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1 2 9 8 DIVISION DES SURTACES TERRESTRES EN RÉGIONS NATURELLES.
Les chiffres dont nous venons de parler précisent le sens qu'on doit
attacher a la pauvreté et à la richesse de la végétation de divers pays. Ce
ne sont pas les formes contrastantes qui manquent aux végétations pauvres,
car il y a partout des représentants d'un assez grand nondjre de familles;
ce sont plutôt les individus qui sont trop rares, ou d'une apparence chétive,
et c'est aussi la diversité de modifications dans des formes analogues qui
fait défaut; enfin, la même végétation se continuant d'un district à l'autre
et quelquefois au travers de vastes pays, il en résulte l'impression d'une
fatigante uniformité. Les végétations riches présentent des conditions opposées.
Tantôt elles brillent par l'abondance et la beauté des individus,
tantôt par la multiplicité des formes spécifiques, tantôt par la diversité
d'un point à l'autre, et quelquefois par plusieurs de ces causes en même
temps. L'Afrique australe est riche par les formes et par la diversité des
végétations d'un endroit à l'autre, mais elle est pauvre quant à Vapparence
et à la fréquence des individus; l'Inde est riche par l'abondance et la grandeur
des individus, mais pauvre comparativement, sous le rapport du
nombre des formes et de la diversité d'une province à l'autre. Le Brésil
est riche de toute manière.
Je rappellerai, en terminant, que la réduction des espèces dans les végétations
pauvres se fait surtout sentir par la diminution des espèces dans
les familles secondaires de la Flore dont il s'agit, et l'augmentation par un
accroissement d'espèces dans les familles de cette catégorie. En d'autres
termes, il reste dans les végétations pauvres deux ou trois familles qui
constituent proportionnellement une masse plus importante d'espèces à
l'égard de l'ensemble des Phanérogames; et dans les pays riches, le nombre
des familles importantes augmente, mais chacune n'a pas une proportion
aussi grande d'espèces. J'en ai fourni la preuve page 1235.
C H A P I T R E XXV.
DE LA DlVISiON DES SURFACES TERRESTRES EN RÉGIONS NATURELLES.
L'opinion des botanistes a varié singulièrement au sujet de la distinction
de régions naturelles, tantôt physiques, tantôt botaniques, ou enlin
physiques et botaniques en même temps.
Willdenow (a) avait prétendu rattacher les différentes flores aux chaînes
(a) Dans Usteri, Neiie Annal,^ 1797 ; dans Magaz. der Natiirforsch. Freunde. Berlin,
1811 ; et aineurs. — Schouw, Grundzuge, p. 502, expose et combat ses théories.
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DIVISION DES SURFACES TERRESTRES EN RÉGIONS NATmiÉLLES. 1299
de montagnes dites primitives. Ainsi^ les Alpes auraient été un centre de
végétation, le Caucase un autrej etc. Malheureusement les détails de
pareilles hypothèses ne supportent pas la discussion, et d'ailleurs les géologues
ont démontré que les montagnes granitiques, appelées autrefois primitives,
ne sont point les plus anciennes.
Les opinions de Willdenow n'offrent aujourd'hui qu'un seul mérite, celui
de prouver le changement qui s'était fait dans la science, depuis l'époque
où Linné (a) avait accrédité la théorie d'un centre unique pour toutes les
espèces du règne végétal. La voix de Gmelin en faveur des origines
diverses, avait été longtemps étouftëe; mais peu à peu l'esprit d'observation
généralement répandu et l'ensemble des découvertes, avaient décidé
contre une liypothèse, émise par l'illustre Suédois, il faut en convenir,
dans un moment d'irréflexion.
Les auteurs modernes ont évité de fonder la distinction de régions botaniques
sur des bases géologiques. C'est une nécessité de l'état des connaissances,
car la liaison entre les êtres organisés actuels et ceux des
époques antérieures est un problème encore bien obscur, et en outre,
l'âge des terrains récents, qu'il faudrait surtout connaître pour la question,
est précisément ce que l'on connaît le moins. Un jour, il faut l'espérer,
on connaîtra exactement l'époque et l'étendue de chaque diluvium, de
chaque surface occupée jadis par des glaciers, de chaque submersion ou
émersion des continents; alors on pourra classer les flores d'après leurs
origines, et l'on trouvera sans doute à chacune des caractères particuliers.
La géologie est encore bien loin d'offrir des bases de cette nature, d'autant
plus que Tage des terrains est ordinairement constaté par les corps organisés
qui s'y trouvent, tandis que nous, naturalistes, nous demandons, au
contraire, que l'âge des êtres organisés puisse un jour être prouvé par des
moyens purement géologiques.
M. de Humboldt (c) s'est appuyé en géographie botanique sur la géographie
physique, dont il a été, pour ainsi dire, le créateur. Il caractérise
les principales régions du glolje d'abord par leur climat, résultant de la
distance de l'équateur, de l'élévation au-dessus de la mer et des influences
locales des mers ou des continents ; puis il esquisse à grands traits, en
liomme d'imagination et d'observation à la fois, les caractères les plus
saillants des végétaux sous les difl'érentes conditions qui les entourent.
Évidemment, la géographie physique fournit des bases de la plus haute
importance à toute division naturelle du globe. La séparation des conti-
(a) De telluris iacremento, 17-43, dans Amoen. acad., vol. TI.
(b) Flora Sibirica^ proef., p. ex, 1757.
(c) Prolegomena^ I81o, p. xxxiv.
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