
forte que la tige foit nette depuis le pied jufqu’à huit
pouces de hauteur.
On garde ces premières feuilles pour les employer
en tabac commun j il faut arracher toutes
les herbes qui viennent dans la terre où le tabac
eft planté.
La tige étant parvenue à la hauteur d’environ
trois pieds , à trois pieds & demi , on Tétête ■ c’eft-à-
dirè' que l’on coupe l’extrémité de la tige pour l’empêcher
;de monter davantage fe donner plus dé.
ccfrps & de fubftance aux feuilles' qui relient , i
aù’on laide ordinairement au nombre de dix ou
doùze.
Si on ne coupoit pas l ’extrémité de la tige ,
elle pourroit s’élever jyifqu’à cinq pieds de haut.
Il faut, pour mûrir le tabac le teins propre pour
la t vigne. '
On corinoît qu’il commence à mûrir lorfque les
feuilles qui font vert es changent de couleur &
deviennent marbrées ; c’eft ordinairement à la fin
djjotît & dans le courant de feptembre. On cueille
le s, feuilles à mefure qu’elles mutifleiit , & les
enfilant avec une ficelle par la tête, on en fait
des paquets de deux à trois douzaines.
Cqlles du milieu de la tige font toujours les
meilleures , & ce font celles-là que l’on deftine
pour fuer & faire le tabac fans côte.
Ou laifle la tige dans la terre pour laiflèr le
teins de mûrir aux feuilles qui relient fur pied, de
forte que l’on voit encore quelquefois du tabac dans
les champs au, mois de décembre.
Les dernières feuilles fervent à faire le tabàc en
prêt & le- tabac, commun.
Pour faire fécher les feuilles on les fufpend dans
les greniers ou fous les ^toîts des maifons & autres
endroits à couvert de la pluie.
Elles prennent leur couleur pendant qu’elles font
à la pente 3 & .c’eft par - là que l’on juge mieux
de leur qualité fe de l’ufâge que l’on en peut
faire.
L a meilleure couléur eft d’un beau roux foncé,
le terme en ufàge dans le pays, eft couleur de
chapon rôti : les bonnes feuilles doivent avoir au
moins un pan & demi de longueur, beaucoup de
corps & de gomme.
Celles de couleur verdâtre ou d’anguille., ou
de choux jaune fe pâle, font les moins bonnes & ne
fervent que pour les tabacs communs.
L ’on fait quatre clartés de ces feuilles ; la première
pour faire fuer \ la deuxieme pour faire le
tabac lans côte j la troifieme pour le tabac en prêtj,
la quatrième pour le tabac commun.
Pour faire fuer les feuilles on choifît un grenier
lec ou il y ait de l’air. On prend les paquets de
feuilles , telles qu’on les a dépendues du lieu où
elles étoient pour fécher, on en fait un lit dans
le greuier, de la longueur qù*on veut, fur la largeur
de deux longueurs de feuille , que l’on couche
pointe contre pointe, ou tête contre tête, de la
hauteur d’environ trois pieds j c’eft ce qu’on appelle .
mettre les feuilles, en prejfc,
Ain fi placées les unes fur les autres, elles s’échauffent
& fuent beaucoup, de forte que fi on met
la main entre ces feuilles, on la retire toute mouillée
de leur fueur. i
Comme il faut ôbferver un certain degré de
I chaleur, il eft néceftaire ' de prendre garde qu elles
ne 's’échauffent trop, car elles fe bruleroient. On
^emploie dés gens expérimentés pour les veiller,
qui , s’ils s’apperçoivent qu’elles prennent trop, de
chaleur, défont les prefles , retournent les paquets
& leur donnent de l’air , enfuite on les remet
comme elles étoient ; foin qu’on ne cefle de prendre
jufqü’à ce que la chaleur & la fueur; foient
paffées. - ' ' • ' .
Elles s’échauffent plus par un tems de pluie que
par un tems fec. Lorfqu’il pîgut, il'faut ouvrir les
fenêtres du nord & fermer celles du midi, en ob-
fervant néanmoins que file vent, du nord étoit trop
grand , il ne faudroit pas ouvrir les fenêtres, car
il fécheroit les feuilles & les empêcheroit de
fuer.
Les bonnes feuilles foumifes à la méthode ci-
deflus expliquée fuent naturellement. Celles qui
font inférieures ont befoin d’être aidées y pour cet
effet on les couvre avec quelques planches , &
l’on remarque qu’elles s’échauffent & fuent en raifon
de ce qu’elles font chargées.
Si le tems eft convenable la fueur pafTe en quinze
jours, finon il faut le double du tems.
On connoît qu’elles ont allez fué lorfque ea
mettant la main dans les prefîès on trouve qu’elles
font froides & feches. On les laiffe néanmoins quelque
tems en cet état afin qu’elles fe purgent entièrement
d’humidité.
Si en les remuant durant la fueur on trouve
des feuilles moifies ou brûlées, on ôte ces feuilles.
L a ràifon qui porte à faire fuer ces feuilles eft
qu’elles ne fe conferveroient pas autrement. -
Elles perdent ordinairement dix à douze pour eeat
de leur poids dans la fueur.
On n’en fait guère que pour le fermier, fe lorfqu’il
en reçoit la livraifon, il les fait choifir paquets
par paquets , & rebute celles qui ne lui con-
1 viennent pas.
Ce rebut fert à faire le tabac en prêt.
L a réception de ces feuilles étant faite, on les
met dans des bouttes où grands tonneaux qui contiennent
environ fept quarteaux , & on les preflè le
plus que l’on peut, afin qu’il n’y entre point d’air j car
elles fe confervent mieux.
On envoyé enfuîte ces bouttes dans les manufactures
de Morlaix fe de Dieppe où elles font employées
à-recouvrir d’autres tabacs inférieurs & à
faire des billes ou carottes.
On ne fait point fuer les feuilles pour faire du
tabac fans côte, les prêts & le tabac commun.
Le tabac fans côte fe fait des feuilles de la i**
clarté 5 on tire la côte à trois doigts près de la pointe ,
ce qui fe fait aifément.
On le file de trois différentes grofleurs, le prin-
filé de la grofleur d’une plume de cigne, le moyen
de la grofleur du,double du prin & le gros filé d’un
pouce de circonférence.
Le filage de ces tabacs fe doit faire par un tems
doux & humide , parce que la feuille eft plus maniable
,, la côte plus aifée à tirer & le refte de la
feuille à filer,
A mefure qu’on opère ce filage on met ces ta- bacs en pelotons & on les y laifle le plus longtenis
que l’on peut , parce que dans ce rems-là il fait
partie de fon déchet.
Il faut un tems plus fec pour rouler ces tabacs
que pour les filer. On roule ceux qui font defti-
nés pour les bureaux de Bordeaux , la Rochelle &
Bretagne, en las d’ainou r , & ces rouleaux pefent
depuis trois jnfqu’à 8 & I j liv. Il faut pour ces bureaux
des tabacs prin-filés.
L e s rouleaux demi-filés pefent depuis 6 jufqu’à
îz liv. & du gros filé de n à zo liv.
Les moyens & gros filés fè confomment en Languedoc
, Provence & Rouflïllon.
Le déchet à la fabrique du tabac va ordinairement
du quart au tiers.
On prefte à demi le tabae moyen filé, & en
entier le gros filé, en forte qu’un rôle de cette dernière
filure , qui peut avoir un pied & demi de
hauteur eft réduit aux f . On a l’attention de l’hu-
meéler avec de l ’eau dans laquelle on a fait bouil-
.. lir, avant de le prefler , des côtes de tab ac: cela
le fait gommer & contribue à lui donner la qualité
néceftaire.-.
On paffe enfuite une ficelle fur ces rolles pour
les tenir dans le même état où ils font fortis de la
prefle.
La voiture des tabacs (ans côte fe fait dans ' des
bouttes aiufi que les feuilles fué es ; on obfervë feulement,
à l’égard du gros filé, de le bien prefler
dans les bouttes, & afin qu’il n’y entre pas de jour
on met des poignets avec force dans les yuides qui
paroiflent entre les rolles: Ces coignets font faits
de tabac moyen filé en rouleaux de la figure d’un
pain de fucre.
Les tabacs deftinés pour les bureaux de Pau,
S. Beal, S. Girons &Tarafcqn le voiturenten balles
du poids d’environ zoo liv.
Les tabacs en prêt font faits des feuilles de la 3e. clafle où on laifle toute la côte , leur filage eft
de la grofleur du prin. -
Le tabac commun fe fait des feuilles de la quatrième
qualité & du rebut de tous les autres.
Il en coûte pour le filage & le roulage du priti-
filé z 1. 5 f. à z 1. io f. par quintal, du moyen
. & gros filé fans côtes i î. f f . à i i. i o f . , du tabac
en prêt z 1.
Les particuliers à qui appartiennent les feuilles
pour le commun le filent eux-mêmes j mais ils ne
le roulent pas & lorfqu’ils le vendent aux marchands
on leur déduit fix à fept fols par quintal pour le
roulage.
Les déchets à la fabrique du tabac en prêt vont
environ à 5 pour 106.
E ta ceux à la garde du tabac commun, en quatre
mois à 10 ou 14 pour tco,
Plufieurs de ceux qui fabriquent le tabac fans
côte, confervent la côte & la vendent environ 1 $ C,
le quintal : d’autres s’en fervent pour couvrir leurs
tabacs en les fa; fane- voiture r, & d’autres pour faire
des fumiers.
Il fe recueilloit année commune dans les diftriéls
dubur eau de Tonneins environ cinquante raille quintaux
de tabac.
Les diftrifts de Saint* Porquier en produifoient
7000 quintaux, & celui de Leyrac 3 à 4 mille.
Ceux du cru de ces derniers endroits étoient beaucoup
moins eftimés que les autres.
La fourniture du fermier rouloit alors communément
fur le pied de 4000 quintaux par an en feuilles
filées & fans côte.
Il ne prenoit qu’environ i?o quintauxvde tabac
commun pour les bureaux de Perpignan, Tarafcon,
S. Girons, S. Béal & Pau.
Cette culture ainfi que la fabrique «fe le commerce
du tabac n’exiftent plus librement en France.
Il ne faut pas avoir des lumières fort étendues pour
fentir tout le préjudice qui en ré fuite pour les propriétaires
fonciers du royaume qui cultivoient ou
pouvoient cultiver cette plante , & pour ceux qui
en font ulage. Nous nous interdirons là-deflus de
longues réflexions, allez d’autres ont dit à ce fujet
tout ce que nous pourrions dire.
Les fermiers - généraux , comme nous l’avons
rapporté ci-deflus , ont enlevé la ferme du tabac
à l’ancienne compagnie des Indes. Sans détailler
ici les inçon.vénièns des privilèges exclufifs ,• nous
nous contenterons d’ôbferver au fujet de la ferme
du tab ac , qu’il feroit peut-être plu.s avantageux
d’en laifler la culture fe le commerce libres , en
les aflujetcifîant à un droit, ou du moins de fuivre
pour la culture & pour la vente., l’ufage qu’on fuit
en Flandre & en Alface , c’eft-à-dire, d-afiujetcir le
propriétaire planteur à livrer le tab ac de fa récolte
au bureau de la ferme à un prix fixe & modéré,
ce qui nous difpenferoit de porter à l’étranger cinq
ou fix millions que la France lui paye pour l’achat
de cette denrée & jetteroit plus d’aifànce dans les
provinces qui s’occuperoient à le cultiver : mais le
parti le plus avantageux feroit de faire jouir cette
culture precieufe & infiniment productive de la liberté,
de l’exploitation & du commerce. L e Roi ,
dont le voeu paternel vient de fe manjfefter aime
manière fi touchante dans l’afîemblée des notables
en annonçant le, defîr de fupprimer la gabelle
ainfi que les péages dans l’intérieur du royaume ,
lui feroit encore un préfent félon fon coeur & qui
11e feroit guère moins agréable & moins utile à fon
peuple & à l’état, en rendant à la culture de cette