
les inteftins , favorifer Ton mélange avec les ali-
mens , retarder ainfî la defcente de ceux-ci dans
le canal inteftinal : de là , dit-on, la faim plus
forte & le vomifiement de bile chez les animaux
a qui l ’on avoit enlevé le pancréas, la grandeur
de cette glande proportionnée à l’abondance 6c à
Tâcreté de la bile. On admet auflî dans le fuc pancréatique
la propriété de délayer & de diffoudre la
maffe alimentaire. C ’eft ainfî qu’on explique la voracité
des animaux chez lëfquels ce fuc eft verfé
dans Teftomac ou très-près de ce vifcère 5 la grof-
feur du pancréas dans les animaux qui ne boivent
pas ; la fécherefle & le refferrement du ventre
chez les fujets où le canal pancréatique eft comprimé,
chez les chiens à qui Brunner avoit ôté
le pancréas. C ’eft au refte une analyfe nouvelle &
importante à faire, que celle de ce liquide encore
û jjeu connu , & cependant fi intéreffant à con-
noître pour la phyfique animale 6c la médecine.
PAPAYER. Le fuc de papayer, efpèce de figuier
des Indes orientales, a préfenté a deux chi-
miftes modernes des faits allez intéreffans pour que
je croye devoir configner ici les quatre differta-
tiôns qu’ils ont inférées dans les Annales de Chimie.
On y trouvera furtout des rapports auflî remarquables
que nouveaux, entre l’analyfe végétale
& Tanalyfe animale.
Examen chimique du fuc de papayer, par M. Vau-
quelin (1).
ce Le végétal qui fournit ce fuc, a été nommé
pàr les botaniftes carica papaya, diaîcie décandrie j
il croît à l’ifle-de France, au Pérou, & fans doute
dans beaucoup d’autres endroits.
» Le fuc dont je vais offrir l’examen chimique
, a été rapporté de Tille-de-France par
M. Charpentier de Coflîgny , qui dit l’avoir vu
employer avec fuccès par les habitans du pays
contre le ver folitaire.
» Quoique les effets tentés jufqu’ici par les médecins
de Paris, pour le même ufage , n’ aient pas
répondu aux efpérances qu’on avoit conçues fur
fes effets, d’après l’avis de M. de Coflîgny, cependant
on a penfé qu’un examen chimique de cette
fubftance pourroit devenir intéreffant.
» M. de Coflîgny a rapporté deux échantillons
de fuc de papayer, l ’un fous forme Jèche & fans
préparation > i autre en extrait mou , provenant
du lait de papayer, qui avoit été confervé avec
une égale quantité de rhum, & enfuite évaporé.
« La première efpèce avoit une couleur blanche
jaunâtre , une demi-tranfparence , une'faveur
légèrement fucrée, point d’odeur fenfible , une
confiftance ferme, & la forme de petites
maffcsi irrégulières.
(1) Annales de Chimie, fkuâidor an .10, tome X L I I I ,
page aa5.
** La fécondé au contraire avoit une couleur
rouge-brune, une demi-tranfparence, l’odeur 6c
la faveur de boeuf bouilli.
» L un & l’autre de ces échantillons, mis fur
un charbon ardent, décrépitent, bourfouflent,
noirciflent, & exhalent une odeur parfaitement
analogue à celle de la chair qui brûle. Lorfqu’on
pouffe 1 aûion du feu jufqu’a l’incinération parfaite
, il refte une cendre blanche, peu abondante
, dont la nature fera expofée plus bas. Cette
cendre, Coumife à la flamme du chalumeau, s’environne
d ’une lumière très-phofphorefcente. »
Ejfais chimiques fur Véchantillon fec & fins
préparation.
« Cette fubftance, qui eft fèche & caffante
quand elle eft confervée dans un endroit fec , fe
ramollit, & devient pliante fi elle eft expofée à
l’air humide. •
» Mile en conta# avec trente-fix fois fon poids
d eau, elle s y eft delayée, & a formé une liqueur
laiteufe , qui moufioit par l’agitation , comme une
eau de favon. Au bout de quelque tems, la liqueur
s eft eclaircie par le dépôt d’une matière
blanche, qui avoit refufé de fe difl'oudre. Mais
bientôt elle s’eft de nouveau troublée y une pellicule
muqueufe s’eft formée à la furface ; elle a répandu
une odeur très-fétide, qui reffembloit parfaitement
a celle d’une matière animale en putréfaction}
enfin, elle s’eft éclaircie pour la fécondé
fois, & a dépofé des flocor.s blancs, qui étoient
fans doute la fuite de l’altération qu’elle avoit
éprouvée.
» La portion du fuc de papayer, qui, comme,on
vient de le dire, ne s’eft pas diffoute dans l’eau ,
avoit un afpe# grailfeux, fe ramolüffoit à l’air où
elle devenoit gluante, brunâtre & demi tranfpa-
rente. Cette matière, placée fur des charbons
ardens, fefondoit, & laiffo.it fuinter, de fa fur-
face , des gouttelettes de graiffe} elle faifoit entendre
un pétillement comme la chair qui rôtit
brulquement, & produifoit des fumées qui avoient
l’odeur de la graille volatilifée} elle ne laiffoitpas
de réfiiu fenfible.
» La folution dans l’eau de fuc de papayer, mêlée
avec 1 acide nitrique, a donné un précipité
blanc fi abondant, que le mélange s'e ft pris en
maffe folide.
» Une autre portion de la même liqueur, chauffée
par 1 ébullition , s eft coagulée, & a dépofé'
beaucoup de flocons blancs. La liqueur, féparée
par la filtration, n’étoit plus enfuite précipitée
par 1 acide nitrique} mais J’infufion de noix de
galle y produifoit encore une précipitation fort
abondante.
» Une troifième portion de la folution de ce
fuc, melee avec 1 alcool, étoit également précipitée,
mais moins abondamment que par l’acide
nitrique. Plulieurs diffolutions métalliques, telles
que celles de plomb, de mercure, d’argent, précipitent
auflî la folution de fuc de papayer.
» Les alcalis en liqueur dilfolvent une partie de
fuc de papayer -, les acides précipitent en blanc la
dilfolution qui en réfulte, 6c ils en dégagent, au
moment du mélange, une odeur naufeabonde,
abfolument femblable à celle d’une matière animale,
traitée de la même manière. L’alcool bien
déflegmé ne diffout pas fenfiblement cette fubftance.
Cepèndant lorfqu’on le mêle enfuite avec
de l’eau , il devient légèrement laiteux,
i: ” Le fuc de papayer fec, fournis à la diftilla-
tion, a donné beaucoup de carbonate d’ammoniaque
criftallifé, une huile rouge, ëpaifle 6c fétide,
des gaz acide carbonique., 6c hydrogène
carboné , 6c un charbon léger, qui, après Tincir
nération, a laifle une cendre blanche qu’on a reconnue
pour être du phofphate de chaux tout
pur.
» Il me paroît réfulter des épreuves ci-defiiis,
que le fuc du papayer fec jouit de toutes les propriétés
qui appartiennent aux lubftances animales,
& fpécialement à l’albumine du fang. En effet, la
manière avec laquelle il fe comporte avec les aci- ;
des, les diffolutions métalliques, 1 alcool, Tinfu- j
fion de noix de galle, le feu, 6cc. eft parfaitement
femblable à celle de l’albumine.
» Je foupçonne même qu’elle fe rapproche du
fang , à la partie colorante près} car je crois avoir
apperçu , dans le réfidu de cette matière inlbluble
dans l’eau , des caractères pareils à ceux de la
fibrine animale; mais comme il étoit mêlé d une
portion de graiffe, & qu’il n’y en avoit qu’une
Pftite quantité, je n’ai pu m’en afiurer d’une manière
bien convaincante.
Sur le fuc de papayer mou.
»> J’ai dit au commencement, qu’une des efpècès
de fuc de papayer avoit été confervée avec du
rhum, &épaiflîe enfuite fous forme d’extrait mou j
ç’eft de cet échantillon dont je vais maintenant
expofer les propriétés.
» i Q. 11 a une couleur rougeâtre, une demi-
tranfparence, une -odeur & une faveur à peu près
femblable s à celle du jus de viande épaiflî, avec
cette différence qu’il eft un peu plus fade, 6c laifle
Un arrière-goût nauféabond.
■ » z9.-Cette fubftance mife dans l’eau s’y ramollit,
6c fe diffout prefqu’entiérement par l’agitation.
L’eau acquiert par cette combinaifon la
propriété d’écumer comme une eau gommée ; il
s en depofq, au bout de quelque tems,- une petite
quantité de matière blanche, qui ne paroît pas
fufceptible de s’unir à l’eau.
» 30. Cette diflolution n’eft pas précipitée furie
champ par l’acide nitrique, comme celle du fuc
àepapayer en larmes} cependant au bout de vingt-
quatre heures elle forme un dépôt blanc aflez
abondant.
| » 4®. L’alcool la trouble, & la fait devenir blan-
! che comme du lait ; enfuite il s’en fépare beau-
I coup de petits flocons blancs.
» L’infufion aqueufe de noix de galle y fait
naître un précipité abfo'ument femblable à celui
qu’elle forme dans une diflolution de colle-forte.
» 6°. La chaleur de l'ébullition ne la troubla
point comme celle du fuc de papayer en larmes ,
mais elle moufle beaucoup par Tébullition.
» 7°. Les diffolutions d’argent, dé plomb & d©
mercure forment des précipités jaunâtres dans la
diflolution de la folution ci-deflus.
» 8°. Cette même folution, ab indonnée à elle-
même, fe couvre bientôt de moififfure, mais ne
devient pas auflî fetide que celle du papayer en
larmes ^également li vrée aux forces de la nature.
» 90. L’extrait mou de papayer, fournis à la distillation
dans des vaiffeaux clos, a donné d’abord
de l’eau, enfuite une liqueur rougeâtre, du carbonate
d’ammoniaque criftallifé, de l’huile rouge
épaiflè & fétide, du gaz hydrogène carboné huileux}
enfin un charbon léger, difficile à brûler,
qui a fourni, par l’incinération, du phofphate de
chaux tout pur.
» En comparant les effets de ces deux échantillons
de fuc de papayer, Ton trouve que, parmi
quelques propriétés communes entr’eux, il y en
a d’autres qui diffèrent eflentieliement : l’extrait
mou a un goût de viandé cuite ; Tautre n’a qu’une
légère faveur fucrée } celui-ci eft coagulé par la
chaleur , & celui-là ne l’eft pas. L’extrait mou
n’éprouve prefque pas de changement par les acides}
le fuc en larmes eft épaiflî comme l’albumine
du fang par ces mêmes réaétifs.
» Il fembleroit d’après cela que l’échantillon
confervé dans le rhum, & évaporé enfuite, a paffé
à l’état de gélatine animale ou de colle-forte. Ce
changement, fnivant moi, n’auroit rien d’éton-
nant ; car l’albutnine du fang éprouve bien quelque
chofe de pareil quand on la fait bouillir avec une
grande quantité d’eau, 6c qu’on fait enfuite évaporer
celle-ci.
" On ne verra fans doute pas, fans un certain
degré d’intérêt, une fubftance produite par un
végétal, préfenter toutes les propriétés des fubf-
tances animales ; car je préfume que perfonne ne
révoquera en doute c^tte identité : cela nous apprend
que la nature a donné auflî à certaines efpè-
ces de plantes la faculté de former des tompofi-
tions fembiables à celles que produit la machine
animale -, ce qui doit déformais nous mettre en
garde lorfqu’il s’agira de prononcer fi une matière
a appartenu aux végétaux ou aux animaux.
» Je dois cependant rappeler ici que M. Four-
croy, il y a long-tems, a trouvé des traces d’albumine
dans le fuc de certaines plantes ; que
Schéèle a dit quelque part qu’il y avoit dans les
feuilles des végétaux une fubftance analogue au
fromage , 6c que Prouft dernièrement vient d’annoncer
que le lait d’amande eft une combinaifoa