
fant, & qui peut également ne fe rencontrer que
trop fréquemment. La veuve Montbaiili fut
trouvée morte au moment où on s’y atrendoit le
moins. Les Médecins & Chirurgiens firent leur
Rapport d’après lequel il confie que toute la
face étoit échimofée, les narines remplies d’un
fan g coagulé, la poitrine livide antérieurement,
ainli que la partie Supérieure de chaque bras -,
il y avoit une plaie au-deffous du fourcil, droit,
qui pénétroit dans l’orbite *, tous les vifeères,
d’ailleurs, éroient dans l’état naturel. Rien de
tout c e c i, d’après le Rapport, ne pouvoir être
regardé comme caufe de la mort Subite dont elle
étoit périe. Il rapportoit les léfions contre nature
à une chûte où à l’aélion d’un corps contondant
, & la plaie du fourcil à un inftrument piquant
ou coupant, tel qu’un couteau ou du verre.
La rumeur publique indiquoit le fils de la défunte
comme convaincu du crime, & la chambre
criminelle d’Arras avoir déjà condamné l’ac-
eufé au dernier lupplice , lorfque la groffeffe de
la femme, qui devoir aiîifier comme témoin,
fit différer l’exécution. Les pièces furent communiquées
à M. Louis qui,dans la confultation,
reconnut que la femme n’avoir point Succombé
fous les coups du détenu, mais bien aux fuites
d’une apoplexie témulente, étant tombée fur
l ’angle d’un coffre. C’eft à cette chûte qu’il rapporta
la plaie de l’oeil, la fugiilation de la face
& des autres parties, & la forrie du fang des
narines à la fuite de la commotion. Le Praticien
que nous citons , appuya fa décifion fur plufieurs
faits tirés de Bohn, de Foreftus, des
Aéles des Médecins de Berlin, de Morgagni &
de Lancifi. Il obferve que ceux qui font des
Rapports fur la léthalité des plaies, ne fauroient
trop fe rappeller l’avis de ce dernier, lorfqu’il
dit : In kde re cautos velim tam ipfos Medicos
q u i, propriam aliquando fententiam pro ufu fo -
renjî interponere debent, quhm judices punituros
eos qui etiàm Ji levi impulfu dejecerint ebrium,
vel quemque alium ,* Ji., hic fiatim de vitâ obie-
r it , illatæ mortis fiant rei. Auffi fon avis détermina
t-il les.juges à abfoudre les accufés, &
à établir que déformais les Médecins & Chirurv
giens feroient plus circonfpeéh dans leur rapp
o r t, & qu’ils y exprimaient exactement les
caufts , tant prochaines qu'éloignées de la mort ; &
les raifons de leur doélrine ou opinion fur tout ce
qu’ils pourroknt découvrir. C ’tft en fe comportant
air/i qu’on pourra confiater le corps du
délit-, & c’eft. ce qui avoit été déjà établi par
le Commentateur du code criminel de Charles
V . Empereur des Romains, ainfi qu’il confie d’ après
le paffage fuivant : Si infpeBio quæ ad corpus
delicü JpeBat , omittatur ob dcfeBum certes
JcUnt’oe an vulnus fuerit lethale vel non, pana
o"dinarta adkiberi nequit, quippe quæ tiunquam
decerni pou f i , nifi ubi confiiteiit de.vulneris letha-
litatej de quâ tamen judex ccrtus ejfc non poteft,
nifi faBâ priiis diligenter cadaveris infpeBione.
Souvent encore il s’agit de décider fur le genre
de mort dont a péri un cadavre qu’on vient de
retirer de l’eau. La mort eft-elle dûe à la fub*
merlion, ou doit-on la rapporter à quelque vio-
lence qui l’ont précédée ? C ’eft la queftion la
plus (impie & celle qui intéreffe le plus dans
plufieurs cas où il s’agit de confiater un févice.
M. Louis, dans fes Lettres fur la certitude de
la mort, publiées en 1752 & dont nous avons
eu occalion de parler à l’article Noyé , établit
plufieurs faits qui conftatent le génre de celle
j dont ils périffent-, le principal èfi la préfence de
; l’ eau dans leur bouche, laquelle y eftroujours
fous la forme d’une écume plus ou moins bour-
beufe, & qu’on ne retrouve point chez ceux
qui ont été jettés dans l ’eau. C ’eft fur ce ligne
démontré vrai par une foule d’expériences que
fe fondèrent MM. Faiffole & Champeaux, Chirurgiens
du Roi aux Rapports en juflice de la
ville de Lyon, pour établir la caufe de mort
de Claudine Rouge à l’ouverture de fon cadavre.
Comme l’hilloire de ce fait eft très-intéreffante,
Si qu’elle a donné lieu à des répliqués où l’on
a taxé d’incertitude les lignes que l’on a regardés
jufqu’ic i, comme les plus certains du
genre de mort dont les noyés périffent, nous
tranfcrironsjjici- ce Rapport, qui mérite d’être
connu dans la circonflance préfente.
et No.us, Chirurgiens du R o i, députés aux
Rapports en juftice, gradués maîtres en Chirurgie
à L y on , certifions qu’en conféquence de
l’ordonnance rendue le feptième jour du courant
par M. le Préfident Dugai Lieutenant-criminel
en la Sénéchaufiée: & liège prélidial de
L y o n , fur les conclulions de M. le Procureur
du Roi auxdits lièges, nous nous fournies tranf*
portés dan$ le charnier de la paroiffe de Saint-
Michel, fous Condrieu, pour procéder au Rapport
des caufes de la mort de Claudine Rouge
après l’exhumation de fon cadavre que nous
avons trouvé dans une bière découverte,, enveloppé
d’une groffe toile , vêtu d’une efpèce de
cafaquin d’indienne rouge & blanc & d’une che-
mife de toile neuve. L ’ayant artentivtmcpt vifité,
nous avons trouvé la tête fans téguifiens, le
crâne à découvert & fans fraélure, la face, le
col Si les extrémités fupérieures rongées par les
vers, la poitrine & le ventre n’étant pas encore
ouverts par ces infeéles & la putridité-, pudenda
fine pilis , vafifque naturdlis exteriora vermibus
jhm depafta. Les extrémités inférieures prodigieusement
bourSoufflées & prefque fans épiderme
ou furpeau. D ’après ce détail., il nous eft impof-
lible de reconnoître aucune ca-ufe de mort fur
toute l’habitude extérieure. Ayant procédé à l’ouverture
du cadavre, nous avons trouvé les vaif-
eaux du cerveau très-gorgés, le coeur dans fon
intégrité à-peu-près naturelle, les poumons extfèmemem
affaiffès & fans eau dans leur intérieur.
De* là nous avons ouvert le bas-ventre1, tousles
vifeères de cette capacité nous ont paru être dans
leur état naturel. Ayant fait l’ouverture de 1 efto-
mac, nous l ’avons trouvé rempli d une pâte verdâtre
que nous penfons être de l’herbage que ladite
Rouge avoit mangé, environ une heure avant
fa mort, attendu que la digeftion de ces alimens
ne fàifoit que commencer. Nous jugeons, d après
tout ce que nous venons de dire, que cette fille a
péri d’une mort violente, peu de tems après avoir
mangé; & quelle a été jettée dans l’eau après
fa mort ; étant dam l’impoffibilité de recon-
noître quel eft softtivement le genre de mort
qu’elle a éprouvée, eu égard la putridité dont
nous avons parlé; ce qui nous fait préfumer que
ce cadavre a refié long—tems dans 1 eau, de laquelle
i’on nous a dit l’avoir retiré. Ce. que nous
attelions véritable. A Saint-Michel, fous Condrieu,
le io Juillet 1757. Signés, Faîsolle &
Champeaux.
Ce Kapport eft ïjbféquent à un qu'avoit drefl'é
un Chirurgien de Condrieu , & dans lequel
étoient mentionnées des preuves de mort violente
qui avoient déterminé les pourfuites de
la juftice. Les preuves > for lefquelles fa validité
appuyé, font les faits même & les nom-
breufes expériences tentées par ceux- qui ont
cherché à confiater la véritable caufe de la
mort des noyés. Il fe rapporte, quant au plus
grand nombre de circonftances, à ce que Paré
avoit déjà remarqué à ce fujet dans fon livre
des Rapports où il dit : ec Si le Chirurgien eft
appellé pour faire Rapport d’un corps mort tué
hors de Peau pour Savoir s’il a été noyé v if ,
ou jeité en l’eau mort,’ les lignes, çju’ il aura
été jetté v if font, qu’on trouvera l’ eftomac &
le ventre remplis d’eau. Il fort du nez quelques
excrémens morveux, & par la bouche écumeux
Si baveux, & le plus Souvent il Saignera du
nez ; de plus il aura l’extrémité des doigts &
le front écorché, parce qu’en mourant il gratte
le fable au fond de l’eau, penfant prendre quelque
chofe pour fe fau v e r ,& qu’il meurt comme
en furie Si rage. An contraire, s’il a été jetté
en Peau mort, il n’aura aucune tumeur en l’ef-
t.omac ni au ventre, parce que tous les conduits
font affaiffés & bouchés, & qu’il ne relpire plus,
Si auftî n’aura morve au nez,. ni bave en la
bouche, ni veflige aux doigts ni au front. C ’eft
pourquoi, félon ces figures, le Chirurgien pourra
faire Son Rapport fidèlement des corps morts
trouvés en l’eau, s’ils ont été jettés morts ou
vivants -, & quant aux corps morts qui s’élèvent
fur l’eau, c’eft qu’alors ils font déjà cadavéreux
& remplis d’air qui les fait élever fur l’eau,
comme une veflie remplie de vents.
Il eft encore quelquefois néceffaire de flatuer
fur le genre de more d’un enfant récemment né *,
car la pervetfité des moeurs n’engage que trop
Couvent les mères à porter une main parricide
fur ces chétives créatures*, & , fi e'iesfont pour-
fuivies, elles difent que leurs enfans font nés mort?.
La rougeur de la face, en pareil cas, ne prouva
rien pour l’étranglement^ car il eft conflaié par
l’expérience, que cette rougeur eft ordinaire à
ceux dont la tête eft reliée long-tems au paffage,
& que communément elle difparoît en peu de
jours, quand l’enfant continue à vivre. L épreuve
des poumons,ufitée en pareil cas, eft^ loin d être
un moyen allez certain pour q ue, d’après e lle ,
on puiffe décider fi un enfant a vécu eu non
après fa naiffance. L ’enfant en effet peut avoir
vécu après être venu au monde fans qu il ait ref-
pîré , quoique les poumons indiquent le contraire*,
ou enfin l’enfant n’a pas vécu & encore
moins refpiré, après être forti du fein de fa mère,
quoique les épreuves avec le poumon dépofent
le contraire*, confidérons chacun de ces cas,
d’ après les idées du Prof. Meckel, qui s eft fpé—
cialement étendu fur cette matière. Le premier
cas a lieu , lorfque des concrétions ou agglutinations
contre nature dans la bouche, des glaires
tenaces & collantes bouchent le n e z , la gorge,
Si s’oppofent au paffage de l’air dans les poumons.
Le Second cas Se rencontre lorfque la refpira-
tion a été incomplette ou rare, & qu’incorfidéré-
ment on a pris pour les expériences, une portion
de poumons qui n’avoif pas encore été développée
*, lorfque le fang s’eft tellement accumulé
dans les poumons même après la refpiration,
que la gravité Spécifique de ce vifeère en a été
confidérablement augmenté. Le troilième cas a
lieu, quand la putréfaèlion a déjà, dégagé l’air,
& que l’infulflation a développé les poumons j
dans ce cas, les poumons des enfans morts-nés
auront acquis une gravité Spécifique moindre que
celle de l’eau. Dans les deux premiers cas, les
juges, qui ne confulteroient que les épreuves
avec les poumons, abfoudroient•,&, dans le dernier
cas, ils condamneroient injuftement l’accufé.
La fuffifance de ces raifons doit porter à ne point
admettre l’épreuve des poumops pour décider fur
la naiffance d’un enfant venu mort ou vivant,
ou du moins à ne l’admettre comme probatoire
qu’autant quelle fe rencontre avec les circonstances
Suivantes.
I. Conditions fous lefquelles V épreuve des poumons
peut dépofer fur la vie de Venfant
après fa naijfance.
j o s i je fétus a au moins les dimenfions &
la pefanreur d’un enfant de Sept mois ou encore
mieux d’un enfant venu à terme.
'1.° Si le cadavre eft frais, exempt de toute
apparence de putrefa&ion qui pourroit faire croire