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VEGETAUX DE DIVERS DAYS AU POINT DE VUE DES ORIGINES.
L'Afrique et l'Amérique seml)leul u'avoir jamais eu de communications,
si ce n'est dans le nord, par l'Europe et les régions arctiques. Certaines
espèces, principalement aquatiques (p. 998) et de nature à supporter
des climats, très différents, ont pu se répandre à une époque reculée
par ce grand circuit, mais les espèces équatoriales ou australes ne le pouvaient
pas. Celles communes aux deux continents sont d'une rareté extrême,
pourvu qu'on ait soin de ne pas couipter les espèces transportées
par riiommeet les courants. Je me suis donné beaucoup de peine pour en
dresser le tableau complet dans le chapitre X, p. 1025. Leur nombre
n'atteint pas /lO, sur environ 60,000 Plianérogames de ces deux grandes
parties du monde. Ces espèces disjointes, sans probabilité de transport
actuel, sont presque toutes des plantes des lieux humides ou des marais.
La proportion des Monocotylédones y est considérable. Les familles d'une
date probablement récente y sont représentées par une seule espèce,
une Composée, sans aigrette, mais des lieux humides, VE])altes hrasiliensis,
DC. On peut donc soupçonner une communication ancienne, peu
étendue ou peu durable, a une époque d'une Immidité générale; cependant,
depuis l'existence de la grande majorité des espèces actuelles, toute
communication aurait cessé, et les échanges n'auraient pu avoir lieu que
par le moyen très insignifiant des courants (p. 796), jusqu'à ce que
l'homme soit venu modifier les conditions de transport.
Un assez grand nombre d'espèces se prolongent du Brésil oriental à la
Guyane et aux îles Antilles (p. /|17). L'analogie actuelle des climats ne
sulfit guère pour expliquer ce fait, a cause des bras de mer interposés, et
de l'aire généralement petite des espèces de l'Amérique équatoriale. On
peut entrevoir dans ce fait, et dans la grande quantité d'espèces communes
aux montagnes des diverses îles Antilles, un indice de jonctions antérieures
ou de communications qui n'existent plus.
Quelques espèces partagées entre la Californie et le Chili (p. 10/|7) ne
peuvent pas s'être répandues à notre époque. Comme elles habitent les
parties basses de ces deux régions tempérées, on pourrait leur supposer
une extension jadis plus grande sur la chaîne des Cordillères, et une position
d'autant plus élevée qu'on se rapproche de l'équateur. Il faudrait pour
cela ajouter l'hypothèse d'une élévation plus grande, à une époque, des montagnes
de l'isthme de Panama. Le docteur Hooker a déjà émis cette supposition
pour expliquer les espèces de Patagonie, et en général de l'Amérique
australe qui se trouvent semblables à celles de la région arctique (a).
Le même naturaliste, qui a parcouru les régions australes et qui semble
(a) Flora of Neto-Zealand, introd., p. xxv.
ORIGINES PROBABLES OU POSSIBLES DES ESPÈCES ACTUELLES. 1331
avoir mûrement réfléchi sur les grandes questions de l'histoire du règne
végétal, a été conduit à supposer l'existence d'un ancien continent ou d'anciennes
îles considérables dans la direction du Chili à la Nouvelle-Hollande
et même du Chili à Tristan d'Acunha (a). Il ne peut s'expliquer autrement
l'existence de 77 espèces communes à Van-Diémen, la Nouvelle-
Zélande et l'Amérique australe, presque toutes particulières à cet
hémisphère et placées aujourd'hui sur les hauteurs de ces îles ou promontoires.
Il nie, avec raison, tout moyen actuel de transport. Il remarque
des analogies non moins grandes dans les genres et les familles. Cet ancien
continent aurait eu un climat moins égal et plus froid que les îles d'aujourd'hui,
car il était moins dominé par la mer ; par conséquent, il pouvait
avoir des glaciers, ce dont on a vu des traces à la Nouvelle-Zélande,
et ses espèces n'auraient guère pu continuer à vivre qu'en s'élevant sur
les montagnes. M. Ch. Darwin, dans son Journal of a naturalist, et
ailleurs, a prouvé que le Chili et la Patagonie se sont élevés de hOO à
1300 pieds depuis l'existence des coquilles de notre époque, et en général
on ne peut douter qu'il n'y ait eu des élévations et des abaissements du
sol dans plusieurs parties de l'hémisphère austral.
Les îles de la mer Pacifique présentent des faits compliqués, dont
l'étude serait assez avancée au point de vue botanique, si l'on avait eu
l'habitude de publier des Flores par îles ou groupes d'îles, en indiquant
les espèces propres à chaque île et communes avec d'autres. En général,
on remarque deux catégories de plantes dans chaque île ou groupe d'îles.
D'abord des espèces du littoral, aisément transportées par les courants et
par l'homme, qui occupent les îles les plus petites, les plus basses, ou les
parties inférieures des grandes îles. Ce sont des Légumineuses, Tiliacées,
Malvacées, Convolvulacées, Amarantacées, Nyctaginées, etc., évidemment
transportées par les causes actuelles. A mesure qu'une île madréporique
s'élève, ces espèces communes et le cocotier s'en emparent. En outre, les
îles un peu élevées, ayant d'ordinaire quelque volcan actif ou éteint qui en
forme le noyau, présentent des espèces propres, qui font contraste avec
les premières. De très petites îles offrent quelquefois des espèces très caractéristiques,
inconnues ailleurs : ainsi l'île d'Elisabeth a une Composée
(Cichoracée) arborescente, le Fitchia, de Hooker fils (Hook., Journ., 18/i5,
p. 6iiO), genre particulier. A quelle date remontent ces espèces? Leur
diversité d'un archipel à l'autre, même souvent d'une île à l'autre du même
archipel, ne permet guère de supposer un ancien continent très étendu,
qui se serait affaissé dans la mer. Du moins, si cela est arrivé, connue
(a) Ibid., p. XX.
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