de fa majefté ne pourroit s’y refufer, & ces per*
Tonnes, remplies de reconnoiflance , s’empref-
feroient, dans toutes les circonftances , à donner
des preuves non équivoques de leur zèle &
de leur confiance- On pourroit , ajoutoit - on
vrai Jtmblablement, fe contenter d’ un feul receveur
par généralité j mais la comptabilité fera plus
facile, s’il y en a deux., l’ un pour les années paires t
& 1 autre pour les années impaires. On croit auffi,
par la même raifon , qu’il fera très - convenable
de rétablir l’ancien ufage de deux receveurs des
tailles dans chaque éle&ion , lefquels feront leur
•xercice alternativement : nos pères l’avoient imaginé
ainfi, & ils favoient bien ce qu’ ils faifoient :
on ne gagne rien à toutes ces innovations , qui
tiennent plus à l ’efprit de fyftême , qu’à une fage
réflexion.
Voilà 3 ce me femble, tout ce qu’on a ouï-dire
en faveur du rétablififement des receveurs généraux y
& peut-être que ces obfervations ifolées dévoient
faire une forte d’imprefliqn. Examinons maintenant
fi cette impreflïo’h eût fubfifté, après qu’une
perfonne inftruite des confidérations contraires
auroit été confultée.
V o ic i , par exemple , ou à-peu-près, ce que
j ’euffe repréfenté.
C e n’eft pas l’étendue numérique d’une recette 3
qui exige un grand nombre d’hommes pour la
conduire, c’ eft le genre de difficultés auxquelles
cette recette eft affujetie. Il faut autant de collecteurs
de la taille que de paroiffes , parce que cés
fonctions étant envifagées comme une charge oné-
reufe , à laquelle chaque habitant eft fournis à fon
tour , on eft forcé de les confier à des gens de
campagne qui ont d’autres occupations , & qui
ne pourroient y vaquer, s’ils étoient obligés de
s’éloigner de leurs foyers. Ces collecteurs de plus,
étant refponfables de l’exa&e rentrée des deniers
qu’ils ont à recouvrer, il faut néceffairement les
mettre à portée de recevoir à chaque inftant &
par petites portions, la contribution de la plupart
des taillables. Il faut auffi un receveur des tailles
dans chaque élection , afin que les colleéfceurs des
paroifTes du même diftriét foient à portée de la
caiffe où ils doivent remettre les deniers qu’ils ont
recueillis. On peut encore, comme on l’a toujours
pratiqué, établir un commis principal dans chaque
généralité, afin que les receveurs des taillesg
correfpondent habituellement avec lu i , & ver-
fent, entre fes mains , les fonds qui doivent fervir
à l’acquit des refcriptions , ou au paiement des
différentes charges affignées fur le produit des
recettes générales.
Mais pour recevoir à Paris l’excédent de ces
charges , objet alors de cent vingt millions , &
pour en faire le verfement au tréfor roy al, on ne
concevra point comment il faut quarante-huit per-
Tonnes revêtues d’un office ; & je ne crois pas
q u e , dans aucun pays du monde, on puiflel’imaginer
, ni en préfenter d’exemple.
Les deux gardes du tréfor royal reçoivent &
payent alternativement des Tommes bien plus con-
Iiderables : ils en comptent Pareillement à la
chambre > & cependant ils ne donnent pas à leur
travail le quart de leur journée.
La caiffe d efcompte a payé & reçu, dans une
annee , près de trois cens millions ; elle a une
double manutention d’argent & de billets qui
exige le plus grand ordre > elle tient la caifTe de
plufieurs maifons de banque j elle ne demanderoit
pas mieux que de tenir celles de tous les receveurs
généraux, & beaucoup d’autres encore. Cependant
les adminiftrateurs font au nombre de douze,
qui tous ont en même tems, des maifons de commerce
a diriger, ou des places confidérables dans
la finance à- remplir.
La banque d’Angleterre^, établifTement im-
menfe, a vingt-quatre dire&èurs , dont la plupart
ont auffi d’autres occupations.
Ces diverfes compagnies, dira-t-on, ne font pas
obligées, comme les receveurs généraux, à fuivre
une correfpondance. Mais qu’eft-ce qu’une correspondance
avec deux cens q u a t r e d e s
tailles , & s’ils étoient alternatifs, avec quatre
cens-huit ? une correfpondance , fur-tout, qui s’applique
aux objets les plus fimples , & fe borne ef-
fentiellement à accufer la réception des fonds envoyés
par ces receveurs 3 & à leur faire des reproches
lorfqu ils ne fe conforment pas aux en-
gagemens qu’ils ont pris ? Il faut remarquer, d’ailleurs
, que cette furveillance fur l’exa&itude des
receveurs des tailles, eft d’autant moins pénible, que
le roi accorde deux deniers par livre fur le montant
des impofîtions , pour etré diftribués à ceux
d’entre ces receveurs qui exécutent pondtuelle-
ment leurs traités} & cette gratification , indépendante
de toutes le* autres taxations , appartient
aux receveurs généraux quand les receveurs des
tailles ne l’ont pas méritée $ en forte que ce faert-
fice, de la part du roi, rend véritablement le rôle
des receveurs généraux très-facile.
La partie effentielle de leurs occupations con-
fifte dans les efeomptes <& les viremens de fonds
auxquels ils font obligés de s'appliquer, pour tirer
le plus grand parti poffible des deniers dont ils
jouiffent plus ou moins long tems j mais cette
geftion , particulière à la fubdivifion a&uelle des
recettes générales, n’étoit point applicable à la
conftitution d'une compagnie qui devoit verfer
au tréfor royal tous Tes fonds oififs.
Ceux qui pourroient confîdérer la correfpondance
des receveurs généraux comme un travail ,
dont il faut divifer la direction, entre quarante-huit
perfonnes, feraient bientôt détrompés, s'ils ra-
voient quil exifte en Europe plufieurs maifons
de commerce, régies par deux ou trois allo-
ciés, qui ont près de,mille correfpondans , OC
dont les lettres roulent fur des affaires continuellement
„variées. Enfin , le premier commis des
finances que j’ avois choifi, homme rare a la ve
r ité , étoit perfuadé comme moi, qu il auroit eu
moins de peine à conduire feul ■ en c h e f, la^recette
générale, qu’à diriger le departement dont il
étoit chargé.
A u d i, quand je propofai au roi de compofer
de douze perfonnes, la compagnie qui devoit exer-
cer àfavenir les fondions des quarantefiuitrece-
leur, généraux , ce n’étott pas que ,'eulfe regarde
ce nombre comme néceflaire i mais on ne peut
fouvent atteindre à la perfeft.on que par degres;
& j’avois été contrarié , en commençant & par
l’âee des perfonnes qu'il avoir fallu choifir pour
tefoeâer les droits d’anciennete, & par cette multitude
de confidérations qui genent un mimftre,
lorfqu’il veut faire un grand changement dans les
perfonnes, en même-tems qu un grand changement
dans les chofes.
Quant au crédit des refcriptions, comment per-
fuader que celles tirégs par une compagnie' de
douze perfonnes, ne foient pas auffi dignes de
confiance , que celles foulcntes par un receveur
général feul ! La différence, aux yeux de la raifon,
feroit toute à l’avantage delà premiete maniéré;
car aucun abus n’ eft poffible de la part d’une compagnie
collective : cependant fous ie feul rapport
du c rédit, on ne peut admettre aucune fupéno-
rité d’une forme fur l’ autre, parce que la compagnie
collective, non plus que les receveurs di-
vifés ne font garans d’ aucun; fait du gouvernement,
& ü eft aifé de fentir qu’une pareille garantie
ne feroit ni julte ni raifonnable. L expérience
d'ailleurs a fuffifamment inftruit à cet egard ;
puilqu’aux deux époques connues ^de la fufpen-
fion'du paiement des refcriptions, l’une en 17/9 •
& l’autre en 17 7 1 , les porteurs de ces effets n ont
eu aucun recours contre les receveurs generaux. La
fortune du plus grand nombre de ces receveurs n a
aucune proportion avec la fomme des refenp-
tions qu’ils fouferivent ; 8c ta confiance, dans ce
papier, naît 8c de la refponfabilité du gouvernement,
8c de la certitude où l’on eft , que ces
affignations font tirées fur le fonds reel des im-
pofitions ^de chaque année.
M a is , dira t-on , les raifonnemens ne Peuvent
rien contre les faits ; 8c il eft conftant q uil s eft
pégocié , immédiatement apres le retablinement
des receveurs généraux , beaucoup plus de refcriptions
que dans les deux ou trois mois qui ont
précédé cette époque. Il faudrait être a portée
d’examiner cette allégation ; mais elle pourroit
être jufte fans qu’on dût en tirer aucune confié -
quence : on avoit répandu le bruit d'un change,
ment prochain dans la nouvelle conftitution des
recettes générales, il n’ en falloir pas davantage
pour tenir en fùfpens plufieurs capitaliftes ; c’ eft
ce qu’on a vu dans toutes les occafions pareilles,
8c j’en pourrois citer plufieurs exemples. Mais
quand le changement annoncé vaguement eft effectué
, & que chacun voit l’ordre des paiemens
également maintenu, les négociations reprennent
leur cours , 8c communément elles font groffies
de tout l’argent dont on avoit retardé le paiement.
J’ ai éprouvé tous ees différens effets, 8c
à l’égard des billets des fermes , 8c à l'égard des
billets des tréforiers » Iprs des réformes établies
dans les établiflemens d’où ces différens billets de
crédit émanoient ; mais je n ai pas moins vu^,
qu’au bout de très-peu de tems , toutes les opérations
d’économie éjendoient la confiance. Enfin ,
on ne doit pas perdre de v u e , qu’il n’y a qu une
certaine fomme de capitaux deftinée habituellement
à des placemens fur le gouvernement, payables
à terme fixe : ainfi . à moins d’ un diferedit général
, lorfque la négociation de certains effets publics
fe ralentit momentanément, celles de quelques
autres augmente en proportion : & les fa-
crifices qu’on feroit, pour favorifer la circulation
d ’un de ces papiers en particulier, ne procure-
roient pas une plus grande fomme de refTources.
Toutes ces explications pourront manquer d’intérêt
auprès de beaucoup de gens 5 mais elles avertiront
l’adminiftration , de ne pas céder trop facilement
à l’autorité de certains faits ifolés , dont
les principaux agens de la finance favent parfaitement
fe fervir pour arriver à leur fin.
La confiance foiblit, le fervice va manquer,
voilà des mots bien impofans fans doute ; mais
pour en connoître l’ aftuce ou le peu de juftefle ,
il ne faut qu’ arrêter fon attention fur la pètitefTe
des moyens que ces mêmes perfonnes indiquent
! comme fuffifans pour réparer ce prétendu diferé*
dit. C e n’eft point l’économie , ce n’eft point un
redoublement d’ordre & de vigilance qu’elles cen-
feillent ; c’eft quarante huit receveurs généraux , ail
lieu de douze j c ’eft deux tréforiers , par tout ,
au lieu d’un } c ’eft , dans les différentes parties de
recettes ou de dépenfes, un plus grand nombre
de financiers, ou un plus grand refpeéfc pour leurs
convenances. Quels petits légiflateurs pour un fi
grand empire 1 quels foibles confeillers pour une fi
vafte adminiftration !
Il faut cependant que je revienne encore au fu-
jet particulier , dont je dois neceffairement parcourir
les principaux détails \ car , en fe refufant
à prendre de la peine , les vérités utiles font toujours
imparfaitement défendues. ( < n a tâche fans
doute de rabaiffer l’augmentation de déoenfe qui
N n n ij