
*> Dans le culte que nous rendons à ce dieu., nous
as invoquons Janus geminus 3 Janus père, Janus
S3 Jurtonius 3 Janus Confivtus , Janus Quirinus,
j> Janus Patuldus & Clufivius » Tous ces noms
font expliqués dans leurs articles.
Plutarque , dans fes queftions romaines , rap-r
porte deux opinions différentes, fur les deux têtes
adoffées de Janus. ;C ’e ft, dit-il ^ ou parce que ce
prince étant grec & natif de Perrhèbe ,\il vint,en
Italie s'établir parmi des barbares > & changea de
langue & de genre de vie ; ou parce qu'il perfuada
aux italiens , peuples féroces & fauvages, de changer
de moeurs , de s'appliquer à l'agriculture , &
de fe policer.
Il y avoit à Rome plnfieurs temples de Janus ;
les uns de Janus bifrons ou à deux faces; d’autres
de Janus quadrrfrons ou à quatre Faces. Les temples
de Janus quadrifrons étoient auflâ à quatre faces
égales, avec une porte & trois fenêtres à chaque
face : les quatre côtés & les quatre portes mar-
q a oient fans doute les quatre faifons de 1 année 5
& les troh fenêtres de chaque côté, les trois mois
de chaque faifon : ce font les douze mois de l’ année.
V arro'n dit qu’on avoit érigé à Janus douze
autels, par rapport aux douze mois. Ces autels
étoient hors de Rome , au-delà de la porte du Ja-
nicule. Ovide nous apprend encore une particularité
fur Janus, favoir que, fur le revers dé fes
monnoies, on voyoic un navire , ou Amplement
Une proue de navire. C 'é to it, dit ce poète, en
mémoire de l’ arrivée de Saturne en Italie fur un
vaiffeau. Voye^ Cahos , Ho ru s , &c.
Prob l ème mythologique sur Janus
p a r M. D u p u i s ..
La nature & les fondions d'une divinité mythologique
3 qui a fon fiège dans les constellations , étant
données , déterminer le lieu quelle occupe dans le
ciel ?
Nous avons cette fatïsfadion dans notre travail,
de pouvoir réduire fouvent à la marche rigou-
reufedés géomètres, la.nouvellè manière de procède!
à la folution des énigmesm} tholôgiques, d’après
nos principes phyfiques , métàphyfiques & attro-
nomiques, 8c d’après notre théorie fur le feu principe
& fur l’ame univerfelle. Nous allons en faire
l ’effai fur le premier dieu de la Mythologie romaine
, le fameux Janus, qui régna fur le Latium,
& donna l’hofpitahté à Saturne, ou au dieu du
temps. Nous examinerons d’abord fa nature & Tes
fonétions ; & nous déterminerons énfuite fon lieu
dans le ciel.
Voici ce que Marcus Meffala, qui avoit été cinquante
ans augure , & qui avoit fur ce dieu des
idées plus juftesque le Ample peuple, nous dit
dé Jàniti : il cil le dieu « qui-ctmftafingit y eadem-
55 que régit , aquA terr&que vint ac naturam'grâveftb
» at que pronam dilabentem , ignis atque anim& It-
>3 vem imrnenfum , in fublime fugientem copulavit
» circumdato coelo : quA vis coeli maxima duas vis
as difpares colligavit. ( Macrob. fat. 1. I. ) Cette
>9 idée fur Janus , confidéré comme dieu qui fait
» ce que fait le feu Ether démiourgique de la
» Théologie d’Orphée, lequel donne une forme
» régulière au cahos , eft confirmée par Ovide,
» ( F a f i 1. I, v. 103 . ) Voici ce qu’il fait dire à
99- Janus :
99 Me chaos antiqui3 nam res fumprifca3 vocabant
v> Lucidus hic aèr , & quA tria corpora reftant,
95 Ignis 3 aqu&3 tcllus, unus acervus ërant.
» Ut femel h ac ferum fecejfic lite fuarum 3
■ 931 tique novas abiit maffia foluta domos ,
»9 Flamma petit altum , propior locus aéra cepit #
39 Sederunt medio terra , fretumquefolo.
y> Tune ego qui fueram globus 3 & fine imagine moles J,
39 Infaciem redit3 dignaque membra deo.
Nous ajouterons à ce témoignage celui d'un
auteur , connu fous le nom de Bérofe, qui, quoM
qu’il ne foit pas de la plus grande autorité, a con-
fervé cependant des traditions précieufes , 8c s'accorde
parfaitement ici avec Ovide & Meffala , fur
Janus , qu’ il confond avec le Deucalion des Scythes,
peut-être à eaufe du vaiffeau qui les carac-
tétife tous deux. Il l'appelle chaos ëz femen mundi r
il lui donne pour femme la Terre , époufe du ciel
dans toutes lesrThéogonies- Il dit f l- III- ) que ce
fut lui qui ce docuit afirorum curfus , & diftinxh an-.
»J num ad curfumfolis , & duodecim menfes ad mo-
93 turn Iuu a ...................39 j qu'il régna fur lTtalie, &
qu'on.l'y honore fous le nom de cahos, ccelum , 8c
« femen mundi , pat rem deorum majorum-3 & tniho-
99 rum, animam mundi moventem ceel'os. lllurrt
y» fignant in feriptis curfu fo lis & motu luiiA &
33 feepiro dominii. . . . . Duabufque clavibus , & c * »
Il n'eft pas difficile de reconnoitre dans ce génie
célefte, aux mains duquel on remet le fceptre&
les clefs du temps , dians ce dieu, ame du ciel 8c
du monde, 1 b Janus, dont les deux auteurs nommés
ci-deffus nous ont défini la nature. Le titre de
père qu'il lui donne, appartenoitf à Janus, quafi
deorum deum, dit Macrobé ( fat. 1. I . c: IX. )
citant les vers faliens les plus anciens-. Sa liaifori
avec la révolution du monde, & avec lefoleil, &
l'année dans Bérofe, eft auffi confirmée par Ma-
crobe î ce Alii Janum mundum3 id efi fcoeium ejfé
93 voluerunt , & Arnobe" { contra gentes , /. III-P«
>9 r i 7. ) Janus quem quidam ex vobis mundufti s
39 annum alii , folem nonnulli èjfe prodidêre ». Lé
même Amobe ifx-Janus 3 fils du C ie l; « I om-ü*
is quem ferunt Coelo procreatum regnajfe in Italiâ
33 primum ».
La nature de Janus eft donc la même que celle de
la force démiourgique, qui agit dans le monde
vifible, que celle de ce feu principe, -générateur
des corps , qui meut la fphère, circule dans les
deux, & brille dans tous les altres, & fpécialement
dans Je foleil, enfin l'agent univerfel des formes
régulières du cahos. En lé plaçant dans le a d ,
dont les uns le font fils, ou avec lequel les autres
le confondent, en le formant de la meme fubftance
que le foleil, nous ne nous écarterons point des
principes théologiques de 1 antiquité.
Examinons maintenant quelle fonction il rem-
pliifoit dans l'ordre du monde , & quel é.toit
fon rang dans la république des /dieux.— Janus
ouvroit la marche des révolutions céleftes , étoit-
place aux portes de l’Olympe, étoit le chef du
temps & de l’année, 8rdonnoit l’impulfion aufyf-
tême harmonique du monde.— Il étoit le père de
l ’année :
Jane biceps , anni tacite labentis origp.
OviDII fafi- l.v . 64.
Principium des , Jane , licèt velocibus annis ,
F t revoc&s vultu facula longa tuo.
MAr t iALIS epzgr. I. VIII.
Il ét.oît comme le chef de l’harmonie univerfelle.; •
I l Quidquid ubique vides , cceliim , mare , hubila ,
terras ,
sa Omnia funt nofira claufa , patentque manu»
99 Me penès eft unumvafti eufiodiu mundi y
39 Et jus vertendi cardinis -omne meum eft. ■
Comme l’année folaire & fes divifions rece-
voient de lui leur impulfion, il eut tout le cortège
fymboüque du génie du temps.
On mettoit à fes pieds douze autels repréfènta-
tifs des douze mois de l’année, dont il faifoit l’ouverture.
( Sot. L I. c. IX . ) “ Varro lïbro quinto
9.3 rerum divinarum feribit, dit Macrobe, Jano duo-
33 decim aras pro totidem menfibus dedicatas 33. 11
préfentoit dans fes mains le nombre 3 égal à
celui des jours de l’année. ( Ibid. ) « Simulachrum
r ejus plerumque fingitur manu dexterâ trecentor.um &
finifirâ fexaginta & quinque numerum retinens ad de-
monfirandam anni dimenfioncm ». Pline en dit autant.
( P line l. X X X IV . c. V I I . ) “ Utper fignifi-
>3, cationem hanc anni tempo ris & Avi fe denuo indi-
caret j». On mettoit fouvent auffi près de lui un
feul autel à quatre faces, pour déligner, dit Plutarque
( Plut. Queft. rom.) , les quatre faifons de
l’année} quelquefois on délignoit la mêmechofe ,
; en donnant à fa ftatue quatre vifages, dont les.
différens âges exprimoient ceux du temps.
Il préfidoit avec les faifons & les heures aux
portes du ciel 5 & cette fon&ion lui fit donner le
nom de jànitor , ou portier du ciel :
Pr&fideo foribus coeli , ciim mitibus horis }
Inde vocor Janus,
Il en avoit les clefs ,•« citm clavi figuratur ™, dit
Macrobe ( Sac. I, I. c. IX. ). Ovide ( Fafi. 1. 1.
•p. 9,9. ) le repréfente de même :
t< Ille tetiens dextra baculum , clavemque finifirâ. 33
Perfonne n’entroit au c ie l, s’il n'en ouvroit la
porte.
Ovide lui demande pourquoi dans tous les facri-
jfices faits aux autres dieux, il recevoic toujours les
prémices de l'encens :
w Car qûamvis aliorum numina placem ,
?» Jane, tibi primo -thura3 merumque fero ?
\ V .i7 u )
Janus répond :
P Ut per me pojfis aditum , qui lumina fervo ,
1? Ad quofcumqueyelis prçrsus. habere eleçs.
Tous, ce-s attributs fymboliques du temps, &
leur explication fe trouvent dans un paffage de
Suidas , fur Janus . dont voici la traduéfcion latine:
» Januarii fimulachrum eft .quadrif orme, ob quatuor
39 anni converfioncs: Ain finguntdcxtrâ manu clavim
m geftantem , ut prinçipem temporis é? apertorem anni
» <& janiiorem; alii dextrâ ejus numerum 3Ô0 , in
finifirâ 6$ terientem % ut qui fit annus 39. Longîn ,
d'it-il, lui donne le nom d‘JEonarius , c ’eft-à-dire,
de père des Aèdes 8c du temps.
Le premier des douze mois fut fpécialement fous
fonTnfpeétton, & emprunta de lui fon nom. Le
commencement de taus les autres lui fut également
«confacré comme au père du temps 8c de
fes divifions. Numa, dit Macrobe ( liv. I, chap,
XIIÏ. ) , donna au premier mois le nom de Janus.
« Et primum anni ejfe volait, tanquam bicipitis
33 dû menfem» }• & ailleurs ( chap. I X . ) , ;« non
33 fpliim Janurii menfis , fed omnium menfium in-
» grejfus tenet ».
Il ne nous refte plus rien à defirer, pour con-
noître la nature & les fondions de Janus dans
l’adminiftration univerfelle du monde. Il s'agit
maintenant avec ces données, de déterminer le
lieu qu'il occupe fur la voûte célefte, parmi la
foule des génies brillants qui la peuplent, & forment
le cortège du Dieu-Soleil, qui s'avance tous