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1 1 3 8 AIRE OU SURFACE DE L'HABITATION DES GENRES.
géographique considérable, mais cette loi n'est pas la seule qui régisse le
phénomène. Si l'on pouvait comparer facilement les genres très homogènes
avec ceux dont les espèces se groupent en plusieurs sections ou sous-genres
distincts, on verrait probablement que ces derniers ont une habitation plus
étendue. L'état de la science ne permet pas de donner des chiffres rigoureux
à l'appui de cette opinion. Je me borne à en appeler au senliment de
tous ceux qui ont publié des Monographies ou qui ont travaillé au Pro-
((ramus. Ils savent que dans bien des cas, les sous-genres sont.propres à
un seul continent, à une seule région, et que les espèces les plus analogues
sont souvent agglomérées dans un môme pays. Le nombre absolu des
espèces doit, selon toute probabilité, contribuer à l'extension du genre, non
pas précisément à cause du nombre, mais à cause de la diversité de nature
physiologique des éléments qui constituent le genre. En d'autres termes,
le nombre est l'indice le plus commode, mais non le plus exact, de ce qui
détermine probablement l'extension d'un genre.
La multiplicité et la diversité des éléments du genre ne sont pas encore
les seules causes qui déterminent son extension ; la nature propre des
espèces y contribue aussi notablement. La preuve en est que si l'aire des
genres augmente avec le nombre des espèces, ce n'est pas dans la même proportion.
Ainsi, les dix genres les plus nombreux dans les Crucifères ont
quarante-huit fois plus d'espèces que les genres de cette famille réduits à
une seule espèce, mais leur aire est seulement six fois plus grande. D'ailleurs,
les genres d'une fiimille qui ont, par exemple, une dizaine d'espèces
en moyenne, n'ont pas la même extension que les genres d'une autre
famille ayant aussi dix espèces.
Le tableau (p. 1136) semble montrer que l'aire moyenne des genres
dépend en partie de l'aire moyenne des espèces qui les composent. En effet,
les groupes dans lesquels l'aire moyenne des genres est la plus vaste (Papavéracées,
Crucifères), sont ceux où les espèces ont aussi l'aire moyenne la
plus étendue; et ceux dans lesquels l'aire des genres est la plus restreinte
(Mélastom., Myrtac.), sont ceux où l'aire des espèces est également la plus
petite; enfin, les Campanulacées, Anonacées et Myrsinéacées, offrent quelques
anomalies, tenant peut-être au petit nombre de leurs genres, mais considérées
en masse, on voit cependant qu'elles sont intermédiaires entre les
autres familles quant à l'étendue, soit des genres, soit des espèces. En réunissant
les sept familles en trois groupes de 60 à U 5 genres chacun, comme
j e l'ai fait au bas du tableau, la relation entre l'aire des genres et des espèces
devient régulière, et l'on a la preuve que les anomalies tenaient au petit
nombre de genres et d'espèces de quelques-unes des familles prises pour
exemples.
AIHE RELATIVE DES GENRES. 1139
D'après les chiffres des deux tableaux, il parait que la cause la plus
importante de la diffusion des genres est le nombre, ou plutôt la diversité
de leurs espèces, et que l'aire plus ou moins vaste des espèces est une circonstance
accessoire. La première catégorie de causes fait varier les aires
génériques, dans les familles choisies pour exemples, de 1 à /i, à 6, à 12,
suivant les familles, tandis que la seconde les fait varier de 2,6 à 6,1, ou si
l'on néglige les Papavéracées, à cause du petit nombre de leurs genres el
de leurs espèces, de 2,6 à A,5.
Pour savoir mieux à quoi m'en tenir, j'ai considéré dans mes tableaux
manuscrits plus détaillés, les vingt genres de Crucifères qui ont le plus
d'espèces, et qui forment une masse considérable de 693 espèces, soit plus
des 3//i de la famille. J'ai groupé d'un côté les dix genres où l'aire
moyenne des espèces est la plus vaste, et de l'autre les dix genres où elle
est la moins vaste. Les premiers ont 70 p. 100 de leurs espèces limitées
à une seule région ; les seconds en présentent 85. De part et d'autre, le
nombre des espèces par genre est assez semblable, car il est dans le premier
groupe de 36,1, et dans le second de 33,2. En calculant l'aire
moyenne des genres, elle s'est trouvée dans le premier groupe de 11, 8 régions,
et dans le second groupe de 9,/|. Cette différence, assez légère, peut
tenir au nombre plus grand d'espèces par genre dans le premier groupe.
Elle prouve que l'extension des espèces dans une famille très naturelle,
assez bien connue et habitant des pays assez explorés, aurait peu ou
point d'influence sur l'extension des genres, au moins de ceux qui contiennent
beaucoup d'espèces. Lorsque l'on descend à des genres peu nombreux
en espèces, l'influence de l'aire spécifique se fait sentir. Les espèces
ne peuvent étendre la surface de leur genre que si elles se trouvent sur le
périmètre, et plus le genre est petit, plus ce cas est fréquent. En poussant
jusqu'aux genres composés d'une seule espèce, l'aire générique se confond
avec l'aire spécifique; ainsi, elle est rigoureusement selon son étendue. Dans
la même famille des Crucifères, où l'influence des aires spécifiques ne se fait
pas sentir pour les genres de 33 à 36 espèces en moyenne, il n'en est pas
de même pour les genres de 3 à 6 espèces par exemple. Ils sont au nombre
de 21 dans mes tableaux. Huit d'entre eux ont des espèces à aire vaste
(33 à 60 p. 100 seulement d'espèces bornées à une seule région); l'aire
moyenne de ces genres est de h régions. Sept genres ont des espèces plus
locales (75 à 100 p. 000 dans une seule région); l'aire moyenne de ces
genres est de 3,1 régions seulement. De part et d'autre, le nombre moyen
d'espèces est semblable, 3,9, ce qui rend la comparaison plus probante.
Six genres sont intermédiaires quant à l'extension des espèces (67 p. 100
bornées à une seule région) ; leur aire est plus faible, 2,8 ; mais ils ont
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