
manière fi marquée dans prefque toutes les opérations
de la chimie.
w Les obfervations de ces chimiftes, & celles
de plufieurs autres qui font venus après eux, nous
ont fait connoître plufieurs propriétés générales
du phlogiflique , que nous allons d’abord expofer
fommairement & fans en donner d’explication,
afin quelles fe trouvent rapprochées & réunies
fous un même point de vue: ces vérités feront
d’ailleurs fùffifamment éclaircies , & prouvées par
le détail des phénomènes que préfente le phlogif-
tique dans les différentes expériences de chimie,
dont nous aurons occafion de parler enfuite.
» Lorfqu’on unit le phlogiflique à une fubftance
non inflammable , il en réfulte un nouveau compofé
qui n’eft ni chaud ni lumineux, mais qui devient
, par cette union, capable- de s’enflammer,
& par conféquent de produire de la.chaleur & de ■
la lumière plus ou moins facilement, fuivant la
quantité de phlogiflique qui fe trouve uni dans le 1
nouveau compofé , & fuivant la manière dont il]
eft combiné.
« Le principe du feu, en s’uniffant avec les corps
naturellement folide-s, ne les rend point fluides,
mais il en diminue la dureté, & augmente toujours
leur fufibilité.
*> Il en eft de même de la fixité : le compofé qui
réfulte de l’union du principe inflammable avec
une fubftance fixe, a moins de fixité que n’en
avoit cette fubftance avant fon union avec ce
principe.
93 U augmente la pefanteur abfolue j fouvent
même auffi la pefanteur fpécifique des corps aux-
quels il s’unit, & , dans certains cas, il leur communique
beaucoup d’opacité.
3> Les fubftances q u i, dans leur état naturel,
n’ont ni odeur ni coulear, acquièrent prefque toujours
l'une ou l’autre de ces qualités, fouvent
même toutes les deux enfemble, par leur union
avec le principe inflammable : de là vient que les
chimiftes font portés à le regarder comme le principe
des odeurs & des couleurs. On trouve à ia
vérité des corps qui n’ ont ni odeur ni couleur fen-
fibles, & qui contiennent'néanmoins du phlogif-
tique ,* mais, premièrement, il eft affé de prouver
que ces corps ne contiennent qu’une fort petite
quantité de principe inflammable > fecondement,
nous ne connoiffoBS aucun corps combuftible qui
n’ait plus ou moins de couleur & d’odeur, ou qui
: ne puiffe acquérir ces qualités par là chaleur.
33 Quoique les compofés dans lelquels entre.lé
principe inflammable foient fouvent très-différens
les uns des autres, il n’en eft pas moins vrai que
ce principe eft unique de fon efpèce j qu’il n’ y en
a point de plufieurs-for tes ; qu’il eft, en un mo t ,
identique, toujours le même, & toujours fem-
blable à lui-même, de, quelque nature que foient
les corps avec lesquels il eft combiné.
*> Le principe inflammable n’a point une difpo-
fition égale à s’unir avec les différentes-fub$ances>
il eft certain qu’il ne fe combine que très-difficilement
avec lès matières fluides, légères & volatiles,
telles que l’air & l ’eau j peut-être même ne
s’y unir-il jamais qu’avec le fecours d’un intermède ;
il fe combine au contraire facilement avec les
fubftances folides, fixes & pefantes, telles que les
terres.
33 Lz phlogiflique fert fouvent. d’intermède pour
unir des corps qui ne s’uniroient point, ou qui ne
s’ uniroient que très-difficilement fans lui.
>3 Nous ne çonnoiffons encore aucune combi-
naifon directe du phlogiflique ni avec l’air ni avec
l’eau, c’ eft-à-dire, aucun corps qui foit compofé
uniquement de feu & d’air ou d’eau ; mais ce
principe eft fufceptible de fe combiner avec des
compofés dont l’eau & l’air font les principes ,
telles que les fubftances huiieufes & les matières
falines, & particuliérement les acides & plufieurs
gaz.
33 Pour que le phlogiflique puiffe contracter une
union intime avec l'acide vitriolique, il faut que
cet acide foit dans l’état de ficcité, c’ eft-à-dire,
abfolument dépouillé de toute eau furabondante à
fon effe.nce faline j qu’il foit dans un degré de
concentration extrême, & qu'il ne contienne abfolument
que fon eau principe : il réfulte alors de
cette union un compofé inflammable, qu’on appelle
foufre. L'acide"vitriolique, dans cet état,
quitte alors tous les corps pour s’unir au phlogif
tique, avec lequel il forme du foufre ; 8c de quelque
nature que foit le corps inflammable qui lui
tranfmet le phlogiflique, il en réfulte toujours un
foufre exactement femblàble : ainfi, que ce foit
une graiffe, une réfine, unè huile, un charbon,
un métal quelconque qu’on traite avec l’acide
vitriolique, c’eft toujours le même,foufre qui en
réfulte j & puifqu’avec le même acide tous ces
corps inflammables ne produifent jamais que le
même compofé, il s’enfuit néceffairement que le
phlogiflique de tous ces corps, quoique fi différens
les uns dés autres, eft auffi toujours le même , &
que par conféquent ce principe eft unique & identique.
»s Le foufre eft inflammable à caufe du phlogif
tique qu’il contient $ mais fa flamme eft peu lumi-
neufe & peu ardente, à caufe qu’il entre dans fa
compofition plus d’acide vitriolique, qui eft un
corps incombuftible, que de phlogiflique.
j»? Le foufre eft.décompofé par la combuffion de
fon phlogiflique, qui redevient feu libre & qui fe
diffipe. L’acide vitriolique redevient auffi par-là
libre, pur, & capable.de fe recombiner de nouveau
avec le phlogiflique -à’ an autre- corps, pour
reformer du foufre en tout femblable à ce qu’il
é-toit d’abord.
>3 L’acide vitriolique n’eft uni dans le foufre
qu’au phlogiflique pwr , puifque , d’une part, cet
acide ne contient point d’eau furabondante, 5c
que, d'une autre part, il eft démontré que les
corps combiiftibles qu'on traite avec cet acide
pour former du foufre , ne lui tranfmettent que 1
Je principe le plus pur de l’inflammabilité: on peut
donc reconnoître plufieurs des propriétés de ce
principe , en comparant le foufre avec l’acide
Vitriolique pun Or , nous voyons que l’acide
Vitriolique, qui n’a ni odeur ni couleur lorfqu’il
èft feul & pur, forme, avec le phlogiflique, un
compofé pourvu dé l’ühe & de l’autre de ces qualités,
lefquelles font même fufceptibles dfe devenir
encore infiniment plus fenfibles dans certaines
circonftances, comme, par exemple, dans la com-
binaifon du foie de foufre.
33 En fécond lieu, quoique nous ne puiffions .
fiivoir au j-ufte fi le foufre eft plus ou moins volatil
que l’acide vitriolique abfolument pur, parce que
nous ne pouvons jamais obtenir cét acide libre à
moins qu’il ne foit chargé en même tems de beaucoup
d'eau furabondante, même lorfqu'il eft en
forme concrète & glaciale , il y a tout lieu de
croire néanmoins que le foufre eft plus volatil que
l'acide vitriolique feul, & qu’ il ne doit cette plus
grande volatilité qu’au phlogiflique : c’eft au moins
ce qu’indique, d’une manière affez fenfible, la
volatilité de l’acide vitriolique fulfureux, laquelle
eft infiniment plus grande que celle de l’acide
vitriolique fimple.
33 En troifième lieu, quoique l’acide vitriolique
libre, furtout lorfqu’il eft bien concentré, & à plus
forte raifon quand il eft privé de toute eau furabondante,
foit extrêmement avide de l’humidité *
quoique la quantité de cet acide foit infiniment
fupérièure à celle du phlogiflique dans le foufre,
nous voyons néanmoins que le foufre ne fe lai fie
point difioudre par l’eau ; ce qu'on ne peut attribuer
qu’au phlogiflique. Cette difficulté-de fe joindre
à l’eau fe rencontre d’ailleurs dans toutes les
autres eombinaifons dans lefquelles le principe
inflammable eft intimement & abondamment uni >
c’eft peur cette raifon que l’acide vitriolique ne
peut former de vrai foufre avec le phlogiflique, à
moins qu’ij ne foit dépouillé de toute eau furabondante.
Ce cara&ère de ficcité 5c d’éloignement
pour s’unir à l’eau que conferve Je principe du
feu dans toutes fes eombinaifons, eft ce qui a
déterminé Beccher à le regarder comme un principe
fec, de nature terreufe, 8c à le nommer terre
inflammable, en oppofant en quelque forte fes propriétés
à celles de l’eau. Il feroit queftion de favoir
fi l'eau, n’étant fluide 51 humide que par la chaleur,
5c paroiffant, Wfqu'eile eft abfolument privée
de toute chaleur, auffi fèche & auffi folide
que les fubftances qu’on peut appeler terreufes ,
Beccher eft bien fondé à faire une diftinétion de
ce qu'il nomme qualité sèche & terreufe , d'avec cé,
qu’il regardé comme humide & aqueux. C’eft ce
que nous n’examinons point. Ce qu'il y a de certain
, c’elt que le feu & l’eau , quoique peut-être
efientiellement auffi fecs l’un que l’autre, font
néanmoins d’une nature très-différente, 5c ont furtout
infiniment peu de difpofition à s’unir & à fe
Combiner intimement enfemble.
»3 Lorfqu’on décompofe le foufre par la combuf-
tion, fon acide s’empare avidement de l’humidité
de l'air, & peut-être de l’air lui-même , à me fur e
qu’il devient libre > mais comme il arrive fouvent
que tout fon phlogiflique ne fe brûle point, furtout
lorfque la coinbuftion eft lente , il en refte encore
une petite portion unie à l’acide aqueux. Cette
petite quantité de phlogiflique ne tient que très-
foiblement alors à l’acide fulfureux | 8c s’en répare
facilement fans le fecours du feu , & par la
feule expofition à l'air. Mais , tant qu'elle eft
unie à l’acide, elle fuffitr pour lui donner des propriétés
bien différentes de celles qu’il a lorfqu’ il
eft pur 5 elle le rend infiniment plus volatil j elle
lui communique une odeur fi vive & fi pénétrante,
qu’on ne peut la fupporter un inftanc fans courir
le rifque d'être fuffoqué ; enfin elle rend c ét acide,
qu'on nomme alors acide fulfureux volatil, infiniment
plus foible, c’eft-à-dire, qu'elle diminue
confidérablement l'adhérence qu'il peut contracter
avec fes corps quelconques.
33 H eft à remarquer que, quoique l'acide vitriolique
ait toujours une très-grande affinité avec
le phlogiflique, la préfence de l'eau empêche toujours
ces deux fubftances de contraél-r enfemble
une union intime : de là vient que lorfque l’on
combine l’acide vitriolique avec des matières inflammables,
il ne fe forme point devrai fo-iifre,
mais feulement de l'acide fulfureux volatil, toutes
les fois que l’acide vitriolique ou le corps inflammable
fur lequel il agit, contient de l’ eau. Il
fe forme à la vérité quelquefois de vrai foufre ,
même dans les liqueurs & par la voie humide,,
mais il faut toujours qu’alors les chofes fe pàftent
de manière que l’acide vitriolique & le principe
inflammable fe féparent de toute eau furabondante
pour contraéler enfemble cette union intime
, d’où réfulte le foufre parfait. ( Fbyeç les
mots A c id e v i t r i o l i q u e , A c id e s u l f u r e u x
v o l a t i l , S o u f r e & F o i e d e s o u f r e . )■ ( i )
. ( i) A l’exception de l’idée principale , qui admet ici le feu
pur pour le phlogiflique, Macquer vient d’expofer ( depuis
ma note,précédente ) la do&rine de Beccher & de Stahl fur le
principe inflammable, la terre inflammable ou le phlogifli-
■ qüe, en appliquant, comme Stahl lui-même , tous les points
de cette do&rine au foufre & à l’acide vitriolique. Or, cet
exemple eft une pétition perpétuelle de principes, un rai-
fonneniéht partout faux, puifqu’il repofe fur une erreur de
fait bien reconnue d'après les nouvelles expériences qui ont
■ fondé la dô&rine pneumatique. En effet, le.foufre, en brûlant
Sc en devenant acide vitriolique ou fulfuriquc , ne perd
pas au principe ou le prétendu phlogiflique, puifqu’il augmente
de'poids en abforbant plus d’un tiers de fon poids
d’oxigène j & l’acide fulfurique, en devenant du foufre ,
n’abforbe pas le principe inflammable, puifqu’uue expérience
exajfte prouve qu’il, perd de Toxigène & qu’il diminue de
poids dans ce paffage. Ceci eft donc en oppofition complète
avec-une partie de là théorie du phlogiflique, dans laquelle
Macquer dit' pofîcivement que lé phlogiflique augmente le