
<}ue tous les faits chimiques concourent à prouver
que le principe de la eonibuftibilité des corps n’eft
point un compofé réfultant de l’alliage de l’air &
du feu.
v » Mais puifque je me fuis engagé dans cette
difcuflion, comme je la crois propre à répandre
du jour fur la théorie du phlogiflique, qui paroît
encore fi obfcure à tant de monde malgré ce que
les plus profonds chimiftes en ont pu dire jufqu'à*
préfent, j’ajouterai encore ici quelques confidéra-
tions pour tâcher d’éclaircir cette matière. ;
» En expofant les motifs qui me déterminent à;
croire que le phlogiflique n’elt point le réfultat de;
la combinaifon du feu avec l’air, je fuis bien éloi-’
gné de vouloir faire entendre que ces deux élé-
mens ne peuvent point s’unir, & former enfemble
des compofés particuliers: ce feroitme contredire'
manifeftement , que d’avancer une pareille after-i-
tion. J’ai dit pluneurs fois , & je dois le répéter;
ici , que toutes les parties de la matière , quelque;
différence qu’il puifie y avoir entr’elles, font efien-•
tiellement capables de fe combiner > qu’elles ten--
dent même toutes à cette union, & qu’elle s’efi-
-feûue conftamment quand aucun obftacle particu-j
lier ne s’y oppofe ; & il fuit de là que l’air & lej
feu, ou la lumière, étant deux fubifancesmaté-^
rielles, peuvent & doivent s’unir & fe lier réci-l
proquement toutes les fois qu’elles fe préfenfent»;
l’ une à l’autre dans des circonftances favorables,à|
çette union; & comme la nature a fans doute fait?
toutes, les combinaifons poflibles, il doit donc-]
exiflcr quelque compofé d’air & de feu.
. » Çeque je viens de dire des corps combufti-j
blés fait allez çonnoître que, s'il exifte un pareil
compofé, on ne doit point le chercher dans ceux
que j’ai cités , quoique prefque tous ceux de la
nature y fuient compris ; mais on en connoît une
efpèce qui femble être ou contenir du moins un
compofé d’air & de feu ; je veu\.parler du ga^ ou
des gai inflammables. Or, ce genre de corps com-
buftibîes ayant l’agrégation & plufieurs propriétés
de l’air , on ne peut guère s'empêcher de regarder
cérfübfiances gazéufês comme'des compofés dans
lefquelsJ air & le feu entrent en qualité de par-
. ties conftitutives..
» La nature de ces gaz, qu’on n’a commencé à
examiner que depuis fort peu de tems, n’eft point
encore bien connue ; à peine les a-t-on fournis
aux épreuves néceffaires pour conftater leur in-
flammabiliré. : on ne peut donc avancer rien de";
certain fur leurs parties conftituantes ; il n’eft pas
même encore démontré què l’air foit un de leurs'
principes ; mais ce qui eft bien confiant, c’eft qu’ ils
ne diffèrent point de tous les autres compofés1
combuftibles en ce qui concerne leur combufti-
bilité, & qu’ils font fournis furtout à la loi générale,
par laquelle aucun de ces corps ne peut per-.
dre fon principe inflammable par la combuftion,
que par l’a&ion & par l’intermède de l’air pur &.
libre* On fait aufii que les gaz inflammables peuvent
tranfmettre, fans combuftion, leur principe
inflammable à d’autres corps, & finguliérement
aux terres des métaux. J’ai été témoin des expériences
variées & multipliées par lefquelles M. de
Montigni a conftaté cet effet important, & l’on
ne peut point douter que ce qui refte de ces gaz
décompoféspar cette opération, & qui eft encore
un fluide élaftique, ne foit aufii incornbuftible que
les réfidus de tous les autres corps inflammables
qui ont perdu leur phlogiflique par une iembLble
tranflatiqn. O r , ces faits, bien loin de prouver
que ces compofés d’air & de feu puiffent entrer,,
lans fe décompofer, dans la mixtion des corps
combuftibles, & y devenir le principe de leur inflammabilité,
le vrai phlogifliquc de 1a nature, démontrent
au contraire que ces.gaz ne font que des
mixtés.dec,o,mpofab!ës comme tous les autres, qui
nè doivent leur inflammabilité qu’à la matière du
feu pur Sc fimple, & qu'enfin cette même matière
pouvant s’en féparer, dans fon état de fim-
plicité, fans.entraîner avec elle aucune portion
de fluide élaftique pour encrer dans la mixtion de
nouveaux compofés, il n’y a véritablement que
,cette feule matière du feu toute pure qui puifie
devenir le principe de l’inflammabilité, en fe fixant
dans ies compofés quelconques ; en un mot, elle
eft le fe u l-v r a i phlogiflique , & le devient purement
8c uniquement par l’tffet même de, fa fixation.
.. . , ,
. » Tout concourt donc à prouver que,la matière
du feu , ou plutôt de la lumière, n’a befoin que
d’elle-même pour fe fixer dans l’état de combinaifon
; .qu’ il fuffit qu’elle trouve d’autres efpè.ces
de matières quelconques difpofées de la manière
convenable pour fe joindre à elle pour qu’elle s'y
joigne en effet, comme cela arrive à l'air, à l’eau,
à la terre ; en un mot, à toutes fortes de matières;
qu’aucune de fts propriétés ne prouve, n’indique
même qu’elle ait befoin d’avoir, pour premier
conjoint ou affocié, un autre élémént, & moins
encore l’air que tout autre, puifqu’il eft au contraire
fon . précipitant unique &c néceffaire dans
toutes les occafions où elle ceffe d’être phlogiflique
en devenant, matière du feu. libre & pure, & je
crois pouvoir conclure de „toutes ces confidéra-
tions, què la matière de la lumière étant une &
identique, & ne cèffànt point de l’être en devenant
phlogiflique par fa fixation, le phlogiflique eft
un & identique,, comme je l’ai avancé ; que le
pklogiftiquef tu. un être aufli fimple que la matière
dé |a lumière, puifque ,ce n eft que cette même
marière confidérée dans fon état de fixation & ie
combinaifon ; enfin , que'le vrai phlogftiquê d'é la
nature n’ éft point un être variable, un compbfé»
un produit de Valliage , un ré fuit ai de la combinaifàn
des. deux élémens de iair & du feu fixés dujis Us
•corps.
- » Il feroit fins doute bien intéreflant de con-
noître comment, dans quelles circonftances, &
avec quels phénomènes la dumière ou la matière
du feu fe combine à d’autres efpèces de matière >
pour former les compofés divers dont l’expérience
& l’analyfe nous ont appris qu’elle eft une des parties
conftitutives ; mais quels moyens avons-nous
de nous élever à des connoiffances fi fublimes? La
combinaifon des premiers principes des corps eft
inaccêftîble à nos fens ; nous n’avons nulle idée de
la figure, de la maflfe, de la dureté, ni d’aucune
des autres qualités eflfentielles de leurs parties :
les molécules primitives intégrantes de l'air, de
l ’eau, de la terre, des corps mêmes les plus comfjofes,
nous font aufli inconnues que celles de la
umière. Nous pouvons appercevoir les réfultats
de leurs unions & de leurs réparations ; mais le
mécanifme de ces opérations merveilleufes eft un
de ces myftères de la nature, qui probablement
nous feront éternellement cachés. Je ne m’épui-
ferai donc pointer vaines conjectures fur un objet
qu'en mon particulier je reconnois être au deflus
de ma portée, & je me bornerai à expofer ici le
petit nombre de faits connus qui ont quelque rapport
à cette matière.
» Beaucoup de phyficiens penfent que les ef-
èces de phofphores qui paroiffent lumineux dans
obfcurité , après qu'ils ont été expofés quelque
tems au foleil ou au grand jour, ne produifent cet
effet que parce qu’ils ont la propriété de s'imbiber
de lumière, & de la retenir pendant un certain
tems. Quoique cette opinion ne foit pas bien
prouvée, il faut convenir qu’elle a pour elle au
moins une afTez grande vraifemblance, & fi elle
étoit démontrée, il en réfulteroit que la lumière
peut adhérer, du moins jufqu’à un certain point,
a diverfes efpèces de corps.
»"Si l’on expofe au foyer d’un verre ardent des
terres martiales afTez calcinées pour n’être nullement
attiràbk s par l'aimant, & fur un fupport qui
ne puifTe point leur communiquer de principe inflammable
, elles ne fe réduifent point à la vérité
en fer, mais elles ne manquent jamais de reprendre^
la propriété d’être fortement attirables; du moins
dans un très-grand nombre de ces chaux diverfe-
ment préparées, fur lefqüelles j’ai fait cette expérience
, je n’en ai trouvé aucune qui ne devînt
frès-attirable par ce moyen. Or, on fait que la
terre du fer ne peut acquérir cette propriété
qu’autant qu’elle fe rapproche de l’état du fer en
reprenant du phlogiflique, & comme il n’y a ici que
la lumière qui puitfe lui en fournir ou plutôt de-i
venir elle-même fon phlogiflique ,• celà femble prouver
que, dans cette occafioa, une partie de la
lumière du foyer qui tombe fur la terre martiale,
sV fixe & s’y combine; Cet effet féroït même
probablement beaucoup plus fenfible-fi on fai foit
ces expériences dans des vaifTeaux de verre clos , i
comme l’indique affez Texpériencé de la réduction
dès chaux de mercure fans addition (i).
II eft conftaté maintenant que la, chaux de
mercure, nommée précipité per fe, celle qui porte le
nom de précipité rouge, le turbith minéral, & même
toutes les vraies chaux de mercure, peuvent fe
revivifier en mercure coulant, fans aucune addition,
lorfqu’on leur applique un degré de chaleur
convenable. Comme cette réduction , de même
que celles de toutes les autres chaux métalliques,
n; peut fe faire qu’autant que ces terres reprennent
la même quantité de principe de l’inflamma-
bijité qu’elles avaient perdue en fe réduifant dans
l’état de chaux, i! s’enfuit que celles du mercure
ne fe réduifent en mercure coulant dans les expériences
dont :1 s’agit, que parce que la matière de
la lumière qui peut palier à travers ies vaififeaux,
furtout lorsqu'ils font rouges, fe recoihbine, en
quantité fuffifante & allez intimement, avec U
chaux de mercure pour redevenir fon phlogiflique,
8c la rétablir par-la dans fon état métallique (i).
Mais une circonftance à laquelle il eft bien eflen-
tiel de faire attention, c’eft que ces répétions de
mercure , fans le concours d'aucun autre principe
igné que la matière de la lumière, ne réuftiiïent
queutant qu’il n'y a pas de communication avec
l’air, comme je 1 ai expliqué à l’article de l’Atn.
DÉPHLOGiSTiQui i car fi on leur applique le même
degré de chaleur dans des vaifTeaux qui ne foient
pas totalement clos, alors'i! n’y a point de réduction
; elles relient 8c fe fubliment dans leur état
de chaux, ou même peuvent fe fondre en matière
vitreufe, fuivant le témoignage de M. Keir dans
les notes qu'il a ajoutées à fa traduélion anglaife
de la première édition du Dictionnaire de Chimie,
8c d'après l ’expérience que M. Baume affure en
avoir faite. Or, n‘eft-ce pas là encore un de ces
faits qui prouvent que nôn-feulemeot lé phlagif-
ùqui n'eft pas un réfultac de l’union de l'air 8c du
feu, mais qu’au contraire fi quelque fübftance eft
capable d'empêcher 1a matière du feu de fe lier,
de fe fixer dans les compofés en qualité de phlogiflique
, c’eft aflurément l’air qui a cette propriété
plutôt que toute autre ?
»' Il paroît, par les faits due je viens d'expofer,
qu'on commence à çonnoître quelques opérations
de l’art, dans lefquelles le ,feq libre ou la pure
matière de'la lumière fe fixe dans certains corps,.
8c devient leur phlogiflique."Peut-être à mefure
qu’on obfervera plus exactement 8c plus attendc
h a le u r le ‘d é g a g em e n t d 'u n e c e r t a in e p r o p o r t io n d e g a z o ï Ç
g è n e , q u i f a i t r é p a d è r i ’ ô x id e b r u n o u ja u n e d e fe r à l ’ é t a t
d 'o x id e - n o i r ; m a is i l h ’ e ft fp a s d u t o u r p r o u v é q u e c e t o x id e
a b fo r b e d e la lu m i è r e e n p e r d a n t f o n o x ig è n e .
; CO f i p n é f t d e c e s o x id e s d e m e r c u r e c om m e d e t o n s le s
c o r p s q u i p e r d e n t le u r o x ig è n e p a r 1 a à i o n d e l a c h a l e u r .
O n n é v o i r , d a n s c e t t e o p é r a t i o n , d 'a u t r e e f f e t q u e le d é g
a g em e n t d e : l ’o x ig e n c e l l g a i , 6c la p r é t e n d u e f ix a t io n d e
la lumière comme phlogiflique d é p la ç a n t o u p r é c ip i t a n t l 'o x i -
g è n e n îe ifc . q u ’u n e h y p o th è f e i n g é n i e u f e , m a is in v r a i f em b ia -
b l c , im a g in é e p o u r n e p a s a b a n d o n n e r e n t iè r em e n t l a th é o r
ie d e S c a h l , a l a q u e l le IV Ia çq u e e é t o i t t r è s - a t t a c h é .
fï) L’auteur a très-bien connu l'effet qui a lieu dans cètte
expérience. L a lumière vive réfléchie produit par fa violente