
Nous croyons donc qu’on fera mieux de renoncer
à tout remède de ce genre, *& de s*en
tenir à ceux que nous avons indiqués ci-deflus.
PO LY PE S . novjîrôdVî, Polypi. Excroiflances
charnues & indolentes qui s’élèvent des différentes
cavités du corps, ou des vil'tères creux qu’elles
renferment, & qui fe préfentanr au-dehors',ont différentes
formes & couleurs, félon leur nature
particulière. On leur a donné le nom de Polypes
à rsifon de ce qu’on a cru quelles avôient plu-
fieiir$ racines ou pieds comme les Polypes ou
Zoophytes, auxquels on les a comparés. Les na -
rines, la gorge, les finus maxillaires, la matrice
& le vagin, font les endroits d’où ces excroif-
fanccs naifTent le plus communément; on en a
cependant quelquefois vu dans le conduit auditif
externe, & dans le canal urinaire des femmes,
l l e f t fait mention d’un dans les Mémoires de
l’Academie de D ijo n , année 1783 , qui naiffoit
du reélum. On en fit avec fuccès la ligamîe , à
l ’aide d’ une groffe corde de violon , montée fur
une double canule , infiniment dont nous parlerons
par la fuite. Nous ne traiterons , dans
çet article, que de .ceux du nez , du finus
maxillaire, de la gorge , de la matrice & du
vagin, comme étant les plus communs.
Des Polypes du ne\.
Les Polypes de ce genre naifTent immédiatement
de la membrane qui lapiffe les narines,
ou plutôt ils font dûs à une'prolongation de
cette membrane qui alors s’amollit, s’engorge &
change plus ou moins de nature,, félon le caractère
de l’excroiffance & le rems qu’elle a été à
fe former. Voici là définition que Celfe en donne.
Polypus eft caruncula modo alba modo fubrubra ,
qfice narium ojji inhoeret, & modo ad labra tendens
narem implet, modo rétro per id foramen quo fp i-
ritus à naribus ad faucès defeendit, adeo increjcit
ut poft uvam confpici pojjïtf flrangulatque komi-
nem maxime auftro aut euro f l ante. Le P o lype
a fa racine implantée fur l’os ethmoïde,
fur là voûte môme du palais vers les apophyfes
pterygoldes, ou à l’un des cornets inférieurs du
nez. On en cite qui naifTent des finus frontaux
maxillaires & fphénoïdaux. Ruifch, dans fes
Obfervations de Chirurgie, parle d’un qui avoir
pris • naifïahce dans 1g finus maxillaire ; nous
parlerons plus bas de cette efpèce. Le Polype
n’occupe ordinairement qu'une feule narine ;
mais quand il éft ancien, qu’il a pris un grand
volume, alors il fe -porte dans l’autre narine,
après avoir déjetté & même ufé la cloifon qui
les fépare. Le Polype parvient quelquefois à un
volume prodigieux; j'en ai vu un aux Invalides
dont une partie fortoii par' l’ orifice orbitaire du
.canal nafal, une autre reiyroit dans l’orbite par
fa fente fous-orbitaire, & môme dans le crâne
uax la fente fphénoïdale, & qui, par une aune,
gagnoit l’arrière-bouche par les narines pofié*
rieures. Ce font les Polypes de ce.genre auxquels
les Anciens ont rrop facilement accordé plu-
fleurs racines ; mais les recherches que les-
Modernes ont faites depuis pour les mettre en
évidence , ont manifeftement fait voir que quelque
volumineufe que fait la tumeur , & quelques
multipliés qu’en foient les rejettons, elle n’av fit
cependant qu’une feule racine, ce qui eft vrai,
même à l’égard de tout autre Polype dont nous
avons ci - dédits fait mention. Le Polype eft
toujours feul ; cependant M., Manne cite l’Abbé
de Royas qui avoit les deux narines jonchées &
farcies de dix excroiflances- polypeufes qu’il lui
extirpa heureufement.
Les premiers indices qu’on a du Polype, eft
une anofmie ou infenfibilité aux odeurs les plus
fortes, laquelle eft accompagnée d’un fentjment
•de réplétion ou d’engorgement pareil à celui
qû’on éprouve quand on eft nouvellement attaqué
de ce qu’on appelle un Rhume de cerveau. Les
malades, en portant leurs doigts dans la narine,
n’y fentent rien; mais, pour peu qu’ils lesfourent
fortement, ils font fortir une certaine quantité
defang, & bien-tôt la tumeur éprouvant un dégorgement
fuftifant, l’odorat revient, mais pour
peu de teins. Les accidens reparoiflant & aug«;
mentant de plus en plus en intenfiré , déterminent
les malades .à confulter. Si alors on regarde
dans l ’intérieur de la narine, on y découvre
une petite tumeur qu’on ne peut bien
voir qu’au tant qu’on leur fait tenir la tète fort
élevée en arrière ; fi Ton fait faire une forte
expiration, on voit la tumeur s’avancer & s’enfoncer
de nouveau, quand on fait ceffer l’expiration.
Quelquefois la tumeur fe retire fpontai
nément dans les tems fecs & s’avance dans les
tems. pluvieux d’une manière étonnante. La
tumeur alors offre différens degrés de confif-
tance; elle eft quelquefois très-folide, & même
, approche de la dureté cartilagineufe, mais le
plus fouvent elle eft molle & faigne pour peu
qu’on la touche un peu fortement ; c’eft ce genre
de Polype fur qui la température de l’atmof-
phère a une très-grande influence. La sumeui
offre également une couleur fort différente; quelquefois
elle eft pâle comme tranfparénte , d’autres
fois elle eft d’un rouge foncé. Cette copleuf
. femble être plus propre à ceux qui font d’une
certaine confiftance , comme la pâleur Teft *
ceux qui font moux. Le Polype d’abord n’elt
p.as accompagné d’une bien grande douleur ;
même à une époque beaucoup plus avancée;
fur-tout ceux qui font d’une nature molle ; mais
ceux qui font plus confiftans deviennent plus douloureux,
à noefure qu’ils augmentent en volume;
: fur-tout quand on les touche trop fouvent. Ordfc
; nairement ils s’enflamment, & bien-tôt la fupp*J-
ration s’établiffam à leur furface, il fort par *e
flfii
nez une plus ou moins grande quantité de matière
purulente. Ce font ceux-ci qui ont une grande
tendance â l’ulcération cancéreufe; mais aufli ils
font moins portés à croître avec autant de
promptitude que ceux qui font moux. Ceux-ci
produifent rarement des accidens dès leur commencement,
tant qu’ils font confinés dans les
narines; mais, dès qu’ils ont acquis affez de vo lume
pour en fortir, alors ils en occafionnent
dont la nature eft relative aux parties qui font
plus ou moins comprimées, ou aux paffages plus
ou moins obflrués. En appuyant fur ia conque
inférieure, ils bouchent & ferment tellement le
canal nafal que les larmes ne pouvant couler par
le nez, elles dilatent le fac & refluent par les
points lacrimaux de manière à rendre l’oeil tout
larmoyant. Quelquefois, chez les perfonnes dont
Tarification n’eft pas encore complerte , les os
prêtent avec la plus grande facilité, la face s’élargit,
le nez, qui n’eft plus foütenu par la cloifon entièrement
jettée de côté, s'affaifle, & une portion
du Polype pénétrant les finus maxillaires
par fon orifice naturel, & s’y trouvant encore
à l’étroit, porte fa portion orbitaire en haut,
chaffe l’oeil de l’orbite , détruit & défigure ainfi
les divers os du ci âne & de la face, de manière
à les rendre méconnoiffables. M. Bonnet a envoyé
à l’Académie de Chirurgie , un crâne où
Ton voit tous les défordres qui peuvent furvenir
en pareil cas. Les parois des finus maxillaires
font fingulièrement émincées & détruites en
divers endroits , u011 - feulement du côté des
foffes orbitaires, mais encore du côté de la
voûte du palais, dont la grande partie a été
rongée. Les cornets inférieurs du nez, les lames
fpongieufes de l’ éthmoïde, les finus & toutes les
éminences de l’os fphénoïde font aufli totalement
détruits. Mais pour peu que les os offrent
delaréfiftance & que les Polypes loient moux &
indolens, ils tombent en devant fur les lèvres,
ou fe portent en arrière vers le gofier, & non-
feulement alors ils gênent la déglutition, mais
même encore la refpiration , en déprimant plus
ou moins l’épiglotte fur l’orifice de la trachée-
artère.
La caufe proégumène du Polype eft relative
aux deux efpèces- que ,notts avons àdmifes. Le
moux paroît viltblcment provenir de l’engorgement
aqueux des vaiffeaux de la membrane
des narines, comme il arrive chez ceux qui font
fujçts au coriza ; c’eft celui que les Auteurs
comment communément Véficulaire, à rai fou de
«a tranfparence qui le diftingue de toute aurre
tumeur. Le dur provient de la même caufe qui
fait naître les tumeurs farcomateufes dans les différentes
parties du corps ; il eft fouvent fomenté
par une caufe vénérienne , qui commencé par
Çarier Pos, circonflance qui en complique toujours
le traitement. En général, les Polypes de
une & de l’autre efpèce peuvent prendre des
ÇUrurgie. Tome I I , 1.*' * Partie.
accroiffemens plus ou moins prompts, félon que
la tumeur & les parties d’ou elle naît, font plus
ou moins fujettes à s’enflammer. Ainfi , l’on en
voit qui reftent, pendant un très-long tems, dans
un état ftarionnaire, quand les malades ne font
point forcés à s’expoler en plein a i r , pendant
que d’autres font des progrès très-rapides, notamment
chez le peuple accoutumé à braver
l’intempérie des faifons, & chez qui les retours
des catharres font fréquens.
Il faut faire attention à ces deux genres de
caufes*ainfi qu’au degré de la maladie, pour
apprécier la valeur des moyens de guérifon &
porter un prognoftic fur la curabilité de la maladie.
Selon quelques Auteurs, les Polypes font
toujours dangereux, en forte qu’on peut regarder
ceux qui en font attaqués comme étant dans une
pofition fort inquiétante. Selon d’autres , ils
font rarement funeftes quoiqu’occafionnellement
fui vis de quelques dangers. Les premiers confeillent
de n’y jamais toucher, pendant que les autres veu -
lent qu’on les tourmente fans s’occuper de ce qui
peut en réfulter. Cette diverfité d’opinions vient
de ce que tous n’ont point diflingué les efpèces,
avec la précifion qu’ils auroient dû. Nous avons
déjà remarqué que les tumeurs de ce genre avoient
différens degrés de confiftance ; eh - bien !
nous pouvons dire , d’après l ’expérience , que
les dangers qui en accompagnent le traitement
chirurgical, eft en raifon de leur dureté. Les
Polypes moux font non-feulement moins douloureux
que les autres, mais encore on a moins
à craindre dans leur traitement. Il n’ en eft pas
de même de ceux qui font durs & comme far-
comateux ; non-feulement ceux-ci occafionnent
de la douleur dans l’opération , mais ils font
encore fujets à revenir après qu'on les a traités.
A in fi, en fuppofant d'ailieurs la conftitution du
corps autant bonne qu’elle puiffe être , on peut
donner un prognoftic favorable dans prefque
toits les cas de Polypes moux & peu volumineux
; c’eft le contraire pour ceux qui font far-
comateux ou durs, car alors il eft rare qu’on
puiffe emporter ceux-ci complertement; & , quand
même on y réufiîroir, ils font fujets à revenir,
& même à îaifler après eux un ulcère cancéreux.
Avant de penfer au traitement manuel du
Polype , il convient de recourir aux moyens ré-
vulfifs qui peuvent dé:ourner les humeurs des
narines ; cette règle a particulièrement fon application
dans les Polypes farcomateux commençai
«. Ainfi , l ’on purgera fréquemment le
malade avec les draftiques ; on ouvrira un
cautère ou un féton à la nuque ^ où Ton fera
porter le garou au bras ; puis on en viendra aux
fondans apéritifs & à la ptifanne des bois. Si
l ’on peut rapporter la caufe de la maladie à un
principe vérolique , on aura recours aux mer-
curiaux; fi Ton préfume qu’elle dérive d’un levain
feorbutiqus, on s’en tiendra aux remèdes qu’où