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L e calice eft à cinq divifions ovoïdes, ouvertes,
partagées longitudinalement par une petite
ligne Taillante.
La corolle eft compofée de cinq pétales plus
courts que le calice, & eft creufée en forme de
demi-entonnoir.
Les étamines, au nombre de cinq, font op-
pofées aux pétales , & les deux il y les font courts
& rapprochés.
Le fruit eft un drune pulpeux, à -p e u -p rè s
fphénque, du la g’ofleur d'une prunelle fau-
vage. 11 renferme un noyau olieux dans fon in
térieur. En n ûriffiint, il prend une couleur rouffe,
approchante de celle de la jujube.
Le lotus fleurit en mai, & fes fruits font murs
dans le courant d’août & de feptembre, leur
goût approche de celui de la jujube 1 mais il eft
plus agréable.
On voit, d’après ce que je viens de dire, que
cet arbrifleau a de grands rapports avec le jujubier
cultivé, dont il diffère fur-tout par la
forme de fon fruit, qui eft fphérique, & au
moins une fois plus petit que celui du précédent.
Ses feuilles fontaufti moins alongées. Le jujubier
s’ élève à la hauteur de vingt à vingt-cinq pieds 5
k lotus forme toujours un buiflbn, il fe trouve
abondamment dans prefque toutes les plaines fa-
bloneufes & arides du royaume de Tunis, particulièrement
fur les bords du défert, & aux en
▼ irons de la petite Syrthe.
Je vais maintenant rapporter les paflages des
auteurs anciens, où il eft fait mention du lotus,
afin de les comparer avec mes obfervations, &
d ’établir les raifons qui me portent à croire que
c ’eft le jujubier que je viens de décrire, qui eft
le véritable lotus de Lybie.
Hérodote (/ïv. 4. ) dit que le fruit du lotus
a la forme des graines du lentifque; qu’ il a une
faveur auflî agréable que la datte 5 qu’il fert d’a-
Jiment aux lotophages, & qu’ils en font du vin.
C e récit ne nous donne, à 'la vérité, que peu
de connoiflance fur le lotus ,• mais du moins la I
comparaifon que l’auteur fait de fon fruit avec
la femence du lentifque , eft exaéte & conforme
à ce que j’ai dit de celle du jujubier que je regarde
comme le lotus. Elles ont l’une & l’autre
une figure à peu-près fphérique, & elles ne différent
fenfiblement que par la greffeur.
Selon Théophrafte, le lotus qu’il nomme celtis
eft à-peu près de la grandeur d’un poirier. Ses
feuilles font découpées & reffemblent à celles
de Yilcx, Le fruit eft de la groffeur de la fêve
d’Egypte (ou colocafe). IL mûrit comme les raifii.v
en changeant de couleur, & naît comme céu>
du mîrte fur les deux côtés des tiges qui font
«aeabteufes & touffues. Sa faveur eft douce, il
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ne fait aucun mal. (Celui qui eft fans noyau eft
préféré à l’autre). On en fait du vin, & l’arbre
produit une très-grande quantité de fruits.
Pline parle du lotus, à-peu-près dans les mêmes
termes que Théophrafte, il le compare au celtis
d’Italie ; mais il dit que lé climat l’a fait changer,
qu’il eft delà grandeur d’un poirier, quoique
cependant Cornelius-Nepos affine qu’il a
Moins d’élévation. Ses rameaux font touffus comme
ceux du myrtej-la couleur du f uit, qui imite
celle du fafran, change fouvent avant la maturité,
comme dans les raifins. Si et s deux def-
ciiptions ne font ni auflî précifes, ni auflî détaillées
qu’ on pourroit le délirer, du moins elles
renferment plufieurs caraâères qui conviennent
nveux à notre jujubier qu’ à aucun autre arbre
du pays des' anciens lotophages. C e que Théophrafte
& Pline difent de la forme du fruit, de
fa groffeur, de fon goût, de fa couleur, de la
manière dont il naît fur des rameaux touffus,
comme ceux du myrte, &c. fe rapporte parfaitement
à l’arbriffeau dont je viens de parler.
Théophrafte raconte que le lotus étoit fi commun
dans 1 "île lotopkagite, & fur le continent
adjacent, que l’armée d’Opfellus ayant •manque
de vivres en t ra ver-fan t' l’Afrique pour fe rendre
à Carthage, fe nourrit des fruits de cet arbre
pendant plufieurs jours. Et précifement la plupart
des plaines arides & incultes, qui conduifent
de la partie méridionale du royaume de Tunis
vers les ruines de l’ancienne Carthage, font encore
aujourd'hui couvertes en beaucoup d’endroits
de l’efpèce de jujubier que je. prends pour
le lotus ; je n’y ai obfervé aucun autre arbre
ou arbrifleau , avec lequel, on puifle le confondre.
Si nous confuitons Polybe , qui avoit vu le
lotus de Lybie, cet hiftorien nous offrira encore
des rapprochemens plus frappans que ceux que
je viens de rapporter.
. « Le lotus eft un arbrifleau rude & armé d’epi-
« nés. Ses feuilles font petites, vertes, fembla-
» blés à celles du rhamnus, maïs plus larges &
» plus épaiffes. Ses fruits encore tendres reflem-
»» blent aux baies de myrte. Lorfqu’ils font mûrs,
» ils fe teignent d’âne couleur de pourpre j ils
» égalent alors en groffeur les ofves rondes, &
» chacun renfeime un noyau ofleux dans fon
»» intérieur *>. On voit que ces obfervations font
parfaitement conformes avec la defeription que
j’ai donnée du rhamnus lotus.
Je fais que quelques commentateurs regardent
•c lotus de Polybe comme une efpèce différente
le celui de Théophrafte & de Pline. Mais il me
Semble que c ’eft fans fondement j car les def-
criptions de «.es deux naturaliftes ont plus de
rapport avec le jujubier que j’ ai indiqué pour le
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lotus, & qui eft le même que celui de Polybe,
qu’avec aucun autre arbre quicroifle fur les côtes
de Barbarie.
Polybe ne s’ eft pas feulement borné à le décrire
i il nous apprend auflî la maniéré dont on
fe préparoit anciennement, &c ce qu’il en dit ,
fervira encore à confirmer l'opiniop que j'ai cm-
bràffée.
« Lot fque le lotus eft mûr, les lotophages le
» recueillent, le broient & le renferment dans
35 des vafes. Ils ne font aucun choix des fruits 1
53 qu’ ils deftifient à la nourriture des efclaves > !
35 mais ils choififlent ceux qui font de meilleure >}
33 qualité pour les hommes libres. Ils les man-
» geîjt préparés de cette manière ; leur faveur
approche de celle des figues ou des dattes : on
.* en fait auflî du vin, en les écrafant & en les
»» mêlant avec de l’eau ; cette liqueur eft très-
»» bonne à boire, mais elle ne fe conferve pas
»» au-delà de dix jours »».
Pline dit la même chofe que Polybe, fur la
préparation du lotus } ce qui me porte d’autant
plus à croire que c’ eft le même arbrifleau dont
ils ont parlé l’un & l’autre. Il ajoute feulement
que le bois étoit fort recherché pour faire des
inftrumens à vent, & divers autres ouvrages.
Aujourd’hui les habitans des bords de la petite
Syrthe & du voifinage du défert recueillent encore
les fruits du jujubier que je prends pour le
lotus j ils les vendent dans tous les marchés publics
, les mangent comme autrefois & en nour-
liffent même leurs beftiaux. Ils en font auflî de
la liqueur en les triturant avec de l’eau. Il y a
plus, c’eft que la tradition que ces fruits fervoient '
anciennement de nourriture aux hommes, s’eft
même conferve’e parmi eux.
D’aprè$_toutes ces confédérations, il me paroît
évident que c’ eft le jujubier que je viens de décrire
, qui eft le véritable lotus des lotophages.
Il eft le feuf végétal. des contrées qu’ils habitaient
autrefois , qui puifle s’accorder avec ce
qu en ont dit les anciens , & fur-tout Polybe
. qui Tavoit obfervé lui-même.
Il eft vraifemblable que c’ eft ce même lotus 3,
dont Homère a parlé dans l’Odyffée ( liv, 9. ) 5.
mais fon imagination féconde l’avoit entraîné un:
peu au-delà de la vérité, en lui faifant dire que
les fruits de cet arbrifleau avoient un goût fi:
délicieux, qu’ils faifoient perdre aux étrangers le
fouvenir de leur patrie ».
LOUCHES. M. Pa\v dit des égyptiens:
«On croit que plus l’air d’un paysefl fec & prefque
toujours ferein, plus la vue des habitans y eft:
foible5 & à cet égard, l’humidité de l’atmofphère!
femble être beaucoup plus favorable.Mais indépendamment
de cette caufe générale, les habitans de
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l’Egypte, dé la Péninfule Arabique, de la Car-
manie ou du Kirman, de l ’Inde , de Siam, de
la Chine Méridionale, & d’une partie du Japon,
font allez fujets à une maladie des yeux, dont
nous avons traité fort amplement , en parlant
des chinois & des égyptiens en particulier. ( ? •
A v eu g lem en t). Cependant on peut Toupçonner
que de Certains vents très-pénétra ns , qui fouflent
quelquefois de la ligne équinoxiale vers le tropique
du cancer, doivent être regardés comme
une plaie à l’égard de tous ces peuples, auxquels
il ne feroit vraifemblablement point poflîble de
lire fans celle des ouvrages écrits ou imprimes
en c ara 61 ères auflî petits que ceux dont on .e
fert en Europe : d’ailleurs ils ont le diaphragme
des paupières plus épanché que nous, & quelques
uns d’entr’eux, comme les chinois, l’alon-
gent encore par artific e ; & leurs peintres rendent
à peine tout l’orbite de l’Iris fenfible, loif-
qu’ils repréfentent des vifages de face : les fculp-
teurs de Siam taillent les yeux en lozange, les
indiens les font d’une manière fingulière , qu’ il
me feroit difficile de définir 5 & il eft certain qu on
né voit pas non plus de beaux yeux dans les anciennes
ftatues égyptiennes. Cette bizarrerie,
qui a eu cours parmi les mythologues au fujet
de la Vénus Cythéréenne, qu’ils difent avoir un
peu louché, paroît provenir de quelque représentation
de la Nephtis, faite en Egypte: auflî
voit-on que Perfe, pour défigner une prêtrefle
de cette contrée, fe contente de i’appelier lufe*
facerdos »».
LO U N A . Voyei O din.
LOUP. Les égyptiens avoient en vénération
cet animal, parce qu’ ils croyoient qu’Ofiris s’é-
toit fouvent déguifé en loup. Le loup étoit même
adoré à Lycopolis, qui fignifie la viile du loup.
Cet animal étoit coq Sacré' à Apollon , parce que
le loup y dit-on, a la vue fine & perçante. Mais
Paufanias en donne une autre raifon. ■ « Il y
»» avoit, dit il, près du grand autel d'Apollon,
“»» à Delphes, un loup de bronze: c’étoit une
»» offrande faite par les habitans de Delphes eux-
» mêmes. On dit qu’un fcélérat , après avoir
■ »» volé l’argent du temple, alla fe cacher dans
» l’endroit le plus fourré du mont Parnaffe :
»» là s’ étant endormi, un loup fe jetta fur lu i,
»» & le mit en pièces. C e même loup entroit
»» tous lès foirs dans la ville, & la remplifloit
»» d’hurlemens : on crut qu’il y avoit à cela
»» quelque chofe de Surnaturel; on fuivit le loup a
93 & on retrouva l’argent facré , que l’on re-
99 porta dans le temple =>». En mémoire de cet
événement, on fit faire un loup de bronze pour
le cùnfacrer au dieu de Delphes. Voye{ Ly c o -
gène & Mac édo.
Elien donne une autre raifon de cette attribution