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Ordonne fa majefté, que les feigneurs ne pourront
donner l’extinétion ou diminution des droits
feigneuriaux , non plus que les iifages concédés
aux habitans, par eux ou leurs auteurs , dans
les bois , terres gaftes, montagnes & autres lieux
dépendans de leurs fiefs.
Ils ne pourront pareillement donner en com-
penfation les terres gaftes * bois ou domaines
délaifles par eux, ou leurs auteurs, aux communautés,
à moins que lefdjtes terres, bois & domaines
ne fe trouvent entre les mains des particuliers
, 8c encadaftrés , ni les ufurpations faites
dans lefdites terres -, bois & domaines , à moins
que la réunion à leur profit n'en ait été ordonnée
par juftice.
Les demandes en compenfation feront faites
par exploits , contenant les 'fîtuations , confronts I
& allivremens, tant des biens roturiers, acquis ;
par les feigneurs, que des biens nobles par eux
aliénés , qu’ils voudront donner en compenfation |
le nom des poflefieurs defdits biens, & le tems
de l’aliénation ; & feront lefdites demandes lignifiées
au fÿndic de la province , dans quinzaine
au plûtard , du jour de la lignification qui en
aura été faite aux communautés, pour y intervenir
, fi bon leur femble, & fans frais; le tout
à peine de nullité des demandes , & de tout ce
qui pourroit s’en être fuivi.
La compênfation 3 en cas qu’elle ait lieu, fera
faite du jour des demandes libellées, & lignifiées,
en la manière ci de fl us 3 & feront les biens nobles,
qui auront été donnés en compenfation, fuffîfans,
8 c tenus porter les mêmes charges qu’atiroient dû
porter les biens roturiers acquis par les feigneurs,
dont ils demeureront garans pendant dix ans , à
compter du jour que la compenfation aura été
ordonnée, fauf les cas fortuits, ou de force majeure
, dont ils ne feront pas refponfables.
Lefdits biens ne pourront rentrer dans les mains
de ceux qui les auront donnés en compenfation,
confifcatio'n , déguerpi fie ment , ou autrement,
-pendant l’efpaee de trente' années , à compter
du jour que la compenfation aura été jugée ou
acceptée , qu’à condition qu’ils demeureront roturiers
8c fujets aux mêm^s charges dont ils étoient
tenus. ,,
L’eftimation des biens qui feront donnés, ou
pris par les feigneurs, en compenfation , fera faite
par les experts convenus ou nommés d’office ,
fur le pied de la valeur , au tems de la compenfation.
Le fol des maifons ne pourra être donné en
compenfation, qu’avec un bien-de même qualité,
& dans les lieux où le foi ides maifons eft en-
cadaftré 5 ce qui fera pareillement obferyé à l’égard
des maifons & bâtimens.
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Sa majefté déclare nuis tous affranchiftemens
de taille faits à prix d’argent, ou fous prétexte
d’acquitter des droits feigneuriaux , ou arrérages
defdits droits, & en quelque manière que ce
puiffe être , autrement que par compenfation ,
enfemble tous aétes par lefquels la cote des biens
roturiers, pofledés pour des feigneurs, ou autres,
aura été fixée, & ce, nonobftant tout laps de
tems.
Veut fa majefté, que les héritages ainfi affranchis
foient réunis au cadaftre , fauf aux pofief-
feurs de pourfuivre , devant les juges qui en
doivent connoître, la liquidation & le rembour-
fement des fommes qu’ils auront payées , ou la
vérification des droits par eux réunis, en confédération
defdits affranchiflemens , dans lefquels
droits ils pourront rentrer 5 le tout fans reftitu-
tion de frais & intérêts pour le pafle.
Fait fa majefté défenfe à toutes cours & juges
d’accorder aux feigneurs aucune furféance au paiement
de la taille, fous prétéxre , foit de compenfation
, foit d’exemption de taille négociale ,
par eux prétendues , jufqu’au jugement définitif
defdites prétentions ,_ 8c déclare nulles toutes
celles qui ont pu ou pourroient être accordées.
La nature & les principes de la taille, en Pro-
vence , ainfi développés , il s’agit maintenant de
retracer la forme d’adminiftration qui y eft fuivie.
On fait que René d’Anjou, comte de Provence
, ayant difpofé de ce comté en faveur de
Charles, comtedü Maine, fon neveu, celui-ciinl-
tituà , àfon tour , fon héritier, en 1481, Louis XI
qui prit , à la mort de Charles, pofleffion de la
Provence, & promit aux habitans de leur con-
ferver leurs loix particulières & leurs privilèges ,
fans que par l’union à la couronne, leur pays
pût devenir province de France : c’eft pour cette
raifon que le roi prend la qualité de comte de
Provence dans les expéditions qui concernent ce
pays- .
Après la mort de Louis XI , René, duc de
Lorraine , fils d’Yolande, renouvellâ fes prétentions
fur la Provence, mais fans aucun fuccès >
Charles^ VIII, à la prière des trois Etats, unit
& annexa à perpétuité cette province à la couronne.
Ce gouvernement eft compofé des comtés
de Provence 8c Forcalquier, & terres adjacentes.
L’affemblée générale des Etats, y.eft depuis
long tems remplacée & repréfentée par celle des
: procureurs du pays 5 l’archev.êque d’Aix eft le
chef de cette aflemblée, ; comme le premier des
procureurs du pays 3 après lui font deux évêques,
procureurs joints, du clergé 3 enfuite. les deux gentilshommes
, procureurs joints delà noblefle 3 après
[ ceux-ci, les confuls d’Aix, procureurs-nés du
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pays : les procureurs-fyndics des trente communautés
, ont droit d’aflifter aux aflemblées 5 le
tréforier général, les deux greffiers 8 c l’agent :
il y aflifte toujours un commifiaire du roi.
On y délibère fur le don gratuit , qui eft de
fepr cents mille livres 3 on fixe auffi le montant
du furplus des dépenfes néceflaires à la province.
Indépendamment du don gratuit, la Provence
paie , à titre de fouage , taillon 8c fubfîde, cent
quinze mille huit cents feize livres ; 1 impofition
fur les communautés des terres adjacentes, monte
à trente-neuf mille neuf cents foixante-dix-huit
livres.
La répartition des impôts, entre toutes les communautés
, fe fait pareillement dans cette afiem
blée , ou plutôt elle eft toute faite au moyen de
l’affouagement.
On appelle de ce nom un tableau qui renferme
les noms de toutes les communautés de Provence ,
eftimées à un certain nombre de feux, eu égard
à la quantité de fonds taillables qui y font fitués :
ainfi le mot feu ne fignifie pas une maifon 3 mais
une certaine quantité de biens-fonds taillables,
& évalués cinquante mille livres de tailles réelles.
La ville 8c viguerie d’Aix, par exemple, contient
quatre-vingt trois communautés , & eft évaluée
cinq cents dix-neuf feux un vingtième & un fep-
tième 5 celle de Tarafcon eft de vingt-quatre communautés
8c deux cents quarante-fix feux fept
vingt-quatrième 8 c un vingtième.
La fubdivifion de chaque viguerië eft faite dans
cet affouagement général, par communautés, efti-
mée chacune un certain nombre de feux. Le
total des biens taillables de Provence eft de trois
mille trente-deux feux 8c demi 8c un tiers 3 enforte
que l’on fçait que les fonds fujets à ce genre
d’impofition, équivalent à cent cinquante un millions
fix cents quarante-un mille fix cents foixante-
fix livres treize fous quatre' deniers, qui produi-
fent environ fept millions cinq cents quatre-vingt-
deux mille quatre-vingt-trois livres fix fous huit
deniers.
On ne parlera point ici de l’afflorinement qui
eft, par rapport à l’impofition fur les biens nobles,
un tableau de la même efpècé à-peu-près que
l’affouagement pour les fonds roturiers j on ne
traite ici que de ce qui concerne la taille, 8c
la manière dont elle s’impofe.
Il réfulte de ce qui * vient d’être dit, qu’avant
que l’aflemblée des procureurs du pays foit fé-
parée, toutes les communautés favent çe qu’elles
doivent payer 5 car elles connoiflent le nombre
de feux dont elles font compofées 3 elles favent
de plus, à combien chaque feu a été impofé dans
la répartition générale. [ p 1
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Alors chaque communauté s*afl*emble , convoquée
par les adminiftrateurs 5 & c’eft-là que
l’on délibère fur là manière d’acquitter fa cote-
part de l’impofition générale, 8c de fatisfaire
en même-tems aux dépenfes qui la concernent :
cette dernière impofition s’appelle taille négociale
, à la différence de la taille royale, qui ne
fe paie qu’au profit du roi.
Les communautés ont deux voies pour fatisfaire
à cette impofition ; l’une, de répartir 1 impofition
fur tous les habitans , à raifon de leurs
biens 5 & il ne peut jamais à cet égard y ayoir
de difficulté. En effet, chaque communauté a
fon cadaftre, dans lequel font inferits tous les
fonds qu’elle poflede , avec leur eflimation 3 la
répartition fe fait au marc la livre de cette ejti-
mation , & chaque particulier eft toujours en état,
de vérifier fi fa taxe eft jufte & proportionnelle.
L’autre moyen eft également facile, & fouvent
préféré, comme plus commode , & confifte a
.établir des impdfitions fur les fruits & denrees
qui fe recueillent dans le territoire 3 on n’a be-
foin pour cet ; établiflement que de l’attache de
la cour des aides.
Cés impofîtions fe lèvent quelquefois, en argent
, 8c alors on les appelle impofîtions fur les
fruits 3 quelquefois au (fi elles confiitenten quotité
, fe paient en 'nature, s’adjugent' au plus offrant
8c dernier enchérifleur,. qui fait les deniers
bons : on les nomme dans ce cas impofîtions en
fruits.
Mais quelque parti qu’adoptent les communautés
, elles commencent toujours par employer
au paiement de leurs impôts Je revenu de leurs
biens patrimoniaux lorfqu’elles en ont.
Quant au recouvrement de l’impofition , il eft
confié & adjugé au rabais., à celui qui exige un
moindre falaire pour fes foins , 8c le produit
en eft verfé dans une feule & même caille, dans
laquelle fe prennent les fommes néceflaires pour
acquitter les fubfîdès, & celles qui doivent fournir
aux autres dépenfes de la communauté.
Les exa&eurS .font toujours les deniers bons,
8 c portent / en quatre termes, le montant de la
portion dont chaque communauté eft tenue dans
les impofîtions de la province , à un receveur, que
la viguerie, ou le tréforier des États nomme , &
dont ils font refponfables. Les rétributions ac--
cordées à tous les receveurs des vigueries enfemble,
he montent en tout qu’à dix-huit mille
cinq cents fix livres feize fous par année. Les
/receveurs des vigueries verfent, à leurs frais, &
aux mêmes quatre termes , le montant de leur
recette , dans la .caifife du receveur général, établi
par les Etats, dont les attributions fe montent à
| l |
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