
H 4 L I E
France ; mais les turcs s'en fervent aujourd'hui
pour leurs cautères > tandis qu autrefois on l'em-
ployoit aux plus nobles ufages. Ses feuilles félon
la remarque de Pline , font d'un verd plus gai
que celles du lierre ordinaire, & fés bouquets
couleur d'or, lui donnent un éclat particulier. Ses
feuilles cependant font fi femblables à celles du
lierre commun , qu'on auroit fouvent de la peine
à les diiringuer , fi on ne voyoit le fruit. Peut-être
que ces efpèces ne différent que par la couleur de
cette partie. Les pies qui ont levé de la graine
jaune de ce lierre femées dans.le jardin royal de
Paris, écoient femblables aux pieds qui lèvent
de la graine de notre lierre en arbre. Leurs feuilles
étoient pareillement anguleufes, cependant les
fruits différent beaucoup.
Ceux du lierre jaune font , au rapport de
Tournefort qui les a vus fur les lieux , de
gros bouquets , arrondis de deux ou trois pouces
de diamètre,, compofés de plufieurs grains fphé-
riques , un peu anguleux , épais d'environ quatre
lignes , & un peu applatis fur le devant où ils
font marqués d'un cercle duquel s'élève une
pointe haute de demi-ligne.
La peau qui eft feuîile morte ou couleur d’ocre,
eft charnue5 elle renferme trois ou quatre graines
féparées par des cloifons foit minces ; chaque
graine eft langue d'environ une ligne & demie,
blanche en dedans, grifatre , veinée de.noirâtre,
$c relevée de petites boffes en dehors ; elles
w'ont point de go tu 8c leur figure approche affez
de celle d'un petit rein 5 la chair qui couvre ces
graines eft douceâtre d'abord, enfuite elle paroît
mucilagineufe, On vend ces graines dans le marché
aux herbes de Conftantinople.
Le lierre qui produit ce fruit doré , étoit'
fpécialement consacré à Bacchus , ou parce
qu'il fut jadis caché fous cet arbre, ou par
d'autres raifons que nous ignorons. Plutarque dans
des propos de table, dit : que ce dieu apprit à
ceux qui étoient épris de fes fureurs à fe couronner
dès feuilles de cet arbre , à caufe de la
vertu qu'elles ont d'empêcher qu’on ne s'enivre.
On en ceuronnoit suffi les poètes,, comme on
le voit dans Horace & dans La feptième édogue
de Virgile, "fur laquelle Servius obferve qu'on
en agiffoit ainfî, parce- que les poètes font con-
facrés à Bacchus, & fujets'comme lui à des
enthoufîafmes j on bien parçe que l'éclat des
beaux vers, femblabîe à celui du fruit de cet
arbre , dure éternellement, & acquiert à leurs
auteurs l'honneur de l'immortalité.
o II n'eft 'pas furcrenant que -les Bacchantes
aient autrefois employé le Lierre pour garnir leurs
thyrfes & leurs coëffures, toute la Thrace eft
couverte de ces fortes de plantes. ( D. J . )
L I E
Il ne faut pas toujours prendre pour des
évantails les feuilles de lierre qu'on voit dans
la main de plufieurs figures fur les monumens.
En effet, il eft aifé de remarquer qu’elles ont
la queue très-fine & très-déliée, & qu'elles ne
fauroient avoir ni la proportion , ni la folidité
convenables à un évantail. D'un autre côté on
ne voit pas- trop fur quoi feroit fondé l'ufage
d'en porter à la main, à moins que ce ne fuffent
de ces feuilles fur lcfquelles on écrivoit les noms
des perfonnes que l'on aimoit ; les anciens écri-
voient le nom de leurs maîtreffes, fur les murailles
, fur les arbres & fur des feuilles.
Malgré l'ufage qu'ils faifoient du lierre dans
différentes fêtes 8c dans les repas voluptueux,
nous n’efons prononcer fur le- motif qui a. pu
faire placer ces feuilles entre les mains des figures
qui les portent. Si nous en connoiffions
bien la nature, la queftion feroit peut-être plus
aifée à réfoudre ; mais quand ce feroit celles
du Nympkoea, ainfî que l’ont penfé quelques
auteurs , il refteroit toujours des doutes fur
leur ufige. Au relte l'antiquité a fes myftères
comme beaucoup d'autres fciences, & il y auroit
de la folie à vouloir rendre raifon de tout.
Diodore de Sicile, ( lib. 1. ) dit qu'Ofîris,
avoit apporte c e végétal en Egypte.
L IE U E , mefure itinéraire, dont fe fervent
les françois, 8c les Efpagnols , pour marquer
la dîftance d'un lieu à- un autre. Les Anglois ,
les Italiens, les Allemands, & c . ufent du mot
de mille quoiqu'ils ne donnent pas la même étendue
à leurs milles. Il en eft de même des lieues
françoifes. La lieue gauloife étoit de ijo© pas
romains, félon Am mien Marcellin. La lieue com-
mune de France eft de 2y00 pas géométriques ,
la petite de deux^mille, la grande de trois mille
cinq cents, & même plus.
Vigenère & d'Ablaneourt ne fauroient être approuvés
dans leurs évaluations des lieués. L'ua
ik l'autre , . en traduifarit les auteurs latins,
évaluent toujours quatre milles anciens à une
lieue y première faute 5 & fecondement ils confondent
le mille romain avec le mille italique.
Ménage dérive le mot lieue de leuca,
Uuga , ou leca , e’eit tout comme il voudra,
mais^ il faut remarquer que ces trois mots ont
été inconrrus aux auteurs de la bonne latinité,
& que ce font ceux de la baffe latinité qui s’en
font les premiers fervis.
Il eft encore à propos d’obferver, que les mots
leg. lega & leuga désignent dans Antonin, une
lieue de quinze cents pas : cependant quelquefois
, & non pas toujours ( comme l'a imaginé
Z u ri ta ) , le mot leg. fîghifie dans l'itinéraire de
ce géographe, Ugio3 légion 3 Sc cela eft claira
quand après le mot leg. eft ajouté le mot ala,
ou des, nombres, comme I. IX. XI. XIV. &c.
fivivis des noms Italie a , ionia, gemina, & autres
femblables, qui font certainement des noms de
légions : le bon fens aide d’un peu de favoir,
fera fans pei.ie ce d'fcerneme.nt, 8c d.irinjzAiera
fans erreur les paffages d’Anton in , où il s'agit
de légions, de ceux qui défignebt les diftances
par lieues.
Ammien Marcellin qui fait les hues, gauloifes
chacune d'un milliaire & demi, ou de 1 yoo pas
romains , dit que les romains ne comptoient
par leüc& ou leugA que depuis Lyon en allant
au Nord. Aufli appelle-1 il cette ville exordium
Galü arum.
LIEVRE. Le lièvjè. ét at confacré à Venus.
( Pki loft rat. lib. 7. Ic'on. 6. "). Il [’étoit aufli à
Bacchus, depuis que .ce dieu en avoit pris la
forme, pour échappera la pour fuite dePenthc'e.
( Acfchyl. Eumenid. v. x6. )..
Les anciens regardôient les. lièvres des Gaules
Cifalpines au delà d u 'P ô ,, du Milanez, comme
lés meilleurs de toute l'Eürope.
L'opinion des Romains qui penfoient que l'on
acquerroit delà beauté, en mangeant fouvent du
lievre, a pu venir de l'équivoque leporis du lièvre
y & Leporis- de la beauté, de la grâce 3 de-là,
ce vers technique :
Venator fequitur lepores , rhetorque leporës.
Sur lés monumens, un enfant ou génie tenant
un lievre 8e des fruits, eft le type de i'automne,
faifon de la chaffe.
L i è v r e 8e lapin, fymbole deI'Efpagne 8e de
la Sicile, où il eft le, fymbole naturel de la fécondité*
Lievre coiirant fur les médailles de Meffine.
L IE U T E N A N T , legatus. Chez les romains,
les magiftrats, même ceux qui avoient l'adminif-
tratîon de la juftice , avoient la liberté de re- i
mettre.en tout ou en partie, à une ou plufieurs
perfoiines , les fondions dépendantes de leur
office.
Les proconfuls qui av,oient le gouvernement
des provinces, tant pour les armes que pour la
juftice 8c les finances, avoient ordinairement des
efpèces de lieutenans diftinds pour chacune de
ces trois fondions ; favoir, pour les armes, U-
gatum, c’eft-à-dife, un député ou commis, lequel
ne fe mêloit point de la juftice, à moins
que le proçonful ne le lui eut mandé expreffé-
metir. Pour la juftice, iis avoient un affdfeur,
aJfcJforem y 8e pour les finances , un quefteur.
Quelquefois pour çes trois fondions, ils n'avoient
qu’un même lieutenant, lequel, fous les derniers
empereurs, s'appelloit pK%^ùçu-srov18c quelquefois
vicarim y mais ce dernier titre fe donnoic plus
ordinairement à ceux que l'empereur en voyoit
dans les provinces où il .n'y avoit point de gouverneur,
lefquels en ce cas en étoient gouverneurs
en chef, étant vicaires, non du gouverneur,
mais de l'empereur même.-
Les légats des proconfuls étoient choifîs par
le fénat , mais les affeffeurs étoient choifîs par
les' gouverneurs de provinces ; 8c lorfque les légats
avoient, outre les armes , l ’adminillratioa
de la juftice, ils tenoient cette dernière for dion
de la volonté du gouverneur.
Les gouverneurs des provinces & plufieurs autres
des principaux officiérs de l’empire avouent
auifi çou'tume d’envoyer, par les villes de leur
département, des- commis appelles ro^àTo^rut 3
ce que Julian, interprête des noveiles, traduit
par locum tenentes3 d'où nous avons fans doute
tiré le terme de lieutenant. Mais Juftinien, en
fa novelle 154, fupprima ces fortes d'officiers ,
voulant que les défenfeurs des cités, choifîs par
les habitans , fiffent la charge des gouverneur«
des provinces en leur abfence.
Mais cela n’empêcha pas qu’il ne fut toujours
libre à l'offic 1er de commettre 8c de leguer quel-
'un pour faire fa chargé 3 les fondions même
la juftice, . quoique les plus importantes 8c les
plus d'fficiles pou voient prefque toutes être déléguées
, même à des perfonnes privées.
D'ahor.d, pour ce qui eft de la fîmple jurif-
didion, il eft certain qu'elle pouvoir être déléguée
: celui auquel elle étoit entièrement coni-
mife, pouvait même fubdéléguer' 8c commettre
à diverfes perfonnes des procès à juger.
L ’appel du commis ou délégué général fe re-
levoit devant IeTupérieur du magiftrat qui l’avoit
commis, parce que ce délégué étoit comme nos
lieutenans ,* il n'exerçoit d'autre jurifdidion que
celle de fon commentant 8c en fon nom. Il y a
même lieu de croire que les .fentences de ce délégué
général étoient intitulées du nom du magiftrat
qui l'avo;t commis; de même qu'en France
, les fentences rendues par le lieutenant, ne
Jaiffent pas d'être intitulées du nom du bailli.
Il y avoit pourtant un cas où. l'on appelloic
du légat au proçonful .3 mais apparemment que
dans ce cas , le légat avoit quelque jurifdidion
qui lui étoit propre.
Du fîmple juge délégué on fe pourvoyoit devant
1^ délégué général qui l’avoit commis 5 mais
ce n'étoit' pas par voie d'appel proprement dit :
car le fîmple délégué o'avoit pas proprement de
jurifdidion ; il ne donnoit qu’un avis V lequel
n'ayoït de foi aucune autorité jufqu'à ce que le
déléguant l'eût approuvé.