
d'abord qu*on ne peut concevoir ce qui arrive
dans cette occafion, à moins qu'on ne fuppofe
que la force qui unie les parties de l’argent avec
celles de l’acide nitreux, devient nulle &c de nul
effet en comparaison de celle qui tend à unir, (k
qui unit en effet ces mêmes parties de i acide
nitreux avec celles de cuivre. En fécond lieu, en
partant toujours de la fuppoficion que toutes les
combinaifons & décompofitions chimiques ne font
que l’effet d’une gravitation mutuelle & particulière
des parties intégrantes & conftituantes des
corps les uns vers les autres, laquelle eft en raifon
de la denfité & du contaCt de ces mêmes parties,
je dis que fi , dans l’ôccafion préfenre, les parties
de l’acide nitreux quittent l’argent pour s’unir au
cuivre, il faut néceffairement que les parties intégrantes
de ce métal aient infiniment plus de denfité
( i ) , ou puifient avoir un contact infiniment
flus étendu ou plus'intime avec les parties de
acide nitreux, que celles de l’argent : d’oü il
arrive que Faction des parties de Facidé nitreux,
qui n’eil que très-imparfaitement fatisfaite par
leur union avec les parties de l'argent, s’éptiife
en que loué forte par la nouvelle union avec les
parties du cuivre , de manière qu'il ne leur relie
plus qu'une force infiniment petite pour adhérer
aux parties de l’argent , & alors on conçoit aifé-
ment que la tendance qu’ ont les parties de l'argent
les unes vers les autres , peut être plus que
fuffifante pour furmonter cette légère adhérence ;
qu’en conféquence les parties de l'argent doivent
réellement fe réparer dé l’acide nitreux , & former
des maffes qui deviennent fenfibles & capables
d’obéir à hpefanteur vers le centre dé la Terre.
Il fuit auffi de là que fi , en même tems que les
parties de l’acide nitreux font déterminées par la
préfence & le contaCl des parties du cuivre à fe
féparer de celles de l’argent, ces dernières trouvent
à leur portée quelqu autre fubftance avec les
.( i) ( Note de Jdacquer.) Nous, ignorons abfolumenc quelle
eft la'd enfité ’des parties .intégrante? des. corps j nous« ne
pouvons en jngèr par" la denfité'«tes a1 grèges formés de leur
u nion, tels qu’ils tombent fous nos fensj'parce qu’il eft
très-poffible qu’ un corps dont les parties primitives, intégrantes
,n’ont que fort peu de denfité-j devienne par leur
union un agrégé' qui en ait beaucoup : ;il fuffit pour cela
que ces parties îoient de nature a avoir les. unes, avec les
àuîtès fiés ' contaèW três-incimes dans totir^s’leurs faces.
Par îa même- raifon, ùri agrégé peut n’âvoïr 'que fort peu
de denfité, quoique fc's parties intégrantes enraient beau-1-
coup : ilfu ffit pour c^la: que leur configuration:foie telle ,
qu’elles ne puifient avoir que peu de conra& Jés’ unes avec
les autres j en forte que , .lorfqu’elles font réunies dans
l ’agrégation, il y ait beaucoup de pores 8c d’efpaces vuides
éntr’elles.' A in f i, quoique le cuivré en hiaflés"fenfibles ait
moins de denfité que l’argént, il eiF très'-poffibJé que fes
parties primitives intégrantes en aient beaucoup davantage
que celles-de l’argém. A u refté', comme nous concevons
que les contads peuvent fuppléer à la denfité dans les affinités
, quand même les parties intégrantes, de cuivre ferpient
moins denfes que celles dé l’argent, le phénomène dont il
s'a git iciTexpkquçroit également bien.
| parties de laquelle elles aient encore plus de dit-
pofition à s’unir qu’elles n'en ont entr’elles, elles
s’y uniront en effet, & formeront un nouveau
compofé : circonlfance qui doit faciliter encore
I beaucoup la féparati.tfn de l’argent d’avec l’acide
nitreux, & même qui, lorfque l’argent (ou toute
autre fubftance qu’il repréfente ici ) a une affinité
j anez forte avec la matière qu’on lui préfente,
peut procurer la même décompofition quand même
le cuivre ou autre métal n’auroit point affez d’affinité
avec l’acide nitreux pour le féparer d'avec
l'argent, & c’eft ce qui paroït arriver en effet dans
le cas des deux décompofitions & des deux com-
binaifons nouvelles, qui ne fe peuvent faire qu’en
vertu des doubles affinités.
Tous les autres phénomènes qu'on voit arriver
dans les combinaisons & décompofitions chimiques
peuvent fe déduire très-facilement des fup-
pofitions qu’on vient de faire, ik n’en font que
des conféquences. ( f^oye^ les articles A f f in i t é s ,
A g r é g a t i o n , C a u s t i c i t é , C o m p o s i t i o n ,
C o m b i n a i s o n , D é c o m p o s i t i o n , D i s s o l u t
i o n , P r é c i p i t a t i o n . , S a t u r a t i o n . )
Je fehs au refie què cette matière , fi intéref-
fante d’ailleurs, eft épineufe, fujète à dé grandes
difficultés & objections; qu'elle n’eft ici qu’éfïh u-
rée & indiquée. Peut-être le tems, l’experience,
Faugmentarion des connoiffances chimiques,enfin
le zèle des fa vans fuffifamment éclairés-- dans les
mathématiques & dans la chimie, répandront-ils,
par la fuite, un bien plus grand jour fur ces objets,
que nous n’entrevoyons à préfent que d’uns manière
cônfufe ; mais je ne puism'empê hc r de les
regarder comme la .véritable clef des phénomènes
les plus occultes de la chimie, & par conféquenc
de toute la phyfique.
Quoique la pefanteur générale & particulière,
qui n’eft autre chofe que l’attraCiion , foit démontrée
par un nombre-infini de faits, elle eft
d’une fi grande importance pour la théorie de
toute la chimie , qu’on ne fauroit Fappüyier fiir
un trop grand nombre'ée preuves", &r je dois, par
cette raifon, faire mention ici d’une des plus
belles expériences de la phyfi'què' moderne, qui
me femble démontrer ce grand principe de la manière
la plus fenfible-: nous en fommes redevables
au zèle de M. de Morveau pour l’avancement des
fciences, 8e de la chimie en particulier.
Ce lavant a jugé'-avec- raifon : qtffï-’étolt eflen-
tiel de démontrer l’attraCtion particulièremême
aux perlbnries les moins initiées'dans la chimie,
par une expérience'faite fur des cérps d’uiie malle
affez grande pour la rendre infiniment plus frappante
& plus fenfible qu’elle ne l’eft dans les opérations
de chimie, où elle ne s’exerce qu’entre
des molécules infiniment petites, & abfolument
jnacceffibles à nos fens.
, Cet illuftre membre dé l’Académie de Dijon a
fait cette expérience capitale en préfence de cette
compagnie, au mois de février iÿ y f î il l’a pubüée
dans le tome P r. Au Journal de Phyfique dé
M- l’abbé Rozier, & il la rappelle dans le premier
volume de fes Elémens de Chimie, avec d’autant
plus de raifon , qu’elle n’eft fujète à aucune objection,
& que, quand elle feroit feule, elle fuf-
firoit pour uem ntrer l’attraClion chimique, ou
entre les petits corps dont M. de Morveau fait
la bafe de fa théorie. Voici cette expérience telle
qu’elle eft rapportée dans les Élémens de Chimie.
« Si 1 on met en équilibre une balance portant
a 1 un de fes bras un morceau de glace taillé en
rond , de deux pouces & demi de diamètre /Tuf-
pendu dans une pofition horizontale, par un crochet
maftiqué fur la furface fupérieure, 8e que
I on faffe eniuite defeenure cette glace fur la fur-
face du mercure placé au deffous, à très-peii de
ciiftance, il faudra ajouter dans le~baffin oppofé,
jjffqu a neuf gros dix-huit grains pour détacher Ja
glace du mercure, & vaiiitre l’adhéfion réfultante
du contact.
« Pour vérifier que le poids & la compreffion
de 1 atmofphère n’entrent pour rien dans ce phé-
nomene , il ri y a qu’à porter tout l’appareii ci-
denus fous le récipient de la machine pneumatique:
on y verra qu’après avoir fait le vuide au
point de ramener prefque jufqu'à fon niveau la
colonne du baromètre ou de la jauge qui le repréfente
t - la glace adhérera encore au mercure
avec une force égale ; que carte adhéfion foutien-
ûia encore de même les neuf gros dont on aura
précédemment chargé l’autre bras de la balance ;
| | ! - n y ayant plus de compreffion de l’atmof-
phère, cette puiffance ayant au moins diminué
dans une proportion très-confidérable, & l’effet
demeurant le même , il eft dû tout entier à une
autre caiife dont les circonftances n’ont point
enange j & c’eft l’atcra&ïon. » Il n’eft pas nécef-
laire d etrechimifte ni même grand phyficien pour
ientir Ja force d'une pareille preuve.
] -rette expérience devient encore
p usdecmve & plus chimique parla manière dont
M. de Morveau l'a variée j il en a fait beaucoup
o autres en fubftituant à la plaque de glace des
plaques de différens métaux & demi-métaux d’un
pouce de diamètre j & les matières métalliques
n ayant pas toutes le même degré d’affinité avec
mercure, il a du réfulter des différences dans le
egre d adhéfion de chaque métal avec ce liquide
métallique. Voici quels ont été les différens degrés
d adhérence. Il a fallu , pour féparer les médreXfuivantS*
* l expérience * des Poids dans | | | |
p ° u,: B .................................................44«
. f s ? » ' ................................. ....
S i .................................. 418
ie P'.pmb................................ 207
Je bifmuth............
le z in c ........................^ ^
le cu ivte ...................... . I4i
grains.
Je régule d’antimoine.. . . 4. 126 grains.
le fe r ........ ............................ 115
le cobalt ................. 8
Ce qu’ il y a de bien remarquable dans ces expériences
, dont je ne rapporte ici que les réful-
tats, & dont il faut lire les détails dans 1 ouvrage
même de M. de Morveau, c’eft que l'ordre d’ad-
héfion qu’ il a trouvé entre les différons métaux 6e
le mercure, eft préciférnent celui des affinités observées
entre ces matières dans les amalgames 5
précipitations & autres opérations chimiques;
c’eft la gradation de la plus ou'moins grande dif-
folubilité des métaux par le mercure, conftatée
par les obfervations connues. ( V^oye^ les Tabies
des affinités de Geoffroy, Gellen ik autres.)
uPerfonne, ajoute judicieufement M. de Morveau
, ne fera tenté fans doute de regarder comme
un effet du hafard une analogie auffi confiante,
une correfpondance auffi fuivie d'un auffi grand
nombre d’effets. Dès-lors il eft démontré que la
caufe de l’adhéfion eft la même que celle de U
diffolution ; que comme l’attraélion eft le principe
de la première, elle eft auffi celui de la fécondé. »
M. de Morveau va plus loin encore, & , non-
content d’avoir établi cette vérité en général par
les expériences qu’on vient de voir , il ofe efpé-
rer qu’on pourra feumettre les affinités chimiques
au calcul, & les eftimer avec une précifion mathématique.
«Voilà , dit-il, des affinités déterminées
par des rapports numériques. Nous pouvons
dire, par exemple, que l’affinité du mercure avec
l’or eft à l’affinité du mercure’ avec le zin c,
comme 446 eft à 204 , & l'on fint quelle exactitude
ces expreflians mathématiques pôrteroient
dans la chimie : bien plus, on eft endroit d’efpé-
rer présentement que, quand par des expériences
induftrieufes on aura récueilli un affez grand
nombre de ces termes , la géométrie j appuyant
fes calculs d abord fur de fauffes fuppofitions ,
redifiant enfuite fes réfultars par la comparaifon
des mêmes effets dans des circonftances différentes,
parviendra un jourà démontrer rigoureufe-
ment les figures que^ioivent avoir néceffairement
les élémens de tels ou tels corps, pour produire
avec tel autre telle fomme déterminée de points de
contaêl, pour offrir après leur réunion ces maffes
régulièrement affujetries à de certaines formes. »•
C ’eft là aflurément une des plus belles perfpec-
tives qu'on puiffe avoir en chimie, quoiqu'elle
ne paroiflè pas deftituée de fondement, c eft aux
géomètres feulé qu’il appartient de déterminer ce
qu’on peur regarder comme poffible en ce genre.
Macquer terminoit cet article par rapporter les
pefanteurs fpécifiques des métaux, déterminées par
Briffon, celui des phyficiens qui a fait les expériences
les plus exaCles & les plus nombreufes
depuis Mufchenbroëck. Je crois devoir repréfen-
rer ici un refultat plus complet des travaux de
Briffon, .