
avec rapidité, s'empare prefque fur-Ie-champ des 1
compotes organiques qu'il touche ; en forte que , ;
lorsqu'il eft concentré, il les brûle & les détruit j
au moment même où il eft en contaCt avec.eux. La
même férié d'effets fubordonnés aux attrapions
de l’oxigène fe retrouve dans les oxides métalliques
& leurs diffolutions : tous les oxides formés
des métaux qui attirent le moins l’oxigène,
font de violens cauftiques > comme je l'ai déjà fait
voir. Ceux au contraire qui retiennent forte»
ment ce principe, ceux qui ne le laiffent point
enlever par les fubftances animales, font , ou peu
énergiques , ou abfolument inaCtifs, comme l'oxide
gris de zinc., l'oxide noir de fe r , l’oxide d'étain,
&c.
Quelque probables que foient ces affertions,
quelqu’accord qu'elles offrent avec les faits de
pratique, elles n'auroient été pour moi que de
fimples hypothèfes vraifemblables j elles ne m’au-
roient pas fuffi pour en former un point de doctrine
certain fi je n’avois pas trouvé le moyen de
les confirmer, de les prouver, aux yeux des hommes
les plus difficiles à convaincre, par des obfer-
vations ou des expériences exaCtes. La.découverte
importante de Berthollet fur la différence du fu-
blimé corrofif & du mercure doux , le premier
plus oxigéné que le fécond, & fur le fublimé
corrofif ou muriate furoxigéné de mercure, paf-
fant à l'état de mercure doux ou de muriate de i
mercure fimple quand on le traite avec une fubf-
tance animale, étoit un trait de lumière j mais ce
n'étoit qu'une expérience faite fur une fubftance
animale morte, & je voulois des preuves que b
même chofe avoit lieu dans l’économie animale
vivante. Quoiqu'il ne fût pas difficile de la tenter
fur un animal vivant, quoique je cruffe qu'on la
trouveroit conforme à l'affertion de Berthollet ,~
c ’eft-à-dire, qû’ après avoir donné quelques grammes
de muriate furoxigéné de mercure à un chien,
on reconnoîtroit enfuite dans fes vifcères ce fel en
partie à l'état de muriate de mercure doux, je
n'ai point fait cet effai, foit parce qu’il n'eft pas
fans quelques incertitudes ou fans quelques difficultés,
foit enfin parce que plufieurs autres réful-
tats m'en ont tenu lieu. J'ai conftamment obfervé,
ce qu’avoit déjà noté Lorry il y a plus de trente-
cinq ans, que les oxides de Fer rouges, qu'on
prefcrit aux malades fous les noms de fafrans de
mars, fortent de leurs inteftins dans l'étar d’oxide
noir, qui teint leurs déjeCtions de cette couleur:
cela ne peut arriver qu'autant que la portion d'oxi-
gène qui eft au-delà de l'oxide noir ou qui palfe
0,27 d’oxidation du métal, eft enlevée par les
organes mêmes que ce médicament travérfe , & il elt trop évident, pour qu'il foit néceffaire de
l'expliquer longuement, que c'eft à cette portion
d’oxigène, de'gagé & abfôrbé lentement dans tout
le trajet inteftinal, foit par les humeurs qui en
garniffent les parois , foit par les fibres mêmes de
ce canal, qu'eft due une partie au moins de l'effet
tonique , aflringent & ftimulant qu'on obtient
par l’ufage de ces préparations-
Il eft prouvé depuis, long-tems que. les oxides
de mercure jaune & rouge fe noirciffent par le
contaCt des matières animales j. que cet effet a lieu
dans les inteftins, & que c'eft à cette circonûance
qu'il faut manifeftement attribuer les globules de
mercure coulant que l'on a trouvé, jufque dans
les cellules offeufes» chez les hommes qui avoient
fait un long abus des préparations mercurielles.
L'application de tous les cauftiques métalliques
fur les ulcères & les affrétions cutanées ne laiffie
encore aucun doute fur la réduction des oxides
8^ fur le paffàge de leur oxigène dans les matières
animales,, qui accompagnent, déterminent & expliquent
tout à la fois leurs effets. On le voit évidemment
dans le.muriate fumant d’antimoine ou
beurre d!antimoine , le nitrate de mercure liquide
ou eau mercurielle, le nitrate d'argent fondu ou
pierre infernale, qui laiffenr, fur les efcarres qu’ils
forment, une couche très-reconnoiffable de matière
ayant l’apparence & quelquefois même l’éclat
métallique..
Un autre ordre de faits que l'on doit aux lumières
déjà répandues fur la pratique médicale par
la dcPrine pneumatiquequi viennent à l’appui
de la théorie dont je parle ,. emhraffe tout ce qui
tient aux nouveaux moyens, foit d'annuiler les
terribles effets des poifons cauftiques, foit de remédier
aux ravages lents & tardifs qu'ils traînent
apies eux lorsqu’on a été affez heureux pour
échapper à leurs premiers dangers. Navier, en
recommandant les fulfures alcalins dans les em-
poifonnemens par l’arfenic, le vert-de-gris & le
(ubiimé corrofif, favoit bien qu'en décomppfant
& en abforbant ces âcres métalliques., les fulfures
qui feformoient,n’avoient plus la même caufticité
que les premiers fels $ mais il ne favoit pas quel
avantage réel on pouvoit retirer des eaux fulfu-
reufes naturelles ou artificielles, dont f’hydroful-
fure en enlevant une portion de l’oxigène des
oxides métalliques, leur enlève en même tems la
caufe de leur acreté vénéneufe j il ne favoit pas
que le fer feul, en poudre très-fine, eft également
propre à détruire la caufticité dés fels métalliques
cuivreux, mercuriaux & arfenicaux, en leur arrachant,
par fa forte affinité pour ce principe, l'oxi-
gene qui les rend cauftiques. Berthollet lui-mêmè,
en découvrant cette utile propriété de la décoction
du quinquina dans les empoifonnemens produits
par une trop grande dofe de fartrite d’antimoine
& de potaffe ( tartre ftibié ) S ignoroit en-
core que c étoit en réparant l’oxigène du métal
Itibie, que l’extrait de quinquina lui ôtoit toute
on énergie, & ce 11 eft en effet que quelque tems
apres cette découverte de Berthollet, que je fis
connoitie cette forte tendance des déco étions de
quinquina pour abforber de l’oxigène; Ainfi, tan-
dis que la recherche des contre-poi ons fait fans
celle des progrès par l’avancement de la chimie,
■ cette Ijelle fcience porte en même tems fon flambeau
fur le mécaniime des fonctions animales, &
fur FaCtion des remèdes^ Dans tous les effets heureux
& bien avérés que je viens d'indiquer, il fe
paflè manifeftement un phénomène qu’on connoît
aujourd hui dans un grand nombre d’opérations
chimiques : l’oxigène obéit à fes attractions j il
quitte un corps pour fe porter dans un autre , où
il fe partage jufqu’à faire naître un équilibre entre,
deux fubftances', dont l’une en enlève plus ou
moins à l’autre. On choifit, pour faire naître ce
falutaire équilibre, des matières qui non-feulement
ont plus d’affinité pour i'oyigène, que celles
qu on veut défoxigéner ou déb’rûler, mais qui ont
encore 1 utile propriété d’enlever la caufticité à
celles-ci, & de retenir en même tems ce principe
comburant avec affez de force pour l'empêcher !
de fe porter fur nos organes, c'eft-à-dire, pour
les forcer de refter elles-mêmes, quoiqii’oxigé-
nées, dans un état d’inertie fur nos corps. Tel
eft le procédé fi fimple & fi facile à concevoir
maintenant, par lequel le chimifte, en traitant le
fublimé corrofif avec le fer, le cuivre, l'étain &
1 antimoine, enlève au mercure l’oxigène qui le
rend fi âcre , & tranfporte la caufe de tous fes
effets fur les nouveaux métaux qui le décompo-
fent : telle la circonftance remarquable du partage
de 1 oxigène par le mercure coulant’', qui, en
1 enlevant, à l’aide de la feule*trituration, au fu-
blimé corrofif, & en perdant fa forme métallique,
adoucit fi fortement l’âcreté de ce fel, qu’au lieu
d un poifon cauftique,il n’eft plus qu’un fimple
purgatif. T el encore cet ingénieux procédé de
M. Vauquelin, de fabriquer, en quelques minutes,
de I éthiops martial en chauffant de 1-oxide rouge
de fer avec du fer en limaille : celui-ci enlève une
portion de fon oxigène à l’oxide rouge, & fait
paffer, par l’équilibre qui l’établit bientôt entre
les deux portions de fe r, toute la maife à l’état
d’un oxide noir homogène.
Ces notions, déjà fans doute affez multipliéës
pour conduire à 1 etabliflement d’une cioéirine
générale fur les fonctions ou les forces médica-
menteufes de F oxigène, appeloient néce flairemeht
toute mon attention fur le mode même de FaCtion
exercée dans nos corps par ce principe. On s’eft
contenté pour l’exercice de l’art ; mais il ne fuffi:
pas en effet, pour fon complément, de reconnaître
qu’une matière a telle vertu , de la plonger
ainfi dans la nuit des fpécifiques, en l ’offrant à la
crédulité ou au trop confiant empirifme comme
un remède précieux. Si l’on a vu , fi l'on a cent 1
fois répété qu'il n'y avoic.que cela d’utile éh mé- {
decine, c'eft la plus grande preuve qu’on ait pu ]
donner qpe cet art en étoit encore à chercher fes f
véritables bafes ou fes principes réels. Mais quand f
on font une' fois la néceflîté de lui en trouver dans |
la.philofophie de la nature-, dans.les lois mieux 1
connues de l’atcraéfion intime quêtes corps exer- -
cent les uns fur les autres, on ne peut pas être
fatîsfait par ce premier réfultat qui fe confond fî
fouvent, ou avec l'expreffion des préjugés, ou
avec les erreurs nées d'une obfervation précipitée
fi l’on n’y joint point des expériences fur le mode
d'aCtion du médicament, fur l’effet immédiat qu’il
produit dans les fonctions de nos organes. Quoique
peu avancé encore dans cette recherche qui
n'a celfé de m'occuper depuis vingt-cinq ans, mais
furtout vers 1790, époque où il m'eft permis d’ef*
pérer que l’hiftoire de la fcience n’oubliera pas
de confîgner mes travaux les plus fuivis & mes
expériences les plus nombreufes fur les matières
animales, il me fera facile de prouver cependant
que l’on eft plus près dê'connoître exactement la
i manière dont agit l’oxigène fur Us fluides & les
félidés animaux, qu'on ne l’eft à l’égard de l'opium
& du quinquina, deux médicamens héroïques,
dont on a cependant depuis long-tems l’occafien
mille fois répétée d'obferver & de déterminer les
effets, & dont on n'a encore bien faifi que le
dernier réfultat. Le genre de mes recherches fur
FaCtion immédiate de l'oxigène pouvant peut-
être contribuer à diriger celles qui feroient né-
ceffàires pour déterminer en quoi confifte FaCtion
des plus importans médicamens, on ne trouvera
pas fans doute déplacés les détails dans lefquels
je vais entrer à cet égard. Plus l'objet eft important
& difficile, plus la nature tient étroitement
replié & ferré le voile qui la couvre dans cette
opération , & plus fans doute on jugera néceffaire
de fuivre exactement les procédés qui m’ont conduit
peut-être à en foulêv&r une foible portion.
Ces détails d’ailleurs font de nature à faire découvrir
à d'autres de nouveaux fentiérs qui pourront
les mener à quelques vérités utiles. '
La première occafion que j’eus de faire attention
à îaéiion énergique de l'oxigène, tient à une
de ees circonftahcés de fetifations extraordinaires
qu'on éprouve lorfqrvon eft, pour la première
fois, expofé aux effets fubiits.de quelques préparations
chimiques âcres, odorantes 8e inconnues
jufque-là f 'c'étoit ëh 1787 , lorfqu'on pféparoit,
pour une'dé mes leçons , de l’acide muriatique
oxigéné dont' Berthollet 8c Pëlletier venoiem de
faire cônnoïtre'les plus importantes propriétés &
la nature intime , que j’avois déjà foupçonnées Se
indiquées , quelques années auparavant, dans mes
Elémens de Chitine. Deux jeunes gens, occupés à
cëtre préparation dans mon laboratoire , ayant
reçu, fans précaution , une grande quantité de
gaz. acide muriatique oxigéné dans la gorge & la
trachée1 artère , furent pris d’une toux violente 8e
fuffocante j ils rendirent bientôt, par les efforts
convulfift du diaphragme , des plaques ou g.èbes
de matière blanche-jaunâtrë ou verdâtre , épaiife
.comme dès' blancs d’oeufs à moine-cuits, 8e qui
fortirent en-;grande quantité julqU’à ce que la
poitrine eût.été'entièrement débârrjfleé ; ce qui
nieûc lieu qu’àprès quelques heures de tnal-aife.
IiS'S’étoknPplaints en même tems d'un ferrement
D d d z