87Ü ÜUIGINE ÜÉOUHAPlligUE DES ESPÈCES CULTIVÉES.
en une seule espèce. Dans celte hypothèse, l'Orange douce serait une
modification du Bigaradier née en Chine ou en Cochinchine, à une époque
très reculée, sans doute, mais historique et non antérieure à l'homme (a).
L'hypothèse me semble cependant un peu moins probable que celle c[ui
fait dériver la Pêche lisse de la Pèche velue (p. 886).
Citrus Japónica, Tiiunb. — Cette espèce, à fruit gTos comme une
cerise el très doux, parait distincte. Elle croît au Japon, où on la cultive,
de même qu'en Chine (Thunb., F/., p. 293 ; Fortune, Journ. hortic.
Soc., m, p. 239).
Citriis javaíiSca, Biunie (Ry'íír,, p. 1^0). •— Rumphius l'a figuré
(II, pl. 29). Il paraît une bonne espèce, à feuilles larges, fleurs solitaires,
fruit petit, arrondi, et peu acide. Il est cultivé à Java; mais on le trouve
aussi sauvage, près des habitations, dit Rumphius; sur le mont Salak, dit
M. Blume.
Indépendamment de ces espèces bien tranchées, il existe dans les cultures,
en Europe et en Asie, une multitude de formes plus ou moins intermédiaires,
assez souvent monstrueuses ou stériles, qui ne paraissent pas
avoir été trouvées à l'état sauvage et sur lesquelles l'opinion des monographes
n'est pas fixée. Les croisements hybrides ont probablement joué un
grand rôle dans leur histoire. Je rappellerai seulement les principales
d'entre elles et les plus caractérisées.
Citrus deeumana, wî i i d (Pa?npeZ-moei, Rumph., II, tab. f. 2 ;
Shaddock des Anglais).— C'est une des catégories les plus abondantes
dans les cultures de l'archipel indien. Les formes en sont peu fixées,
d'après ce que dit Rumphius ; mais la variété à très gros fruits dont il parle
(p. 98) paraît se maintenir de graines, et plusieurs auteurs en font le type
d'une espèce (Blum., Bijdr., p. 1/iO; Forst., PL esc., p. 35). D'après
Rumphius, le pays d'origine serait la Chine méridionale. Loureiro {FL
Coch., p. 572) , dit : « Habitat frequenter in Cochinchina et China-, »
mais cela ne signifie pas qu'elle soit spontanée, car ailleurs (voy. C. Aurantium)
il a soin de dire si une plante cultivée est aussi spontanée. On la
cultive certainement beaucoup en Chine, dans le midi et sur le littoral. On
envoie les fruits de Là à Pékin (Bunge, Etium., p. 9). Au Bengale, on l'a
reçue de Batavia (Roxb., Fl. Ind., édit., v. III, p. 393). Elle a été
(a) M. Adolphe Pictet vient de me fournir un indice de la date peu reculée de l'Orange
douce. Il a cherché dans les ouvrages sanscrits les noms significatifs donnés à l'Orange
ou à l'Oranger. Ils sont au nombre de 17, qui tous font allusion à la couleur, à l'odeur,
la qualité acide {danlacatha, nuisible aux dents), le lieu de croissance, etc., jamais à
une saveur douce ou agréable. Cette multitude de noms, indépendamment du nom ordinaire
Nagaranga, montre un fruit ancien dans le pays, mais différent pour la saveur,
de 1 Orange douce,
OIUGINE DES ESPÈCES LE PLUS GÉNÉRALEMENT CULTIVÉES. 871
transportée d'Asie en Amérique par un capitaine Shaddock, d'où vient le
nom anglais (Pluk., Almag., p. 239; Sloane, Jam., I, p. /il). Il paraît
que les premiers pieds vinrent de graines laissées aux Barbades par ledit
Shaddock (Sloane, Ì. c.). A la Jamaïque, on continue d'en semer
(Macfad., FÌ. Jam., p. 131). Si Gallesio avait eu connaissance de
ce fait, il aurait sans doute admis l'espèce, car son principe était de
regarder toute forme constamment héréditaire comme spécifique. Il n'avait
pas vu le vrai Citrus decumana d'Asie, et d'après les descriptions, il le
rapportait au Citrus Auran tium à fruit doux (p. 161). Il s'efforce de le
distinguer de la Pomme d'Adam, qu'il regarde comme une hybride de
l'Oranger et du Cédratier (p. l / i l ) . Je suis disposé à admettre le Citrus
decumana comme espèce, non pas précisément à cause de l'hérédité qui
est propre aux races et aux espèces, ni à cause de la grosseur du fruit,
caractère susceptible de transitions, mais peut-être à cause des feuilles
pubescentes en dessous (Rumph., Blume, Macfad., l. c.) et légèrement
ciliées sur les bords (Blume), ce qui, dans un genre à feuilles essentiellement
glabres et lisses, me paraît avoir quelque valeur. Le Citrus decumana
réussit dans les lieux très humides, autre différence d'avec les Orangers
(Macfad., l. c.). Si on admet l'espèce, il faut reconnaître en même
temps qu'elle s'est modifiée dans les cultures, et qu'il s'est formé souvent
des hybrides avec les autres espèces cultivées.
La Pomme d'Adam, comiue déjà des Arabes à l'époque des croisades,
présente les indices d'une plante hybride (Gall., p^ lAl). Le Cîtrus
„otoiiis, i.«wr., ne diffère du Citrus Aurantium à pulpe douce que par le
fruit légèrement déprimé, caractère bien insuffisant pour une espèce. Le
Cîtr«« Omet ta, Risso {Ann. Mus., XX, p. 195), est évidemment composé
de plusieurs formes distinctes, que Gallesio a séparées avec méthode
et a rapportées à diverses espèces comme variétés ou hybrides. En
particulier, la Bergamotte est, selon lui (p. 118), une hybride du Limonier
et de l'Oranger, je suppose de l'Oranger amer. Il n'en donne aucune
preuve directe ; mais la circonstance qu'on possède plusieurs de ces intermédiaires
en Asie et en Europe, et le fait qu'on ne les trouve pas sauvages,
rendent vraisemblable l'opinion de Gallesio sur les quatre types primitifs
de nos fruits cultivés du genre Citrus.
Je termine en remarquant la facilité avec laquelle les Aurantiacées se
sont naturalisées de semis en Amérique, dès les premiers temps de la conquête.
J. Acosta {Hist. nat. Ind., trad, franc., 1598, p. 187) en était
déjà surpris, et une foule d'autres voyageurs également.
Mangostan. — Le Garcinia Mangostana, 1.., croît dans leS forêtS de
q u e l q u e s - u n e s des îles orientales de l'archipel indien, par exemple, à