978 ORIGINE GÉOGRAPHIQUE DES ESPÈCES CULTIVÉES.
la Guyane par les missionnaires (Aubl.,5M;)pL, p. 102). Sloane (/am.,IT,
p. 9) le dit d'origine étrangère aux Antilles. Hernandez {Thes., p. 71)
l'avait \'u introduire des Indes orientales dans les Indes occidentales.
Cependant, les Mexicains l'appelaient, selon lui, Coyolli. Si ce nom n'est
pas une corruption de Coqueiro, Coco, il est peut-être l'origine. Un vieux
auteur. Martyr (a), cité par Sloane, parle de l'introduction aux Antilles,
mais admet que le Cocotier existait déjà sur la côte du Pérou, peut-être amené
en ce point par les courants. Oviédo (trad, de Ramusio, III, p. 53), qui
écrivait en 1526, dès les premiers temps de la conquête du Mexique, dit
que le Cocotier était abondant sur la côte de la mer du Sud, dans la province
du cacique Chiman. Il décrit clairement l'espèce. Joseph Acosta
(Hist. nat. Ind., édit. Iranç., 1598, p. 177) en avait vu à Porto-Rico
et autres endroits des Indes; or, il prenait le mot Indes pour l'Amérique
et l'Asie, indifféremment, et il traite de fruits américains dans le même
chapitre. Du reste, aucun autre auteur des premiers temps de la colonisation
en Amérique, ne vient à l'appui de ces indications vagues sur la présence
du Cocotier dans le nouveau monde avant les Européens. Laet
{Hist. nat,^ 1650), Christoplie Acosta [De las drogas^ 1578, p. 98),
Gardas de Orto (dans Glus., Exot.) et autres n'en parlent que comme
d'un arbre d'Asie.
On ne peut douter d'après cela que le Cocotier ne fiit étranger auBrésil,
à la Guyane et aux Antilles ; d'une manière générale, au côté oriental de
l'Amérique ; mais il semblerait avoir existé avant l'arrivée des Européens
sur la côte occidentale du Me?^ique.
^ M. de Martius {Palm., I, p. 188) est arrivé à la même conclusion par
d'autres documents. Il cite le voyage de Dampier (Amsterdam, 1705,
p. 186), d'après lequel le Cocos nucífera était abondant sur les iles de
l'isthme de Panama, et non sur le continent voisin. Il présume que ce
point serait le lieu d'origine, et que les courants auraient porté l'espèce de
là sur l'île de Los Cocos, où Wafer (Foy. de Dampier, p. 253) et Vancouver
(édit. franc., V, p. 325) l'avaient vu, couvrant le sol, avant l'établissement
de toute population.il est certain qu'il existe un courant d'eau
à une température élevée, qui porte de Panama vers cette île et au delà,
tandis que les îles Galapagos, du moins ]es plus méridionales, sont baignées
par les eaux froides du grand courant qui marche du Chili au Pérou
(Hook. î., Trans. Linn. Soc., XX, p. 25/i), De l'île des Cocos, le premier
courant, celui de l'est à l'ouest, aurait porté les fruits aux petites îles Gallego,
Duncan, et de là aux îles Sandwich, vers le nord, et aux Marquises,
(a) P. Martyr, de Angleria, a écrit dans la première moitié du xvi^ siècle, La traduction
an-iaise est de d'après Dryander, BibU Banks, Ì, p. 148.
RESULTATS DliS UECUKHGHES SÜK LES ESPÈCES CULTIVÉES. 979
vers le midi del'équateur. Une fois dans ces archipels, d'autres courants et
l'espèce humaine l'auraient transporté vers l'Asie. M. de Martius observe
que les migrations peuvent remonter à une époque très ancienne. Tout cela
est conforme aux faits connus, savoir : la persistance pour la noix de coco
de la faculté de germer, son transport fréquent par mer, sa station habituelle
sur les côtes, son existence fort ancienne àTîle dite des Cocos à une
centaine de lieues du littoral américain, dans le courant de Test à l'ouest;
et enfin, à ces indications du Cocotier sur la côte occidentale de l'Amérique
avant les Européens, d'après quelques auteurs.
M. de Martius présume l'espèce originaire de la côte occidentale du continent
américain et des petites îles adjacentes, vers Panama. J'aimerais
tout autant dire qu'elle existait avant l'homme, et peut-être depuis un
temps très reculé, à la fois sur cette côte et dans l'île des Cocos, qui en
est, pour ainsi dire, dépendante, car elle en est éloignée comme les îles
Shetland le sont de la Norwége. Le transport de cette île aux îles de la
Polynésie est plus difficile, mais il est possible, d'après la direction des
courants ; tandis que si l'on suppose le Cocotier originaire des îles polynésiennes
ou asiatiques, il faut supposer un transport par l'homme dans la
direction de l'Amérique, ce qui est peu probable avant l'arrivée des Européens.
L'hypothèse de l'origine américaine a aussi ce grand avantage de
faire concorder la patrie du Cocos nucifera avec celle de toutes les espèces
du genre. Elle est, en somme, vraisemblable.
ARTICLE III.
RÉSULTATS DES RECHERCHES SUR LES,ESPÈCES CULTIVÉES.
§ I. SÛRETÉ DES MÉTHODES EMPLOYÉES.
Un premier résultat, bien satisfaisant, est de voir que les méthodes
diverses par lesquelles on arrive à constater l'origine des espèces cultivées,
conduisent presque toujours, dans chaque cas particulier, à des conclusions
semblables.
Ces méthodes sont ou botaniques, ou historiques et linguistiques. Elles
sont toutes utiles, mais leur valeur diffère selon les cas.
Parmi les méthodes botaniques, la plus directe est de chercher dans les
herbiers et les auteurs si la plante que l'on étudie a été trouvée sauvage
dans tel ou tel pays. Quand elle l'a été, il faut contrôler presque toujours
l'observation par d'autres moyens, car il se peut qu'une plante cultivée
depuis longtemps se soit naturalisée en s'échappant hors des cultures, et