
De la fracture du Sternum ',
Le Sternum éprouve ce genre de folution de
Continuité , le plus Couvent par une chùte qu’on
fera fur un corps aigu , qui offre une très-grande
rt'fiflance : il eft rare alors que les pièces con-
feivent leurs pofitions naturelles, elles Ce dérangent
toujours plus ou moins, & occafionnent,
. par les prtfiions quelles exercent fur les parties
voifines, des accidens plus ou moins urgetjs. Les
artères mammaires, parla violence du coup, font
quelquefois déchirées, ce qui donne lieu à des
ëpanchemens primitifs de fang, qui deviennent
fouvent fort inquiétans. Cette dernière circonftan-
ce arrive plus fréquemment dans les playes d’armes
à feu, qui intéreflent cette partie. Les malades
n’éprouvent pas d’abord de bien grands accidens,
par la raifon que l’épanchemenr fe fait
d’une manière forte lente, & que les feuillets du
médiaflin offrent au fang qui for t, une certaine
réfiftance ; la quantité de celui-ci, propre à produire
quelque détordre, ne peut s’échapper que d’une
manière fort lente. Mais bien-tôr ils fe plaignent
d’un poid qui gêne leur refpiration , St qu’ ils
difetit reffentir vers le Sternum.
En touchant la région de cet os, on trouve
un commencement d’oedématie ou d’infiltration,
qui doit porter à faire la plus férieufe attention
à ce qui pourroit furvenir par la fuite. Si les
vaiffeaux mammaires n’ont point été intéreffés,
les phénomènes que nous venons d’énoncer, font
beaucoup plus lents à paroître. L ’épanchement
qui fondent alors, eft en partie fanguin & purulent
; il provient tant du diploé de l’o s , que
de la Suppuration qui s’établit dans le voifinage
de la fraélure-, & la manière dont il fe forme,
a tant de rapport à celle des ëpanchemens fur le
cerveau, à la fuite des playes de tête, que les
Auteurs qui en ont trafté, ont eu recours à la
même théorie'pour expliquer leur formation. C’efl
ce qui efi confirmé par le témoignage de Junc-
Ler, de Duverney, & même de J . L. Petit. Ver-
duc , dit même que les accidènsqu’on a à redouter,
font encore bien plus graves & bien plus
promptement funefles ; notamment les palpitations
de coeur, la dyfpnée, la phrénéfie, les ccn-
vulfions & la mort; & .quoiqu’il les rapporte à
la dépreflïon des pièces détachées, & qu’il con-
feille pour les relever l’ ufage du tire-fond , fon
prognoftic n’en efi nas moins fâcheux. Il s’en faut
rie beaucoup cependant qu’on ait fi promptement
à craindre des épanchemens qui fe forment confé-
cutivementà la fraélure du Sternum , que de ceux
qui fuccèdent à Celle du crâne, & c’eft ce qui
efi confirmé par le plus grand nombre des Ob-
fervareurs, auxquels nous renvoyons pour de plus
grands détails.
La fraélure fimple du Sternum, qui n’efi accompagné
d’aucun accident, qui vient d’une chute
ou d’un coup, & qui eft fans aucun déplacemen t
ai
de pièces, demandent un traitement fimple. Aux
remèdes généraux, la diète > le repos, & ies
faignées plus" ou moins répétées, félon l’exigence
des cas, on fera fuccéder des topiques réfolutifs)
telles que des compreffes trempées dans de Peau
marin ée , aiguifée d’un-peu d’eau-de-vie, & qu’on
maintiendra avec un bandage de corps, aidé d’un
fcapulaire. Si les pièces étoient déplacées* on
cherchera à les relever, en preffant de chaque
côté le thorax -, en appliquant fur 1« lieu déprimé
, un emplâtre d’André de la Croix * munis
d’un cordon,pour pouvoir le tirer for rement,quand
il fera bien adhérent. On a confeillé, quand les
pièces failloient en-dehors, une preflîon faite
avec un baril, mais l’ufage des doigts fera toujours
infiniment préférable à ce moyen, quand il
fera bien dirigé. Enfin , quand aucune de ces tentatives
ne réunifient, il faut fe dérèrminer à in-
cifer fur le lieu de la fraélure, & à relever , avec
un élévatoire ces pièces, comme dans les cas
de fraélure du crâne. Si la fraélure compliquait
une playe d’armes à f e u , il faudroit fuivre le
même procédé , & enlever les pièces qui feroient
affez détachées des parties voifines, pour peu
qu’on doute qu’ elles puiflent fe réunir à elles.
Il arrive quelquefois> en pareil cas, que les vaiffeaux
mammaires, ifolés .de toutes parts, font
fans appui. Un cas pareil fe préfenta à M. La
Martinière •,ce j'aurois peut-être dû lier , dit-il,
cette artère pour prévenir les accidens que fon
ouverture inopinée auroit pu caufer. La curiofité
de voir ce que cela deviendroit, me fit prendre
le parti d’attendre ,* je foutenois les vaiffeaux avec
delà charpie mollement conglobée ,que j’infinuois
deffous, pour fervir comme de pilliers d’acque-
duc. Chaque jour l’imervalle devenant moins
étendu , par le rapprochement des parties , je
diminuois proportionnellement la charpie. Enfin
l’artère fut réunie aux chairs voifines, & la cicatrice
gagnoit folidement de la circonférence au
centre de la playe. Trois femaipes après, il fut
parfaitement guéri, n Si les accidens déterminent
à incifer, & ^ue le Sternum foit Amplement fend
u , il faudroit alors fe difpofer à le trépaner*
n’y ayant que ce parti qui puiffe procurer l’évacuation
des matières épanchées, auxquelles on
rapporte les accidens.
De la_ Carie du Sternum.
Cette affeélion fâcheufe eft fouvent la fuite de
dépôts formés fur cette partie, & qui s’ouvrant
fpontanément, pour avoir été abandonnés à eux-
mêmes, ne laiffent échapper lentement qu’une
très-petite quantité de pus. Le refie alors * fé-
journant dans le fond du foyer , & acquiérant
une acrimonie corrofive , ronge peu-à-peu 1 os
avec lequel il eft en contaél. On trouve plufieurs
faits de ce genre * notamment dans Galien, l’Auteur
lé plus ancien qui ait traité cette matière *
dans toute l’étendue qu'elle demande. Comme la
pratique ne peutqu’ëcîatrer la théorie, quand elle
efi fondée fur des piinci'pes , & que la conduite
de cet Auteur prouve qu’il donnoit à chaque
une égale attention, nous rapporterons fes Ob servations
telles qu'elles fe trouvent confignées
dans fon fepîième Livre des Adtninîftrations Ana
tomiques', chap. i f .
Un jeune-homme s’exerçant à la lutte , reçut
un coup fur ie Sternum *, le mal fut'd'abord négligé
j :& en fuite traité peu convenablement. Au
bout.de quatre mois , il furvinr un abcès à l’endroit
qui avoit été frappé , on en fit l'ouverture,
& la guérifon fut aufli prompte qu'on l'avoir efpé-
ré. Une nouvelle inflammation produifir bien-tôt
un fécond abcès, qui fut ouvert, & qu'on ne
pût parvenir à cicatrifer. Le Maître de ce jeune-
homme appella en confultation plufieurs perfonnes
de l’Art j Galien ét’oit du nombre. On convint
unanimement que lé Sternum étoir carié j mais
perfonne n’ofoit entreprendre d’enlever l’os corrompu
, à caufe du mouvement'du coeur qu’on
fintoit du côté gauche , & dans la crainte "de pénétrer
dans la cavité; de la poitrine. Galien leur garantit
qu’il feroit l’opération fans endommager les
parties contenues, comme ils le craignoient ; mais
il ne promit rien fur la guérifon , ne fachant,
leur difoit-il, fi les parties qui font fous le Sternum
étoient altérées, & jufqu à quel point elles le
feroient. Ayant découvert l'os, il vit que la carie
hes’étendoit pas jufqu aux endroits que lés artères
& les veines-• parcourent fous le Sternum, ce
qui le détermina encore plus volontiers à entreprendre
l’opération. Lorfque la portion cariée fut
enlevée, il trouva la partie fupérieure du péricarde
altérée par la pourriture, & dans;cet endroit
le coeur fe mon t roi t à nud. Quoique* dans,
cette circonftance, Galien n’eut pas grandes e f- .
pérances de fauter le malade , il guérit néanmoins*
& en fort peu de tems. Pour obtenir ce
fuccès, il falloir * d it- il, emporter l’os carié, &
il ajoute , qu'il n’y avqit qu’un homme fort exercé
dans les préparations anatomiques qui en fût capable.
Il tait cependant les moyens dont il a fait
ufage •, fans doute que ce-font les mêmes que
ceux üfités pour -le traitement de la carie, la
tugine ou le feu , quoique ce dernier ne doive
pas être employé inconfidérément dans un endroit
fi voifin du coeur. La jugine eft l’inffrument le
plus à préférer. On incife les tégumens , s'il n'y ;
a point d'ouverture , ou l ’on aggrandir celle qui !
eft déjà , & 1’ ôn ratiffe toute la portion viciée de j
los. Si l'on trouve qu’elle s’étende à toute l'é-
paifîeur de l’os, on a recours au trépan, qu'on
applique ici avec les mêmes précautions que fur le
crâne. On emploie aufli les injeélions déterflves les
plus convenables, & avec les attentions que demande
la nature des circonftances, ainfi que nous
1 avons déjà dit à l'article I N JECTÏQN j & , lorfque
lê‘ pus; pat oit de bonne de qualité , que la
Chirurgie. Tome I L /ƒ.« Partie.
quantité en eft n oin ire chaque jo u r , ou /es
diminue, & même on les cd& , & ion panfe
à plat & à fec. Les parties cartilaginenfes des
côres partaient quelquefois le défor dre; ir faut
alors les feier, ainfi que la partie attenante du
Sternum , au moyen d'une1 très - petite feie
appropriée, à ceite fin/ La perte dé fubflance ,
qui 'réfulîe.de ces.opérations, . ne doit .point in-
; quiéter, uni que la -iplèLvre conferve route fon
intégrité , car,la nature vient à bout d.y fuppléer,
ainfi qu’il eft conflaré par l’obfervation d'Harvée!
Quoique nous ayons dit plus haut que l’emploi
du féu n’éroit pas fans crainte .dans le trai-
tament des caries du Sternum ; cependant, li
l’on s’en rapporte aux Obfervateurs, on l’a employé
quelquefois: avec fuccès. Jofué Aymar,
Chirurgien de Grenoble, a donné , dans les OEuvres
de Lazare Rivière, une obfervaffon fur une carie
du Sternum, à la fuite d’une tumeur dure,
qui s’étoit terminée, au bout d’un an, par la fup-
puration. L application réitérée du cautère aeluei
a été le principal moyen dont il s’eftfervi , pour
détruire efficacement cette carie. Marcher!is ’ Pro-
feffeur de Padoue , eft cependant contre ce
moyen j mais les raifons qu’il donne nous parodient
trop futiles pour les rapporter j il peut
avoir une grande efficacité entre jles mains d'un
homme inftruit & prudent, comine il peut être
très:nuifible dans celles d’un ignoraot.
Des Dépôts fous le Sternum.
Ces dépôts arrivent à fa fuite des inflammations
qui fiégent fur le péricarde, le médiaflin
antérieur , entre les • extrémités des côtes &
la plèvre qui les recouvre -, ou ils font la fuite
des coups * des chûtes qu’on a faites fur cette par rie.
Quelquefois ils font accompagnés de la fièvre 8c
de tous fes épiphénomènes , & d'autres fois ils
viennent infenftbiemenr & d’une manière cachée.
La tumeur offre alors l’apparence d’un véritable
fféatôme * dont l’ouverture laiffe échapper une
matière indigefte. Les dépôts dont il s’agit ic i ,
ont été complètement décrits par Avenzoar ; c’tft
une remarque que fair Freind , dans ion Hiffoire
de la Médecine. Cer Arabe dit que le péricarde
8l le médiaflin qui lui eft contigu , font fuje s
à l’inflammation & à fes différentes terminaifon-
auffi-bien que la plèvre & les poumons. Ereind
à cefujet, rapporteles fignes qui annoncent cette
inflammation. Il y a , d i t - i l, fièvre aigue , h -
quiétude, fo if, refpiration courre & fréquente
grande chaleur dans le thorax, une petite douleur
par-tout, excepté au Sternum, ou l'on fent
enrefpirant un refferrement & une gêne, plutôt
qu’une vraie douleur ; avec'cela la roux continue
& le pouls eft toujours dur, comme il ltft
dans la pleuréfie. Les fignes de l’abcès du médiaflin
produit par caufe interne & aigue , fe déduiront
de la confidération de ces fymptômes & des
fignes rationels, qui en indiquent-la terrai»