822 ORILUÌN'E GËOGUAI'IIIUUE DKS ESPÈCES CULTIVEES.
d'un mot mexicain; le mot àé Batatas (d'où par transposition erronée, on
a fait Potatoe, pomme de terre) est donné pour américain. Sloane
(Hist. Jam., p. 150), Hughes {Barb., p. 228), en parlent comme
d'une plante très cultivée, ayant plusieurs variétés aux Antilles. Ils ne
paraissent pas soupçonner une origine étrangère. Clusius, qui l'un des
premiers a parlé delà Batate, dit en avoir mangé dans le midi de l'Espagne,
où l'on prétendait l'avoir repue du nouveau monde (Glus., Hist., II, p. 77).
Il indique les noms de Batatas, Camotes, Ainotes, Ajes (a), qui étaient
étrangers aux langues de l'ancien monde. Son livre date de 1601.
M. de Humboldt (Nouv.-Esp., 1. c.) dit que d'après Gomara, Christophe
Colomb, lorsqu'il parut pour la première fois devant la reine Isabelle, lui
offrit divers produits du nouveau monde, entre autres, des Bâtâtes. Aussi,
ajoute-t-il, la culture de cette plante était-elle déjà commune en Espagne
dès le milieu du xvr siècle. Oviedo (trad, de Ramusio, vol. HI, part, m),
qui écrivait en 1526, avait vu la batate très cultivée par les indigènes de
Saint-Domingue, et l'avait introduite lui-même à Avila, en Espagne. Rumphius
(V, p. 368) dit positivement que, selon l'opinion commune, les Battatas
ont été apportées par les Espagnols d'Amérique à Manille et aux
Moluques, d'où les Tortugais les ont répandues dans l'archipel indien. Il
cite des noms vulgaires, qui ne sont pas malais, et qui indiquent une
introduction par les Castillans. Enfin, il est certain que la Batate était
inconnue aux Grecs, aux Romains et aux Arabes; qu'elle n'était pas cultivée
en Egypte, et cela même il y a un demi-siècle (Forsk., pl. liv;
Dehle, III.), ce qui ne s'expliquerait guère si Ton supposait une origine de
l'ancien monde.
D'un autre côté, il y a des arguments pour une origine asiatique. Les
Chinois et les Cochinchinois cultivaient la Batate, dans le siècle dernier
(Lour.,FZ. Coch., l, p. 131), et peut-être depuis longtemps, car VEncyclopedic
d'agriculture en parle et mentionne diverses variétés (d'Hervey
Saint-Denys, Rech. sur Vagric. des Chin., 1850, p. 109). Le nom
chinois, d'après Loureiro, est Hoân-xy. La culture de la Batate était
répandue dans l'Inde dans le siècle dernier (Roxburgh, édit. Wall., Il,
p. 69). On lui attribue plusieurs noms vulgaires, et même selon Piddington
(Index, p. 23), un nom sanscrit, Buktaloo, prononcez Roktalou,
qui n'a d'analogie avec aucun nom à moi connu et qui n'est pas dans le
Dictionnaire sanscrit de Wilson. D'après une note que m'a donnée
M. Adolphe Pictet, Ruktaloo semble un nom bengali composé du sanscrit
Alu (Rutka plus âlu), nom de l'Arum campanulatum, et qui, dans les dia-
(«) Ajes éluii un nom tie l'igname (Humb., Ngi^.-Usp.. éçjit., vol. II, p. 467,468].
OlUGINE DES ESPÈCES LE PLUS GÉNÉUALEMENT CULTIVÉES. 823
lectes modernes, désigne l'igname et la pomme de terre. Cependant, Wallich
(Fl. Ind.,\. c.) indique plusieurs autres noms que Piddington omet.
Roxburgh (édit. 1832, vol. I, p. /i83) ne cite aucun nom sanscrit. Rheede
(Mal.,yil, p. 95) dit ([ue la plante était cultivée au Malabar. Il cite des
noms vulgaires indiens.
Les motifs sont beaucoup plus forts, ce me semble, en faveur de l'origine
américaine. Si la Batate avait été connue dans l'Inde à l'époque de la
langue sanscrite, elle se serait répandue au loin dans l'ancien monde, car
sa propagation est aisée et son utilité évidente. Il paraît, au contraire, que
les îles de la Sonde, l'Egypte, etc., sont restées étrangères pendant longtemps
à celte culture.
Peut-être unexamenattentif ramènera-t-il à l'opinion de G. -F. -W. Meyer,
qui distinguait (Primitioe Fl. Esseq., p. 103) la plante asiatique des
espèces américaines. Cependant, on n'a pas suivi généralement cet auteur,
et je soupçonne que, s'il y a une espèce asiatique différente, ce n'est pas,
comme le croit Meyer, la Batate décrite par Rumpliius, que celui-ci dit
apportée d'Amérique, mais la plante indienne de Roxburgh.
On cultive en Afrique des Bâtâtes; mais, ou leur culture est rare, ou les
espèces sont différentes. M. Robert Brown (J?oi. Congo, p. 55) dit que le
voyageur Lockhardt n'avait pas vu la Batate, dont les missionnaires portugais
avaient mentionné la culture. Thonning {Pl. Guin.) ne l'indique pas.
Vogel a rapporté une espèce cultivée sur la côte occidentale, qui est certainement,
d'après les auteurs du Flora Nigritiana,\Q. Batatas paniculatus,
Choisy. Ce serait donc une plante cultivée pour ornement, ou
comme espèce officinale, car la racine en est purgative (Wall, dans Roxb.,
Fl. Ind., Il, p. 63).
On pourrait croire que, dans certains pays de l'ancien ou du nouveau
monde, l'Ipomoea tuberosa, L., aurait été confondu avec la Batate ; mais
Sloane (Jam., I, p. 152) nous avertit que ses énormes racines ne sont pas
bonnes à manger.
M. deHumboldt(A^oMU.-i'5j3.,l. c.)menlionne\e Convolvulus platanifolius,
Yahl, comme cultivé en Amérique, sous le nom de Batate, avec la
véritable Batate. M. Choisy (Prodr., IX, p. 380) rapporte cette espèce
à VIpomoea fastigiata, Sweet, dont le type est une plante de l'Inde,
le Convolvulus fastigiatus, Roxb., qui ne paraît pas avoir de tubercules.
Je reviendrai sur cette espèce douteuse (voy. la tab. alphab. finale).
Je ne vois, d'ailleurs, aucune preuve que la plante décrite par Vahl ait
une grosse racine et soit cultivée.
Une Convolvulacée à racine comestible, qui peut bien être confondue
avec la Batate; mais dont les caractères botaniques sont pourtant distincts,
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