
la ferm e la plus convenable aux indications qu'on
leur vculoit faire remplir. Mais, dans ces conflits
répétés entre la caufe du mal & le remède
qu’on lui oppofoit, la Nature aux prifes entre j
ces deux puitTances a fou vent fuccombé à leur '
aélion , ou fi elle en eft fortie vièloricufe, ce .
n’a été qn’après un long combat qui lui a Ôté :
tontes fes forces. Il faut lire 1 Hiiioire fur l’apparition
de la Vérole en Europe, pour fe con*
vaincre de la vérité de tout ce que nous avançons.
Les premiers fymptômes qui frappèrent le
plus furent les puftules, les ulcères & les exof- 1
tofes qui, étant autant d’afteélioàs extérieures
apparentes, furent laiffèes aux foins des Chirurgiens
deftinés par état au traitement de toutes
les maladies qui dérivent d’un défoi dre local. Ils
n’eurent point à fe louer de leur fuccès, dans
l ’ignorance profonde où ils étoient de la caufe
qu’ils devoiem feule combattre \ aufli la maladie
fit - elle des progrès étranges , jufqu’au teins ou
Bérenger de Carpi croyant trouver une analogie
entre les pullules vénériennes & celles de la gale
où l’on tmp oyoit le mercure, eut recours aux
friètions mercurielles. Les fuccès que la Pratique
en retira forent bien - tôt répandus , malgré !
les obftacles que leur opposèrent la routine &
l'empyrifmc dans lelquelles on tomba enfuite, par
l’abus qu’on fait des meilleurs moyens en Mede
cine , comme dans toute autre proftffion.
La formation de la Vérole fuccède toujours à l’abforbtion du virus qu’on en regarde comme
la caufe prochaine, & à fa difleminarion dans !
les différentes régions du fyfléme organique du
corps. Il s’efi élevé à ce fujer plufieurs difficultés
qu’on a cru réfoudre eB ayant recours aux loix
de la Phyfique & de la Chimie *, mais ces folu-
tions, telles plaufibles quelles aient paru à leurs
Auteurs, font encore loin de fatisfaire le Phi-
lofophe qui va à la recherche de la vérité par
le plus court chemin. A in fî, l’on a regardé le
virus comme étant d’une nature acide, & l'imagination
aidée de quelques faits, a été jufqu’à
établir l’efpèce de cet acide que les uns ont rapporté
au vitrioiique & d’autres au marin. Cette
luppofition a paru d’autant plus vraifemblable
que plufieurs tymptômes de la Vérole paroiffent
accompagnés d’indurations dans les glandes &
autres parties du corps fournies de fucs albumineux,
fucs qu’on fait être coagulables par l’action
des acides. Mais l’ expérience aidée de toutes
les tentatives néceffaires, n’a jamais pu faire
découvrir le moindre degré d’acidité dans les hu*-
meurs qu’on a toujours regardées jufqu’ici comme
en étant le véhicule. D’autres, d’après une fuite
d’hypothèfes, l’ont foupçonné être une forte
d’altération de fluide électrique paffé fous forme
d’expanfion j & , partant de cette fuppofition, ils
ont cru expliquer tous les phénomènes, en admettant
un mode de communication fondé fur
celui des loix que fuit Télefiricité dans fon ex*
panfion. La vérité eft qu’on ignore & qu’on ignoi
rera peut-être toujours l’ intime nature du virus
de la Vérole.
On avoit cru jufqn’ici, & Hunter lui-mêms
eft de cette opinion, que le pus en étoit l’excipient,
& qu’il ne pouvoit fe communiquer que
fous cette forme, ce Le pus, qui eft imprégné de
ce virus j dit cet Auteur, venant à toucher une
partie visante, y caufe une irritation , & l’ inflammation
en eft la fuite ordinaire. Mais il faut pour
cela , ou qu’il foit appliqué dans un état de fluidité
| ou qu’il foit rendu fluide par les humeurs
de la partie fur laquelle on l’applique ; car il n’y
a point d’exemples que l’infedion fe foit communiquée
fous la forme de vapeurs, commeil
arrive à l’égard de plufieurs autres virus, jj
Cette opinion eft démontrée fauffe par diverfes
expériences faites & rapportées par M. Bru. Ce
Praticien a inoculé avec une lancette,' fur le
gland & dans l’intérieur du prépuce , du pus
provenant de chancres de toute qualité & de différentes
époques, & la maladie n’a pas eu lieu.
Il a fait les mêmes tentatives avec la matière des*
gonorrhées, & Toujours fans fuccès il a employé
celle des bubons au moment de leur ouverture
& il n’a pas été plus heureux. Enfin il a porté
profondément dans le canal de l’urètre, du pus
provenant de ces trois fymptômes, & rien n’a
paru. Il a établi, par des véficatoires, des ulcères
fur le gland & le prépuce, & y a «appliqué,
lorfqu il, étoient en pleine fuppuration, du coton
imbibé de pus provenant de tomes fortes de
fimptômes véroliques -, il a répété fes expériences
fur différentes parties du corps j il en a placé
dans le vagin de quelques chiennes , fous le prépuce
de plufieurs chiens, & toujours fans aucun
effet. D ’où il conclut que le pus, qui provient
des divers accidens vénériens, n’efl point le virus,
qu’il n’y eft pas même uni, & que néceffâire-
menr ce pus ne pouvoit être qu’une conféquence
de fa neutralisation. Cette conclufion eft conforme
à la fuites d’idées que s’eft faire M. Bru , fur la
nature & communication du virus & fi elle acquiert
par la fuite l’évidence dont elle eft fuf-
ceprible, elle pourra jetter un grand jour fur
l ’hiftoire de la Vérole.
Le délétère de la Vérole paroitne pas affeÆer
indiftincïement toutes les furfaces du corps, &
les pénérrer également pour le répandre dans
le fyftême.Xette vérité eft fondée fur l’obferva-
îion , & c’eft d’après elles que les Praticiens font
partis pour établir a ce fujet deux fortes de fur-
faces , les fécrétoires & les poreufes q u i, ayant
une organifation particulière, & une fenfibilité
différente , influent par cela même fur les caufes
morbifiques qui les afftélenr. et Les premiers,
d;t le D. Nisbet, fe diftinguent par la fineffede
leur femiment*, elles font couvertes d'une pellicule
très - délitate , & forment des conduits qui
mènent à des organes intérieurs 3 elles opèrent
une fécrécion dont la quantité eft fingulièrement
liée avec leur degré de fenfibilité. Les fécondés
font couvertes d une peau commune, & n’admettent
qu’une exfudation infenlible qui fe fait
par les extrémités des pores organifés, toutes les
fois que, par une diminution de fenfibilité, elles
font feulement afftélées par des circonftances
qui déterminent en elles un état favorable à
labforption. îj Les premières font beaucoup
plus propres que les autres à admettre le virus,
# même l ’on pourroit croire, d’après un très-
grand nombre de faits, qu’elles font les feules
qui peuvent le recevoir, malgré ce qu’en penfe
le vulgaire q u i, pour fauver quelquefois la dé-
licarefle, n’adopte que trop Couvent ce mode de
traDfmiffion.
Le virus une fois reçu , n’opère pas toujours
inltammem fes effets lur le lieu qui l’a admis ;
il eft quelquefois quatre à cinq jou rs , & d’autres
fois huit, avant que la partie ne maniftfte quelques
preuves de fon aéiion, ainfi qu’on le voit
dans la formation du chancre, de la gonorrhée
& du bubon. Mais aufli , dans quelque cas, il
agit d’une manière fingulièrement prompte, &
& comme un cauftiquo dont on pourroit comparer
l’effet à celui de la pierre à cautère. C eft ce
que j’eus occafion de voir',-en 1773 , fur un
Invalide qui, immédiatement après avoir vu une
femme gâtée, éprouva une violente inflammation
au prépuce & au gland, du genre de Ces éré-
fipèles qui, par leur afpeél, indiquent aux Pra-
t tiens une gangrène menaçante. Les anti-phlo-
g ftiques généraux & topiques furent conciliés,
l’application en fut différée au lendemain, pour
de^ railons indifpenfables ; mais alors il n’étoit
pus teins *, la gangfène sèçhe s’étoii emparée de
la moitié de ia verge, & Kefcarre ou la caufti-
cité du virus s'étoit éteinte, étant tombée £ il
g îérit fans l’ufage d’aucun mercuriel. M. Pere-
nottifait mention d un cas de ce genre -, c’eft
ctlui d’un tambour qui , quarante heures après,
le coït eut la verge énormément gonflée, & noire
depuis fa racine jufqu’à .fon extrémité , en forte
que quelques prompts que furent les fecours qu’on
lui porta, les tégumens tombèrent en gangrène
en moins de douze heures, &iaiflerem les corps
caverneux & le gland à découvert.
Mais les effets font loin d’être toujours aufli
aélifs^ le plus communément ils paroiffent d’une
minière fucceffive, & dans un ordre ft régulier ,
quand la maladie eft laiffée à elle-même , qu’on
pourroit prédire leur filiation. Entr’aurres preuves
que b pratique m’en ait fournies, ai-je dit dans
un Ouvrage publié fur cette matière, en 1788, je
ne citerai qu’une perfonne que je traitai, avec le
plus grand fuccès, dans les Indes Orientales, vers
la fin de 17 74 , & de qui j ’eus lieu d'entendre
cette fucccflïon d’effets d’autant mieux marqués
qu ignorant la caufe de fon mal, elle l’avoit abandonné
à lui-mêoie; jufqu’à ce an après,
m’ayant confulié, je l’eus éclairé fur fon état. Elle
eut une gonorrhée q u i, d’après fon récit, fiégeoit
dans la fofle naviculaire. A cette gonorrhée, fuc-
céda un phymofis, à raifon de l’étroiteffe du prépuce.
Le phymofis guéri fiant, fut remplacé par
un bubon & une inttunefcènce du tefiicule, qui
difparurent, à 1 exetption d’un gonflement à l’épi-
dydime. Deux mois après ia guétifon apparente
de ces maladies, il lui furvint une inflammation
fur la région d’un fourcil, qui fe termina par un
ulcère qu on traita avec de iolibao en poudre.
Cet ulcère fut trois mois à fe guérir ; à peine
étoit-il cicatrifé, que l’un des teflicules fe gonfla,
pendant que l'autre diminuoit à proportion.
Les chofes fe paffèrent ainfi pendant environ deux
mois, lorfque le malade commença à maigrir &
à éprouver un dépériffentenr de forces qui f’abbant
entièrement. A ce dépérifl’emtnr , fuccéda une
exofiofe à la partie fupérieure du tibia & une
autre fur la première phalange du grand doigt de
la main droite. Quelques jours après, il lui furvint
une carie au vomer, & bien-tôt une autre
au palais, en foi te quà raifon de la communication
établie entre la bouche & : les narines la
voix étoit entièrement perdue. Ce fut alors que
je vis le malade, & que, lui découvrant la caufe
de fes maux , je lui preferivis les remèdes appropriés
, qui eurent le plus grand fuccès.
Cette obfervation confirme une vérité admife
par tout Praticien vraiment obfervareur ; (avoir ,
que tout lymptôme efl un foyer virulent ©ù fe
fabriquent les principes d infection qui peuvent,1
par merafiafe, pàfier d une partie vers une autre
fans que le caractère de la maladie en éprouve là
moindre mitigation. Ce foyer exifte par lui-même
& fans recevoir une plus grande activité par les
humeurs qui continuellement y affluent, & qu’on
peut croire comme très - faines , lorfqu’il eft en
pleine aélivité; ce qui eft contre l’opinion du plus
grand nombre, qui regardent les humeurs comme
infeétées, chez Ceux qui ont la Vérole portée au
plus haut degré. L inflammation, en ranimant les
principes de v ie, (emble augmenter fa force, &
rendre plus aélifs les principes d’infeflion. Il eft
rare qu'une femme qui voit un homme affeélé d'un
écoulement gonorrhoïqueinflammatoire, échappe
à la contagion , ce qui a raicment 1 eu, lorfque le
flux eft devenu chronique. Les foyers font fouvent
multipliés, St au-delà du nombrenéceffaire pour
confiituer ce qu'on appelle proprement la Vérole,
Ainfi, l’on obterve fouvent un même homme avoir
en même-terns une exofiofeau crâne, par exemple
une carie aux os du nez, des puftules aux bourfes
St les actions qui fe pt flent dans ces foyers étr*
affez diffemblables entr’elles, pour céder, à des
époques différentes , aux remèdes qu’on leur
oppofe, ou même leur réfifter, indépendamment
les unes des autres.
Ces Auteur, ont tous été curieux d’établir
quelles étoient les routes qui convoyoient les