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moyens de cette pratique,. 8c j'avois eu deffein
«’en expliquer les détails ; mais ce qu’en a dit
Ml Du fa i , dans les mémoires de l’académie des
fciences , en 173 z , (pag 169 'i m’a paru fuffifant;
quoiqu’il eût été poffible de traiter un peu mieux
cette matière , & de lui donner une plus grande
étendus. Le feeret, dont il eft queftion, n’a
jamais été perdu, car je-le vois conlDmmeut
pratiqué depuis le temps des grecs jufqu’à notre
fiècle. Plusieurs monumens indiquent meme qu’il
étoit connu des arabes. S’il étoit perdu, les
cornalines, qui avoient éprouvé un feu violent,
l’auroient fait retrouver. En t ffet, il étoit aifé de
s’appercevoir que ces pierres jetcée-s au feu , ne
font que blanchir à leur fupe-ficie , quand la
chaleur, qui les calcineroic. à h longue, n’eft
pas confidérable. L’expérience a donc montré.que
la pierre n étoit point altérée fous le lit blanc
qu’un feu médiocre lui avoit communique. Gtt:e
confidération a fait naître les ouvrages e-n creux
ou de rcferve, qui ont produit ces efpèccs dé
€amayeux»i.
ce Au relie ,on ne doit point inférer de ce que
j’ai avancé à l’occafion de .ta gravure des lettres,
qu’aucun artifte fe fort jamais fait aider également-
pour le pol'.ment des pierres gravées. Quelque
longue que foit cette opération, elle eil trop
eflèntielle pour qu’on l’ait confiée à de lïmples
ouvriers».
Gori ayant vu le mot YAAOY, fans addition,
fur des pierres gravées, & ayant trouvé fur
d’autres 1 infcvsption AIOcKOYPIÀOT Y A AO Y
en a inféré qu’il y avoit deux graveurs quiportoient
le nom d'Hyllus. C e n’ étoit cependant' qu’un
feul & même artifie qui fe fera fait honneur
d’ajouter a fon nom celui de Diofeoride fon
maître, fur quelques pierres, quoiqu il ait négligé
de le faire fur d’ autres. Cette addition , du
m m du maître à celui de l’élève , n’eft pas fans
exemple par rapport à Diofeoride; puifqu’on
trouve fur une pierre gravée, publiée par le
baron de Stofch (p1. 34 )> W .nom d’Eutyches
joint a celui de ce célèbre artifte.
Les graveurs ont quelquefois fubftitué à leur
nom quelque fymbole, ou attribut analogue,
appelles logogriphe par quelques écrivains.
Mariette regarde ta figure de pêcheur, qui
eft placée dans i’exergue delà célèbre pierre gravée
connue fous le nom" de cachet de Michel- Ange^
comme une efpèce d e ,logogriphe, dont le graveur
s’eft fervi pour marquer fon .nom.
« Les logogriphes, d i t - i l , ne font point fins
exemple dans l’antiquité. Cicéron , étant qüefteur
en'Sicile , offrit aux dieux du pays une. ftatue
d’argent ; Plutarque ( in. vita Cicer. mit. )
remarque qu’il y fit graver tout au long^ fes deux
premiers noms j Marcus Tullius , 8c qu aulieu de
le faire fuivre de fon furnom Cicéron, il ordonna
au graveur d’y ajouter un pois chiche. Sauron&Ba.
trachus, deux fculpteurs célèbres de Lacédémone,
n’ayant pu obtenir que leurs noms fulfent mis
dans l’infcriptîon du temple d’Oétavie qu’ ils
avoient conltruit-, s'avisèrent de tailler fur les
bjfas de§ colonnes un lézard & une grenouille,
qui étoitnt les fymboles de leurs noms, & fe
firent ainfi connoitre pour les architectes de ce'
grand édifice. (Flin. lih. X X X V l , c. V ) ».
«Le baron-de Stofch à cru qu’un beau vafè de
marbre de la galerie Juftinienne à Rome., fur.
lequel on voit un lézard, étoit l’ouvrage du
même Sauron. Ne p ouïr oit-on pas dite auflî que
cette étoile qui accompagne le nom de Diofeoride,
fur une pierre gravée, repréfentant le portrait
d’Augufte , rapportée par le même Stofch, &
qui eft actuellement (en 175,0) en Hollande dans
le cabinet qu’a lailfé M. le comte de Thoms,
eft un (ÿfnbole qui a été mis d’abondant par Ip
graveur; que c’eft une allufion de fon nom
Diofcuride . ( car c ’eft ainfi qu’ il l’écrivoit , à
celui des ; Drofcurts , nom que les grecs don-
noient aux ctoj'es favorabLs. de Caftor & de
Poiluxi Je ne lais fi je rencontre jufte, mais,
je ne vois pas quelle autre fignificatipn pourro t
avoir cette étoile, ni pourquoi elle auroit trouvé
place en cet endroit ».
« La figure du pêcheur ,c i - defifus mèntionnée,
étant prife dans le fens que je lui ' donne, le
mot grec A’pueo?, qui fignifie un pécheur., doit
conduire à - la découverte du nom de Tartiite
qui a gravé cette belle cornaline. En partant de
là , on paurroit fort bien fuppofer que c’ eft un
ouvrage d'Allion , excellent graveur, de qui l’on
a des pierres gravées d’une lingulière beauté.
Mais encore une fois, ma remarque ne doit être
regardée que comme une conjecture, qui peut
pourtant obtenir quelque créance, s’il eft vrai,
ainfi que l’a obfervé Gori (Muf. Florent, t. II.
p. 15. ) , que tous les noms des grecs, tant des
hommes que des femmes, n’aient jamais été
fans quelque fignification ».
Après avoir fait connoîtrë le mérite dés pierres
chargées du nomdel’artifte, 8cdes pierres écrites,
nous devons prévenir les antiquaires contre les
fourberies que le goût pour ces pierres occafionne
journellement. Nous emprunterons le îécours de
deux écrivains, qui ont traité cette matière avec
beaucoup de fuccès, Mariette 8c M.Eckhel.
« L ’on rencontre affez fouvent,dit Mariette,
des pierres gravées en creux 8c même des
çamées , fur lefquels fe lifent des noms grecs,
& quelquefois des caractères romains, étrufques
ou puniques. C e font prefque toujours les noms
des artiftes qui ont fait ces gravures , ainfi que
Baudelot 8c le baron de Stofch l’ont très-biei*
prouvé ; 8c les curieux ne manquent pas de s'en
prévaloir, pour décider & de la valeur de ces
pierres, & de leur antiquité. C e feroit donner
dans un excès de pyrihonifme , que de douter
un inftant de l ’authenticité du nom de Plotarque, ,
qui fe l:t fur un merveilleux camée du cabinet
du grand-duc, repréfentant un amour qui joue
delà lyre, monté fur un ljon. Jl eft trop vmble
que ces caractères en relief font épargnés dans
Je même lit de la pierre que les figures qui
forment 1© fujet, 8c que l’un & l’autre ont
été gravés dans le même temps».
« Mais il n’ en eft pas de même’des inferiptions
qui font gravées en creux fur les pierres; elles
peuvent y avoir été mifes apres-coup, & voici
les lignes auxquels les curieux croient reconnaître
fi elles font vraies, ou fuppofées. On a obfervé •
que les ancien^ artiftes, fur-tout les grecs, o n t,
eu égard, en écrivant leur nom, a la deftina-
tion que devoit avo r la pierre fur laquelle ils le
mettoient. Sur celles qui dévoient fervir à cacheter
, les caraCtères font gravés à rebours , afin
qu’à l’empreinte le nom fe prefente dans le fens
qu’ il convient pour le lire. Quand çeft un
camée, ou une pierre taillée en cabochon ,
dont on ne doit pas tirer des empreintes, le
nom eft écrit dans le véritable fens, on le lit
fans aucune difficulté, fur la pierre même. Les
fauffaires ne fefont pas affujettis à cette règle , &
cette inattention les décèle. Le plus fouvent ils
manquent d’exaCtitude; 8c en conféquence s’il y
a quelque vice dans l’orthographe d’ un nom ,
fi toutes Ls leitres ne font pas de la même hauteur,
d’ une égale proportion & bien alignées,
pour peu qu’ on apperçoive quelque incertitude
dans la formation de leurs jambages, on ne
balance pas à les arguer de fauffeté.
«Si au contraire ces mêmes lettres font régulières
8c bien proportionnées, fi les jambages
font d’ une extrême fineflè 8c tracés nettement,
c’eft (à entendre ceux qui fe croient en droit
de prononcer fur cès matières ) une marque in-
contcftable d’antiquité; & il eft certain que les
ancieps, & fingu'.ièrement les grecs , ont apporté
une extrême attention pour bien former
leurs caraCfères , 8c les graver avec délicateffe.
Si les mêmes curieux remarquent encore que
les jambages de ces lettres foient terminés par
de petits points arrondis, c’eft pour eux une
nouvelle & forte preuve de l’ authenticité de là
gravure y parce qu’on n’eft plus dans l’ufage ,
depuis long-temps, de former ainfi les caraCtères.
Ces points étoient, dit-on, deftinés à recevoir
8c à retenir de ^petits filets d’or qui fe trou-
voient ainfi engagés dans la pierre, & y expri-
moient, par le moyen de l’incruftation , le nom
qu’on y vouloit mettre , à-peu-près comme on
incruftoit dans la pierre 8c dans le marbre de
grandes lettres d’airain > lorfqu’on plaç.oit fur
les fiontîfpicesdes grands édifices, des inferiptions
en bronze. C ’étoit le fentimenl du favant Peirefc,
8c je ne préfente cette idée fingulère que
d’après lui ; car pour m oi, je fuis fur cela d’uri
avis fort différent. Je ne vois rien dans ces
points qui termine les jambages des lettres
grecques fur quelques pierres gravées , qu: n’ ait
été pareillement obfervé dans Jes légendes de
prefque toutes les médailles grecques; 8c de-là
je conclus que cette façon de former ainfi les
lettres fur les pierres gravées, n’ a rien de particulier,
8c que l’opinion de Peirefc, fi refpec-
table dans tout autre cas, eft fans fondement».
«Tout ce qu’ on pourroit dire fur ces caraCtères-,
c’eft qu’ils forment un préjugé favorable à l'antiquité
de la gravure qu’ils accompagnent ; mais
rien n’eft cependant fi incertain que les confé-
quenceS qu’on en peut tirer, 8c pour dire la
vérité, je ne trouve guère plus, de certitude
dans la plupart des autres obfervations que je
viens d’expofer. Je ne les regarde prefque toutes
que comme des minuties, qui ne vont point au
but- Et en effet, pour ne point perdre de vue
les inferiptions qu’on trouve fur les pierres
gravées, xowt'graveur qui voudra s’en donner la
peine, & qui aura une main légère, tracera des
lettres qui imiteront fi bien celles des anciens ,
même celles qui font formées par des points t
que les plus fins connoiftturs prendront le change»*
« On fait d’ailleurs que de tout temps, il y a
eû de ces ouvriers médiocres, ou avides du
gain, qui pour faire valoir davantage leurs pro-
du'€tions , leur' ont fuppofé des noms illuftrës,
8c d’autres qui pour fe jouer de certains curieux
, nourris dans la prévention, ont eu recours
aux mêmes ftratagèmes. On pourroit rapporter
glufieurs exemples de pareilles fraudes,
qui ont été imaginées depuis peu en Italie ( Dijf.
glytogr. p. 99) , Sc je fuis témoin de quelques-
unes qui n’ont que trop bien réuflî ».
« Qui pourra donc aflurer que plufieurs de ces
noms d’ art ftes, qui fe lifent fur les pierres
gravées , 8c même auprès de fort belles gravures ,
n’y auront pas été ajoutés dans des fiée les pof-
térieurs, fur-tout depuis que Gori a fa t ob-
ferver que le nom de Cléoménès écrit en grec,
qii’on voit fur le focle de la célèbre Vénus de
Médicis , eft une infeription poftiche, 8c qui ne
mérite pas plus de créance, que celles des chevaux
de Monte - Cavallo, attribués pendant fi
long - temps, Sc avec fi peu de fondement à
Phidias 8c à Praxitèles» ?
Il faut joindre aux pierres chargées du nom
du graveur , les pierres écrites.
Les auteurs qui ont publié des pierres écrites
( que les auteurs défîgnent en latin par le nom
de gemma litterata, & en italien par celui de