
frir non-feulement ce qui eft connu, mais encore
de fournir j par leur généralité & les difpofitions
variées dont ils font fufceptibles, des matériaux
futurs, pour défigner des corps nouveaux, même
parmi les fubftances indécompofées, à mefure que
la fcience s'enrichira par de nouvelles découvertes.
C ’eft furtout par-là qu'à l’inftar des dénominations
nouvelles, ces caractères fe diftinguent d'avec
les hiéroglyphes anciens, q u i, n'ayant rien
que d'hypothétique ou d’erroné, s'éloignoient de
plus en plus de l’ordre Tyftématique, à mefure
qu'on étoit obligé d'en former quelques nouveaux
pour exprimer des matières inconnues jufque-là.
NUTRITION. La nutrition eft le terme de la
digeftion & de l'aflimilation ; & comme il s'agit
de la converfion des alimens en matières animales,
il eft évident que les phénomènes qui ont lieu
dans l’exercice de cette fonction, font du reffort
de la chimie. En effet, la matière alimentaire, convertie
en chyle, verfée fous cette forme dans le
fan g , aflimilée par fon mélange avec ce liquide,
vi vifiée par la refpiration & la circulation , eft portée
par celle-ci dans les divers organes ; elle dé-
pofe dans chacun d'eux la fubftance propre à la
réparer en proportion exactement relative à la
perte qu’il a faite ; elle fe change furtout en lymphe
qui, tranfportee partout & dans toutes les
cavités, toutes les areoles du tiflu cellulaire, y
fournit cette gelée muqueufe, pîaftique, difpofée
à former les lames tranfparentes & gélatineufes
dont la plupart des matières animales font formées.
Voilà pourquoi on lui a donné pour bafe nourricière
la lymphe, pour fiége ou organe le tiflu
muqueux. Il faut cependant généralifer davantage
l'idée de la nutrition, voir chaque organe mufcu-
laire, pulpeux, membraneux, parenchymateux,
offeux, comme jouiflànt du caractère de s'approprier,
dans le fang & dans la lymphe qui le tra-
verfent & le pénètrent, la matière deftinée à fa
propre réparation. A la vérité, l'excès de cette
nourriture eft repompé, avec la partie en quelque
forte ufée & fondue de l'organe, par des vaifleaux
abforbans, qui, en la verfant dans le torrent de la
circulation, la renouvellent ou la tranfportent au
dehors par la tranfpiration. La nutrition eft beaucoup
plus aCtive dans les premiers tems de la vie
de l’animal, quand fes organes dilatables & exten-
flbles jufqu’à un degré déterminé, croiflent au
point d’atteindre ce terme. Voilà pourquoi , à cet
âge, les forces digeftives font plus énergiques, ;
l'appétit plus grand , & la quantité des alimens
néceffaires plus considérable. Elle eft modifiée,
dans les différentes claffes d’animaux, fuivant leur
nature, & très-fimple dans les dernières.
Quoique les énoncés précédens femblent réduire
là nutrition à des termes fort Amples , l'ex- j
plication du mécanifme de cette fonction préfente !
de grandes difficultés aux phyfiologiftes. Outre
qu’il eft très-difficile de déterminer comment un
liquide homogène.primitif, le fang, contient tous
les divers matériaux propres à conftituer les différentes
parties du corps , il l'eft encore plus de
favoir comment les liquides variés qui en émanent,
fe convertiffent en matières folides, qui, en fe
collant fans cefle aux tiffiis organifés dont les vif-
cères^ & les parties du corps font compofés, en
renouvellent perpétuellement la maffe, & réparent
ainfi les pertes que les mouvemens vitaux occa-
fîonnent.
Le problème de la nutrition fe compofe de deux
autres problèmes également importans & difficiles
à réfoudre. Le premier a pour but de déterminer
comment les organes ou les parties folides augmentent
en étendue & en poids pendant un certain
tems de la vie des animaux, confacré à leur
accroiffement, pourquoi cet accroiffement s’arrête
à une certaine époque. Le fécond eft relatif à ce
qui fe paffe après l'accroiffement, & dans l’entretien
des organes au même point d’étendue, de
forme, de poids, & furtout des forces vitales, ou
à la réparation non interrompue des parties qui
font détruites par l’aClion même qu elles exercent.
On a fuppofé, pour expliquer le phénomène de
l’accroiffement, que les organes étoient formés
primitivement de parties fufceptibles d’une grande
extenfion, de cellules , ou de lames jroulées ou
plifîees fur elles-mêmes, qui, en recevant dans
leurs pores ou à leur furface la matière nourricière
qui s'y applique par le travail de la nutrition ,
s'aiongent, s'étendent, fe déroulent à une grandeur
donnée fuivant refpèce-de l’animal, & dont
le développement ou l ’extenfion ne s'arrête qu'à
l'époque où elles ne peuvent plus céder à l’alon-
gemefit ; il a fallu fuppofer encore dans cette opinion
une forme donnée primitive dans les organes,
& confidérer ceux-ci comme des efpèces de moules
furlefquels la matière animale s'applique dans tous
les points.
Ce qu'il y a de chimique dans cette première
partie du problème de la nutrition, c’eft la formation
rapide & facile de tous les compofés divers
qui font deftinés à agrandir chacun des organes du
corps , & d'abord la force digeftive très-confîdé*
rable, la quantité & l’énergie diflolvante du fuc
gaftrique, qui, en produifant un appétit ou une
faim plus fréquente & plus grande, exige une plus
ample accumulation d'aümens dans l’eftomac, un
travail plus rapide de l’hématofe par la refpiration
& la circulation plus fréquentes , un renouvellement
plus prompt du fang, ainfi qu'une réparation
plus facile & plus célère des divers matériaux qui
le confticuent dans les régions organiques qu'il
avive, une attra&ion plus forte de chaque*tiflu
pour la matière qui lui convient, & qui y aborde
avec plus d'abondance & de célérité que dans les
autres époques de la vie j enfin une concrefci-
bilité plus accélérée & plus forte dans les humeurs
nourricières, accompagnée néanmoins d’une force
abforbante plus prononcée dans tout le fyftèmè des
vaifleaux blancs.
Quant à l’entretien commun ou fimple des organes
après la fin de l'accroiffement & jufqu'à
celle de la vie, il fe fait par un même mécanifme ;
il admet les mêmes phénomènes chimiques } il
fuppofe la fuite non interrompue de la force afli-
mi la tries, & il la montre feulement diminuée dans
ion énergie, & perdant peu à peu, jufqu'à la vieille
f le , une partie de fa puiffance. Pour rendre
compte du paffage des liquides nourriciers à l’état
folide & organique, les phyfiologifles ont admis,
avec les Anciens, une force pîaftique ou une propriété
concrefcible générale, qui leur a paru fuf-
fifante pour l'explication de ce phénomène. Les
chimiftes modernes, un peu plus avancés qu'on ne
l'étoit avant eux fur la caufe & la nature de cette
concrefcibilité, favent aujourd'hui qu'elle eft due
à la combinaifon de l'oxigène, & que e’eft pour
cela que les liqueurs animales ont tant de difpoiï- :
tion à abforber ce principe.
Quoiqu’on ne fa.che rien encore fur la nutrition
particulière de chaque organe, fur l'influence qu'y
portent, & le fyftème qui l’entoure , & celui du
tiflu organique lui-même, on voit,que cette fonction
, confidéréè dans fa généralité, fuppofe une
affimilation complète, un changement entier de la
fubftance alimentaire primitive en chaque fubftance
organique particulière } que cette aflïmila- .
ri-on, commencée dans la digeftion , pourfuivie
dans la refpiration , prefqu'achevée pendant les
différons termes de la circulation , entièrement
terminée .à l'entrée de chaque organe à nourrir,
çonfifte principalement dans la perte du carbone
& de l'hydrogène, dans l'augmentation de l'azote,
& dans une forte de tranfmutation nommée juf-
qu’ici l 'animalifation. Malgré la variété .de nature
que paroiffent .préfenter Tes tiffus des différer) s
organes, on peut les clafler en trois ou quatre
matières, comme je l'ai dit plufieurs fois; favoir :'
la gélatine , qui forme la bafe du tiflu membraneux;
l’albumine, qui conftitue celle du cerveau,
des nerfs &. du parenchyme des vifeères ; la fibrine,
qui compofe les fibres mufculaires , & le phof-
phate de chaux gélattnifère, qui appartient aux os.
( f^oye^ ces différens articles. )
Je crois devoir joindre à ces idées générales fur
la nutrition, des confidérations entièrement fondées
fur les connoiffances chimiques, & contenues
dans un ouvrage dû à un favant médecin,,auquel
on ne reprochera pas un amour exclufif & une
préférence intéreffée pour l’application de Ja chimie
, puifqu'il poflèdè à une égale.hauteur toutes
les fciences qui éclairent l'art de guérir, &tpuif-
q.u'il en fait un ufage également heureux pour le
traitement des maladies.
• J’inférerai ri ci tout rentier cet effai de M . JEJaillé,
tel qu’il ;a ,bien voulu me le remettre il y a feize
ans , & tel que je l'ai configné dans un ouvrage
périodique que j'ahpublié,, en 1790 & 1.79:1, fous
le titre de la Médecine éclairée par les fciences phy-
Jiques, tome I I , page 295. 1791.
EJfai de théorie fur l'animalifation & l’affimilation
des alimens y par M. Hallé, médecin.
PRIN C I P EiS.
« i° . On appelle animalifation le changement des
fubftances végétales en fubflances animales.
» On appelle affimilation le paffage des fubftances
alimentaires, foit végétales, foie animales, à
l'état qui les rend femblables aux parties dont nous
fommes compofés.
.» 2°. La nutrition fuppofe, dans les alimens végétaux,
l’animal i fa tion , & dans toutes les fubf-
tances alimenteufes l’aflimdation.
« 50. L'une & l'autre de ces opérations fuppo-
fent, dans les fubftances alimenteufes, i°. des analogies
.qui les rendent fufceptibles de fubir ces
changëmens ; i ° . des différences qui rendent ces
changemens néceffaires.
PREMIER ORDRE DE FAITS, COMPRENAIT:
Ai Les analogies de nos alimens avec nos corps y
B. Les analogies des fubftances alimentaires entre
: elles y
C. Les différences connues des fubftances qui forment
nos alimens & nos corps.
m 40. L'analogie .eft connue.
m ( a ) Elle exifte entre nos folides & les fluides
que l'on appelle nourriciers, c’eft-à-dire, ceux dans
lefquels les fubftances alimentaires font néceffaire-
ment reçues., & à l’aide defquels elles font nécef-
fairement portées dans toutes les parties de noue
corps.
m (b ) J1 .exifte également une analogie entre
nos alimens & ces fluides appelés nourriciers.
*> ;j°. Toutes les fubftances qui .cotmpofent nos
folides coulent véritablement, difloutes par un
véhicule commun, dans les fluides nourriciers qui
pénètrent toutes les parties de notre corps. Le
fang à lui feul les contient toutes. Ce fait eft trop
connu pour avoir befoin de démonftration. Le
chyle & là lymphe nous font véritablement inconnus
; mais nous favons que le fyftème des vaif-
feaux laétés ;& lymphatiques communique immédiatement
avec celui des vaifleaux fanguins.
.os 6°. On fait à .préfent que les fubftances qui
conftituent nos folides, qui font tranfportées
par >nos fluides, fe trouvent toutes dans nos alimens.
» Les alimens animaux les contiennent toutes
formées.
« Les alimens végétaux en contiennent toutes
les analogues.
.»j 7°_ .La.gélatine_o.u.-g.elée-animale-a-paut-analor
gués les^gefées végétales, foie fous .forme .liquide,
comme dansdes fucs d’une.mwUitude de fruits,
y . Kk 2