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fyriens employoient celui de Marnas, & les égyptiens
celui de Sérapis pour défîgner la divinité
que les jurées nommoient îsw & les latins Jupiter.
Il y a egalement diverüté d’opinion fur l’éti-
mo'ogie du furnom de Lacinia fous lequel Junon
etoit adorée en Italie & fur l’occafion de là fondation
du tempie. Les uns difent ( Servius in
Æneid. lib. I I I v. 5 52 ) que le roi Lacinius le fit
baiir en l ’honneur dt. Junon, parce qu’elle hàïffoit
Hetcu:e, qu'il n'avoit pas voulu recevoir chez lui.
D autres difent que c ’eft au contraire Hercule qui
y en Lhonneur de la déelfe qu’il furnomma
Lacznia, après avoir fait une punition exemplaire
du Yoleur Lacinius. Le fent ment qui me paroît le
plus vrailcmblable eft celui qui dérive l’épithète
Lacinia du Promontoire Lacinium dans la partie
° e.i nommée le Brutium 5 ce qui justifierait
aufii lite -L ive contre Valère Maxime dans la po-
lition que le premier donne du temple de Junon
ladmeane près de Crofone.
Aucune ville du Latium ne fignala autant fon
ze.e & fon relpect envers'Junon que celle de Lanu-
vium. On ignore quel fut le fondateur du temple
ÇiP «reqcbt fiillullre, on foupçonne néanmoins..
qu il étoit auflî ancien que là ville même 5 &
comme i époque de ia fondation de Lanuvium eft
incertaine, celle du temple de la dés fie i f eft pas
p.us connue.’ On pourrait peut-être la rapporter
«i Diomède originaire de Grèce. Quelques-uns
ont cru qu’il avoit confacré dans cette ville un
remple a Junon fous le titre de Sofpita, parce qu’ il :
y étoit abordé heureufement, après avoir efïuyé l
milie dangers fur mer & de la part de tous les i
peuples par les pays defqueîs il avoit été obligé de
paffsr. Au dedans du temple oh voyoit la ftatue
de la déeife reptéfentée d’un jeune âge & d’une
figure très-agréable avec un habillement particulier.
Elle etoit debout , la tête couverte d’une peau
de. chèvre aveq fes cornes, armée d’une hafte,
tenant de l’autre main un bouclier, & fa chauf-
fure étoit recourbée pardeyant à peu près comme
nos patins. On ne peut rien ajouter à la defcrip,-
t:on qu’en fait Cicéron. ( Cicer. de nat. deor. lib.
I , c. 29). Elle paroît ainfi fur plufieurs médailles
confulaires & impériales. Une mfçription trouvée
dans fes ruines à Lanuvium , & publiée par
Spanheim ('de praft. & ufu p. 83 Fabreti. c. 9 )
nous apprend que Jupiter étoit adoré dans le
même temple fous le titre de fifpes ou de fofpes.
Les romains & les latins firent alliance fous
le confulat de L. FuriusCamilIus 8c de C . Mæ~
niusj c’eft alors que la coutume fut établie, que.
dès que les confuis romains entraient en c ha r g e '
entr’ autres cérémonies auxquelles ils étoient obligés,
ils iraient offrir des facrifices à Junon furnom-
mécfafpita dans fon temple de Lanuvium > ce que
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Cicéron exprime très-clairement ( Pro Murena )
quand il d it: nolite a facris patriis Junonis foj-
pitA, cui omn.es confules facere necejfe eft domefii-
eum & fuum confulem potiftimum avcllere.
On connoit une autre épithète de Junon qui
•Hgnjfie à peu près la même chofe & que l’on
peut regarder comme*fynonime de fofpita , c’eft
celle de confervatrix qu’on ht fur une médaille de
Julia Mamæa, au revers de laquelle la déeiîe eft
affile ( Harduin, fol. p. 820 ) ayant le paon à'fes
pieds avec la légende IUNO CONSER V A TRIX,
& fur une de Salonine au revers de laquelle
■ Junon paroît debout tenant de la- droite une pa-
tere & de la gauche une hafte ( Band. p. 2. yz) ,
avec le paon à fes pieds & la légende IVN O
CONSERVAT.
' Cette épithète fe lit auflî fur une infcription.
avec celle de placida, Se: elle paroît bien ici fe
rapporter au fecours qu’elle a ccordoû aux femmes
dans les accouchemens & aux fuites fâcheufes
dont elle les prélervok (Gruter x x v , n°. 2 ).
Que les fabins aient emprunté de leurs voi-
fins le culte de Junon, ou qu’ijs le lui aient déféré
d’eux-mêmes i il/»’en eft pas moins cer tain
que la déefle étoit en grande vénération chez ces
peuples. Es l’honoroient fous le titre de curis ou
quiris furnom que quelques auteurs & entr’autres
1 iutarque ( Qu&Jl’. rom. ) ont cru formé d’un terme
de la langue des fabins qui fignifioit une hafte,
d’où ils prétendent auflî que le dieu Mars a été
appelé Quirinus. Cette étimologie pourroit bien
avoir quelque fondement. ( On connoît une infeription
fur laquelle le titre de Quiris eft donné
à Junon ). Mais il paroît plus vraisemblable que
fi elle a été adorée fous ce titre par les fabins,
comme il y a lieu de le croire , elle tiroit plutôt
ce nom de la ville capitale de ces peuples qui
s appeiloit Kuplsj & que le véritable furnom de la
déelfe étoit Kupirlei. C ’eft ce qu'Etienne ( Stepkan.
de urbïb.) fait entendre par l ’explication qu’il en
donne à ce mot.
D ’où l’on peut conclure que les furnoms.de
Curis & de Quirïs ne font que des diminutifs ou
des orthographes variées de celui de ICvpttiu,
& que fon origine eft , nom de la métropole
des fabins. . • :
Quant au furnom Fer onia, Strabon dit qu’au pied,
du mont Srora&e étoit une ville nommée Fero-
nia , & qu’on y adorait une déefle du même nom.
Ce pays étant limitrophe de-ce lui des fabins qui
honoraient déjà Junon fous lé nom de. Curis , 8c
qui avoient un temple confacré.à la déefle Feronia,
lequel leur étoit commun avec les latins, cette
déefle pourroit bien être Junon; ou plutôt le mot
de Feronia feroit un furnonrde Junon qu’on aurait
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«mployé feul , comme on fit ailleurs celui dé
Lucina.
Junon fut honorée à Rome fous les noms de
Sororia ou de vengerefle des foeurs relativement
au crime d’Horace • '& de Mo ne ta, c’eft-à-dire,:
de la dorfneufe d’avis,. Il y avoit un temple de
Junon fur lé ejpitolè , .avant que. Camille le fils
eue voué le temple de JunonMoneta ; ou bien
il faudroit dire qu’ il voua feulement un temple à
Junon,y '8c que dans la fuite cette déeife reçut.le
furnom de Moneta, à caufe dè l’avis qu’elle doiina
d^ns ce temple, de faciifier une truie, pleine,.
afin de faire..celier un tremblement de terre.
Suidas donne une origine d fférente au temple!
qui fut bati'par les romainsà Junon, Sc une autre?
étymologie du furnom de Moneta. Les romains/:
dit cet auteur , manquant d’argent dans la guerre
contre Pyrrhus & les tarentlns-, firent un voeu à
Junon.j la déafle leur répondit que fi pour défendre
leur droit, ils comb.ittoient avec courage, I
ftargent ne leur manqueroit point. Sur quoi' lès-romains
avant tibtenu le fucçès, ils honorèrent Junon ;
fous le titre de Moneta, & ils ordonnèrent que
déformaisj on frapperoit la monnoie dans fon
temple. G’étoiteneffeïprès de ce temple qu’étoient
les maifons des monétaires appelles triumvirs.
' Il a des auteurs qui dérivent le nom latin de
Junon a Juyando , -quafi Juvarèt. En la confidérant I
comme 1 air qui donne le mouvement & la vie
aux hommes, ou bien fous le rapport du fecours
quelle procure aux femmes daps les douleurs de
l’enfantement, cette étymologie eft également
raisonnable. Je ne^crois cependant pas qu’elle foit
bien sûre ; & fi l’on veut dériver le mot Juno du
verbe Juvare i feulement parce que l’un & l’autre
commencent par la même: fyllabe, j’aimerois mieux
Je_ dériver cie celui de Jupiter "qui ne vient pas
lui-meme de Juvare. Il femble que le nom H"p«
qui doit venir de la même racine que H é r o i t
un ancien fynonime de AWo/v«, dame ou maitrjjfe,
titre d honneur de plufieurs divinités grecques. -
. ^ paon ,1 oifeau favori de Junon, ne fe trouve
jamais auprès d’aucune autre déefle. L ’épervier &
1 oiion lui étoient auflî confacrés, & accompagnent
quelquefois fes flatues. On ne lui facrifioit
point de vaches, parce que dans la guerre des
■ p ans contre les dieux, Junon s’étoit cachée en
^gypee fous la figure d’une vache. Le diefame,
&J a Srenade étoient les' plantes que les
grecs .lui offraient, & dont ils ornoient fes autels
lui ; S lrn.a^es* j-a viétime la plus ordinaire qu’on slfJSSfii et? !t ' ‘agaeau femelle : cependant
à R m!er ,our ,c*e chaque mois on .lui immoloit
a une truie.
paf A d / ? Alj T n ’ anaens poètes cités
Par Athenee, difent qu à Sparte on voyoit Junon
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coèffée avec le iïiMiw, tel que Gérés le porte
ordinairement.
Elle, paroît ainfi coëfféé fur une médaille'des
argiens, publiée par Haym.
Junori, indépendamment de fon diadème relevé
en pointe au milieu , eft reconnoiîfable- fur les
mpnumens à fes grands yeux & à /a-hôuche im-
périeufe : traits qui caraélétifentfibien cette déefle,
qu’on l’a reconnue à un fimple profil qui é ta t reftè
d’une tête de femme, débris d’un bas-relief
du cabinet de Strozzi. La'plus belle tête de cette
déeife ; de grandeur coloflale, fe trouve à la villa
Ludovifî j on voit au même lieu une tête plus
petite de la même déefle qui mérité d’occuper le
fécond rang. Mais la plus belle ftatue que nous
ayons de cette divinité, eft celie du palais Bar-
berini.
Par rapport à l’air qu’elle défîgne, Junon peut
etre repréfentée vêtue de bleu-célefte 5 quoique
Martianus Capella ( lib. I . pag. 19 .) la faffe paraître
couverte d’un voile blanc:
Junon-nomùct eft une belle ftatue du Muféum
Pio-CIementin, qui a été publiée par Winckel-
mann. Il a cru reconnoître Hercule dans l’enfant
qu’elle allaite , trompée par Jupiter , félon Paufa-
nias, ou perfuadée par Pal las, félon Tzetzès.
Mais M. Vifconti, éditeur de ce Muféum, d i t -
que cet enfant eft Mars, dont Junon fut mère
fans de fecours d’aucun homme, & par la vetttt-
feule d’ une fleur*.
Junon paroît dans la même attitude , 8c de plus
tenant cette fleur, funune médaille de bronze de
Mammée.
Elle tient quelquefois par la même raifon une
fleur de lys, plante qu’elle aimoit beaucoup, félon
Clément d’Alexandrie. ( Padagog. I. I I ..c. V I I I .)
Voici les pierres gravées de la colleélion deStofch,
qui font relatives à Junon.
Une pâte antique. Tête de Junon voilée, comme
Vefta.. On la voit fur un bas-re’ie f ( Bartoli admi-
randa tom..XXVII, ) , à Rome, avec un voile qui
lui couvre entièrement le vifàge. Muratori. croit
X In fer. tom. I. p. 28. ) que la tête de Junon voilée
lignifie l’air, dont elle étoit 1 image.
Sur une cornaline , Junon debout, avec des
cornes fur la tête, & la peau de chèvre dans la
rnajn gauche .‘ .avec ces .attributs elle eft appellée
Sifpita ow Sofpita. On voit Junon avec des cornes
fur plufieurs médailles romaines.
Sur une pâte de verre, Junon aflîfe fur un trône,
fur le doffier. duquel on voit d’un côté la tête
d’Apollon, avec des rayons repréfentanr le foleil ,
ôc d£ 1 autre cote Diane, avec le croiffijut repré-^
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