avec une matière particulière à Turine. ( Voye\
Varticle U rine. )
d. Le muriate de /W« infundibuliforme. C'eft
celui qui préfente des trémies formées par la juxta-
pofition des cubes le long de leurs bords.
La faveur de ce fel eft falée , pure & agréable.
C'eft de toutes les matières falines , quelque
nombreufes quelles^oient, la feule qui jouiffe
de cette faveur falée franche qui plaie à 1 homme
& aux animaux , & qu'ils recherchent^ comme
un léger irritant , nécelfaire fans doute a l exercice
des fondions de leur corps, puifqu'ils ont
pour lui un appétit bien prononcé.
C'eft aufli de tous les corps falins un de ceux
que la nature a offerts le plus abondamment aux
habitans du globe , foit fous forme folide & oe-
pofé en couches plus ou moins confidérables dans
le fein de la terre , foit diffous dans les eaux de
la mer, des fources & des fontaines falées, foit
dans les humeurs des végétaux & des animaux.
Le muriate de foude naturel folide eft ce qu on a
nommé fel gemme, parce qu’ il eft fouvent tranlparetit
comme les pierre*, nommées gemmes ou crijiaux
gemmes. Ce fel offre beaucoup de modifications
dans fa forme , fa couleur, fon grain , fa faveur :
on les a fouvent diftinguées comme des efpèces,
tandis que ce ne font véritablement que des variétés.
Le plus fouvent il eft blanc : on en trouve
de gris, de jaune , de fauve , de rouge, de brun,
de bleu & de noirâtre; il y en a de très-dur; 1 autre
au contraire eft tendre & facile à broyer.-Celui
ci eft d’une faveur agréable ; celui-là eft acre
& amer. Tel elt crifhllifé en cubes , dépofé en
couches lamelieufes, groupé en grand à la manière
des incruftations par couches concentriques,
comme des ftaladlites 5 tel autre eft en maffes informes
ou en roches. Les variétés de couleur &
de faveur dépendent de quelques corps etrangers,
fouvent métalliques, prefque toujours du ter qm
y eft mêlé , quelquefois d’autres fels, &: fur tout
des muriates terreux qui lui- donnent de 1 acrete,
de l'amertume & de la déliquefcence. Les mines
ou carrières de ce fel font abondantes en Pologne,
en Hongrie, en Ruflîe, en Efpagne , &c. : on les
exploite par des puits, des galeries & à laide de
pics , &c. comme les mines ou carrières de
nouille, &c. .
La portion de ce fel, difloute dans les eaux de la
met, des fources & des fontaines falees, n eft pas
plus pure que celui qui eft dépofé dans la terre.
En général, il eft rare qu’une eau falée naturellement
en contienne plus de 0:04 de fon poids. La -
faveur âcre & fouvent amère de cette eau ne dépend
pas tant du muriate de foude qu elle contient,
que des autres fels étrangers qui y font meles,
furtout des muriates terreux ou des fulfates de
foude & de magnéfie.
La nature fôurniffant abondamment le muriate
de foude, on ne le fait jamais artificiellement. Celui
qui eft folide, ou le fel gemme, eft Amplement
extrait de la terre, brifé en fragmens, & offert
ainfi immédiatement aux befoins de 1 homme &
des animaux. Quant au fel diffous plus ou moins
abondamment dans les eaux , on^ l’en fépare en
général par une évaporation faite à l'aide de procédés
différens, fuivant la richeffe de ces difiolu-
tions, leur faturation refpeétive, la température ,
le climat des lieux divers, & l'induftrie de leurs
habitans. La nature elle-même en a donné l’exemple
à l'homme, en lui préfentant a la furface des
rochers , fur les bords de la mer, des croûtes de
fel dépofé par l'évaporation. Les peuples fauvages,
fitués à peu de diftance de la mer, fe contestent
de prendre ainfi dans les creux des rochers celui
qui s y raffemble par les>ayons du foleil & le cont
a i de l'air.
On nomme marais falans des plages creufées lur
le bord de la mer ,-dans les pays méridionaux, ou
l'eau falée, reçue par le mouvement du flux, elt
arrêtée, s'épàiflit & fournit le fel qu’elle contient,
en s'évaporant fpontanément. Cet art eft
pratiqué dans les départemens de 1 oueft de 1 Empire
français, & furtout à Peyrac, Peccais , &c.
L’eau de la mer , dans les grandes marées , arrive
dans de vaftes réfervoirs généraux qu'on nomme
vafetSy où elle dépofé les terres qu'elle entraîne
par fon mouvement, fe purifie des détritus orga-
niques par la fermentation qui s’y établit, & prend
en même tems, par un commencement d'évaporation,
un degré de falure un peu plus confidera-
ble que celui qu’eHe avoit. L'eau s'écoule enfuite
par une légère pente dans d'autres réfeTvoirs d environ
cinq mètres dé largeur, qu on nomme aires
y & dont vingt forment ensemble une livre.
Ces aires font féparées par de petits murs de terre
nommés vettes. Le fol de ces féconds réfervoirs
doit être argileux pour retenir l'eau falee ; elle y
prend bientôr, par la chaleur du foleil & par le
vent nord-oueft, auquel on a foin dexpofer les
aires convenablement difpofées pour cela, un
certain degré de concentration; elle y devient
rougeâtre par le dépôt ferrugineux qui s y forme*
& la fubftance animale marine qui s'y altère. Au
moment où elle arrive à fon point de faturation
par le fel qu’elle contient, il fe forme a fa furface
une pellicule faline qu'on enlève avec des écu*
moirés percées fi l'on veut du fel.blanc, ou qu on
-brife pour la faire tomber au fond , & faire con-^
tinuer l'évaporation de l’eau qu’elle recouvroit;
On ramaffe avec des râbles de bois, vers les bords
des aires, le fel dépofé, que l'on fait égoutter dans
des paniers, & que l'on réunit enfuite en pyrami-?
des. Avant que l'eau foit entièrement defféchés
dans les aires, on les remplit de nouvelle eau des
vafets : par ce moyen, on obtient le fel plus pur
& privé de beaucoup d’eau mère ; on îaiffe, après
plusieurs opérations, cette eau fe perdre , quoi-,
qu'on pût en tirer un grand parti pour préparer le
muriate d'ammoniaque, comme je le dirai plus
bas. Si le tems devient trop pluvieux, on fait
couler les eaux des ai res.-dans un réfervoir fomer-
rain, d'où 011 les tire de nouveau pour les remettre
dans les aires à l'aide de pompes & de chéneaux
de bois lorfque l’atmofphère eft devenue
fèche.
On recouvre de chaume ou de fagots de bois
les tas ou pyramides de fel élevés fur le fol£à quelque
diftance des marais falans 5 quelquefois on
brûle ccs fagots, & il fe forme ainfi une croûte
de fel fondu, qui, par fa dureté & fa furfaceliff’e
inclinée, défend toute la maffe de l’aétion des
eaux pluviales. On ramaffe celles-ci , qui diffol-
vent du fel, dans une fofl’e creufée autour des pyramides.
Le fel des marais falans eft fort impur j il
Contient du fable, de l’argile, de la craie, au fui-
fate de chaux , de l'oxide de fer, du muriate de
chaux, ikc.
Dans les départemens de l’Empire français, où
la température & le climat ne permettent pas d’établir
des marais falans, & fpécialement fur les
côtes des ci-devant provinces de Bretagne & de
Normandie, on pratique une autre méthode allez
ingénieufe. On fait couler l’eau delamer fur de vaftes
terrains glaifés, recouverts de quelques centimètres
de fable fin qui favorife l'évaporation de l’eau
par la divifion qu'il lui fait prendre entre fes molécules
; de forte qu'au bout de quelque tems on
atin mélange de fable & de fel. On ramaffe ce
mélange en petits tas pour le deffecher 5 on le lave
avec de l’eau de mer, qui prend tout le fe l, & fe
concentre affez par-là pour pouvoir être évaporée
avec avantage. On la fait cuire ou évaporer en-
fuite dans de grandes chaudières de plomb, à
l’aide de matières combuftibles > on agite la liqueur
à mefure que le fel fe dépofé, afin d’empêcher
qu'il ne s’attache au fond des chaudières ; on
le retire & on le fait égoutter. On a , par ce
procédé, du fel blanc qui paroît plus pur que celui
des marais falans, mais qui contient du muriate
de chaux. On nomme ce procédé méthode par le
bouillon.
Dans les pays feptentrionaux , dont la température
eft,fouvent au deffous de la glace, on fuit
une méthode oppofée à celles qu'on vient d'indiquer.
On enlève par la congélation l'eau furabon-
dante à la diffolurion du fel; on enrichit l'eau de
mer en en féparant de l'eau douce par la gelée.
En recevant l’eau marine fur un vafte terrain argileux
, fa furface fe congèle ; on en brife & on
enlève la glace > il s'en reforme une fécondé
croûte qu'on enlève encore, & on continue ainfi
jufqu'à ce qu'il ne refte plus que de l’eau faturée
de fel. On traite celle-ci par l'évaporation artificielle
, comme dans la méthode par le bouillon.
On fait que les navigateurs tirent parti de cette
propriété gelable de l’eau de la mer d’une manière
inverfe, & que lorfque, dans des voyages de long
cours, ils manquent d’eau douce, ils s'en procurent
dans les mers du nord & près des pôles, au
moyen des glaçons polaires.
Les départemens de l’eft de la France, Ceux de
la Meurthe, du Jura, du Mont-Blanc, offrent des
fources falées, dont l'induflrie nationale a fu tirer
un grand parti , & qu’on exploite par plu fie ui s
procédés différens emr'cux , mais dont le réfultat
eft le même. Après en avoir raftemblé l'eau dans
des puits conftruits en maçonnerie ou doublés de
planches & d’argile, on l'enlève à l'aide de pompes
ou de diverfes machines hydrauliques. Leur
falure étant variée depuis un ou deux degrés de
l’aréomètre, jufqu’à quinze ou feize, & celle des
premières étant trop peu riches pour qu’on puifle
les évaporer avec profit, on a recours au procédé
ingénieux de la graduation. C'eft une opération
par laquelle on multiplie finguliérement le
conta# de l'eau avec l’air, en la divifant & en
l'agitant, pour la faire évaporer & y augmenter
la proportion du fel. On nomme bâtimens de
graduation deshangards couverts, fous lefquels on
met , on arrange fur des planches une grande
quantité de fagots de bois d'épine. L’eau, élevée
au haut de ces bâtimens par des pompes ,
tombe plufieurs fois de fuite fur les fagots, par
lefquels elle eft difperfée ; & , frappée par i’aic
dans un grand nombre de points à la fois, elle
s'évapore très vite. On continue à l'évaporer
ainfi jufqu'à ce qu’elle donne feize à dix-fept degrés
à l’aréomètre, ou qu'elle foit graduée : alors
on la porte dans de grandes chaudières de tôle
établies fur des fourneaux, foutenues par des crochets
de fer qui partent de leur fond , & repo-
fent fur des pièces de bois portées par les bords
de ces vaiffeaux. L'eau paffe d’abord dans la chau-.
dière du fond , nommée poêlon, où elle s’échauffe
& commence à s'évaporer; enfuite dans
la poêle proprement dite, dont elle ne refroidit
point l'évaporation en pleine activité , & dans laquelle
on ne la fait arriver qu’à proportion de.
celle qui s’y évapore : l'eau falée commence à dé-
pofer du fuifate de chaux dont elle contient encore
une portion , outre celle qui s’eft raffemblée
fur les bdis des fagots pendant fa graduation. On
fépare ce fel peu foluble, qu’on nomme fchlot ,
dans des augelots de bois placés fur les bords de
la chaudière.. Le fchlotage continue ainfi jufqu'à
ce qu’il fe forme, à la furface de la liqueur, de
petits criftaux qu'on nomme pieds de mouches , &
qui fe préfentent quand l’eau, acquiert vingt-huit
ou vingt-neuf degrés à l’aréomètre. A cette épo-.
que, on retire les augelots j on enlève tout le
fchlot ou fuifate de chaux qui fe trouve au fond
de la poêle ; on rable enfuite ce même . fond
pour ramener le fel vers les angles, & empêcher
qu'il ne s'attache, ne nuife à l'évaporation &
n'altère la chaudière. On enlève le fel dans des
vafes. de bois ; on le porte au féchoir placé derrière
le fourneau, & de là au magafm. Quelque
foin qu’on mette à rabler la poêle, il s’y attache
toujours du fel en croûte, qui augmente à chaque
opération ou falinage. On a coutume de le dé