autres. C’eft une loi , non pas à la vérité univèr-
fellement, mais fréquemment oblervée , & très-
digne d’attention , que les acides font attirés , par
les oxides métalliques, dans un ordre très-différent
de celui avec lequel ils font difpofés à s’ unir aux
bafes alcalines & terreufes.
» L’acide nitrique qui tient une fi haute place
dans l’ordre des affinités pour'les alcalis, eft chaffé
des oxides métalliques par la plupart des acides.
Les acides phofphorique, fluorique, tous ceux des
végétaux, excepté deux ou trois, & tous les acides
des animaux, attirent plus fortement ces dernières
bafes. Que dis-je ? Après un examen attent
if, on trouve que les acides attirent communément
les oxides métalliques à raifon inverfe de
leur aCtion fur les autres métaux, ou , en d’autres
mots, à proportion de leur propre affinité de com-
pofition. Ainfi les acides phofphorique & fluorique
le placent quelquefois avant le fulfurique , & la
place de l’acide nitrique eft généralement très-
baffe, ainfi que je l’ai déjà obfervé. L’acide muriatique
hyperoxigéné femble fuivre la même règle,
& prend place, dans l’ordre des affinités pour les
Oxides métalliques, après plufieurs des acides qu’il
peut chaffer des terres & des alcalis.
» Je n’ai pas1 encore fuffifavnment examiné les
autres muriates hyperoxigénés. Je puis cependant
dire dès à préfent, que je me fuis affuré que les
Tels muriatiques, ci-devant connus fous les noms
étrangers de beurre des métaux, font des muriates ,
& non dés muriates hyperoxigénés, & que la proportion
extraordinaire d’oxigène y eft combinée,
non pas dans l’acide, mais dans l’oxide métallique.
» Durant le cours de diverfes expériences, j’ai
connu que l’acide muriatique hyperoxigéné s’étoit
formé dans deux cas où je ne m’y ferois guère
attendu.
» Dans l’analyfe de quelques mênacanites de Bo-
tany-Bay, que le préfident de la Société royale me
donna l’an pafle ( 1801 ) , j’obfervai que , tandis
que l’oxide de titanium étoit précipité de l’acide
muriatique dans lequel il étoit diffous ,'l’excès de
l’oxigène dans l’oxide paffa dans l’acide muriatique
& la potaffe déjà dans la liqueur, & qu’il s’étoit
formé du niuriate de potaffe hyperoxigéné. J’ai
effayé la même expérience avec i’oxide noir de
manganèfe, & n’ai pu réuffir.
‘ S 11 y a néanmoins une formation encore plus
extraordinaire de cet acide dans la diftiilation de
l’acide nitro-muriatique fur le platine. De l’oxigène
eft abforbé par le métal, & néanmoins il fe
forme non-feulement de l’acide muriatique oxigéné,
mais aufli dé l’acide muriatique hyperoxigéné.
J’ai répété l’expérience plufieurs fois, & je
fuis bien convaincu du fait, quelque contraire
qu’il puiffe paro&re à la théorie. J’ai effayé l’a&ion
de l’acide muriatique oxigéné fur l’acide nitrique,
dans l’éfpérance de former de l ’acide muriatique
hyperoxigéné, mais il n’y eut entre leurs élémens
aucune -aâion qui tendit à cette- formation.
» Le fait de la production d’un gaz particulier
par la diftiilation de l’acide nitro-muriatique fur le
platine a été obfervé par M. Davy dans fes Recherches
(i). Mais comme l’acide muriatique hyperoxigéné
n’étoit pas connu dans ce tems-là , il
ne pouvoit pas nous dire quelle étoit la véritable
nature de ce gaz.. Si M. Davy avoir pouffé fes
expériences ingénieufes un peu plus loin, nous
aurions connu beaucoup plus tôt le dernier degré
d’oxigénation de l’acide muriatique.
« M. Berthollet termine fon Mémoire fur le
muriate de potaffe hyperoxigéné , en difant qu’il
confidérera l’acide muriatique comme le radical,
l’acide muriatique oxigéné comme correfpondant
avec l’acide fulfurique & nitreux, & l’acide qu'il
conjeéturoit exifter dans ce fe l, comme correfpondant
avec l’acide fulfurique & nitrique. Je conclurai
par les argumens qui favorifent chaque dénomination,
& les analogies fur lefquelles elles
font fondées.
« L’acide muriatique eft pour nous un corps
fimple , mais il a des propriétés acides de la plus
forte efpètf* ; c’eft pourquoi nous fuppofons^par
analogie, qu’il contient de l’oxigène. Mais cette
conclufion n’eft-elle pas trop précipitée ? Ne doutons
nous pas beaucoup de l’exiftence de l’oxigène
dans l’acide pruifiqtie ? Ne fommes-nous pas au
contraire certains que l’hydrogène fulfuré qui pof-
fède plufieurs marques cara&ériftiques des acides,
n'en contient point? Nous n’avons pas de preuves
de l’oxigénation des acides fluorique & boracique,
& nous ne pouvons pas affirmer qu’aucun de ces
acides exifte dans trois états de combinai fon avec
l’oxigène : l’acide muriatique eft l’unique radical
où nous admettons ce fait. Nous ne devons pas
cependant prétendre limiter le nombre ou les degrés
de combinaifons entre les corps combuftibles
& l’oxigène, mais nous pouvons parler avec certitude
feulement des chofes qui font prouvées.
Outre fes propriétés acides, l’acide muriatique en
a d’autres communes avec les corps oxigénifables :
avec feize parties d’oxigène il forme un acide qui,
dans plufieurs de fes propriétés, eft à fon radical ce
que l’acide fulfureux eft au foufre. Comme l’acide
fulfureux, il eft volatil, a peu d’attraCtion pour les
bafes falifiables, détruit la couleur bleue des végétaux
, & eft capable de recevoir une plus grande
quantité d’oxigène. Avec foixante-cinq parties
d’oxigène il devient plus fixe, ainfi que l’acide
fulfurique ; il a une plus forte affinité pour les
bafes falifiables, & acquiert des propriétés plus
réellement acides. Sur ces confidérations je fou-
mets au jugement des chimiftes fi , dans l’ état
aCtuel de nos connoiffances, il n’eft pas plus phi-
lofophique de dire radical muriatique, ou quelque
autre mot feul de la même lignification, pour acide
(i) L e do&eur Prieftlcy fait auffi mention d’ un gaz particulier,
produit par la diftiilation d’une folution d'or dans
l'eau régale. -
muriatique ; acide muriateux , pour acide muriatique
oxigeney acide muriatique, pour acide muriatique hy- \
ptrçxigéné.
: O» Je fens bien qu’au premièr coup-d’oeil ces
nouvelles dénominations doivent paroître extraordinaires
, d'autant plus que nous n’avons point de
faits pofitifs qui prouvent que l'acide muriatique
foi.t un corps fimple. Tout ce que nous pouvons
donc faire judicieufement, c’eft de favoir en faveur
de laquelle de ces dénominations la fournie des
analogies femble prépondérer ; & pour juger fans
préjugé, nous devons commencer par confidérer
fi la préfence de l'oxigène dans tous les corps qui
ont des propriétés acides, a été rigoureufement
démontrée, & ne pas nous déterminer par cette
loi de la chimie françaife avant d’être convaincus
qu elle n’a pas été trop légèrement reçue.
« Si la nomenclature ne ferr pas l’art & ne fuir
pas fes progrès, les rapports entre les fubftances
& leurs noms feront bientôt fi vagues & fi relâches,
que la coiifufion fera introduite par les
moyens mêmes que nous prenons pour l’éviter; &
fi, tandis que nous continuons d'étendre la con-
noilîance des corps chimiques , la nomenclature
refte emprifonnée dans fes premières limites, les
liens qui unifient ces deux parties de la fcience
feront inévitablement rompus. « -
MUSC. Le mufe, fubftance afiez généralement
connue par fon odeur forte âc ion grand ufage
dans les parfums , eft une forte de réfine ou de
corps extraéto-réfineux, venant d’une efpèce de
mammifère ruminant, nommé par Linné mofehus
mofehiferus , & qu’on appelle chevrotin dans la
' nomenclature françaife d’Hiftoire naturelle. Cet
animal, de la forme du chevreuil, ayant de longues
dents canines forçant de la bouche à la mâchoire
fupérieure, ayant le pelage brun, taché de
-blanchâtre ou de fauve, porte une bourfe fitufe
vers leuombril, dans laquelle eft renfermé 1 e mufe.
Il habite le Thibet & la grande Tartarie : on le
-ch a fie pour en avoir le parfum, qu’on vend avec
,1apoche qui le contient. 11 eft afiez rare que cette
matière foit livrée pure, fans addition ou fans fo-
•phiftication dans le commerce. Comme Ion odeur
eft exceflivement forte , & qu’il fuffit qu’il refte
un peu de la matière du mufe pour qu’elle foit.
très-marquée , on y ajoute des réfines mêlées de
diverfes efpèces de fuît ; & c’eft pour cela qu’il eft-
très-difficile de connoïtre fes véritables cara&ères
ou propriétés chimiques.
Le mufe pur eft en grumeaux fecs, gras fous les
doigts, d’ une couleur brune, d’une faveur amère,
un peu âcre ; d'une odeur très-forte, afiez fem-
blable à des fragmens de fang coagulé tk defféché.
On préfère celui du Thibet à celui qu’on recueille
quelquefois en Rufiîe & en Sibérie.; il eft au fil
beaucoup plus cher. Cartheufer dit que ce corps
concret eft compole de particules déliées, très-
mobiles, hui lentes, volatiles & odorantes , attachées
en quelque forte à une fubftance fixe gommo*
réfineufe. On fait, par plufieurs expériences de
phyfique, quelle eft la fingulière fubtiüté de cette
matière odorante. Un feul demi-décigramme de
mufe répand une odeur forte & tenace, pendant
plufieurs années , dans un grand efpace , & peut
imprégner fortement cinq hectogrammes ou deux
mille fois fon poids d'une pouflîère inodore. L’eau
& l'alcool fe chargent également de ce corps odorant.
Quoique le mufe entier foit inflammable, &
femble; être de nature réfineufe , il paroît que la
matière gommeufe ou extra Clive y furabonde,
puiique Neuman en a retiré près d’ un tiers par
l’eau, & un foixantième feulement par l’alcool :
il paroît encore que le mufe contient de l'ammoniaque,
ou eft très-difpofé à en fournir, puifqu’en
le traitant avec de la potaffe, il s’en exhale une
vapeur très-fenfible.
Quoique l’analyfe du mufe ne foit rien moins
qu’exaCle , on voit, d’après le peu de faits qu’on
a recueillis jufqu’ic i , que cette matière eft un
corps réfineux contenant une huile, très-volatile
& très-odorante, & combiné avec une fubftance
extraCtive, plus une certaine quantité de matière
faline. Cette notion fuffit pour faire concevoir fes
propriétés médicinales, fa qualité exaltée, fa forte
&■ tenace odoration. On le range parmi les médi-
camens toniques , anti-fpafmodiques , cordiaux,
éehauffans , &c. On le donne fréquemment, foit
pur, foit mêlé à diverfes fubftances qui jouiffent
de la.même propriété. On l’adminiftre quelquefois
diffous dans l’alcooJ.
Son grand ufage a lieu dans la préparation des-
parfums : on Je mêle avec l’ambre gris, la civette
&' beaucoup d’autres matières odorantes : on le
fait entrer dans des compcfitions balfamiques ,
ongnentacées, liquides, folides, pulvérulentes,
& fous des formes prodigieufement variées. C ’eft
un des ingrédiens les plus utiles dans l’art du par*
fumeur.
MJJSCLES. Les mufcles, qui, dans leur enfem-
ble & dans leur généralité, comprennent le tifiù
charnu ou mufculaire , font une des cia fie s d’organes
les plus imporfans & les plus utiles de la
machine animée ; c’eft en eux & par eux que la
puifiancé de la vie exécute les divers mouvemens
qui l’entretiennent, ou qui en fatisfont fans ceffe
les befoins ; c’eft à l’aide de leur contraCHon , de
l'irritabilité ou de la force qui produit cette contraction,
ce raccourcilfement des fibres qui rapproche
les unes des autres les parties auxquelles ils
s’attachent, que l’animal fe meut, fe tranfporte
dans l ’ efpace, parcourt lentement la furfice de la
terre, s’élance à quelque di fi an ce de cette fur-
face, s’élève & fe foutient dans Tatmofphère ,
s’avance, s’abaiffe, fe fufpend ou recule dans les
eaux ; c’eft par eux que s’exécutent les mouve-
mens intermittens & cachés qui conftituent la vie,
ainfi que la ftation 3 le marcher, le faut, le voU
Bb i