fouvent les ravages du mal, les derniers fur-tour,
qui lont fi fujets à être corrodés par les acrimonies
qui parcourent les diverses routes de la circulation.
Les fymptômes heéliques annoncent alors le mal ;
l ’appi-tit devient moindre; il furvientdes fri (Tons
auxquels fuccèdent des accès de chaleur; la toux,
en fe répétant à chaque infiant, devient fatiguante;
elle efl hien*tôt accompagnée d’un fentiment de
chaleur intérieure, & d’une expectoration de matière
plus ou moins jaune & épaille. D’autres fois,
le foyer s’établit fur le foie; & la ftafe, fefaifant
lentement, donne lieu à une fehirrofité' plus ou
moins étendue, & qui gêne toujours affezle cours
de la bile, pour occafionr.er une jauniffe que les
remèdes ordinaires ne fauroient vaincre : ou bien
attaquant, fe fixant fur le tefticule, ii amène le
gonflement chronique de cet organe , qui conflit
ue ce qu’on a-pelle le farcocèle. On peut voir
dans les Auteurs, fur-tout ceux qui onr confiaté la
narure de ces dégénérefcences, par l’ouverture des
cadavres, combien font variés les défordres qui
dépendent d’une caufe aulfi facile à combattre,
li on ne l’eût point négligée dans les commence- ,
mens.
Une obfervation que la pratique a donné lieu
de faire, & qui mérite la plus grande, attention
dans le traitement,c’efl que les fymptômes marchent
avec d’autant moins.de rapidité, que les défordres
qui accompagnent l’affeèh'on locale ont été plus
grands. C’efl: ce qu’on remarque dans la vérole qui
eft la fuir® d’un bubon qui a bien fuppuré, dans
celle quifuccèdeà une gonorrhée qui a été violente
dans fes commencemens, & qifon ne-s’efl
point trop prefl'é d'arrêter, dans celle qui furvient
aux chancres qu’on a traité long-tems localement.
Auffi efl il conflaré, par l’expérience , qu’il faut
beaucoup moins de teins & de remèdes pour guérir
ces fort-s de véroles, que pour celtes qui fuc-
cèdenr à des fymptômes légers, & qu'on croit ,
pat cette raifon , ne mériter aucune oonfidéraiion.
J ’ai .vu ai mi des bubons accompagnés d'une fuppu-
ration très-abondante, offrir, par la fuite du traitement,
un large ulcère qui fe guériffoit par un
panfemcm purement lo cal, pendant que d‘aurr%y
qui fe réfolvoient par de Amples emplâtres, de-
mandoient un traitement général qui pût obvier
aux fuites fàcheufes de la réforption : ce font de ces
faits que la pratique journalière fournit dans les
hôpitaux comme dans les maifons particulières, !
A l'énumération que nous venons de faire des
fymptômes de la Vérole, au caractère que chacun
d’eux offre, & à leur opiniâtreté à céder aux re
mèdes ordinaires qu’on leur oppofe, on pourra
tirer un diagnoftic affez certain & affez appuyé fur
les faits', pour établir la nature de la maladie qu’ils
conftituenr, quand , d’ailleurs , les malades ont
affez de franchife pour répondre ingénuement aux
queflions qu’on leur fait. Mais il n'en efl pas ainfi
dans le cas de complication où plufieurs genres
d’irife#ion ayant lieu ? les fympjùmçs exiflahs pa- ]
roiflent indiquer auffi bien l’un que l’autre &
plus encore, quand l’infeélion vénérienne paroft
moins évidemment que les autres : c’efl ce qui a
particulièrement lieu dans le cas de feorbut porté
au fécond ou au rroiüème degré, & compilé
récemment de maladie vénérienne. Ces cas offrent
nombre de difficultés, fur-tout quand les malades
veulent cacher leur fecret ; la Vérole ne préfenrant
fouvent aucun figne qui lui foit propre, on efl
réduit à; l’empyrifme ; c’efl ici où l’axiôme de
Thérapeutique a juvantibus fumitur indicaiîo a
lieu. Les cas de complication de la Vérole avec
le feorbut font beaucoup plus fréquens qu’on ne
penfe /dans les hôpitaux fur tout où l’on entaO'e
les malades au détriment de leur refle de fànt*
L ’expérience , dit M. Bru à ce fujet, apprend
que ces deux maladies ne fe croifent à l’avantage
des fujets, que lorfque la Vérole prédomine fur
le feorbut. Ils font alors plus difpos, ont un teint
plus. f. ais , le ventre plus libre, les urines plus
cuites; il femble que, dans la majorité de ces cas,
les fymptômes véroliques font des égouts par lef-
quels Je vice feorbutique s’écoule. Il n’en efi
de même quand le feorbut prend le deffus ; les
ulcérations tiennent de ce dernier caraélèrq, &
deviennent toujours gangreneufes, fur-tout quand
la fièvre vient à fe mettre de la partie ; car alors,
dirnotre Auteur, la fièvre y porte le vice fcorbii-
tique avec profufion , ce qui détruit la confiitu-
tion vénérienne locale, & change l’ulcère véné-
ricm en ulcèie feorbutique. Les aecidens qui s’en?
fui vent de la préfence du feorbut chronique, font
moins rares ; les bubons, en pareil cas, font lents
à fe réfoudre ou à fuppurer , & quand ils font
ouverts, les bords en deviennent durs & calleux,
ce*qui nuit à la prompte ci'catrifation.
Quant au pronoflic ou événement qu'on peut
prévoir de la maladie, il fera d’autant plus fâcheux
que finfeéfion datera de plus lo in , & qu’elle
occupera un plus ou moins grand nombre de parties
plus ou moins eflentielles à la vi;- ; qu’elle fera
compliquée ou non de perte de lubflance, ou
jointe à d’autres affeélions qui en mafquent le caractère
, & q u i, conféquemmenr, font fouvent
prendre le change, lorsqu'il s’agit de la bien
connoitre. La Vérole , autrefois, éroit une maladie
fort grave, parce que, dans l’ignorance où
I on étoir fur fa narure , on l’abandonnoir à elle-
même, dans un'rems où l’on pouvoir lui oppofer
les plus grands fecours, & que, quand fès fymp-
rômes étoient des pius évidens, on les prenoit
fouvent pour d autres, & qu’on les traifoir comme
tels, c efl-à-dire d’une manière entièrement oppo-
fée à celle qui leur convënoîr. Ii faut lire l’hifloire,
pour être affuré de la vérité de tout ce que nous
avançons , ou pratiquer dans des climats fort
éloignés , où l’Art , encore dans l’enfance, efi
laiffé à des ignorans qui font loin de faire toutes
les difiinéliôns que nous- venons d’établir, En
général, la Vérole,-dont les fymptômes occupent
un fyftême i
(jn fyflêtrte de parties fournis aux influences aèlives
de la vie , efl toujours beaucoup -plus' facilement
curable que celle qui fiége dans des régions qu’on
pourroit regarder comme inorganiques. Ainfi, l’on
peut plus efpérer, lorfque la maladie a pour cariée
des ulcérations , des ptifiules, des poireaux^
des choux-fleurs, que quand elle efl accompagnée
de périoflofes, d’exoflofe ou de carie. Nous
laifions toutes autres confidérations relatives à Ce
point, pour paffer à ce qui regarde le traitement
de la maladie, d’autant plus que c’efl la partie la
plus effentielle de tout ce que nous pourrions dire
dans cet article.
Curation.
Les premiers Praticiens qui eurent à traiter là
Vérole, perfuadës que la maladie provenoit d’un
levain qui infeèloit la maffe des humeurs, & pen-
fanr qu’ils pourroient l’en fouflraire par des remèdes
évacuans, eurent d’abord recours aux purgatifs,
& généralement à tous les remèdes qu’on
reconnoît pouvoir purifier le fang. Cette méthode
réuiîît à quelques-uns, mais momentanémenr, car
' le foyer, déplacé par elle , ne fai foit que changer
de lieu , & , fe portant au-dedans> il opérait un
plus grand mal, & d’une manière d’autant plus
f.inefte, qu’étant plus caché , les malades viyoient
dans la plus grande fécuHtë fur leur état, jufqu’à
ce que des fymptômes plus graves dénotaffent une
maladie plus inquiétante, qu’on rapportoit alors à
une toute autre caufe. Ceux fur qui elle étoit plus
lente à manifefler ft>n efficacité, tourmentés continuellement
par les remèdes, fe déflechoient &
dépériffoient à vue d’oe i l , comme ceux qui font
tourmentés d’une diarrhée ou d’un flux dyffen-
; térique.
Ce fut alors que Bérenger de Carpi, voyant que
lemercure guériffoit les gales & lesfuronclès,tenta
ce même remède pour la Vérole qui fe manifef-
toit fous cette forme. Il y fut d’autant plus porté,
qu’il favoit que les Bergers & les Payfans de la
Calabre employoient avec fuccès ce minéfal, pour
guérir les maladies cutannées de leurs troupeaux :
fes tentatives eurent tous les fuccès qu’il s’étoit
promis, quoique, dans bien des cas, cette nouvelle
méthode lui fut inefficace. Thierri de Heri,
Chirurgien des Armées Françoifes, ayant fuivi les
troupes en Italie, apporta ici ce nouveau remède,
& rendit publique la manière de s’en fervir. Mais
lemercure, laiffé alors à des mains quiTem-
ployoient dans tous les cas, & d’une manière
purement empyrique, fit bien-tôt lui-même des
ravages qui égalèrent ceux du mal, s’ils n’étoient
pas pires. Auflî le remède tomba-t il dans un tel
diferédit que perfonne ne vouloit en tenter les
effets. Mais comme l’opinion éroit que la maladie
avoir été apportée de l’Amérique en Europe, par
«es Espagnols, on crut auffi que la même contrée
Qevoit fournir le remède.
Enfin , en 1508 , c’efl-à-dire quinze ans, à-peu-
Çhirurgie. Tome / ƒ , IL« Partie,
près, après Tâpparirion de la Vérole dans nos
climats, lesEfpagnols vantèrent le gayac comme
un fpécifique nouvellement venu de leurs nouvelles
Colonies, & afiurèrent qu’ il avoit la plus grande
efficacité parmi les Naturels chez qui la maladie
étoit fi fréquente. Un prêtre Efpagnol publia un
livre, à Venife , où il vanta beaucoup les grandes
vertus du remède. Son efficacité étoit telle alors,
qu au rapport de Nicolas - Paul, Médecin de
Charles - Quint, trois mille malades défefpérés
furent guéris prefqu’ à-la-fois. Hutten, Chevalier
Allemand, le loua également dans un Ouvrage où
il déclare qu’ayant été attaqué lui-même, depuis
neuf ans, d’une Vérole terrible, avec de* dou-*
leurs cruelles, des ulcères, des exoflofes, des
caries, & un marafme complet, il avoit inurile-
ment effayé, jufqu’ à onze fo is , les friélions mercurielles,
jufqu’à ce qu’il prit le gayac, qui le
guérit dans l’efpaced’nn mois. La méthode, alors,
étoit de le donner en décoélion , à une très-haute
dofe , ce qui rendoit le remède infiniment dégoût
tant à prendre ; on enfeveliffoit les malades fous
leurs couvertures, de manière à faciliter la fueur
qu’on vouloit procurer, & on les rérluifoit à une
diète févère, pour mieux faciliter la dépuration
quon avoit en vue. Le gayac n’a pas toujours
foutenu la haute réputation qu’il avoit acquilè :
auffi, en lifant ce qui a rapport à l’hiftoire de la
Vérole, voit-on qu’en 1535 , la racine de fquine,
venue de Chine , 1,’avoit déjà, en quelque forte,
remplacé; mais elle eut bien-rôt le même fort que
le gayac, quoique vantée.par Cardan, Paulmier,
Braffavoil e & Faîldpe. LesEfpagnols , auffi in'é-
Feffés que les autres-à la découverte d'un fpécifique
, apportèrent encore , en 156$, la lalfe-
parcille, qui croît dans les Indes’.occidentales ;
mais le fuccès fut encore le même que celui du
gayac & de la'fquine , & même du faflàfras ,
qui nous vint enluite de l’Amérique Septentrionale.
La méthode fudorifique à s’en tenir à ce que
nous venons d’en dire , auroit dû nëceffairement
tomber de manière à ne plus jamais reparoître ,
fi les fubfiances qu’on employoit en la fuivant,
euffent été abfolumeat privées de toute efficacité;
mais l’obfervation & l’expérience prouvent le contraire.
On a donc fait de nouveaux effais en combinant
plufieurs de ces fubfiances, & même d'autres
enferabie, pour en faire des boiffons qu’on donna
dans des cas où le mercure n’avoic été d’aucune
efficacité; & on eut fouvent lieu de s’en louer.
£ntr autres formules de ce genre, on vanta beaucoup
la ptifanne de Lisbonne, qui efl compofée
de la manière fui vante : fy Racine deSalfepareiile,
Santaux blanc & rouge, de chaque trois onces ;
RégJiffe & Mèzereum, de chaque demi-once ; bois
de Rhodès, Gayac, Saffras, de chaque une once ;
Antimoine crud , cinq onces; verfez dix livres
d’eau bouillante ; faires infufer , pendant vingt«
quatre heures, & bouillir enfuite, jufqu’à réduc^
O o o