
dettes des Communautés font un fardeau onéreux
pourl’induftrie & pour la nation, & qu’elles oppo-
fent le plus grand obftacle à la liberté qu’on doit
donner aux arts & aux talens.
Nous avons propofé les moyens du rembour-
fement, & indiqué les changemens qu’ il convien-
droit de faire dans nos règlemens pour favorifer
l ’induftrie.
"N ou s ne pouvons cependant "pas nous empêcher,
en finiflantjde rappeller ce que nous avons dit
au commencement de cette differtation. La plus
grande liberté qu’on donnera aux artifans & aux
marchandsne procurera aucun bien à l’état j l’e f
fet même en fera préjudiciable , fi le gouvernement
ne commeqce par encourager l’agriculture.
L ’admiffion plus facile dans nos arts & métiers,
pourroit enlever plus de fujets à la clalfe des laboureurs
; ils y font déjà affez invités par d’autres
motifs. Cette claffe la plus utile, qui fournit
à toutes les autres , & dans laquelle il n’en ren:
tre aucune, pourroit faire encore de plus grandes
pertes, & la culture en fouffriroit davantage;
On n’ aura donc rien fait en faveur du commerce ,
& l’édifice fera toujours chancelant, fi on n’en
affermit la bafe , & fi on ne multiplie les matières
premières. Malheureusement le luxe aôluel ne
tend pas à augmenter la confommation des ouvrages
faits de nos propres denrées. Les laines d’Ef-
pagne , le poil & les foies font employés dans
la plupart de nos étoffes. De ces matières , les
unes ne croififent pas dans nos provinces , les autres
n’y croififent pas en affez grande abondance.
Cette partie de notre commerce me nous eft pas
plus avantageufe que celui des Indes ; nous n’a-
Vons intérêt de le faire qu’ afin que les autres ne le
faffent pas pour nous. En manufacturant des denrées
exotiques, on ne gagne que la main-d’oeuvre
; on n’amaffe que des richeffes fictives & de
convention : on n’ acquiert pas les feules richeffes
folides & indépendantes; c’eft-à-dire, les matières
premières. Loin qu’une grande partie de
nos manufactures réagiffent fur l’agriculture , elles
ne fervent qu’ à enrichir le cultivateur étranger.
L e mal n’efl peut-être pas fans remède. Ne pour-
Toit-on pas multiplier encore nos foies ? Seroit-
àl impofîible de changer ou' du moins de perfectionner
la nature de nos laines , en croifant les
races de nos moutons avec celles des moutons de
Barbarie 3 d’Efpagne ou d’Angleterre ? L&France
ne peut-elle pas faire ce que Madrid & Londres
ont fait? Si le canal qui joint les deux mers, a
immortalifé le dernier règne, peut - être l’exécution
de ce projet ne procureroit-il pas moins de
gloire au prince fous lé règne duquel nous avons
le bonheur de vivre : Enfin comme tous nos procédés
en matière de commerce , tendent plus à
multiplier le ligne que la chofe, cette multiplication
ne produit d’autre effet que d’augmenter le
prix des denrées , & de rendre au peuple la fub-
fiftance plus difficile, parce que fon falaire n’eft
pas augmenté dans le même rapport : d’où il fuit
que quoique la maffe d’argent foit. augmentée,
l’Etat n’en eft pas réellement plus riche, & que
le peuple en eft plus pauvre. Il n’en eft pas de la
répartition de l’argent comme de celle des denrées.
Plus le premier fera abondant, moins il en appartiendra
au peuple, . parce que le haut prix des
denrées confommera fon falaire en fubfiftances :
plus au contraire les denrées feront abondantes ,
plus le prix en fera modique, & plus le peuple
aura d’aifance. On,doit confidérer encore.,qu’une
grande partie des denrées commencent par appartenir
au peuple, & qu’il; n’en eft pas ainfi de l’argent..
On ne peut donc remédier à ce furhauffe-
ment que produit l’entrée du ligne, qU’en multipliantles
matières premières dans la même proportion
qu’on en multiplie l’image. Mais on ne
.peut y parvenir 8c faire le bonheur du peuple,
qu’en encourageant l’agriculture, la fource unique
des richeffes fixes & permanentes.
Les confidérations qu’on vient de lire , n’ont
pas été fans fruit ; foit quelles aient été connues
du gouvernement, ou foit qu’étant l’effet de la
méditation d’un efprit jufte & inftruit dans les matières
d’économie politique, elles fe foient présentées
naturellement aux perfonnes qui pouvoient
ihfluer fur cette partie d’adminiftration ; on a
vu , en 1776 8c les années fuivantes, fe réali-
fer une partie des voeux & des projets de l’auteur
de ces confidérations i nouvelle preuve que la liberté
d’écrire fur tout ce qui intéreffe la profpé-
rité de l’Etât, contribue à répandre la lumière ; 8c
finit, tôt ou tard , par avoir de l’utilité.
M. Turgot.,. contrôleur général des finances ,
qui avoir conftamment manifefté fon zèle pour la
liberté, fut le prejnier à propofer, en 17 7 6 , la
fuppreffion de toutes les communautés, jurandes
& maîtrifes , par l’édit du mois de février de
cette même année. On peut voir dans le préam-
bulè de cet édit, avec quelle force de raifon,font
préfentés les avantages de la liberté , appliqués
aux arts 8c métiers. C e t édit , étant rapporté
en entier dans le dictionnaire du commerce,
nous nous abftiendrons de le donner ici* Mais
nous ne devons pas omettre de dire , que ce
monument, élevé en l’honneur de la,liberté , ne
fubfifta que jufqu’ aù mois d’août de la même
année 1776, qu’il fut détruit dans la majeure partie.
Cependant , lé nouvel édit' , en rendant
l’exiftence aux corps , communautés 8c maîtrifes
j leur a donné une forme très - différente
de celle qu’ils avoienteue précédemment; l’entrée
des arts eft devenue beaucoup plus facile,
au moyen d’ une finance très-inférieure à celle
qui avoit été payée jufqu’àlors ; plufieurs communautés
ont été réunies 5 ce qui diminue le
nombre des procès. Enfin , cet édit femble avoir
concilié 1 par le rétabliffemenr des anciennes
corporations & maîtrifes , l’avantage de ceux qui
peuvent y prétendre , avec l’intérêt des finances
de l’Etat, dont les revenus çafuels ont reçu un
aceroîffement très: fenfible , au moyen de I attribution
au roi , des trois-quarts des droits de
maîtrifes , & de la formalité de 1 infcnption , en
payant annuellement le dixième du montant du
droit fixé pour l’admiffion. Il eft vrai que e
roi fe chargeoit d’acquitter les rentes & les dettes
dont les corps 8c communautés etoient grèves.
! C e t édit , du mois d’août 1776 , doit être
configné ici comme une loi burfale , qui > Par
fes dffpofitions , procure des reffources^ au fife ,
pour le moment préfent, & lui en préparé en- ,
! core d’autres toutes, les fois que les' befoms
l’exigeront.
Louis, par la grâce de Dieu, 8cc. Notre amour
pour nos fujets nous avoit engagés à fupprimer
par notre édit du mois de février dernier, les
jurandes & communautés de commerce, arts &
métiers : toujours animés du meme fentiment ;&
du défit de procurer le bien de nos peuples, uous
avons donné une attention particulière aux difte-
rens mémoires qui nous ont été préfentes a ce
fu jé t, & notamment aux repréfentations de no--
, tre cour de parlement ; 8c ayant reconnu que l’ e-
t xécution de quelques-unes des difpofitions que
! cette loi contient, pouvoit entraîner des incon-
I véniens, nous avons cru devoir nous occuper du
, foin d’y remédier, ainfi que nous 1 avions annoncé
; mais perfévérant dans la réfolution où
nous avons toujours été de détruire les abus qui
. exiftoit avant notre éd it, dans les corps 8c communautés
d’àrts métiers , & qui pouvaient
nuire au progrès des arts , nous avons juge necef-
faire, en créant, de nouveau , fix corps de marchands
& . quelques communautés d’arts 8c métiers,
de conferver libres certains genres de métiers
ou de commerces qui ne doivent être affu-
jettis à aucuns règlemens particuliers ; de réunir
les profeffions qui ont de l’analogie entr’elles , 8c
d’ établir à l’avenir, des règles dans le régime def-
dits Corps & communautés , à la faveur defquelles
la difeipline intérieure & l’autorité domeftique
des maîtres fur les ouvriers, feront maintenus,
fans que le commerce,, ! les talens & J ’induftrie
foient privés des avantages attachés à cette liberté
qui doit exciter l’émulation fans introduire la
fraude & la licence. La concurrence établie pour
des objets de commerce, fabrication & :’façon
d’ouvrages, produira une partie de ces heureux
effets.; . & le rétabliffement des;corps 8c.communautés
, fera ceffer les inconvéniens réfultans de
la confufion.des états. Les profeffions .qu’ il' fera
libre à toutes perfonnes d’exercer indiftinélement,
continueront d’ être une reffource ouverte £ lapartie
la plus indigente de nos fujets ; les droits &:
frais pour parvenir à la réception dans lefdits corps
& communautés, réduits à un taux très-modéré, 8c
proportionné au genre 8c à l’utilité du commerce
& de l’induftrie, ne feront plus un obftacle pour
y être admis ; les filles & femmes n’en feront pas
exclues ; les profeffions qui ne font pas incompatibles,
pourront être cumulées; il fera libre aux
anciens maîtres, de payer des droits peu onéreux,
au moyen defquels leurs anciennes prérogatives
lepr feront rendues ; ceux qui ne voudront pas les
acquitter, n’en jouiront pas moins du droit,d’exercer,
comme avant notre éd it, leur commerce
ou profeffion. Les particuliers qui ont été inferits
fur les livres, de la police, en vertu de notredit
édit, jouiront auffi , moyennant le payement qu’ ils
feront chaque année d’une fomme modique , du
bénéfice de.cette loi. La facilité d’entrer dans lef-,
dits corps & communautés, les moyens que notre
amour pour nos fujets , & des vues de juftice,
nous infpireront, feront cefifer l’abus des privilèges.
Nous nous chargerons de çayer les dettes
que lefdits corps & communautés avoient contractées
; & jufqu’ à ce qU’elles foient entièrement
acquittées , leurs créanciers eonferveront leurs
droits , privilèges & hypothèques ; nous pourvoirons
auffi au payement des.-indemnités qui
pourroient être dues à "caufe de la fuppreffion
des corps 8c communautés ; les procès qui exif-
toient avant ladite fuppreffion , demeureront
éteints ,‘ & nous , prendrons des mefures capables
d’arrêter les conteftations fréquentes qui étoient
fi préjudiciables à leurs intérêts & au bien du
commerce.. En rectifiant ainfi ce que l’expérience,
a fait connoîtrè de vicieux dans le régime des
communautés , en fixant par de nouveaux ftatuts
& règlemens ; un plan d’âdminiftration fage 8c
favorable , lequel dégagera des gênes que les anciens
ftatuts avoient apportées à. l’exercice du
commerce 8c des profeffions ; & détruifant des
ufages qui avoient .donné nâiffance à une infinité
d’abus, d’excès & de, manoeuvres dans les
jurandes , & contre lefquels nous avons dû faire
un ufagé légitime de notre autorité / nous confer-
verons de ce£ anciens établiffemens, les avantagés
y capables d’opérer le bon ordre & la tranquillité
publique. A ces caufes 3 8c autres , 8cc.
A r t i c l e p :R e ;M i e r.
Les marchands & artifans, de notre bonne ville
de Paris, feront claffés & réunis fuivant le genre
de leur commerce, profeffion ou métier ; ,à l’effet
de. quoi nous avons rétabli & rétabliffons , 8c
1 en tarit que L»efoin eft y créons & érigeons, de
aouveau, fix corps de marchands, y compris
celui des orfèvres , & quarante-quatre communauté
d’arts & métiers : voulons que leldits corps
communautés jouiffent, exclufivement à tous
autres , du droit & faculté d’exercer les commerces,
métiers & profeffions qui leur, font at