
Les Playes où fe trouvent compris des vaif-
feaiix lymphatiques d’un certain calibre, ont aufli
beaucoup de peine à fe fermer, à caufe de l’écoulement
qui fe fait continuellement par les orifices
de ces vaiffe'aux d’un fluide, féreux & limpide,
qui empêche la cicatrifation. Et lorfqu’on
eft parvenu à les cicatrifer, .on voit fouvent fur-
vemr dans la partie inférieure du membre qui a
fouffeit, des gonfle mens oedémateux très-opiniâtres
, en conféqutnce de l’obftruélion qui en ré-
fulte au paflage de la lymphe ; cet accident n’eft
pas rare api ès l’extirpation des tumeurs fquir-
rheufes des glandes lubaxillaires, fur-tout de
celles qui font profondément firuées.
La divilion complexe d’un nerf, même con-
fidérable, n’occafionne pas beaucoup de douleur,
mais les parties auxquelles il fe diftribue fe trouvent
tout-à-coup privées de fenfibiüté & de mouvement,
à -moins qu’elles ne reçoivent des nerfs
de quelqu’autfe tronc. Mais lorfqu’un nerf eft
feulement piqué, ou n’eft divifé qu’en partie, il
en réfuite' généralement une douleur très-aigue
qu’accompagne bien-tôt une inflammation très-
v ive , une forte fièvre, des foubrefauts dans les
tendons, des convulfions, & fouvent même la
mort.
Lorfqu’une Playe eft accompagnée d’une forte
hémorrhagie, il faut d’abord chercher à recon-
noître fi le fang eft fourni par des artères, ou
par des veines. Ep générai, il y a peu de danger
à redouter de l’ouverture d’un vaifleau veineux,
même d’un grand diamètre, tandis que celle des
artères d un certain calibre, peut devenir promptement
mortelle, comme cela fe voit quelquefois
lorfque l’ artère eft fituée de manière qu’il eft im-
poilible de paffer une ligature au-deflus de fon
orifice. D’autres fois , quoique l’on puiffe facilement
arrêter l’hémorrhagie par la ligature, fi le*
vaifleau, qu’on a lié eft le feul qui foùrniffe du
fang à la partie où il fe diftribue, celle-ci perd
bien-tôt la vie & tombe en gangrène. Mais ce
danger eft moins grave que le précédent; car,
pour l’ordinaire, lorfqu’on a lié un gros tronc
artériel, la circulation fe rétablit peu-à*peu dans
la partie où il fe diftribue par le moyen de vaif-
feâux collatéraux, qui s’anaftomofent avec les
branches.
f a fituarion d’une Playe eft encore un objet
d’une très-grande importance. Les Playes des extrémités
, limitées aux parties qui repofent fur
des o s , ne doivent pas être regardées comme
aufli dangereufes que celles qui pénètrent dans
les articulations ; & en d’autres parties du corps,
celles qui intéreffent de grandes cavités, font
toujours beaucoup plus fâcheufes que celles qui
n’affeclent que les parties extérieures. Car on a
toujours lieu de craindre dans celles-là, que quelque
organe important n’ait fouffert de la blefîure
même, ou qu’il n’ y foit refté quelque corps étranger,
ou que l’accès de l’air n’occafionne une in-?
flammation dangereuse dans une cavité que Ig
nature n’avoit point deftinée à être expofée à fe$
impreflions ; ou enfin que le pus ne vienne $
s’y accumuler, accident dont il eft bien difficile
de fe mettre à l’abri dans les Playes de cette
nature.
Une autre confidération qu’il ne faut pas per.
dre de vue, c’ eft que, quoique la bleffure ne
paroifle pas avoir atteint aucun organe important
, ni par conféquent mettre la vie du malade
immédiatement en danger , elle peut encore devenir
mortelle par différentes circonftances.
Ainfi, lesblefiures du poumon, ou dès autres
vifeères, peuvent affoiblir le malade par la durée
de l’hémorrhagie, & Je. tuer enfin parl’épui-
fement, quoique d’abord la perte du fang ne parût
pas aflez confidérable pour faire craindre un
pareil évènement. L ’efiomac & d’autres parties
du canal inteftinal, peuvent être affeélés de manière
à caufer une maladie qui fe terminera par
la mort, quoique d’abord rien ne parût annoncer
une femblable cataftrophe. On a vu la membrane
extérieure de l’aorte endommagée par la
pointe d’une épée, & le bleffé mourir tout-à-
coup par la rupture de ce vaifleau lorfqu’on le
croyoit abfolument hors de danger, & que la
blefîure éroit à-peu-près èîcatrifée. Les Playes
de la véficule du fiel, ou de fon conduit excrétoire
, celles du réfervoir du cnyle, celles
du canal thorachique, & de divers antres organes
peuvent dèvenir mortelles fans qu’on ait
pu pendant quelque-tems s’attendre à rien de
pareil.
L ’on voit quelquefois l’inflammation’ s’étendre
de la partie immédiatement affeétée, à des organes
voifins & importans qui n’avoient point fouffert
de la bleffure, mais “qui, par la part qu’ils
prennent ainfi à la maladie, finiflent par la rendre
mortelle. Le défaut de foins ; un traitement mal
entendu; des imprudences commifes par le malade,
foit relativement à fon régime, foit à d’autres
égards, n’ont que trop fouvent de pareils effets
dans dés cas qui par eux-mêmes, & s’ils euf*
fent été bien conduits ne dévoient avoir aucune
fâcheufe conféquence.
Toutes cesconfîdérations, que nous venons d’ex*
pofer, doivent être pèfées avec foin lorfqu’il s’agit
de porter un jugement fur la manière dont une
Playe doit fe terminer; aufli un pareil pronoflic
eft il la pierre de touche à laquelle on reconnoît
le Chirurgien inftruit, & le Praticien confommé.
L ’adreffe & la fermeté de la main, du fang-froid,
& une connoiffance exaéte de l ’Anatomie fuffi'
ront ordinairement pour mettre en état d’exécuter
aflez bien les opérations même les plus importan*
tes; aufli n’eft-il pas bien rare de rencontrer de
bons Opérateurs, fur-tout dans les grands hôpitaux
où l’on a plus qu ailleurs des otcafions de s’exercer.
Les connoiffances néceffaires pour mettre
un homme en état de prévoir d’une manier®
érompte & (lire toutes les conféquences qui doivent
rélulter d’une P laye, detnan fenr beaucoup
nlus de talens, de tems & de travail pour.les
acquérir, aufli font-elles beaucoup moins corn-
piunes. ,
Vu Traitement des Playes Jimpies.
I. Traitement de VHémorrhagie. '
L ’hémorrhagie, lorfqu’elleeft confidérable, eft
le premier objet qui doive attirer l’attention du
Praticien dms le traitement d’une Playe quel-,
conque; la fureté du malade exige qu’ il s’occupe
d’abord des moyens de l ’arrêter; il doit le faire
pour raflurer le’bleffé & ceux qui l’entpurem ; il
y eft obligé même, s’il veut pouvoir reconnoître
l’état de la Playe que la préfence du fang ne lui
permet pas d’examiner. On arrête fur-le-champ
une hémorrhagie, même confidérable, en comprimant
les artères qui la fourniffent, au-deffus
de leur Oiifke, au moyen d’un tourniquet, .ou
fimplement avec les doigts-, on lie enfuite les extrémités
de ces artères. Voye\ l’article Hémorrhagie.
Il eft rare que lesartères bleflées foient fituées
de manière qu’on ne puifle en faire la ligature,*
car, lorfqu’elles s’ouvrenr dans une Playe profonde
dont l'embouchure eft très-étroite au-dehôrs, on
a la reflburce de dilater cette Playe pour découvrir
l’orifice du vaifleau, ce qui fera généralement
praticable & mettra à portée de le faifir &
île le lier. Cette pratique à laquelle fans doute
on ne doit pas recourir fani néteflhé, & qui
pourra paroitre trop cruelle à bien des perfonnes, eft cependant la meilleure à laquelle on puiffe
recourir dans certains cas, où la timidité des
Praticiens à cet égard a eu plus d’une fois des
fuites fàcheflfes ; car on a tourmenté bs malades
par d«.s bandages compreffifs, par d s ftyptiqués,
par l’application même du cautère aéluèl, & fouvent
à pure perte. On en eft venu même à faire
l ’ampuration de membres où l’on ne pouvoir venir
à bout d’arrêter unie hémorrhagie, dans des
cas fur-tout de fr a élu res compliquées, où l’on
auroir pu éviter de faire cette opération en fai-
fant une incifion qui mît lé vaifleau affrété à découvert.
Lorfque l’artère bleffée fo trouve logée dans la
fubfLnce d’un os,, il eft évident qu'on ne fauroir
y appliquer une ligature, & qu’il léroit fort inutile
d’aggrandir la Playe pour y p rvenir. Mais
les artères fituées de""cette manière font rarement
aflez confîdérables, pour qu’on ait lieu de s’effrayer
de la quantité de fang quelle' pe -vent
fournir, &, pour 1 ordinaire, elles ceflent bien-tôt
d’en donner, lorfqu’elles ne font dirigées qu’en
partie, m.,is alors fi l’on peut achever de les di-
yifer traofverfalement/l’hémorrhagie ne tarde pas
a s arrêter*
5» II. Extraction des corps étrangers,
Lorfqu’on a arrêté la perte du fang, la première
cho'e dont il faut s’occuper, c’eft de retirer
de la Playe les corps étrangers qui peuvent s’y
être engagés, -ce dont on vienr facilement à bout,
& même fans autre feeouts que celui des doigts
quand la Playe n’eft pas profonde. Mais lorsqu'ils
ont pénétré à une certaine profondeur, c’eft une
chofe ti ès-débeate & qui demande beaucoup d’a-
dreffe & de circonfpeélion de la part du Chirurgien,
que de s’a (forer de leur préfence & d’examiner
leur pofifion; car, en mani mt les parties
rudement, on fait fouftrir le malade & l’on s’tx-
pofe à exciter un degré d’ inflammation, qui peut
devenir très-dangereux. Cependant fi l’ on eft à
peu près certain qu’il y a quelques corps étrangers
logés dt-vns une Playe, il faut tâcher de re-
connoître de qiielle manière ils fontfirués, & ne
rien négliger enfuite pour les rerirer, à moins que
cela ne puiffe fe faire fans rifquer de bleff-.r des
organes très-importans. En pareil cas, c’eft le jugement
du Praticien qui doit le décider après
qu’il aura mûrement pefé le danger qui fe préfente
de part & d’autre.
Les Auteurs modernes, en général, infiftent
beaucoup fur les inconvéniens des tentatives rrop
peu ménagées pour fonder les Playes, & pour en
faire fortir les corps étrangers; & ils font c.bfer-
ver avec beaucoup de raifon, qu’autrefois on
faifoit bien du mal par des foins de ce genre
très-mal entendus. D’un autre côté peut être, eft-
on alié trop loin en donnant dans une exrrémiié
oppofée. Car, quel que foit le danger de manier
indiferettement des parties bieffées, quei que
puiffe être celui des fondes, des*pincettes & des
autres inftrumens dont les Anciens ont tant abufé,
il eft, certain que la préfence de corps étrangers
dans les chairs, ou dans quelqu’aucse partie , excite
fouvent beaucoup de douleur, & une inflammation
violente, qui n’exifteroient point fans
cette caufe.
On dit qu’il y a nombre d’exemples de corps
étrangers qui ont féjourné long-tems en différentes
parties du corps fans occalîonner d’acci-
dens ; que cela fe voit particulièrement dans les
cas où'Ces corps font d’une nature peu irritante;
& que lorfque par leur forme, ou leur quali 6
particulière, ils tendent à caufer beaucoup de
douleur, ils ne tardent pgs, par-là même, à exciter
une fuppqration abondante qui les ent.aîne
au-dchors d une manière bien plus douce pour
le malade que n’en eut été l'exrraéHon. Mais 9
quoiqu’il] y ait des cas, ainfi que nous l’avons
déjà obfervé, où l’on ne fauroit faire cette ex-
traèbon fans danger, comme Jorfque la Playe fe
trouve voifine de quelque gros vaifleau, & où
il vaut mieux attendre que la fuppuration y fup~
plée, il n’y a pas de railon de s’en diipenui lorfqu’on
peut la faire fans rifque, & fans caufer une
A a ij