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1 2 9 2 VARIÉTÉ DES FORMES VÉGÉTALES DANS LE MONDE ENTIER.
cette cause seule, leur proportion ne devrait pas tomber au-dessous de
l'île Melville et du Labrador. Tristan d'Acunha, Kerguelen, les îles de
la Société, ont des proportions bien faibles, comparées à celles de Zante
et de Madère , dont l'étendue est analogue. Dans un degré inférieur
d'étendue, les îles de l'Ascension, Keeling, Norfolk ont des proportions
faibles ; tandis que Juan-Fernandez, Auckland et Campbell offrent
des proportions ordinaires. Je ne dis rien des îles Galapagos et Sandwich,
parce que la moitié des espèces en est encore inconnue; ni de Sainte-
Hélène, à cause de l'imperfection des Flores publiées, et de la quantité
d'espèces d'origine étrangère qui s'y trouvent mélangées. Les chiffres certains,
concernant les îles ou groupes d'îles contenus dans notre tableau,
ne sont pas, j'en conviens, très probants; ils semblent toutefois indiquer
un affaiblissement plus grand du nombre des espèces que du nombre
des genres, dans la plupart des îles. Assurément, aucune île ou réunion
d'îles ne présente une proportion d'espèces par genre plus grande que des
étendues semblables prises sur des continents, sous des conditions analogues
de climat. D'après cela, une moyenne des îles, si le calcul pouvait
en être fait régulièrement, donnerait une proportion d'espèces par genre
inférieure.
Il y a au reste deux causes, bien certaines, qui tendent à diminuer le
nombre des espèces, relativement à celui des genres dans les îles éloignées,
et surtout d'une faible étendue. L'une, que les volcans, l'incendie des
forets, l'introduction des cultures, des chèvres, et, en général, les causes de
destruction peuvent bien mieux anéantir une espèce qu'un genre. L'autre
cause est dans l'introduction fortuite d'espèces nouvelles, qui, venant de
loin dans le cas d'îles très distantes des autres terres, se trouvent généralement
appartenir chacune à un genre nouveau. Le docteur Hooker (a)
remarque avec raison combien la proportion des genres, relativement aux
espèces, est considérable dans les îles madréporiques (Keeling, Maiden),
dont la végétation tout entière est venue de l'extérieur; tandis que les
îles Galapagos, Juan Fernandez, Sainte-Hélène ont un fond propre, dans
lequel certains genres ont plusieurs espèces. J'ai aussi fait remarquer
(p. 7/i5, 759, ì^ìhlì) que le transport accidentel des espèces d'un continent
à l'autre introduit souvent des genres nouveaux pour le pays.
Dans les petites îles, où les nombres sont naturellement faibles, cette addition,
plus ou moins difficile à reconnaître, doit jouer un grand rôle.
Malgré ces deux causes, dont Tune diminue les espèces, et l'autre augmente
les genres, c'est-à-dire qui concourent à affaiblir la proportion des
(a) Veget. of Galapagos {Trans. Linn. Soc., XX, p, 246)<
NOMBRE DES FAMILLES, DES GENRES ET DES ESPÈCES. 1293
espèces par genre dans les petites îles éloignées, il est difficile de ne pas
sentir dans la distribution des genres quelque chose de plus élevé, quelque
chose d'antérieur à l'état actuel du monde. Si l'on pouvait tracer sur un
globe terrestre l'habitation de chaque genre, on verrait toutes les surfaces
insulaires et continentales, comme enlacées dans un réseau, dont les
mailles seraient croisées et inégales, plus serrées sur les continents, près
de l'équateur et dans quelques régions tempérées, que dans les îles, ou
dans les pays stériles, ou encore vers les pôles. Les espèces, par leur nature
plus locales que les genres, se trouveraient accumulées en suivant à peu
près les mêmes lois, mais un peu autrement. En particulier, dans les îles,
le réseau des genres serait fourni moins abondamment d'espèces. Dans cet
ensemble, on peut chercher la part des influences locales et du mouvement
actuel des espèces, mais les faits n'étaient-ils pas analogues il y a
500 ans, il y a 1000 ans, 10,000 ans? Cela semble probable. Alors nous
remontons ici, comme dans toute la géographie botanique, à des causes
antérieures, plus ou moins obscures.
Ce qui nous montre encore l'existence de causes antérieures dans la
distribution actuelle des genres, c'est que pour les îles éloignées, les genres
ayant une seule espèce sont assez fréquemment des genres monotypes,
c'est-à-dire composés réellement et absolument de cette espèce unique.
J'en ai rencontré plusieurs exemples dans les familles dont je me suis
occupé spécialement, comme les Campanulacées et les Myrsinéacées. On en
voit aussi dans les Composées, les Apocynées et autres familles.
Quand les espèces insulaires ne forment pas de genres, elles forment
souvent des sections constituées d'une seule espèce. Ainsi, on ne peut
pas dire que les formes génériques à espèce unique, si communes dans les
îles, s'expliquent toujours par des transports probables de pays éloignés et
par des modifications qui auraient changé les espèces analogues du meme
genre. Il y a une foule de genres monotypes dans les îles, et ceux-là ne
peuvent provenir que d'une création dans l'île sur laquelle ils se trouvent,
ou de la végétation d'une époque géologique antérieure, disparue des
autres surfaces terrestres.
ARTICLE III.
NOMBRE DES FAMILLES ET COMPARAISON AVEC LE NOMBRE DES GENRES
ET CELUI DES ESPÈCES.
Dans les Flores qui approchent d'être complètes, les familles peuvent
être regardées comme toutes connues. Cependant, il n'est pas aussi aisé