
l’avoir ni gazeux ni folide. Il a une faveur piquante,
aigre & empyreumatique; il a une odeur
analogue à celle des raves, du raifort ou des
amandes amères grillées ; il fe rapproche un peu
par-là de l'acide pruflique. A une haute température
, il fe décompofe en acide carbonique & en
eau ; il laiffe toujours une tache charboneufe quand
on le diftille dans une cornue. En l’expôfant à la
gelée il fe concentre par la portion d’eau qui s’en
fépare. 11 tache la peau en jaune-orangé ou en
rougeâtre , & cette tache ne difparoît qu’avec
l ’épiderme. Il forme avec la chaux un pyromucite
calcaire bien diffoluble. On ne connoît pas Tes
combinaifons falines j on fait feulement qu’elles
font différentes de toutes lès autres. Il dégage
l'acide carbonique de toutes Tes bafes, & fait une
vive effervescence avec tous les carbonates. Il
«’attaque ni le platine, ni l’o r , ni l’argent, ni le
mercure ; il corrode & -oxide le cuivre, le fer, le
plomb & j’étain ; il criftallife avec l’oxide de plomb
& l’oxide de fer. L’ordre de fes attractions électives,
fuivantM.Guyton,eft lapotaffe, la foude,
la baryte , la chaux , la magnéfie, l’ammoniaque,
l'alumine, les oxides métalliques, l’eau & l’alcool.
On v o it, d’après ce court expofé, qu’à peine
connoît-on encore les propriétés de cet acide pyromuqueux,
& que ce qu’on en a déterminé fufKt
feulement pour favoir qu’il diffère de tous ceux
qu’on a découverte jufqu’ici ; il n’eft d’aucun
ufage.
i f. Les gommes font absolument inaltérables à
l’air 5 lé mucilage s’y épaiflit & y devient gommeux.
L’eau dilfout facilement le muqueux , qui
lüi donne beaucoup de vifcofité, comme tout le
monde le fait. La chaleur aide beaucoup l'adion
de l’eau, & lui fait diffoudre plus vice une plus
grande quantité de gomme : trop forte ou long-
tems continuée , elle l’ évapore, & finit par ramener
le mucilage à l’état fec & gommeux. Le muqueux
, diffous dans l’eau, ne s’altère point 5 c’eft
de tous les matériaux immédiats celui qui refifte le
plus à fon changement fpontané.
Telles étoient les idées que l’on s’étoit formées
fur l’acide obtenu par la diftillation de la gomme.
Aujourd’hui, d’après des expériences beaucoup
plus exactes faites par MM. Fourcroy & Vau-
quelin , on eft fondé à croire que ce prétendu
acide pyromuqueux n’eft autre chofe que de l’acide
acéteux formé pendant l’opération, & altéré
pat* une petite portion d'huile empyreumatique
qu’il entraîne avec lui.
Nous allons inférer de fuite le Mémoire où font
décrites tes expériences d’après lefquelles les chi-
miftes peuvent affeoir leur opinion, tant fur ce
prétendu acide pyromuqueux, que fur les acides
pyrotartareux & pyroligneux, qui, comme lui,
font de véritables acides acéteux formés par le
feu & altérés par une huile particulière à chacun
des produits.
Observations fur l'identité des acides pyromuqueux,
pyrotartareux & pyroligneux, & fur la nécejjtté de
ne plus les regarder comme des acides particuliers y
par MM. Fourcroy & Vauquelin , lues a la clajfe
des fciences pkyfiques & mathématiques de Tlnf-
tituc, le 6 thermidor an 8.
§. I. De la multiplicité des acides végétaux.
Lorfque Bergman & Schéèîe eurent découvert
plufieurs acides végétaux & animaux qu’on avoit
méconnus jufqu’à eux ; lorfqu’ils eurent détruit
la prétendue identité qu’on admettoit entre ces
corps, tous les chimiftes s’emprelièrent de fou-
mettre les diverfes fubftances acides végétales à
un nouvel examen. Bientôt le nombre de ces com-
, pofes, qu’on avoit réduits jufque-là à deux elpè-
ces, s’accrut au point qu’on fut perfuadé qu’il
devoit excéder de beaucoup celui des acides qu’on
avoit reconnus parmi les fofliles', & qu’il n’étoit
plus permis de fixer des limites à la multiplicité de
ces productions naturelles des corps organifés.,
Les liqueurs aigres qu’on extrait, par la diftillation
, des corps muqueuxdes bois & du tartre ,
quoique dues à une décompofition artificielle, ont
été comprifes dans la claffe des acides végétaux
bien caradtérifés, comme jouiffant d’une nature
particulière. Quelques analogies, fondées fur leur
origine, fur leur couleur brune, fur leur odeur
de brûlé , les ont fait rapporter à un genre fpécial
fous le nom à3acides empyreumatiques. Raffemblons
d’abord les faits qui fembloient prouver leur nature
differente, non-feulement de celles des autres
acides, mais encore entr’eux ; ils prouveront facilement
que ces acides n’étoient pas affez exactement
examinés pour être bien connus; qu’on
n’avoit quê des notions très-imparfaites fur leur
nature, & que c’étoit faute d’une anaiylè rigou-
reufe qu’on les avoit crus, & différens entr’eux ,
& différens, dans leur enfemble, d’un autre acide
végétal.
§. II. Caractères donnés a Vacide pyromuqueux.
Lérnery, Boerhaave, Neumann, Cartheufer,
Macquer & Bucquét avaient infifté les premiers
fur les caractères fpécifiques de l’acide qui a été
nommé pyromuqueux dans le fyftème de nomenclature
méthodique , & qu’on avoit long-tems dé-'
figné par le nom d’efprit de miel, de fucre, de manne,
de gomme, &c. M. Schrickeï, en donnant une hif-
toire détaillée de l’analyfe du fucre & de cet
acide, en 1776, étendit beaucoup, & confirma
les idées qu’on avoit déjà, conçues fur la nature
particulière de l’acide pyromuqueux , & tous les
chimiftes ont depuis adopté cette opinion. On le
caraCterifoit par fa couleur rouge-foncée quand il
étoit impur, & jaune-dorée après fa rectification,
par fon odeur de caramel, par fa faveur très-
piquante, par fa volatilité affez femblable à celle
de
de l’eau, par fon aCtion fur la peau qu’il rougit,
& fur les verres des cornues qu'il femble attaquer.
On l’avoit cru tout contenu dans les matières
muqueufes, & feulement développé par le feu > on
le difoit fufceptible de fe décomposer par le feu,
& de fe convertir en corps gazeux. Mais, outre
que fon aCtion prétendue fur le verre ne dépendoit
que de l’adhérence & de la pénétration du charbon
du fucre ; outre la preuve , aujourd’hui bien ac-
quife, de fa non-exiftence dans les matières fu-
crées & gommeufes, & de fa production entière
par le feu, il faut convenir qu’en examinant ce
qu’on avoit fait fur les compofés falins & fur les
attractions de l’acide pyromuqueux, on ne trou-
voit pour réfultat que des notions vagues & indéterminées
, qui fembloient appeler le doute &
l’incertitude fur la nature particulière de cet acide.
On en jugera furtout en méditant les détails con-
fignés dans l’article A cide sirupeux, où notre
favant collègue Guyton a réuni tout ce qu’on fa-
voit alors fur cet acide empyreumatique ; aufiî,
lors de la rédaction de l’ article- de mon Syfieme
des connoiffances chimiques} écrit & imprimé plufieurs
mois avant la découverte que nous expofons
aujourd’hui, n’ai-je pas recueilli de caractères véritablement
diltinCtifs de l’acide pyromuqueux.
§. III. Caractères attribués a Vacide pyrotartareux.
C ’eft à Lémery & à Neumann qu’on doit la
première connoiffance de cet acide fourni par le
tartre diftillé, & différent de l’acide tartareux. Ils
ont vu que le tartre donnoit le quart de fon poids
de phlegme acide par la diftillation. Neumann pref-
crivoic de le rectifier par un feu très-doux ; mais
M. Guyton n’a pas pu parvenir à faire cette opération
avec fuccès, & la cornue s’eft toujours
brifée par l’expîofion qui a eu lieu. La faveur &
l’odeur empyreumatique de cet acide font les deux
caractères les plus prononcés qui l’ont fait admettre
comme un acide particulier par les chimiftes.
11 eft difficile de concevoir comment Venel
avoit pris ce produit acide du tartre diftillé pour
de l’acide nitrique, qu’il croyoit poflible d’extraire
feul & bien pur. Il ne l’eft pas moins d’entendre
M. Monnet foutenir, d’après des expériences
même affez détaillées, que l’acide du tartre
diftillé eft de l’ acide muriatique, dont il ne lui a
trouvé réellement, & par fon propre aveu, que
des caractères approximatifs. Les académiciens de
Dijon & M. Berthollet, après avoir répété toutes
lès expériences de M. Monnet, fe font convaincus
qu’il n’ y a aucune analogie réelle entre le produit
acide du tartre diftillé & de l’acide muriatique.
Schéèle , tout en prouvant qu’il y avoit toujours
un peu de véritable acide muriatique dans l’alcali
du tartre | infifta fur les différences de cet acide
avec celui du tartre. M. Fontana prouva que l’acide
diftillé du tartre pouvoit fe réfoudre entière- j
ment en gaz acide carbonique & hydrogène carboné
> de forte qu’en le rapprochant ainli de tous
Chimie. Tome V*
les autres acides végétaux, il éloigna de plus en
plus l’idée de le confondre avec des acides miné-
: raux. Enfin M. Guyton, dans la première partie
de ce Dictionnaire, publiée en 1786, après avoir
expofé les diverfes opinions, ainfi que les principaux
faits connus fur cet acide, en conclut qu il
falloit le regarder comme un acide particulier,
produit de l’altération du tartre par le feu, dif-
tingué même de ce dernier par fa non-criftallifa-
bilité, par le fel foluble qu’il forme avec la chaux,
& il le nomma acide tartareux empyreumatique. Ces
notions, adoptées en 1787 par les auteurs de la
nomenclature méthodique , les engagèrent à dif-
tinguer cet acide pzr le nom d3acide pyrotartareux.
Depuis cette époqué on a continué à regarder cet
acide comme une efpèce diftinCte, & aucun chi-
mifte n’en a fait un examen nouveau.
§. IV. Caractères donnés a Vacidepyroligneux.
Boerhaave a le premier fait cortnoître, fous le
nom d3efprit acide du bois, le produit diftille du
corps ligneux , & ilTavoic même déjà comparé à
une efpèce de vinaigre. M. Goetling en a donné
une hiftoire particulière dans le Journal allemand
de M. Crell en 1779* M* Guyton l’a fait connoitre
depuis , fous le nom d3acide ligneux, dans la première
partie de ce Dictionnaire déjà cité. Il a
réuni toutes les connoiffances acquifes alors fur
cet acide, d’après les expériences faites dans les
cours de l’Académie de Dijon. Tous les bois examinés
ont fourni jufqu’ici le même acide par la
diftillation : la différence de couleur, de faveur,
d’odeur âcre, & furtout celle des compofés falins
formés par le liquide diftillé des bois, l'ont fait
diftinguer de tout autre acide: on ia nommé, dans
la nomenclature méthodique , acide pyroligneux,
& je l’avois claffé, dans mon Syfieme chimique, à
côté des acides pyromuqueux & pyrotartareux,
comme formant avec eux un genre d’ acides, com-
pofé d’efpèces analogues les unes aux autres, en
raifon, & de leur origine identique, & de quelques
propriétés comparées, dépendantes manifestement
de leur état empyreumatique. Les car adhères
adoptés pour diftinguer l’acide pyroligneux
éroient fon odeur de fumée, la couleur rougeâtre,
fa propriété de teindre folidement les bois,
les fels qu’il formoit avec les bafes alcalines, air.fi
que les attractions eleCtives auxquelles il obeiffoit.
Néanmoins, dans l’expofé fyftématique des propriétés
de cet acide, comme pour celles des acides
pyromuqueux & pyrotartareux, le défaut de
connoiffances exadtes fe faifoit toujours fentir : .on
netrouvoit pas de caractères bien tranchés & bien
faillans, propres à diftinguer ces trois acides entre
eux ; & lorfqu’ après les avoir rapprochés les uns
des autres en un genre diltindt-, en raifon de leur
nature empyreumatique.qui leur aflîgnoit une ref-
femblance Frappante , on vouloir expofer ce qui
pouvoit être propre à chacune des èfpèces, on
étoit obligé de convenir que l’examen de css pro