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fe fait fentir, tous les mufcles de la partie pof-
férieure du cou font affeélés defpafme, & tirent
la tête fortement en arrière. En même-tems, ceux
qui relèvent la mâchoire inférieure, qui, dès
le premier abord de la maladie, a voient éprouvé
un peu de rcideur, fe contractent avec violence,
& tiennent les mâchoires tellement ferrées l’une
contre l’autre, qu’on ne peut, même par force*
les féparer.
Ceî te affeélion des mâchoires eft regardée comme
le fymptôme pathognomonique de la maladie,
qui, dans bien .des cas, ne fe manifcfîe que de
cette manière, ou dont elle conftitue la principale
partie | ce qui l’a même fait regarder comme i
fine maladie particulière qu’on a nommée mâchoire
ferrée j chez les Anglois, lockedjaw.
JLorfque le mal eft parvenu au point dont nous
parlons, la douleur au bas du fternum revient
.très- fréquemment, •& les fpafmes du cou & des
müfcles de la mâchoire redoublent en même-
tems de violence. De nouveaux mufcles s’affectent
& participent à la contraélion fpafmodique;
ce font d’abord ceux.de l’épine du dos, qui,
par leur aélion, courbent le tronc fortement en
arrière.} accident auquel les Auteurs ont donné
le nom d’opifthotonos.
Dans les extrémités inférieures les mufcles flé-
ohiffeurs & les extenfeurs s’âffeétent pour l’ordinaire
en même-tems, & maintiennent les membres
dans.un état de rigidité. Dans les parties
■ fupérieures, quoique les extenfeurs du dos & du
cou aient été. les premiers, & foient généralement
les plus fortement affeélés, les fléchiffeurs
du cou, & les abaiffeurs de la mâchoire entrent
aufli en contraélion. Les mulcles abdominaux fe
contraéfent pareillement, & retirent fortement le
‘bas-ventre en arrière, de manière à le faire pa-
roître dur & roide comme une planche.
Enfin, tous les mufcles fléchmenrs de la tête
& du tronc, s'affectent au point de balancer tour-
à - fait l’aélion des extenfeurs, & de tenir tout le
corps, depuis la tête jufqu’aux pieds, dans un
.tel état de rigidité, que toutes les jointures
foient abfolument inflexibles. Les bras, qui, ju f
ques-là, avoient confervé quelque mouvement,
participent à la roideur générale, à la réferve
des doigts, qui confervent fouvent jufqu’à la fin
,wn peu de mobilité.. La langue conferve aufîi
la fienne jufqu’à un certain point, quoique fréquemment
agitée de violons fpafmes. .Tous les
mufcles de la face, ceux du front, des yeux, du
nez, des joues s’affeélent & altèrent les traits du
■ vifage de la manière la plus étrange.
Ces fpafmes font, par-tout, accompagnés de
vives douleursjf ils ne font pas conftamment au
même point de violence.} mais, après avoir redoublé
en intenfité pendant une ou deux minutes,
les mufcles fe relâchent un peu. pas affez cependant
pour céder à l’aélion de leurs antago-
jnifles. Les violons retours des contraélions & 3
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des douleurs, -fe font fentir quelquefois toutes
les dix , ou foutes les quinze minutes, fans aucune
caufe apparente de ces renouvellemens, autre
que les efforts naturels, pour changer de pofture
pour avaler , pour parler, &c.
On voit rarement dans cette maladie aucun
fymptôme fébrile, quoique lorfqu’elle efl à fon
plus haut période, & que les mufcles fe con-
traétenr avec plus de violence, le pouls foit fréquemment
ferré, précipité, & irrégulier. Quelquefois,
cependant, il efl plus élevé que dans
l’état naturel, avec plus de chaleur à la peau -,
mais le plus fouvent le vifage efl pâle, & la peau
fe couvre d’une fueur froide plus on moins générale.
Nous ne parlons ici que du Tétanos, qui
efl la conféquence d’une b tellure; dans celui qui
eft idiopathique, on obferve plus fouvent des
fytnptômesfébriles ,& même inflammatoires.D’ailleurs
les fonétions- naturelles font peu dérangées,
on paroiffent l’être plutôt en conféquence du
traitement & des remèdes qu’on emploie, que
par une fuite de la maladie même.
Le Tétanos a généralement été regardé, par
les Anciens, comme une maladie mortelle} il n’y
a même que peu d’années que les Anciens ont
commencé à fixer leurs idées, fur la manière
dont il convenoit de l’attaquer. Depuis cette
époque, on a fauvé la vie à divers individus qui
en étoient atteints, & quoique la méthode, qui
avoit réufîi dans quelques cas , n’eût pas été employée
auifi.heureufement dans d’autres, les fuccès
ont prouvé que le mal n’étoit pas toujours
incurable, & par de nouvelles tentatives, on eft
parvenu à trouver de nouveaux moyens de gué-
rifon.
Lorfque le Tétanos efl évidemment occafïonné
par la léfion de quelque partie nerveufe, les Praticiens
font d’accord pour demander l’amputation
c emplette de la partie bleffée, toutes les fois quelle
tû praticable, ou du moins de détruire la communication
qui ex i fie entr’elle &, le cerveau1,
foit en achevant, avec l’infirument tranchant, la
divifion du nerf hleffé, foit en détruifant une
portion de ce nerf, au moyen du cautère aéluel.
Mais, pour obtenir tout le fuccès qu’on peut attendre
de cette méthode, il faut y avoir recours
de bonne heure .} elle efi pour l’ordinaire inutile
lorfque les accidens font parvenus à un certain
point de violence, & que le fpafme efi devenu
général dans tout le fyfiême.
L’expérience a montré que l’opium étoit quelquefois
un remède très-efficace dans cette maladie}
mais elle a fait voir auffi qu’il ne la gué-
riffoir que lorfqu’on l employoiten dofes”extrêmement
fortes, beaucoup plus fortes qu’on ne fau*
roit le faire fans danger en tour autre cas', h
méthode qu’on a firme pour fon adminiftratiofl,
a été de le donner en dofes d’abord ,affez .mO'
dérées, mais répétées toutes les deux ou tr.o^
heures , ou à de plus longs intervalles fnivant le
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jjefoin. On en a fouvent admîojftré de cette manière,
vingt, trente, quarante grains & au-delà
dans vingt-quatre heures, fans autre effet que
de relâche r un peu le fpafme & les douteurs} le
mal a te n’éprouvant ni.fomm.il, ni affoupiffe-
nicnr, ni aucuns des autres accidens qui font
les effets ordinaires de celte drogue, même en
dofes beaucoup moins coniîdérables} ce qui fait
qsi’on peut en augmenter la quantité autant &
autii hardiment que les fymptôme s paroîtront
l’exiger. Il ne iaiffe pas cependant quelquefois
d’avoir des inconvéniens qui ne permettent pas de
le pouffer auHi loin qu’il teroit néceffaire. Nous
avons vu les fonélions de l’eftomac & des intef-
tins en fouffrir, au point qu’il étoit abfolument
iinpolfible d’en continuer l’adminiftration, &
qu’on ctoit obligé de l’abandonner avant qu’il eût
produit aucun effet falutaîre.
C’tft une chofe qui mérite une attention particulière
, que,quoique lès premières dofes d’opium
aient paru adoucir un peu les lymptômes, ces
bons effets ne fe fomiennent pas lo,ng-tems, &
qu’il faut en donner de.nouvell.es dofes, avant le
moment où les premières doivent ce (for d’agir.
On fuit la même méthode tant que les fympiômes
ont quelque tend.-nce à fe manifefier ; & , ce n’tft
qu’ap» ès qu’ils ont paru avoir cédé pendant un
certain teins, & qu’ils ont laiffé au malade des
intervalles de bien-être longs & foutenus, qu’on
peut fe permettre de diminuer les dofes du mé-,
dicamenr, & mettre enrr’elies de plus longs intervalles
de tems.
Un accident qui empêche quelquefois de donner
l’opium de manière à le. rendre' utile, c’eft
la difficulté d’avaler, qui efi un fréquent fymptôme
de cette maladie, & qui fe manifefie, fur-tout,
lorfqir’elle a déjà fait un certain progrès. Cette
ci-confiance indique la néceffité d’employer ce
remède dès les premiers inftans > & avant que la
déglutition devienne difficile. Lorfque la pré-
fence de ce fymprôme s’y oppofe , il faut donner
l’opium en lavemens, en dofes proportionnées
à la violence du mal. On obvie à la cor.f-
tipation que l’opium occasionne, pour l’ ordinaire,
par des lavemens émolliens, & un ufage de remèdes
laxatifs proportionné au befoin. .
L ’analogie a fait fuppofer que i’o-n pourroit
aider l’opium, par l’ufage de quelques médiesmens
de la claffe-des antifpafmodiques, & dans cette
idée, on a eu recours au mufe & au camphre,
qui font juftement mis au nombre des plus puif-
fans. Mais, quoique quelques Praticiens aient
cru obferver de bons effets du premier, la plupart
de ceux qui ont fait ufage de l’une & l’autre
de eés drogues dans des cas de Tétanos, n’ont
pas eu lieu de s’en louer, foit qu’ils ne les aient
pas employées en affez fortes dofes, ce qui efi
affez vraifemblable, foit que le mute, en par-
Mculier, ne fût pas d’une bonne qualité.. Nous
avons donné jufqu’à 150 grains de mute, dans
Chirurgie. Tome I L I L C Partie.
l’efpsce de douze h cm e s , à une jeune fiiie cl '
f'eizeans , au commencement d’un Teianos, fan>
obferver qu’il produisît fur la maladie aucun
changement falutaîre.
C ’cfi encorè l’analogie qui a conduit à employer
le bain tiède, comme un moyen qui paroi
ffoir devoir contribuer piiiffâmrnent à relâcher
la contraélion mufcu'aùe. Mais, quoique dans
un périt nombre cas il ait paru procurer un prit
de calme, fur-tout quand on s’tfi borné à l’employer
fous la forme de fomentations, en généra
1 , il ne réufiît point, & même il a fouvent
fdit du mal} pciit-ê.re en raifon du mouvement
qu'il faut donner au malade pour le mettre au
foin , & de ce que, comme nous l’avons fait obferver
plus haut, toute éfpèce d’aélion, de la
part de celui-ci, eft fujette à excirer chez lui les
plus violens fpafmes. Nous avons vu des effets
manifeftement fâcheux, réfulrer dé l’application
de ce remède , dans deux ou trois cas de Tétanos
ou nous avions cru pouvoir l’employer avec avantage.
Et quoique prefque tous les Auteurs, qui
ont écrit fur ce fu je t, l’aient recommandé, il feroit
difficile de trouver chez eux des faits d’où
l’on pût conclure que fon ufage ait jamais été
fuivi d’un fuccès bien marqué , Hiilary , Médecin
Anglois, qui exerçoit fa profelïïon dans les climats
chauds de l’Amérique, où le Teranos eft
très-fréquent, eft du même fentintent que nous
à cer égard. Il dit que, quoique l’ufage du bain
tiède paroiffe très raifonnabie & promette du fuccès,
il l’a toujours trouvé beaucoup moins utile
que les fomentations émollientes & ar.tifpafmo-
diques, & qu’ il a vu quelquefois les malades
mourir au moment où on les fortuit du ba'n,
quoiqu’ ils n’y euffent pas demeuré plus de vingt
minutes, & que la chaleur, de i’eau ne fût qu’à
vingt-neuf, ôu trente degrés} Hiilary en the air
and. difeafesofBarbadoes. De Haen suffi raconté
un fait tc.-mb isole-, où un malade, que le bain
paroiffoit avoir foui âgé, tomba mort un inftant
après en être forti.
Ce font peut-être ces mauvais effets du bain
tiède qui ont conduit quelques Praticiens à tenter
ce qu’ori ppurroit obtenir du bain froid. De
tous' les remèdes qu’on a employé contre le Te-
ranÿs, ce dernier paroît être celui par lequel on
en à les plus grands fuccès. On trouve, dans un
Mémoire de M. Wright , publié dans le fixième
volume des Recherches & Observations de Médecine,
de Londres, le récit des premiers effais
qu’on en a faits qui ont tous été heureux. Aujourd’hui
ce moyen efi devenu d’un ufage prefque
général dans toutes les Indes Occidentales.
La méthode qu’on fuit, à cet égard, confifte ù
plonger le malade dans l’eau froide, dans celle
de la mer, préférablement à" toute autre, quand
on en tfi à portée , ou à verfer fur fon corps
quelques féaux d’eau d’une certaine hauteur. Après
cette opération, on l’effuie avec fo in ,on le met