces dans leur pays natal, qui deviennent annuelles
quand on les cultive dans un pays moins chaud (h). Cela s'explique par
une action fréquente des froids de l'automne, qui change la durée des individus,
mais non leur état intime. Des espèces annuelles chez nous, deviennent
vivaces à Bourbon (c). Le cerisier cultivé sous un climat égal et tem-
(a) De Candolle, Phys. végét., p. 688.
{b} Le ricin en est un exemple frappant.
(c) M. Laperveiiche ; treizième rapport de la ¿'oc, Iiisl. nal. de Maurice, p. 39.
CHANGEMENTS (JUl ONT PU S'OPÉUEU DANS LES ESPÈCES. 1079
péré, comme celui des hauteurs de Ceylan, ne perd plus ses feuilles (a).
Il est probable que si l'on transportait un de ces cerisiers toujours verts,
de Ceylan en Europe, il reprendrait le mode de végétation de nos cerisiers;
mais plus on tarderait à faire l'expérience, moins cela serait probable, ainsi
que nous le verrons bientôt en parlant de l'effet du temps.
2° Monslruosités. — Ce sont des formes exceptionnelles, ordinairement
plus graves que les variations, qui se présentent sur des individus,
et qui disparaissent quelquefois, comme les variations, ou se renouvellent
plusieurs années. x\insi un arbuste peut offrir une branche fasciée, des
feuilles crispées, des fleurs doubles, et ces déviations peuvent se reproduire
ou ne pas se reproduire d'année en année. Je ne m'attacherai pas
à chercher les causes, qui sont externes ou internes. Je passe rapidement,
car les variations et les monstruosités sont des états particuliers
d'individus, plutôt que des espèces. Toutefois, il est nécessaire de les
mentionner, comme servant de base, de point de départ, pour les modifications
qui afiectent plusieurs individus, pendant une durée beaucoup plus
grande, et qui alors sont véritablement des modifications de l'espèce.
3° Variétés. — Ce sont des formes ou des dispositions physiologiques
particulières, qui se propagent et se conservent longtemps, par tous les
moyens de division, c'est-à-dire par boutures, greffes, séparation des
tubercules, etc., mais qui se perdent presque toujours dans la reproduction
par les graines. L'agriculture et l'horticulture en offrent des exemples
nombreux. On pourrait m'arrêter ici et dire: ces exemples importent peu
en géographie botanique, car ils ne concernent que des plantes cultivées,
et la multiplication par division est infiniment rare dans le cours naturel
des choses ; d'ailleurs, la subdivision ne fait qu'étendre en quelque sorte
un individu, elle ne crée pas des êtres distincts au point de vue théorique.
Ces objections ne me touchent pas. Que les variétés proprement dites
soient rares dans la nature, faute de reproduction par division; que la
séparation d'une partie de végétal ne crée pas, dans un certain sens, un
nouvel individu, il n'en est pas moins nécessaire d'examiner des modifications
qui altèrent profondément certaines plantes, et qui les disposent à
modifier leurs graines elles-mêmes, comme nous le verrons tout à l'heure.
Les variétés ont différentes origines. Certaines monstruosités, qui disparaîtraient
peut-être d'une année à l'autre, ou qui demeureraient propres
à un seul individu, dans le cours naturel des choses, peuvent être conservées
et propagées par la greffe, les boutures, etc. Ainsi le marronnier à
fleur double n'est mentionné ni par Duhamel, ni par Dumont-Courset, et
il est rare encore dans plusieurs pays. Son origine est constatée par le
(a) Gardner, dans Hookei', Bol. mag., 1848, comp., p. 13,
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