
d'huile & de fromage. Mais je ne fâche pas que
personne ait encore eu occafion d'examiner un lue
végétal entièrement dénaturé animale, & auquel
il ne manque pour ainfi dire qu'un principe colorant
pour reffembler au fang , puisqu'on y trouve ,
comme on l a vu plus haut, une grande quantité
d'albumine, une petite portion de fibrines oti au
. moins une fubftance qui en a toute l'apparence}
enfin du phofphate de chaux en quantité notable.
» Il feroit à defirer que les chimiftes qui auront
occafion de parcourir, les contrées où croît le
papayer, foumiff~nt ion fuc laiteux, au moment
ou il découle , à un examen chimique , & fiffent
au/fi quelques expériences fur l'arbre lui-même,
qui doit être d'une nature particulière } je fuis
perfuadé qu'ils obtiendroient des réfultats très-
inté reflans. »
No:ice fur le fuc de papayer , par M. C. L. Cadet.
« M. Vauquelin a déjà fait l'analyfe du fuc de
papayer ( carica papaya Linn. ) , que l'on emploie
dans l'Inde contre le ver folitaire } il a trouvé,
entre le fuc concret & quelques iuhftançes animâtes
, des analogies fort curieufes. Non-feulement
il y a remarqué une a (fez grande quantité de phof-
phate de chaux, mais il en a féparé une fubftance
blanche affez femblabîe à une graiffe animale.
M. Roch, chirurgien de l'lfle-de-France, m'a
remis plufieurs échantillons de ce fuc évaporé, &
une bouteille .de lait de papayer liquide. Comme
M. Vauquelin n'avoit opéré que fur le fuc con-
cret, j'ai penfé qu'il feroit intéreffant d’examiner
cette matière dans fort état liquide. La bouteille
qui la renfermoit, bien bouchée & goudronnée,
n'étoit pas pleine. Lorfque je îa débouchai, le
bouchon .en fut chaffé avec force. J'examinai le
gaz qui s en dégageoit : c'étoit de l'acide carbonique.
La liqueur, blanche Sc opaque comme du
lait, exhaloit une odeur infupportable , affez analogue
àXajfa foetida , mais plus vireufe & plus nau-
feabonde, Cette odeur a diminué peu à peu d’in-
tenficé. Ce lait rougiffoit fortement la teinture-
, de tourné fol; ce que ne fait point la diffolution
aqueufe du fuc concret. Sa faveur étoit âcre, &
laiffoit dans la bou'.he un arrière-goût fucré. Le
fuc concret n'a point la même acreté.
” Le lait dé papayer filtré paffe tranfparent &
verdâtre comme du petit-lait clarifié } il laifl'e fur
Je filtre une matière blanche, cailiebotée , d'une
faveur féba.cée , infoluble dans l'eau chaude ou
froide, hrunillant à l’air, fe bourfouflsnt fur les
charbons, & analogue à la matière çaféeufe.
» Le fuc concret, diftiilé à feu nu dans une cornue
de verre, a donné une grande quantité de
carbonate d'ammoniaque criftallifé, une huile fétide,
& il s'eft dégagé beaucoup de gaz acide
carbonique 6c d’hydrogène carboné. 11 eft refté j
dans la cornue une charbon volumineux, brillant, ;
comme celui d’une matière animale. Ce charbon
incinéré a donné du phofphate de chaux & de la
• chaux, ainfi que l'avoit rrouvé M. Vauquelin.
99 j ai fait diftiller, au bain de fable & à un feu
très-doux, du fuc de papayer liquide : la liqueur
s eft coagûléej il eft pafle un flegme infipide,
n’ayant aucune propriété acide. J'ai arrêté la distillation
, &' j’ai filtré la liqueur de la cornue pour
en féparer la matière concrète. Cette liqueur étoit
beaucoup plus acide qu’auparavant. J'en ai faturé
une portion par la potaffe} j'ai fait évaporer, &
j'ai verfé deffus de l'alcool, qui a diflous un peu
de matière extra&ive ik fucrée fans toucher auTel
qui s'étoit formé. Ce fe l, examiné, m'a préfenté
les caractères du malate de potaflè. Expofé à
l’air , il en attiroit promptement l'humidité, &
précipitoit également le nitrate de mercure, de
plomb & d’argent.
99 Une autre portion de la liqueur, également
acide & provenant de la même diftillation, a été
traitée par 1 alcool, qui en a féparé une matière
blanche entièrement foluble dans l'eau, précipitant
par l'acétite & par les nitrates de plomb &
de mercure, faifant une efpèce de vernis fec &
brillant lorfqu'on l'appliquoit à la furface-des corps}
acquérant, par la defhccation, la tranfparence ,
l’afpeâ: & la faveur des gommes. Traitée par l'acide
nitrique, cette matière ne donne point d’acide
oxalique; c'eft du malate de chaux parfaitement
femblabîe à celui qu'on obtient en verfant
de l’alcool dans du fuc clarifié de joubarbe. Enfin
j ’ai précipité une troilîème portion de la liqueur
acide par l'acétite de plomb } j'ai traité le précipité
par l'acide fulfurique étendu d’e a u j ’ai
obtenu pour réfultat de l'acide malique.
99 T alcool, verfé dans la diffolution filtrée du
fuc concret, opère la même précipitation de malate
de chaux j ce qui prouve, ce me femble , que
l'exiftence de l ’acide malique n'eft pas due à la
fermentation du fuc liquide.
» La matière blanche &: concrète qui donne au
fuc de papayer l'apparence laiteufe , n'a point',
comme on l’avoit cru , les cara&ères de l'albumine
pure ou de la fibrine, mais bien ceux du caillé ou
fromage. Elle fe comporte comme lui avec les
acides, avec les alcalis, & à la-diftillation. La pré-
fence de la matière çaféeufe dans un végétal ne
doit point étonner. Prouft l’avoit déjà trouvée
dans tes emuifions d'aman dés.
" C'eft cette matière concrète qui fournit à
l'analyfe le phofphate de chaux & le carbonate
d ammoniaque ; ce qui la rapproché infiniment des
matières animales. Ainfi le fuc de papayer liquide
ou le fuc concret d flous préfente également deux
fubftances remarquables.
» La première, retenue par le filtre, eft de la
matière cafeeufe mêlée fans doute d'une légère
portion d albumine} la fécondé eft une diffolution
de malate de chaux avec excès d'acide malique
pour le fuc liquide naturel} fans excès d'acide
pour le fuc concret. »
Analyfe du fuc de papayer ( carica papaya ) , par
M. Vauquelin.
« J’ai publié, il y a environ un an, dans les
Annales de Chimie, le réfultat de quelques expériences
fur le fuc de papayer apporté de l’ lfle-de-
France par M. de Cofligny} mais comme je n’en
eus à ma difpofition qu’une petite quantité, je ne
pus varier fiiffifamment mes effais pour en con-
noître toutes les propriétés.
» M. Roch, médecin à l'IUé-de-France , en
m’offrant une nouvelle quantité de cette fubftance,
m’a mis à même de recommencer mes effais, & de
les multiplier davantage : c'eft le réfumé de ces
épreuves que je vais préfenter ici.
» M. Roch a rapporté ce fuc dans trois états}
favoir : i °. à l'état folide, & fous forme de larmes
blanches-jaonâtres deiféchées au foleil dans des
afliètes }
» i° . A l’état de fuc naturel renfermé dans des
bouteilles bien bouchées 5
» 30. A l’état de fuc naturel mélangé avec du
fucre pour le conferver fans altération.
» Ce fuc, en forrant de l'arbre, eft, fuivant
M. Roch, blanc comme du lair} il fe coagule au
bout de quelques minutes 3 des flocons de matière
blanche comme du fromage s'en féparent, & nagent
dans la liqueur qui eft alors rranfparente,
» Ce fuc eft répandu dans routes les parties de
l ’arbre; mais les fruits, avant la maturité, en contiennent
davantage 3 ils n'en donnent plus lorfqu’ils
font mûrs. »
Examen du fuc de pdpayer concret,
payer s mais l’acide muriatique oxigéné ne la rend
j point violette, comme celle du fuc qui a fer-
I mente, ainfi que je l’expoferai plus bas : de là il
| fuit que le principe qui forme, avec l’oxigène,
| cette belle couleur violette, s'eft évaporé pendant
la defliccation du fuc concret, ou s'eft développé
pendant la fermentation 3 ce qui eft plus probable.
«« Le fuc de papayer, épaifli au foleil , eft d’un
blanc-jaunâtre ; quelques parties font d'un blanc- j
pur & demi-traniparentéS. Il eft fragile, facile à j
pulvérifer quand il eft bien fe c} il fe fo.nd aifé- |
menr dans la bouche, à laquelle il imprime une j
fenfation fingulière qui provoque beaucoup la fa- j
liye. Il attire fortement l’humidité de l'air 3 il fe j
rçduit en une pâte gluante, qui fe couvre de moi-
fiffure s'il refte dans cet état quelque tems à l'obf-
curité.
» Il fe diffout aifément dans l’eau froide} encore
plus promptement 6c plus abondamment dans 1 Vau
tiède. Sa diflblution concentrée fe trouble & fe
coagule par l'ébullition, mais toute la matière ne
S en féparé pas } car après avoir bouilli, les acides
èn précipitent encore beaucoup.
» Elle fie rougit point la teinture de tournefol} |
ce qui annonce que le fuc ne contient point d'acide J
développé. $
» L'alcool, mêlé en grande quantité à la diffo- j
lution aqueufe du fuc de papayer le précipite !
complètement, & fans lui faire fubir aucune alté- I
ration.
»» Les acides fulfurique, nitrique 8c muriatique !
coagulent abondamment la diffolution du fuc pa~ f
35 II brûle fur les charbons ardens en décrépitant
légèrement, en fe cenrraitant fur lui-même,
& en répandant, comme'les matières animales,
une odeur d’ammoniaque très-fétide.
» Il donne à la diftillation beaucoup de carbonate
d’ammoniaque, d’huile noire , épaiffe, dont
la plus grande partie fe précipite au fond d’un liquide
brun qui eft produit en même tems. Il refte
un charbon léger, difficile à brûler, Sc qui laiffe
un peu de terre formée de chaux 6c de phofphate
calcaire.
» Lorfqu’on diffout dans l’eau le fuc de papayer^
il refte une petite quantité de matière blanche
floconeufe, qui fe-réfuté abfolument à la diffolution
, mais qui fe fond aifément à la chaleur, &
brûle en répandant une odeur de graiffe empyreu-
matique.
33 La diffolution dû fuc de papayer concret, abandonnée
pendant quelque tems à elle-même, fe
décompofe, & contraire une odeur fétide comme
les matières animales.
33 Si l’on fait bouillir de l ’alcool fur le fuc de
papayer réduit en poudre, il diffout une petite
quantité de matière que l’eau en précipite en
rendant la liqueur laiteufe. Il paroît que c’eft la
matière graffe in foluble dans l’eau, dont j’ai parlé
plus haut, qui produit cet effet : elle eft en petite
quantité*
» Diftiilé à l’appareil pneumatique avec de l’acide
nitrique foible, le fuc de papayer concret a donné
une grande quantité de gaz formé d'acide carbo*
nique & d’azote : en fe diffolvant dans cet acide,
il lui a communiqué une couleur jaune & une faveur
extrêmement amère. Après avoir bouilli quelque
tems , la liqueur a préfenté à fa furface une
couche de matière graffe fondue.
» ïl s’eft formé au Si, dans cette opération, une
afftz grande quantité d’acide pruflique oxigéné,&
d’acide oxalique. »
Examen du fuc de papayer liquide , confervé dans une
bouteille fans addition.
« Au moment où on a débouché la bouteille
contenant co fuc, il s’eft dégagé, avec beaucoup
de violence, un gaz qui a lancé, à une grande distance
, une partie de la liqueur fous forme d’écume.
J'ai reconnu que ce gaz étoit de l’acide
carbonique , fans doute formé par la décompofî-
tion de quelques-uns des étémens du fuc, & qui
étoit comprimé dans la bouteille. Des maffes de
matière blanche femblabîe à du fromage nageoienç