
autres orientaux ; & comme je l’ai d i t , elles '
m’ont donné , pour terme moyen le plus fo r t ,
25 ans. C ’eft fur ce pied que j’employe le fyftême
des générations : 6c i’on aura plus d'une
occafion , dans le cours de c - t écrit , de s’étonner
de la jufteffe avec laquelle il me con-
duirau niveau des dates connues &.détef minées.
avec certitude par d’autres moyens.
§. 3. Du tems <î Homère & cfHéfiode.
Tatien , dans un fragment confervé par Eii-
sèbe (1), a rapporté les noms de feize auteurs
plus anciens les uns que les autres, qui tous à
l’envi s’étoient occupés de la recherche du
tems où vécut Homère-, la confiontanon de
leurs rélultats eft très-intérefïante, parce que
leurs calculs ayant été faits fur ce que l’on avoir
de plus- anciens monumens , 6c for des mé
moires originaux de différens peuples & dediffé
rens tems , ils 'nous repréfentent un état de
chronologie dont les détàils ne fubfiftent plus.
Voici le paflage de Tatien.
« Selon C ràtè s , Homère fut poftérieur à la
33 guerre de T r o y e de 80 ans : de iç o félon
33 E ratofthènes, de 140 félon Ariftarque , de
33 i 8o félon d’autres-, quelques-uns le font
33 contemporain delà Colonie Ionienne-, plu
33 fîeurs de G ygès * Roi de Lydie. Hérodote (2)
33 eftime qu’il vivoit 400 avant lui, Ôc il lui aflo-
33 cie Héfiode^*
Dans l’état aétuel des connoiflances , ces
fentimens forment des contradictions énormes ;
par exemple, de Gygès à la guerre de T r o y e ,
I on compte aujourd hui plus de quatre cents
ans. Mais ces difcordances font-elles bien
réelles ? Eft- il probable que des écrivains qui
ont eu en main des monumens originaux, aient
commis des erreurs aufti groftières ? Voyons
quelle folution reçoivent ces discu tés dans
notre fyftême. Nous commencerons par Hérodote.
Par quel moyen a t-il ejtimé qu’Homère v é cut
400 ans avant lui? A-t-il été privilégié
d ’une Chronologie exaéte 6c détaillée? Dans ce
c a s , pourquoi ces termes vagues de vécut, e/?/-
mer? Pourquoi ce nombre fo**.maire de 400?
Ici le calcul d’Hércd~: .. .1 eft pas ce qu il préfente
au premier coup-d’oeiU il n’a pas prétendu
ëftimer par années, mais par générations : c’eft
une méthode qui lui eft familière, 6c dont nous
aurons occafion de voir d’autres exemples -,
ainfi, quand il dit que les Poètes ont vécu
quatre liécks avant lu i , il entend la valeur de
quatre fiécles en générations, c’eft-a-diie:, aou\t
dans fon fyftême -, mais fi l’on évalue ces douze
^générations, félon que nous le propofons,
on n'aura que trois cents ans. O r , Hérodote
ayant fleuri vers 530, Homère eft placé par le
vrai fens de fon calcula l’an 230, 6c nous allons
voir comment les témoignages des autres écrivains
quadrent avec cette interprétation.
On doit fe rappeller que nous avqps placé la
ruine de T r o y e à l’an 100 duTemple. Homeie
ayant vécu , félon Cratès , 80 ans^, répond à
l’an 180. Dans le calcul d’Eratofthènes , il répond
à l ’an 200. Ceux qui le fai foie nt contemporain
de Gygès ne s’éloignent guère du
même fentiment, puifqueGygès régna en 262.
D a i leurs,leterme de contemporain embralianc
la vie entière , prend Une grande extenfion.
Ceux qui le plaçoient au tems de la Colonie
Ionienne , formoient fynchronifme avec Aril-
tarque, puifque de l’aveu d'Erathoftènes (3 ),
elle tombe à l ’an 140, depuis la ruine de T ro y e .
Il en étoit encore qui le difoient né avant- les
Olympiades, 6c l’exprefliôn de ceux-là reve-
noit au fentiment de la plupart des auteurs cités.
Enfin la contemporanité reconnue d'Ho-
•mère avec Lycurgue \, Légiflateur^ de Sparte,
achève de prouver la même chofe.
§ .4 . Du tems de Lycurgue*
(4) Ariftote ’avoit appris par le difque même
des jeux Olympiques , fur lequel ongravoit les
noms des vainqueurs , que Lycurgue lut contemporain
d’Iphirus , fondateur de ces jeux ,
6c qu’il l’aida même de tout fon crédit dans
cette entreprife. L ’autorité d’un pareil monument
eft fans réplique. Iphitus ayant vécu en
2 0 7 , ou 215 , Lycurgue appartient à cette
même date. Cicéron approchoit beaucoup de
la vérité , ou plutôt il y tou ch oit, lorfque 1 an
( 1 ) Eufeb. Prcepar. Evang. pag. 491.
. ( 1 ) Hérod.Lib.II. p; izç.
( 3 ) Marsham Chron. Egypt. p. 334. in-fol.
( 4 ) P l u t a r q . in vi:â Lycurgi.
deux de la 18e Olym p iad e, il difoit que
Sparte gardoit fes loix depuis 700 ansy car
ce calcul revient à l’an 227 du T . 11 eft remarquable
que Cicéron fuivoit ici la Chronologie
de Timée de Sicile, dont il fai (oit beaucoup
ds cas j o r , T im é e afluroit qu’Homère fur
contemporain de Lycurgue ( 1 ) , 6c ion témoi
gnage en ceci eft confirmé par Apojlodore 6c
par tout ce que nous venons de voir ( i j
Je demande maintenant pourquoi cette
foule de fÿnchronifmes 6c de coïncidences ?
Si le tems que j’afligne à la guerre de T r o y e eft
faux, comment produit il des rapports aufti
bien liés entre des Ecrivains divers de tems 6c
lieux ? Une pareille concordance peut-elle exif-
ter fans un fond commun de vérité ?,
Mais, d ira -ton, fi cette même époque eft
réelle, comment fe fait - il que les anciens
comptent quatre fiècles entre la guerre de
T ro y e 6c les Olympiades ? Voilà le problème
de contradiction que je laiffe à réfoudre, parce
qu’il demande un travail qui excède les bornes
que le tems m’a impofées *, j’obferverai feulement
que laifTant même à part les contradictions
ci-delfus, les calculs des auteurs fontful-
peCts par eux mêmes., en ce que pendant que
d’un côté ils détaillent jufqu’aux années , de
l’autre ils avouent qu’au-delà des Olympiades
il n’y a rien de certain ni de fufceptible d’un
ordre probable (3) D'ailleurs, les liftes des
Rois Grecs & Latins, par lefquelles on veut
juftifier ces calculs , demandent ellef mêmes
( 1 ) C i c é r o n O r a t .p r o F l a c e o .V . Marsham , p. 414.
( 2 ),11 eft encore un témoignage en notre faveur.
Les marbres d’Oxford reconnoift'ent Homère pour
être contemporain dé. Phidon , tyran d’Argos. Or il
eft certain que Phidon exiftoit à la huitième Olympiade
( 241 du Temple ) , dont il troubla la célébration
chez les Eléens. Si les calculs des marbres placent
ces deux perfonnages à la fin du premier fiècle du
Temple, c’eft par un abus du fyftême des générations,
& par une mauvàife- acception des 400 ans d’Hérodote.
(3) *V; D i o d o r . in p r e e fa t . V a r r o n . A f r 'i c a n u s a p u d
E u f e b . p r è s - E v a n g e l . p. 487. Le fyftême des générations
ne^paroît avoir eu ici beaucoup d’influence;" j’imagine
Qu on a rejetté, à cette période, l’excès accumulé
des générations poftérieures. Peut-être encore a-t-on
fait erreur de la g é n é r a t io n au f i è c l e : du moins il eft
fingulier de trouver dans notre fyftême quatre générations
de la guerre de Troye aux Olympiades ; &
cette équivoque fe retrouve dans les quinze g é n é r a t io n s
du Cycle caniculaire..
d’être prouvées j on doit avoir plus que des
doutes fur leur certitude hiftorique , quand on
y voit des êtres mytboipgiqnes , tels que Hercule
, Inachus, Deucalion , O g y g è s , Erec-
rée , C e c ro p s , Dan a iis , Acrinus t P e r fé e ,
Cadmus , Faunus, Janu s , Saturne, Latinus ,
P icus, Hefperus, & c . qui n’ont jamais.exifté
comme hommes, 6c qui cependant figurent
comme tels dans les Chroniques. En gén é ra l,
les antiquités de la Grèce 6c de l ’Italie font encore
dans les élémensducahos. Jufqu’à ce jour,
on a peu fait pour y rétablir l’ordre-, ce feroit
cependant une entreprife digne d’être tentée ;
mais il ne faudroit pas fuivre fervilement 6c
exc'ufivement lin auteur, fe borner étroitement
à un peuple y il fâudroit généralifer fes vues ,
fes recherches , confronter, diftinguer les rapports
fatfticeS' 6c fyftématiques, de ceux qui
font authentiques 6c réels-, en un m o t , reprendre
la Chronologie dans fes fondemens.
Quant à m o i , les antiquités de l’Occident
n’ayant point fait l’objet ipécial de mes recherches,
il me fuftit d’avoir établi un point
capital qui étoit lié trop étroitement à d ’autres
parties que je traiterai, pour le JaiiTer en airière.
Je terminerai ce que j’ai à dire fur celle- c i , par
le fiècle de Pythagoie.
§. 5. Du tems de Pythagore.
C ’eft aujourd’hui une opiniongénéralement
reçue , que Pythagore fut contemporain de
T h a ïe s , c’eft à-dire , vécut vers le milieu du
quatrième fiècle : tous nos modernes l’écrivent
6c le répètent -, il eft vrai qu’ils ont pour garans
de leur afTertion Diodore , Diogène de L aerte,
Jamblique, ôc la plupart des compilateurs qui
font venus après ces auteurs -, mais ce n’tn eft
pas moins une erreur démentie par des faits
avérés 6c des autorités décifives, il eft entr’autres
un paffage de Paufanias , qui, fi l ’on eut lu
l’apprécier , eût dès longtems donné des idées
plus juftes 6c des notions plus précifes. Pythagore
, dit cet écrivain eftimable , fut fils de
Mnéfarque, fils à’Hippafe ; Hippafe étoit un citoyen
dePhliunte-, qui s’oppofa à l ’invafion de
Regnidas Héraclide , fils de Phalcès , fils de 27-
ménus : or , Téménus étoit frère d’Arijlodème,
premier Roi Héraclide de Sparte. Il réfulre de
ces rapports une confrontation généalogique
au Roi de Sparte, qui nous conduit à des tems
très-connus.