
Dans tous les cas , les bâtimens arrivant à Mar-
fiille , doivent, comme le porte l'arrêt de 1705,
une déclaration détaillée de leurs chargemens au
bureau du poids & caffe, en y remettant leur ma*
nifefte , & payant cinq fols pour l'enregiftrement
qui en eft fait. C e droit a été afîiijetti aux dix fols
pour livre , par l'édit d'août 1781.
Marfiille ayant été aflimilée aux autres ports du
Royaume, par les lettres - patentes du mois de
février 1 7 19 , qui l'ont admife à faire le commerce
des Ifles & Colonies Françqifes , tout le
régime fifcal dont il a été parlé aux mots Isles
de l'A mérique, s’obferve à Marfiille, ^infl
que dans les autres places maritimes.
II en eft de même pour les marçhandifes de
retour : à leur arrivée à Marfiille , elles acquittent
feulement le droit du domaine <ïOccident ;
ceux de confommation impofés à l'entrée du
royaume, ne font dûs que lorfque les denrées
fortent du territoire de Marfiille, pour paflfer en
Provence-
La traite des Nègres qui eft liée au commerce
des Colonies , fe fait encore à Marfiille ; mais
elle eft peu confidérable, & d’ailleurs réglée
dans ce port comme dans le refte du royaume,
par des loix d'une exécution générale & uniforme.
C 'e ft dans fon territoire & dans celui de la
Provence , que Marfiille trouve en partie les ali-
mens du commerce qu'elle fait avec les provinces
Occidentales & Septentrionales de la France.
Elle leur fournit des favons, des huiles, des
amandes , des prunes , des figues , des vins &
des eaux-de-vie : elle leur fournit aufli des cotons
en laine & des cotons filés , foit du Levan
t, foit de l’Amérique , des drogueries , &c. >
& elle en reçoit des morues fèches & des poif-
fon falés, qui font la nourriture ordinaire des
artifans des villes & des journaliers des campagnes.
Afin d'empêcher que le refte de la province
ne participe aux franchifes & libertés dont jouit
Marfiille & fon territoite > cette ville eft enceinte
d'un mur qui les fépare entièrement du pays
non privilégié ; à chaque point de communication
par les routes, font fîtués des bureaux
de la ferme où tout eft déclaré, vilïté & acquitté,
comme en venant du pays étranger , ou en y allant,
fauf les exceptions en faveur des fabriques.
On a vu au mot Grenier a sel , que celui
de Marfiille çonfommant quatorze mille cent
quarante minots de fel annuellement, au prix de
vingt-quatre livres neuf deniers, donne un produit
d'environ trois cens quarante-deux mille livres.
Le produit de la partie du tabac, fahs être
aufli confidérable, eft néanmoins intéreffant j mais,
on ne^ peut l'évaluer avec précifîon, attendu que
ce qui eft vendu de cette denrée dans Marfiille,
êft confommée hors de fon enceinte.
Les droits de contrôle des aétes , infinuation ,
centième dçnier, & ç . , ayant lieu à Marfiille ,
comme dans le refte de la Provence, on peut en
eftimer la recette à environ douze à treize cent
mille livres , pour la province.
Les droits de traites payés à Marfiille 3 n'étant
qu'une avance faite par le négociant qui s'en
rembourfe fur le confommateur , leur produit ne
peut-être calculé que fur le pied de la confommation
de cette v ille , & c'eft beaucoup l’éva-,
luer, que de le porter à cent mille livres.
Quant aux vingtièmes & à la capitation > ces
impofitions n'ont pas lieu à Marfiille, au moyen
d'un abonnement qui les remplace & qui eft de
huit cens mille livres par an : en conféquence ,
lçs terres & les maifons de Marfiille & de fon
terrritoire, ne fupportent aucunes charges quelconques.
Toutes les impofitions font payées avec
le produit des droits établis dans la v ille, fur les
farines, fur les viandes & les vins qui s'y con*
fomment.
Ces droits forment une ferme générale , dont
le prix annuel eft de feize cens mille livres.
Leur perception fe fait fur les grains convertis
enfarinés, dans les moulins du territoire, ou fur
les farines qui y font apportées du dehors ,.à raifon
de fix livres, par charge du poids de trois cens
livres, poids de table , ou deux çens “cinquante-,
huit Jivres, poids de març.
Le fermier a feul la faculté de faire tuer les
beftiaux & d’en débiter la viande. Le droit qù'iî
perçoit fur celle qui eft apportée du dehors ,
revient à-peu-près à deux fols quatre deniers par
livre.
Quant aux droits fur les vins, ils varient fuî-
vant la profeffion de ceux qui les vendent. Les
vins confommés dans les auberges & hôtelleries,
chez les traiteurs, paient un fol par pot ; ceux
qui fe débitent dans les tavernes & les bouchons,
ne font fujets qu'à douze fols par millerolle , qui
eft de foixante pots.
Jufqu'en 1776» la ville de Marfiille avoit joui
du privilège exclufif de vendre dans fon enceinte
les vins de fon territoire : écoutons ce qu'en dit
l’édit du mois de février de cette même année.
« Aucune ville n’a porté ce privilège à un plus
» grand excès, aucune ne l'a exercé avec plus
» de rigueur. De tems immémorial, lorfque Mar-
» fiille jouiffoit d’une entière indépendance, elle
ai avoit interdit toute entrée aux vins étrangers*
„ torfqu’elle fe remit fous l’autorité des Comtes
m de Provence« elle exigea d’eux , par des ar-
» ticles- convenus en ü f y , fous le nom de cha-
» pitres de pa ix , qu’en aucun tems ces princes ne
» fouffriroient qu’on portât dans cette ville du
.» vin ou des raifins, nés hors de fon territoire ,
» à l’exception du vin qui feroit apporte pour
=>. être' bu par leComte & laComteffe de Pro-
» vence & leur maifon, lorfqu’ils viendraient a
„ Marfeille y demeureroient, de manière ce-
» pendant, que ce vin ne fût pas vendu.
„ £ „ 1104, un ftatut municipal, ordonna que
» le vin qui feroit apporté en fraude, feroit re-
» pandu, les raifins foulés aux pieds, les bati-
» mens ou charrettes brûlés, & les contrevenans
» condamnés en différentes amendes.
» Un règlement du 4 feptembre 1610 , ajouta
» à la rigueur des peines prononcées par les pre-
» cédens règlemens, celle du fouet contre les
„ voituriers qui amèneroient du vin étranger dans
» la ville'de Marfeille
„ C ’eft ainfi que par un renverlement de toutes
» les notions de morale & d'équité, un vil inte-
„ rêt follicite & obtient, contre des infractions
.. qui ne blelfent que lui , les peines flétriflantes
.1 que la juftice n’inflige même au crime qu’à re-
,, gret, & forcée par le motif de la fûreté pubii-
» que. -
» Différens arrêts du confeil & du parlemenr
„ de Provence, des lettres-patentes émanées des
» rois nos prédéceffeurs", ont fucceflivement au-
„ torjfé ces règlemens, Un édit du mois de mars
„ 1 7 1 7 . portant règlement pour l’adminiftration
„ de la ville de Marfeille, confirme l’établifTe-
„ ment d’ un bureau particulier, chargé fous le
» nom de bureau du v in , de veiller à l’exécution
» de ces prohibitions.'
„ L’article 95 de cet édit, fait même défenfe
y> à tous capitaines de navires qui feront dans le
„ port de Marfeille, d’acheter pour la provifion
» de leur équipage, d’autre vin que celui du
.= territoire de ,çette ville ; & pour prévenir ,
s, eft-il dit," les contraventions au préfent arti-
ss c le , les échevins ne ligneront aucune patente
.. de fanté pour les bâtimens de mer qui feront
SJ nolifés dans ladite ville , & qui en partiront,
sj qu’il ne leur foit apparu des billets de vifite des
s. deux intendans du bureau du vin & de leur cer-
jj tificat, portant que le vin qu’ils auront trouvé
SJ dans lefdits bâtimens de mer, pour la provifion
JJ de'leurs équipages, a été acheté dans la ville
- si de Marfeille.
SJ Comme f i l’attention d’ un fait devoit dépen-
=» dre d’ une circonftance abfolument étrangère à
=» la vérité de ce fait ! Comme fi le témoignage de
sj la vérité n’étoit pas dû à quiconque la réclame !
93 Comme fi l'intérêt qu’ont les propriétaires des
99 vignes de Marfiille à vendre leur, vin un peu
39 plus che r, pouvoit entrer en quelque confidé-
39 ration, lorfqu'il s'agit d'un intérêt aufli im-
09 portant pour l'Etat & pour l'humanité entière,
99 que la fécurité contre le danger de la conta-
33 gion ! Hj
99 Le corps-de-ville de Marfiille a étendu l’ef-
99 .fet de cette difpofition de l’édit de 1717 > juf-
99 qu'à prétendre interdire aux équipages des bâ-
99 ti mens qui entrent dans le port de Marfiille,
99 la liberté de confommer le vin ou la bierre
»9 dont ils font approvifionnés pour leur voyage,
99 & les obliger d'acheter à Marfiille une nou-
33 velle provifion de vin. Cette prétention forme
33 la matière d'une conteftation entre la ville de
s> Marfiille & les Etats de Languedoc.
33 La ville de Marfiille s'eft même crue en droit 39 d'empêcher les vins des autres parties de la Pro-
^ vence, d'emprunter fon port pour être ven-
» dus aux étrangers. C e n eft qu'après une lon-
» gue difcuflion, qu'une prétention aufti injufte
» & aufli funefte au commerce général, a été
33 profcrite par un arrêt du confeil du 16 août
„ 1740 , & que le tranfit des vins par le port
,3 de Marfiille a été permis, moyennant certaines
33 précautions.
» Par-tout où un pareil privilège exifte, il eft
» nuifible au peuple confommateur, nuifible au
99 commerçant j les propriétaires des vignes ne
» font favorifés en apparence qu'aux dépens des
» autres propriétaires & de tous leurs conci-
» toyens.
33 Dans Marfiille, dont les chefs fe montrent
» fi zélés pour l'exclufion des vins étrangers ,
» cette exclufion eft contraire aux intérêts du
93 plus grand nombre des habitans de la v ille ,
99 q u i, non-feulement, font forcés de confom-
33 mer du vin médiocre , & au prix que le défaut
» de commerce rend exçeflifj mais qui même
99 feroient obligés de fe priver entièrement de
» v in , fi malgré la défenfe de faire entrer dans
» cette ville des vins prétendus étrangers , ceux
99 qui font fi jaloux de cette défenfe & du pri-
99 vilége exclufif qu'elle leur donne , ne fe réfer-
33 voient pas aufli le privilège de l'enfreindre par
33 une contrebande notoire , puifqu'il eft notoi-
9» rement connu que le territoire de Marfiille ne
99 produit pas la quantité de vin néceflaire pour
» les befoins de fon immenfe population.
» A u fli, n’eft - ce que par les voies les plus
» rigoureufes, que le bureau du vin peut main-
33 tenir ce privilège odieux au peuple , & dont
> l'exécution a plus d’une fois occafionné les rixes
90 les plus violentes.
33 Ceux donc qui ont obtenu de nos prédécef