
cette rcmte'nottvelle, ce qu'on peut efpérer d'y
trouver encore.
11 n’eft donc plus permis au médecin de demeurer
fpeélateur muet & infenfible <$e ce mouvement
communiqué à la fcience de l’économie animale.
Aucun hommé de l'art ne peut plus négliger de
■ S’infiriiire des réfultats nouvellement découverts,
S’il s’intéreffe aux progrès de Ton étude , s’il eft
animé du zèle qu il doit porter à l’avancement de
la medecine. La froide immobilité de quelques-
uns, 1 indifférence affrétée de quelques autres, le
fnépris prononcé de celui-ci, l'amour-propre ir-
n té , le langoureux attachement dé cet autre pour
|a doctrine de les pètes, la haine des nouveautés,
les préjugés de tous genres, toutes les petites parlions
cmi féglilfent dans Us fociétés ,qui, en jouant
leurrore dans les ficenesde la vie civile, fe retrou-
Vent aufli dans la carrière' des fciences ; les excès
même auxquels elles conduifent, les plaifanteries
qu elles font naître, le farcalme ou l’épi gramme
elles arment le difcours, le ridicule dont elles
eflaiént de couvrir les inventeurs, lés épithètes
de novateurs qu’on lefir pro&îguë, tout ctla petit
©•len retarder pendant quelques jours, quelques
sniîées même, la marche dps idées nouvelles ;
noesla vérité renverfe tous les obftacles; elle n'tft
effrayee, ni des clameuis de l'envie, ni de la ré-
nftance des préjugés, ni des oppolitions de l'ignorance.
C eft le roc contre lequel fe brife le flot
Îjnpuiflant des paflionshumaines. Quand elle frappe
de fi vive lumière les efprits afft* élevés pouf en
foutenir 1 éclat, elle leur donne bientôt la forcé
nécefiaire pour la proclamer avec afîurance, &
pour en établir folidement les droits en vain me-'
connus. Les cris encore reténtiflans à nos oreilles
contre la circulation du fang, l'ufage de l'antimoine
& 1 emploi de la faignée, n'ont pas empêché la
découverte de Hervey de prendre fon rang parmi
les vérités démontrées, l'antimoine d’être compte *
parmi les midicamens héroïques les plus pre-
cibiijt, & la fatgnée, de fourniri ceux qui la p'ref-
«nvent habilement, Une des armés les plus pifif.
larttes de l'art de guérir.
lien fera de même des découvertes chimiques
nouvelles, applicables à la phyfique animale. La
Cartière, fi glotieufeinent tut verre, ne fe fermera
p lu s to u t annonce pne améh‘ofatîôn remarquable
dansles ptogtès tamméntés fou:s nds yeux & par
nos prbptc'Séffortp. Si la fté’rilemédiofri t£ la létW-
giq’ué apathie & 1 irritable amotir-ptoprê e/Taiéfn
ebcbredeles retarder, leur oppofition s'évanouira
filbtoat auprès dé tçrte faboriéulè jeunelfe qu'i
Wquertte en ce moment les écoles régénérées.
Etrangère ;à ces mouVemens tumultueux de l'en-
vis cette généra tioh nouvelle, qui cherche avec
^dfté.l'mftttâion & le (avoir, fera témoin 8r ;
a&rtir -de là grande lévoîiitioft ïrrédicàiè rioiit'
irous ne faifem encore que prévoir la nécefliré
jütfr lès premiers fôîidemens. Semblable à ces'
^àinis 4cbip$"àoùji la maffe & la'viteffe entraîner!t
dans la fphère de leur activité tous ceux qui en
remplirent l’ efpace, & les forcent d’obéir à leur
mouvement, la révolution de la chimie, après
avoir ébranlé Jes anciennesbafes des théories phy-
lïqués, doit atteindre toutes Iss pâmes de la
ïtiencè de la nature, & aucune n’én recevra on
plus grand & un plus prompt changement que l’art
de guérir, qui fait une partie fî effemielle de l ’hifr
toire naturelle. fjj
J’en ai dit fans doute affez pour réchauffer.les
indifférens dans notre arc , encourager les foibies
& l.s timides , averrir la médiocrité de l'impuif-
fance de fes efforts, livrer les préjugés'au mépris
qu’ils méritent, & l'amour- propre aux vains tuur-
mens qui l ’agitènt. Mais fi j’annonce avéc fecuritè
l’qfpoir d’une heureufe & prochaine révolution
dans l’art de guérir, je dois, eh meme tems que
je femble la provoquer, combattre les dangereufrs
conféquences de cette pétulante activité qui brûle
les cerveaux au lieu de les échauffer, de ce précoce
amour des innovations / qui ne veut qué détruire
fan‘s avoir rien à remettre à la place des ruinés
dont iis’entoüre; je1 Crains autant, je l’avons
les itiiprudens novateurs , que lés fatiguais louangeurs
des chofes ufée's par lé t ms : fi ceux-ci ra-
lennffênt le mouvement de larâifon, ceux-là peuvent
la précipiter dans des exagérations non moins
dangereufes. Je m’oppofe avec la même force à
la folie novatrice des uns & a l’immobile lenteur
des autres. Je repoufie également, & la
prétendue füffifance de la ddétrine brownièné
pour toute théorie de l’art de guérir, & l ’indif-
i crête explication du mécariiftne entier de la vié
animale par unepuiffance chimique. En un mot,
je defire une révolution fans doute dans la thëo--
rie de h médecine; je rappelle par mes voeux;
je l’annonce depuis vingt ans dans mes leçons; je
la proclame en quelque' forte dans tous mes ouvrages}
j'en aiderai de tous mes pouvoirs , de
toutes mes facultés, la nàiffance; mais fe veux
une révolution fage, lente, réfléchie} je ne brûlé
point lès livres anciens avec Paracelfe ; je ne brife'
point les vâfés pharmaceutiques I je ne proferis
point d’un fêüi mot toute la matière médicale 5 jë
conferve tout cè qüiexifte; je ne facrifie point
toutes les.conn’oi'ffançes acquifé's à un vain appareil
de qu/iques applications nouvelles, à une
doêtriné bâtie èncotê fur le fable. IV fer oh fou de
rejeter ce qü’ôh pofiède , d’ét'èindré tout â coüp
iè flambeau d’ u'ne longue expérience ', de renbn-
cer à f’empirifme raifonné qui dirige la pratiqué
de la médecine, polir énibrafier un fantôme.
On m’a déjà 1 ant prêté d’opinions hafardees ,
tant fait dire de chofes que je n ai point dites, que
j“a! cru nëcêïTaire d’établir exadement ma profef-
fiun deirn , de Tnepronrmeerira fein demies con-
frères-, &rde leùv expo fer avec précifiow ce que
je penfe fur les nouvelles idées qui, pour m’érre
attribuées originairement, & quoique j’ en aie véritablement
reconnu la tiaiffàiice pour m’apparteo
x 1
nir, Vont pas biffé cependant que d'éprouver
quelques altérations dans l’ efpace qu’elles ont ;
parcouru depuis leur première origine. Ce font, !
je ne le renie point, quelques-uns demes enfans >
mais adoptés avec trop de chaleur par quelques
phyficiens qui ont bien voulu fe charger de les
élever & de les produire trop promptement dans
le monde ,. il n’tft pas impoffeble que, déformés
par quelques-uns de ces complaifans inftituteurs,
ils aient perdu plufieurs de leurs traits primitifs.
Il eft tems que, les rappelant au giron paternel,
j’examine ce qu’ils ont acquis ou ce qu’ils, ont :
perdu, & que je foi gne encore leur éducation fi
je ne veux pas m'expofer par la fuite à regretter
de leur avoir donné le jour.
- Je commencerai par annoncer que je n’ai point
eu le projet de donner, ni une théorie entière de
J.i phyfique animale, fondée fur les connoiffances
chimiques modernes, ni, à plus forte raifen, d'établir
fur les mêmes bafes une doctrine pathologique.
J’ai bien fenti, j’ai bien annoncé que, déformais
on ne pouvoir plus rien faire dans l’une &
l'autre de ces premières parties de l'art de guérir,
lans fe ferijir des expériences, de la chimie moderne;
qu’elles feules pouvoient faire ce que l’anatomie
la plus exaéte, l’obfervation la plusJon-
gue & la plus attentive ne promettoient.jamais
d'atteindre-; que ces connoiffances changeroient
néeeffairemenc les fondemens de la médecine ; que
lorfqu’on connoïtroit mieux les fondions anima-r.
les, on fer oit bien près de connoître les caufes
& les effets de leurs dérangemens ; qu’un grand
nombre de maladies avoient pour caufes des
changemens chimiques ; qu’il ne s'agiffoit que de
les déterminer avec foin pour faifir la nature des
maladies dont on n'a encore apprécié que les
fymptômes , trouvé que les caradères , annoncé
que les phales & les terminaifons naturelles; qu’à
ce dernier égard, la médecine- étoit encore une
fcience neuve à reprendre ab ovo, ou plutôt à
créer toute entière ; que pour cela l’on n'avoit de
r.eflburces que les examens chimiques des matières
animales altérées par les maladies. J’ai fait
voir, par les premiers exemples des affedions bi-
lieufes, des calculs biliaires & urinaires, des concrétions
goutteufes, toutes maladies, fur lefquelles
les connoiffances chimiques ont commencé à fou-
lever le voile qui en a caché jufqu’ ici la véritable
nature aux yeux du médecin; j’ai fait voir, dis-je,
combien on pouvoit concevoir d’efpérances d’après
l’état aduel de nos découvertes & de nos
mflrumens chimiques; mais j'ai toujours eu foin
d annoncer en même tems combien ces idées
étoient encore éloignées de la certitude qu’elles
doivent acquérir quelque jour pour conftituer une
tneorie pofitjve, capable de enanger la conduite
du praticien; j’ai toujours infifté fur h grande dif-
tance qui fépare ces premières données, quelque
belles qu’elles foient, quelqu’efpoir qu’elles pro-
niettent de concevoir, & une dodrine médicale
O X î 5g i
•toute entière.- Leréfultat général que fai toujours
offert aux élèves, a été ce lui-xi ; on vient de trouver
dans la méthode nouvelle d’opérer & de rationner
des chimiftes, un infiniment bien précieux.
Cet infiniment > qu’on commence à employer aux
recherches de phyfique animale, a déjà fait découvrir
que le fang s’échauffe dans la refpiration,
qui] perd du carbone & de l’hydrogène, qu’il
abforbe d e l’oxigène, qu’il fe renouvelle ainfi &
prend la qualité ftimulante dont il a befoin pour
irriter le coeur, qu’il porte partout la chaleur &c
la^vie, qu’il change d,e nature par la circulation
même, &c. Il a piodu t beaucoup d’autres dé*-
couvertes encore fur la cranfpjration , fur la formation
de la bile, fur la nature des humeurs albu-
mineufe,. gélatineufe & hbrenfe. il promet de conduire
beaucoup plus a vant rie phyfiologifte dans
l’ét ude de la nature & des fondions des^animaux.
Mais il faut continuer avec ardeur les recherches ,
& ce .qu'on a découvert n’eft encore qu’une bien
foibie portion de ce qui relie à découvrir pour
conftru.ire une théorie générale de l’animalifation
& des phénomènes de la vie des animaux.
Cet infiniment pourra être de même appliqué
à la connoiffar.ee des maladies; mais on a bien
moins fait encore dans certe partie, que dans la
première, & l’on ne pourra penfer à former une
dodrine pathologique que lorfqu’on aura terminé
ou bien avancé un travail qu’on n’a point
encore entrepris, ou qui eft à peine commencé.
Un des objets de ces applications, qui paroîtêtre
le plus avancé, à la manière an moins dont il a
paffé parmi les hommes- de l’a r t, au bruit qu’il
commence à faire parmi eux; un de ceux dont il
m’a paru conféquemment le plus preffant d'entretenir
les médecins, parce que, très-agité en ce
moment dans les écoles & dans tous les éta-
bliffemens où l’on s’occupe de quelques parties
de la médecine, on eft bientôt menacé de voir les
idées les plus fauffes, les erreurs les plus grofliè-
res, les opinions les plus fingulières, s'élever tout
à coup , fe groffir, fe raffembler, oaen louanges
exagérées , ou en tempêtes beaucoup trop bruyantes
; c’eft celui qui eft relatif aux propriétés mé-
dicamenteufes de Yoxigene. A ce mot, je me figure
entouré de plufieurs groupes d’hommes animés
de penfées & de pallions diverfes. Les uns,
que le feul mot Üoxigene épouvante , parce qu’ils
ne l’ont jamais bien conçu, croient plus court &
plus facile d’en nier ‘i’exiftence ; les autres, effarouchés
par ce nom mal fonnant à leurs oreilles ,
fans en nier formellement i’exiftence , lui refufent
au moins toutes les propriétés ou tous les caractères
chimiques que Lavoifier & fes amis y ont
découverts. Un troifième cercle, plus agité que
les autres, murmure du rôle qu’on fait jouer à ce
nouveau principe, & femble oublier celui donc
ils avoient fi long- tems chargé le feu qu’ils avoient
fixé, par la feule imagination, dans toutes fortes
de compofés, fous le nom de phlogijiique. Suit un