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contrarier à cette compagnie , des engagemens
bien au - delà de fes pouvoirs de fournir ,
& la vente , par préférence , à des princes
Allemands , qui payent Je fel plus cher que les
Suifies , a arriéré la fourniture qu'elle doit aux
Cantons catholiques , de près de trois cents *
ou trois cents cinquante mille quintaux. Ce font
meme ces arrérages, qui, comme on Ta dit ci-
devant, ont été le motif de la conftru&ion d'une
fuline à Chaux, dont la formation médiocre ajoutera
toujours aux regrets d'y avoir fait une dé-
penfe aufïi confidérable.
Il étoit bien plus lîmple pour fatisfaire à ces
arrérages de prendre le parti, qui eft encore praticable
aujourd'hui, de faire arriver à Grandfon
& Yverdun des fel s de Peccais , dont le prix
»e feroit revenu qu'à fèpt livres, & ne reviendrait
à préfent qu'à fept livres dix fous par
quintal. Ces fels remonteroient par les canaux
& par le Rhône , de la même manière que ceux
qui font fournis à Genève , ou pourroient enfcore
être tranfportés, par la Saône & le Doux, juf-
qu'en Franche-Comté , d.'où ils feroient diftri-
bués dans la SuifTe.
S I X I È M E S E C T I O N .
De la vente étrangère des fels , de leur tranfport,
du bénéfice qu*il donne, & de tintelligence qu i f
demande.
Les fpéculations de la ferme générale, ont eu
pour but d’étendre , autant qu'il étoit pof-
fîble, la vente étrangère qu'on a divifée en deux
départemensî celui de Metz & celui de Stralbourg j
villes ou font formes & entretenus des magafins
de fels.
Le premier fournit une partie de Téleélorat de
Trêves, le duché de Luxembourg & d'autres
principautés.
Le fécond étend fes ventes au-delà du Rhin,
dans le Wirtemberg, dans les vallées que forment
les montagnes noires, & jufques dans le
Brisgaw.
Les falines de Château Salins & Dieuze four-
nifient les fels du département de Metz ; celui
de Strafbourg n'ên tire que de Dieuze exclufi-
vement. Quelques traitans d'au-delà du Rhin
viennent lever des fels dans la faline de Dieuze ,
mais la partie la plus confidérable de la vente
étrangère eft expédiée par la ferme générale, dans
des chariots , appelles embauchai res , garnis
intérieurement de jonc & d'une Forte toile ,
appelle bauche, qui fe replie pour envelopper
lé fel, & dont les extrémités font plombées de
même manière que le font les facs dans lefquels
fe voiture le fel de gabelles.
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Le prix dè tranfport de Dieufe à Stralbôurg,
d’abord réglé par le traité de Monclar à vingt-
trois fols trois deniers par quintal, avoit été
porté en 1777 à vingt-fept fous deux deniers,
pour quatre muids, pefant chacun huit cents trente-
deux livres, compofaht une voitüre j la ferme
générale pafloit donc environ quarante-quatre livres
par voiture aux entrepreneurs des falines,
& ceux-ci la payoient depuis vingt-fix livres juf-
qu'à trente-une livres : en forte qu'ils gagnoient
dix-huit & treize livres par voiture, & cinq à
fix livres par bauche 5 au to ta l, l'article des voitures
, tant en Suifle, que pour le département de
Mets & de Strasbourg, tous frais faits , donnoit
un bénéfice de quatre-vingt mille livres par année.
Mais ce profit, dû à la vigilance & aux foins
continuels, des entrepreneurs, ne peut pas être
le même pour une régie,"telle que celle qui fe fait
aujourd'hui par la ferme générale > car on peut
aflurer que le tranfport des fels & la voiture des
bois aux falines, forment peut-être la partie la
plus difficile à conduire, parce que c'eft de-là
que dépend le bénéfice, ou la perte de l’exploi-
tatron générale des falines t puifque le nombre
des voitures nécefiaires à leur fervice monte à
plus de trois cens quarante mille. On fent combien
l'économie & l'intelligence doivent, à cet
égard, rapporter dè fruits > fk-qu'elles ne peuvent
fe trouver que dans unerpartié immédiatement
intéreffée aux fuccès de l'affaire j laquelle ,
par fes connoiffances des lieux,.des perfonnes &
des efprits, fâche faifir à propos une infinité de
çirconftances & d'habitudes propres à opérer des
diminutions de prix. Par exemple, chaque canton
ayant un genre de culture particulier fuivant la
nature du fo l , il eft des momens d'inaétion où
les voituriers peuvent fe relâcher fur les prix dé
voitures j il eft d'autres conjonctures où il convient
de les hauffer fans héfiter, mais avec des conditions
qui empêchent que cette'augmentation ne
tourne en habitude : il faut enfin fe montrer toujours
conduit par l’équité.
Peut-on ratfonnablement attendre que les employés
d’une régie quelconque , foit infpeéteurs ,
foit contrôleurs, s'attacheront à modifier leur
conduite avec tant de foin?'S'ils font mal payés»
ils pourront favorifer l’augmentation de prix, ou
par indifférence., ou par reffentiinent, ou peut-
être même par des motifs encore plus répréhen-
fibles- Si au contraire ils font contens & zélés »
Rattachement aux intérêts de leurs commettans
les portera à chicaner fans cefie les voituriers»
pour en obtenir des diminutions ; l’entêtement
de ceux-ci s'accroîtra par le refus & la difcuf-
fionj tous ceux du canton fe concerteront pour
ne marcher qu'au taux qu'ils fixeront, & le prix »
quel qu'il foit, fera non-feulement permanent à
l'avenir dans ce canton j mais de proche en proche»
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I l réfiftânce des uns deviendra un exemple pour t
les autres, & l'inexpérience , le mécontentement
ou le zèle mal entendu d'un commis, peut coûter
cent cinquante mille livres par an a des comme -
tans éloignés, qui ne voient que par fes yeux.
Dans le principe, la vente des fels à
droit limitée à la fourniture des feuls Cantons
Suiffes catholiques, en vertu de traites P°|,l:1<]u“
faits par le gouvernement , avec abftraétion de
toute vue fifcale. Succeffivement la ferme generale
a paffé différons marches avec les Cantons
proteftans, en calculant le bénéfice qui lui en
reviendrait, ■ & fans s'inquiéter fi les provinces
où reforment les fels, feraient dans le cas: de
gémir de l'excès de la confommation de bois
que néceflitent une formation fans niefure, ix
fans proportion avec fes facultés. Maigre U c -
croiffement de cette formation la ferme generale
étoit arriérée à l'égard des Suiffes , au
premier oaobre 17 74 . les feules fahnes
Se Lorraine, de deux cens vingt-cinq mille neuf
cents douze quintaux, non compris ce qui et oit du
pat les falines de Franche-Comte. On en a donne
ci-devant les raifons; elles font dans les efforts
qu'on a faits pour étendre la vente des fels en
Allemagne , au préjudice des conventions patiees
pour la fourniture des Suifies , qui procure beaucoup
moins de bénéfices ; & ces efforts, pour eten-
dre la vente étrangère , font l’effet d une remue ,
q u i, par une inftitution viciéùfe , eft accordée en
Taifon de Textenfion qu’elle reçoit , & des fels
qu’elle confomme.
Si Ton remonte à l’origine de la vente étrangère,
qui ne date que de 17S®, on voit la première
entreprife, à cet égard, propofée & conduite
par un traitant appelle Laurent Wolft j
S E P T I E M E S E C T I O N -
De la régie & exploitation des falines ; du bénéfice
mais n’ayant pu atteindre à une confommation
de dix-neuf mille muids, qui faifoient 1objet de
fon traité, il en demanda la réfiliation a la ferme
générale, & elle la lui accorda. En.même tems
elle prit des arrangemensj elle établit des bureaux
& des agens pour procurer des débouches^ a fes
fels dans l'Allemagne, en .négociant auprès des
pleéteurs & des princes , ou en rendant leurs
Confeils favorables à fes vues. Le fucces s en-
fuivit fi bien , qu'en 1771' elle fongeoit à mettre
en réferve, pour la vente étrangère , cinquante
mille muids de huit cens livres chacun, ou trois
cens mille quintaux. Pendant les cinq premières
années du traité de Monclar, la vente aux Suiffes
& à l'étranger a été de près de cinq cens mille
quintaux, & la fourniture aux gabelles de Lorraine
, Trois-Évêchés , Franche-Comté & Àlface
de deux cens vingt-cinq mille quintaux » enforte
que la formation générale , dans toutes les falines
a été d’environ fept cens vingt - cinq mille
quintaux.
quelles ont donné.
Les ducs de Lorraine & les rois d'Efpagne ont
toujours été dans l'ufage de faire régir le u r sM « «
en Lorraine & en Franche-Comte. L a q u e lle »
ont été réunies à la couronne, nos rois les ont
fait entrer dans le bail de leur ferme generale. On
voit celles de Franche-Comte faire partie de celui
de 16 81, & elles n'en ont plus ete diftraites. Mais
paraît que lesfeimiers généraux, reconnoiflant quo
cette manutention particulière exigeoit des connoil-
fances, des foins & une application qui n avoient
nulle connexion avecl'adminiftration des autres pai -
ries de leur ferme, qui d'ailleurs etoient bien p us
intéreffantes, prirent le parti de fous-ttaitet les
falines , ou plutôt ils s’affocierent des perfonnes
habituées depuis long-tems aies conduire, pour
fabriquer le fel feulerfient, & fe réferverent d en
fnivte la confommation & la dellination , des
l'inliant qu'il feroit formé, foit dans les paysûe
gabelles, foit dans l'approvifionnement deshuilies.
Mais dans la fuite voyant que l’ entrepnfe de 1»
formation des fels faifoit des bénéfices coniide-
rables la ferme générale tentoit i.chaque renouvellement
de traité , de faire des réferves lucratives
, ou des modifications avantageufes. Ln
1744 le prix de formation fut diminué, & fit
un bénéfice pour la ferme générale d'environ cinquante
mille livres par année. En 17 56,1} y:eu*
i' deux traités , un pour la formation & la voiture
des fels , dans les falines de Lorraine & des
Trpis-Evéchés , .& une autre pour la faline de
Salins. A l'exDiration de ces traités, qui avoir la
même durée que fe bail des fetmes, ceft-a^-dire
en 1756 , toutes fes falines furent données aune
feule compagnie, fous 1e nom de Làb^t, fe
miniftre réferva annuellement quatre-vin^: mille
livres fur fes bénéfices.
Le traitant Joly ayant fuccédé à.Labat en
la ferme générale, frappee de 1 etendue des bénéfices
que faifoient' les entrepreneuTS , chercha
à y participer. A cet effet, elfe commença par
s'attribuer les quatre-vingt mille livres dont 1e
miniftre avoit difpofe dans 1e traite precedent,
puis , par une autre réferve annueüe de quarante
mille livres, par la fupprefiion.de l avance.de cen,t
quarante mille livres qu’elle étoit dans 1 ufage de
faire aux entrepreneurs, & par fe retranchement
de la gratification de trois livres par corde de
bois qui étoit économifée à -Salins > elle parvint
à fe former un revenu d environ cent quarante
mille livres par année.
L'expiration de ce traité lui fournit, en lyéSj.
i'occafion de faire un arrangement encore plus
X x x ij