
ii faut incifer les parties, fi le premier coup fie
biflouri ne fuffit pas pour cet effet, toutes les
autres parties de cette opération , font ordinairement
ou beaucoup retardées, ou manquent peut-
être tout-à fait leur but.
f l n’y a aucune opération où il foit plus né-
ceffaire que dans celle-ci d'agir hardiment, pour
faire du premier coup une incifion fuffifante. Une
petite incifion caufera prefque autant de douleur
au malade qu'une grande 5 & elle aura cet inconvénient
très-effentiel, que le Chirurgiey ne pourra
achever fôn opération, ni aufli facilement, ni
auffi promptement que s'il lui avoit donaé plus
d’étendue.
L ’Opérateur ayant fait une ouverture fuffifante
dans les tégumens, il procédéra enfuite d'une manière
j/lus mefurée , fâifant l’ une après l'autre
de petites incifions, St évitant, avec tout le foin
poffible., de blefler les vaifTeaftx artériels ou veineux
qu’il rencontre ; il tâchera, de cette manière,
de découvrir le nerf bleffé ; ou , s'il ne peut
pas en venir à bout en ôtant, au moyen dune
éponge , avec tout le foin & toute l’exacfitude
poffible, chaque particule de fang qui s’extravafe
à induré qu’il opère, il continuera à travailler
lentement St graduellement, jufqu’à ce qu’il ait
divifé toutes les parties qui fe trouvent entre la
peau & le période, à la réferve des gros vaifieâux
St des fendons.
Avant pouffé jufques - là fon incifion, le Chirurgien
lâchera le tourniquet, & en ce moment,
pour 1 ordinaire, le malade exprimera beaucoup
de contentement de l’opération qu’il vient de-
fubir. C ar, fi 1 on a coupé rranvetfalement le
n e r f , dont la bleffure avoit caufé tant de
fâcheux fymptômes, il fe fendra foulagé fur -
le - c h am p ; mais f i , au contraire, la douleur
continue à fe faire fentir avec violence, on peut
être affuré que le liège du mal efl dans quelqu’un
des tpndons-41 faut donc examiner de nouveau,
avec foin , l ’intérieur de la playe , la nétoyer
exaéfement avec une éponge ; & très-probablement
on trouvera, dans le tendon le plus voifin
de la veine où l’on avoir fait la Saignée, ou
les marques d une bleffure, ou les lignes évidens
d’une inflammation. Mais, quoi qu’il en foit, &
lors même qu’on n’appercevroit rien de fembla—
ble , il faut fans héfuer couper ce tendon; &
.même s il y en avoit deux ou trois dans le voi-
finage de fa veine, qui par conféqueni euffentété
également expofés à être bleffés par la lancette,
il faut les couper tous. Cela étant fa it, il arrivera
bien rarement que le malade n’en éprouve pas du
fodagement à Imitant même. Et f i , contre tome
efpérance, il en étoit autrement, on aura du
moins fait tour ce qui pouvoir donner quelque
efpérance de guérifon.
La feélion des parties étant achevée , on relâchera
tout à-fait le tourniquet, & l’on fera la
ligature des artères qui auront été ouvertes dans 1
l ’opération. On mettra un léger appareil fur la
playe, qu’ il faudra gouverner enfuite comme une
playe ordinaire.
En ne confi déram que légèrement ce dont il
efl ici queftion, Ton pourra regarder comme bien
cruel le moyen de guérifon que nous venons de
propofer -, car fans doute une incifion auffi profonde
ne peut qu’être extrêmement douloureufe;
& la feélion d’ un ou de plufieurs tendons, non-feulement
ôtera la faculté de faire certains mou-
vemens, mais pourra priver pour toute la vie
de l'ufage eptier d’un membre. Mais fi l’on porte
fon atrention fur l’importance de l’objet qu’on
a en vue, toutes ces considérations perdent leur
force. Ce n’eft pas un avantage de peu de con-
féquence qu’on fe propofe d’obrerir par cette
opération, & ce n’eft que dans des circonftan-
ces graves & urgentes qu’il convient d’y avoir
recours. O r , dans le cas que nous avons décrit,
il eft évident que la vie du malade doit dépendre
de fon fuccès *, &,le Chirurgien le plus timide,
s’il eft capable de raifonner, doit reconncître la
convenance qu’il y a de la faire. D’après l’événement
bien connu de tons les cas de cette efpèce
iorfqu ils font parvenus au point pour lequel nous
avons recommandé ce fâcheux moyen, on peut
hardiment prononcer que le malade qui éprouve
de pareils Symptômes, eft dans le plus grand
danger de perdre la vie *, conféquemment dans
une iemhlable pofition, aucun remède qui donne
une chance de guérifon, ne devroit être rejetté.
D ’après la théorie feulement, on feroit déjà
porté à croire que, dans le cas dont il s’agit,
aucun remède ne promet d’avantage que l’opération
ci-deftus propofée *, mais, fi le raifonne-
ment Se trouve fortifié par l’heureux fuccès de
plufieurs tentatives, les argumens qu’on peut
faire encore contre fon ufage ne méritent plus
d être écoutés. Dans différens cas de cette nature
qui n’éroient pas d’une extrême gravité, M.
Bell a vu réfulter de grands avantages de la
pratique que nous avons recommandée. Il en a vu
un entr’autres, où après une faignée à la veine
médiane céphalique, les fymptômes réfiflantopi-
niâtrément à tous les remèdes, avoient été portés
a flî.n ,te^ flue Ie malade paroifi’oit devoir
périr infailliblement, mais une profonde incifion
que l’on fit dans les parties affectées le fauva.
Au moment où il étoit dans le danger le plus
imminent & où il foutfroit les douleurs les plus
vives, il fe trouva foulagé prefque fubitement;
l’enflure, q u i, jufqu’à cet inftant, avoit réfifté
à tout ce qu’on faifoit pour la diffiper & s’éten-
doit conftamment de plus en p lu s , ne tarda
pas à s abattre, & le malade obtint une guérifon
en beaucoup moins de tems qu’on n’auroit pu
l ’efpérer.
Tout ce que nous avons dit jufqu’à préfent
de la Saignée-regarde cette opération en gé*r
néral. Nous allons à préfent la confidéret
fuivant les différentes parties du corps où on la
fait ; & nous parlerons d’abord de la Saignée
du bras.
De la Saignée du Bras.
Gn Saigne plus fouvent fur la partie antérieure
de l’avant-bras, près du pli du coude,
qu’en aucune autre partie du corps. Les veines
en général font beaucoup plus vifibles en cet endroit,
mais c’eft la feule raifon que l'on puifle
donner de cette préférence} car les nerfs, les
tendons & les groffes artères qui fe trouvent dans
le voifinage de ces veines, rendent l’opération
plus dangereufe en cet endroit qu’en tout autre.
Auffi eft-il évident que, s’il eft néceffaire toutes
les fois qu’on fait une Saignée de ne négliger
aucune des précautions recommandées ci-defîù:,
l’obfervation en eft encore plus importante lorsque
la Saignée fe fait en cette partie, où les
veines fe trouvent fi voifines d’organes qu’il eft
dangereux de blefler.
Comme .nous avons déjà expliqué fort en
détail les différentes parties de cette opération,
nous nous contenterons, pour éviter les répétitions
, d’indiquer ce qui eft particulièrement
néceffaire pour la faignée du bras. .
La ligature deftinée à arrêter le cours du fang
dans les veines, doit être placée à un pouce, ?
ou un pouce & demi au-deffùs du coude *, on en
fera le noeud lur la partie extérieure du bras
pour qu’il ne gêne pas le Chirurgien au moment
où il devra enfoncer la lancefte. Un feul
noeud pourroit fuffire, mats un noeud à a nfe. par-
deflus le premier, l ’empêcheroit de gliffer, &
n’eft pas difficile à fûire.
Pour le choix de la veine qu’on doit ouvrir,
il faut fuivre bien attentivement les règles générales
que nous avons indiquées. Il faut préférer
celle qui eft la plus vifible & qui roule le moins
fous la peau, à moins qu’il ne fe trouve une
artère immédiatement au-deffous & en comaél
avec elle y car alors, fi l’opérateur n’eft. pas parfaitement
sûr de fa main, il ne doit pas héfiter
àen choifir une autre. Pour l ’ordinaire cependant,
lartère eft fi profonde en cet endroit que l’on
peut ouvrir en toute sûreté la veine bafiiique ,
au-deffous de laquelle elle court le plus fouvent^
& fi cette veine: ordinairement fe montre davantage
à l’extérieur que les autres , c’eft proba -
blement à- caufe de la pulfation continuelle de
l artère qui eft au-deffous, & qui empêche que
la circulation ne s’y faffe bien librement*, cette
jaifon même doit! la faire préférer aux autres.
“ y a encore, quelques raifons de Saigner à. la
bafiiique, plutôt qu’à, la céphalique, ou à la médiane.
La première, favoir, la bafiiique, eft plon-
§ée moins profondément dans le tiuu cellulaire*,'
®u outre, comme elle fe rapproche davantage
de l’intérieur du bras, la portion de Pèxpanfion
Sendineufe. dit mufcle biceps ; qui ia recouvre ,jeft
plus mince que celle qui recouvre les autres.Toute*
ces circonftances font que la Saignée eft moins dou-
loureufe à cette veine qu’à aucune autre*, & cette
considération feule doit influer beaucoup fur- le
choix que fait le Chirurgien.
Lorsqu’on faigne en cet endroit, quoique
1 opération puifle fe faire de la main droite fur
l’un ou l’autre b ras, elle fe fait avec plus de dexté-
ritéde la main droite au bras droit, & de lx
main gauche au bras gauche *, quiconque s’y
prend autrement, doit fe fentir g ê n é & n’a point
de facilité p/tfur palper & comprimer comme il
convient avec lès doigts les veines du malade.
Chez les perfonnes qui ont beaucoup d’embonpoint,
il n’eft pas rare que toutes les groffes
veines fe trouvent tellement enfoncées dans le
tiffu, cellulaire que l’oeil ne puifle pas les ap-
percevoir *, mais pourvu qu’on les fente bien dif-
linélemenr avec les doigts, on peut les ouvrir
hardiment quoiqu’on ne les voye pas. Quelquefois
cependant, il arrive qu’on ne peut les dif-
tinguer ni par le toucher, ni par la vu e } alors,
comme il eft toujours poffible de trouver celles
qui font auprès, du poignet, ou fur le dos de
la main, on ôtera la ligature de la partie -fu-
périeure du bras pour la placer fur le milieu
de. l’avam-bras, ce qui fera paroîrre les veines
qui font au-deffousc O r , par-tout civ l’on apper--
çoit diftinèlement les veines, on peut aifémenc
faire une Saignée.
De la Saignée a la Veine jugulaire.
Dans les cas d’efquinancie r de maux d’yeutf
& d’autres .affeèHons- de la tête où l’on defire
de tirer du fang des vaiffeaux- voifins des parties;
malades, il arrive fouvent que l’on juge convenable
d’ouvrir la veine jugulaire externe.-
Il n’y a qu’un rameau de cette veine ,. favoir
fa branche poflérieure, qu’il foit facile de faire
paroître en dehors , affez pour qu’on puifle rouvrir
comme il convient. S'a fituation cependant,
n’efl pas très-voifine de l ’extérieur, car elle eft-
couverte non-feulement par la peau & le tiffu:
cellulaire, mais encore par lès fibres du mufcle
large du cob; ce qui fait qu’on eft obligé de la
comprimer affez fortement pour la faire gonfler
autant quil eft néceffaire. En conféquence, on:
confeille ordinairement au Chirurgien de placer
fon pouce fur la v eine,. de manière à y former
la compreffion dont il a befoin, à un pouce ou
un pouce & demi de diftance au-deffous de
l ’endroit où il doit faire fon ouverture. Mais
en général cette compreffion ne fuffit pas, parce
que le fang arrêté dans cette branche de la jugulaire
trouve ajfément un paflage par les autres'
veines j en forte que, pour y produire une dif-.-
tenfion fuffifante, il faut auffi comprimer la principale
veine de l’autre côté du coi; Pour cetr-
effet 931 mettra une compreflè p a r lem e n t - fe r r a i